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Bruxelles.CH LELONG, imprimeur-éditeur.

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LA QUESTION DES CIMETIÈRES.

La question des cimetières, entendue dans le sens que lui ont assigné les luttes politiques, est la question de savoir si les cimetières doivent être divisés par cultes, de telle façon qu'on y réserve en outre un compartiment pour ceux qui meurent en dehors de toute religion positive, ou s'il convient au contraire d'y enterrer, pêle mêle et sans distinction de croyances les personnes décédées. Mais, envisagée sous les divers aspects qu'elle est susceptible de revêtir en administration et en jurisprudence, cette question présente une portée beaucoup plus large, et elle embrasse un assez grand nombre de problèmes d'une importance à peu près équivalente.

C'est restreinte au premier de ces deux sens qu'elle a vivement préoccupé l'opinion publique dans ces dernières années, et qu'elle a suscité des controverses ardentes. Toutefois, les autres points de vue méritent à divers égards de fixer l'attention, et, s'ils n'ont pas provoqué de la part des catholiques des protestations retentissantes, ils n'en ont pas moins été l'occasion de violations de droits considérables.

En tant que se rapportant à la division des lieux de sépulture par cultes, la question a fait en 1855 son avénement dans le domaine parlementaire non pas qu'on eût jusque-là évité toute difficulté dans l'application des lois en vigueur; mais, ainsi que nous le verrons bientôt, les hommes les plus écoutés des deux partis avaient toujours paru d'accord pour admettre la solution réclamée par la liberté religieuse. C'est pour mieux fixer cette solution, et en même temps pour réviser toute la législation sur la matière, que MM. de Haussy et Rogier avaient institué en 1849, par arrêté royal du 1er mars, une commission chargée d'élaborer un travail d'ensemble (1), et celle-ci n'avait pas hésité à formuler

(1) Cette commission était composée de MM. Ch. de Brouckère, bourgmestre de Bruxelles, Tielemans, conseiller à la cour d'appel de Bruxelles, Paquet, conseiller à la cour de cassation, Dewandre, 1er avocat-général près la même cour, Orts fils, représentant, de Coninck, doyen de Bruxelles, Willaert, curé de N. D. de la Chapelle, Wyns de Raucour, sénateur, Vent, pasteur protestant, et Loeb, grand-rabbin. Les deux ecclésiastiques appelés dans la commission refusèrent d'y siéger : elle se constitua sans eux; M. Orts en fut le rapporteur.

des dispositions en conformité parfaite avec les justes exigences des consciences chrétiennes. En 1855, les choses commencèrent à prendre une physionomie différente. Dans la séance du 29 novembre de cette année, M. Verhaegen soutint pour la première fois à la tribune cette thèse, que les personnes baptisées dans la religion catholique, mais auxquelles l'Église refusait la sépulture ecclésiastique, avaient le droit d'être enterrées dans la partie bénite des cimetières. MM. Alph. Nothomb et Malou repoussèrent une telle prétention avec énergie: aucun député n'appuya M. Verhaegen; aucun ordre du jour ne fut proposé par la gauche. Il semblait que le sentiment de la Chambre était presque unanime, et qu'une entente analogue à celle de 1842 s'était tacitement produite. Malheureusement les funestes journées de 1857 ne tardèrent pas à éclater; elles ne furent pas seulement un grand échec pour la Constitution; elles transformèrent l'opinion libérale, en la poussant décidément dans les voies d'une hostilité religieuse bien marquée, et en lui imposant la défense des doctrines les plus extrêmes. La presse et les associations du parti vainqueur proclamèrent à l'envi la nécessité d'instituer la promiscuité dans les cimetières; beaucoup de membres de la gauche parmi les nouveaux venus et même parmi les silencieux de 1855, se rangèrent à ce système, et bientôt la fraction de la majorité parlementaire qui y était favorable augmenta à vue d'œil. Il ne s'agissait plus seulement de décider, comme le demandait M. Verhaegen quelques années auparavant, que les personnes nées dans la religion catholique, mais que l'Église privait de la sépulture chrétienne, devaient être inhumées dans le compartiment catholique; il s'agissait de dépouiller les cimetières de leur caractère religieux, et de décréter que les catholiques, les protestants, les juifs, les libres-penseurs, les suicidés seraient désormais enterrés à la suite les uns des autres et d'après l'ordre des décès.

Le débat se prolongea pendant cinq années au dehors de l'enceinte parlementaire, et, au mois de juillet 1862, M. Alph. Vandenpeereboom, ministre de l'intérieur, déclara à la Chambre qu'il considérait l'article 15 du décret de prairial an XII comme contraire à la Constitution: c'est l'article qui consacre la division par cultes des lieux de sépulture. Un peu plus tard, le 10 juin 1864, il ajouta que le gouvernement, tout en persistant dans sa manière de voir, n'avait l'intention ni de présenter une loi nouvelle, ni même d'interpréter le décret de l'an xi par voie de circulaire, mais qu'il laisserait aux administrations communales le soin de l'appliquer dans le sens qui leur serait conseillé par leur raison et leur conscience.

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