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d'y faire jeler trois mille hommes, d'armer les remparts et de désarmer la garde nationale.

Si cette opération réussit, il sera convenable de réu– nir le plus de forces possible sur Genève. Sa Majesté autorise Votre Excellence à en donner le commandement au général Marchand et à nommer le général Dessaix gouverneur de la place avec des pouvoirs extraordinaires.

Les préfets de l'Ain, du Léman et du Mont-Blanc auraient à prendre des mesures pour approvisionner promptement la ville. Aussitôt qu'on y serait entré, on ferait arrêter les signataires de la proclamation qui a rétabli la République de Genève. Leurs biens seraient séquestrés et leurs personnes seraient envoyées dans l'intérieur et traitées comme prisonniers d'État.

Sa Majesté ne doute pas que les huit cents Autrichiens qui sont dans la ville ne s'empressent de l'abandonner, lorsqu'ils se verront menacés d'être cernés, la population paraissant disposée à se soumettre.

Je vous prie, monsieur le maréchal, de donner sur~ le-champ tous les ordres nécessaires pour remplir à cet égard les intentions de l'Empereur et de m'informer de leur résultat.

Je prie en même temps Votre Excellence de communiquer cette dépêche à MM. les commissaires extraordinaires comtes de Chaptal et de Saint-Vallier, l'intention de Sa Majesté étant qu'ils en aient connaissance afin de seconder votre opération de toute l'influence que leur donne la mission qui leur est confiée.

N° 19

Lettre confidentielle du sénateur Chaptal, commissaire extraordinaire de la 19° division, au ministre de la guerre.

Lyon, le 30 janvier 1814, Dimanche.

Monsieur le duc,

Je vous dois la vérité sur les difficultés de tout genre qu'on éprouve dans cette division, pour former, équiper et nourrir l'armée qui s'organise à Lyon.

La levée des conscrits est très-difficile, pour les hommes qui ont plus de vingt ans ; elle s'opère très-imparfaitement dans les montagnes de l'Auvergne et du Velay. L'esprit public est mauvais dans ces départe

ments; les moyens d'échapper aux appels y sont d'autant plus faciles, qu'il n'y a plus de colonne mobile pour appuyer l'autorité; les maires craignent les vengeances, et secondent faiblement l'autorité supérieure. Il n'y a plus d'autre force que la persuasion, et cette force devient nulle contre la résistance ou la mauvaise volonté. Il y a eu des appels par désignation d'individus, sans qu'il se soit présenté un seul homme; il y a cu des départs de 100 hommes et de 200 conscrits, sans qu'un seul soit arrivé à sa première étape. La conscription a toujours été difficile dans ces montagnes; mais les circonstances du moment lui ont donné le vrai caractère de la résistance; et malheureusement on ne peut pas détacher encore 50 hommes de la force armée de Lyon, pour les diriger en colonne mobile, sans compromettre le sort de la ville.

Le décret du 6 janvier, concernant la levée d'un ou deux bataillons par département, voulait que les hommes fussent armés et habillés par les départements. L'impossibilité d'exécuter cette disposition dans le Cantal et la Haute-Loire, qui n'offrent aucune ressource, a été bientôt reconnue, et on s'est borné à exiger qu'on donnât à chaque homme des souliers et un chapeau, avant de les diriger sur Lyon, où l'on devait compléter l'habillement.

On devait espérer de trouver à Lyon de grandes facilités, soit dans le commerce, soit de la part des fournisseurs de l'armée. Mais ces derniers n'ont plus ni argent ni crédit, ni matière; leurs produits fabriqués sont saisis par leurs créanciers; j'ai été forcé d'écrire aux

tribunaux pour arrêter les poursuites dirigées contre eux, dégager les objets saisis et transporter l'hypothèdes créanciers sur les mandats à échéance délivrés par le Trésor.

que

Jusqu'ici les 5,000 hommes qui composent l'armée de Lyon vivent sur des réquisitions, qu'on exerce sur les magasins du commerce de Lyon, en blé, vin, eaude-vie, bois, fourrage, avoine, paille, etc.; mais ces ressources sont déjà épuisées ; et comme nous ne payons pas ce qu'on prend, il est à craindre que bientôt les arrivages pour Lyon ne cessent par la peur qu'on a des réquisitions. Cette crainte me paraît d'autant plus fondée, que les arrivages par eau sont à présent impossibles, et que les départements de l'Ain, de la Bourgogne et de la Franche-Comté, qui fournissent Lyon, sont occupés par l'ennemi.

Par ces moyens forcés, nous nous sommes procuré quelques milliers de capotes, de souliers, de schakos, et tout ce qui a été nécessaire jusqu'ici; mais on ne peut pas aller plus loin. Les particuliers dont nous avons pris les marchandises nous pressent pour le paiement, et les magasins sont épuisés. Les caisses publiques ne présentent aucune ressource, leurs recettes étant engagées pour le paiement des mandats du Trésor fournis pour services antérieurs.

Nous venons de frapper des contributions en nature et en argent sur les cinq départements de la division; nous établissons la nécessité de cette mesure sur l'urgence des besoins de l'armée destinée à les protéger; mais ces réquisitions sans paiement seront mal rem

plies et nos magasins de réserve seront d'un faible se

cours.

Nous manquons également de fusils pour armer nos soldats. Votre Excellence a donné des ordres pour faire diriger sur Paris toute la fabrication de Saint-Étienne. Il ne nous reste donc plus de ressource de ce côté-là. Les fusils de chasse, malgré les mesures les plus sévères, n'ont presque rien fourni; et on n'a pas plus de 6,000 fusils pour armer 25 à 30,000 hommes qui formeront l'armée de Lyon.

Dans cet état de dénûment, une réunion à Lyon de 30,000 hommes épuisera nos approvisionnements en tout genre sans pouvoir espérer en tirer le parti qu'on était en droit d'en attendre.

M. le maréchal envoie à Paris un de ses aides de camp pour demander des armes et de l'argent. Si nous obtenons ces deux objets, nous aurons promptement une armée, des vivres et des habits; sans cela, je crains beaucoup que le service ne soit compromis, et qu'il ne devienne impossible d'assurer la subsistance et l'équipement des soldats.

Je continuerai à faire tout ce qui dépendra de moi pour tirer de notre position tout le parti possible, car je suis loin de me décourager. Je sens même que Lyon n'est pas le seul point qui occupe le gouvernement; mais j'ai cru de mon devoir d'y appeler votre attention, parce que l'armée de Lyon est dans une position à rendre de grands services, si elle pouvait être promptement organisée, et qu'il me paraît qu'elle ne pourra l'être

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