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gieux et moraux les plus simples et les plus incontestables.

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Les législateurs ne peuvent faire de bonnes lois que dans la méditation et le silence; elles ne seront chéries qu'autant qu'ils donneront le spectacle de l'union, de la sagesse et des vertus publiques. Si les pensées des philosophes, si les recherches des savans exigent le recueillement de l'ame, et demandent toute l'attention dont l'homme est susceptible, que sera-ce de la formation de la loi, qui réunit les grandes combinaisons de l'esprit, l'observation exacte des faits les plus diffi ciles à analyser, et la solution des plus grands problêmes de l'intelligence humaine? Comment des législateurs rempliront-ils les devoirs qui leur sont imposés, si, en formant la loi, ils sont au milieu des passions sans que rien puisse arrêter ce torrent dévastateur, si l'agitation de leur ame s'accroît et se perpétue par tout ce qui fermente autour d'eux ? Les législateurs de l'antiquité fuyaient le tumulte des villes, et allaient dans la retraite méditer les lois qu'ils devaient donner aux peuples; ils rompaient les nœuds qui les liaient à la société, et n'avaient de commerce qu'avec les dieux. C'est ainsi qu'un vaisseau battu par la tempête se brise et s'ensevelit dans les flots; au milieu d'une mer paisible, il se promène majestueusement, et arrive au port.

Le premier magistrat d'une république, chargé de faire sanctionner la loi qu'il propose, est pénétré de l'étendue et de la sainteté de ses devoirs; soumis à cette opinion publique dont il craint le jugement, il n'est point dominé par ces passions sombres qui agitent une assemblée nombreuse, et dont les membres ont des moyens multipliés pour échapper à la censure publique. Il sait que c'est dans sa fidélité, dans sa justice, que le peuple trouvera son bonheur, que sa reconnaissance et son amour seront la récompense et le prix de ses travaux. Dans ses profondes méditations, et loin du tumulte et des passions, il ne proposera que des lois justes et utiles; il sera l'interprète du vœu national; il ne parlera qu'un langage fier, noble, majestueux; ses expressions seront grandes et sublimes; et, comme le prêtre de l'ancienne lõi, il portera sur sa poitrine l'emblême de la force et l'image de la vertu.

C'est dans la formation de la loi que le législateur a montré une grande sagesse. Des lois rédigées et proposées par le gouvernement, discutées par les tribuns, présentées par les orateurs du tribunat et du conseil d'état, admises ou rejetées par le corps législatif, voilà le chef-d'œuvre de notre constitution. Le gouvernement fixe la pensée et rédige la loi; le tribunat pèse, discute et examine; le corps législatif juge penser,

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discuter et juger, voilà les trois actes qui font la

loi; lumières et connaissances profondes de toutes les parties de l'administration pour le premier; conception facile, étendue, prompte, finesse exquise, éloquence forte, raisonnement solide pour le second; attention soutenue, réflexion sévère, méditation sérieuse, maturité, et sagesse d'esprit pour le troisième : ainsi, le législateur a réuni par le travail le plus grand par son influence sur le sort des hommes, le plus imposant par ses effets sur la société, tous les efforts de l'esprit humain, toutes les combinaisons du génie, des lumières, des talens, de la raison, tout ce qui peut en un mot consolider les divers élémens de la machine politique.

On doit ici admirer le génie du législateur qui, par une sage prévoyance a limité à des époques déterminées les séances du corps législatif. Une assemblée permanente est un foyer perpétuel de tumulte et de désordre: un corps sans cesse délibérant tend à l'usurpation ou à la perte de son pouvoir; les discussions dégénèrent en dissensions, et les débats en lutte scandaleuse; les motions se succèdent rapidement et sans ordre, et la loi est discutée sans examen et sans réflexion. La multiplicité des lois leur ôte ce caractère sacré et solennel qui tient à l'importance et à la sûreté de

leur promulgation. Les législateurs eux-mêmes, qui sont accoutumés à se voir, ne conservent point ces respects et ces égards que doit inspirer l'exercice d'une grande autorité. Le peuple, fatigué de voir ses législateurs occupés à des discussions longues et tumultueuses, perd toute confiance, toute vénération, et regarde les lois comme l'ouvrage des préjugés et des passions. Il y avait à Athènes quatre grandes assemblées par mois: on s'occupait des lois, de la religion, de la guerre et de la paix. Les Lacédémoniens se rendaient dans une assemblée générale pour statuer sur les grands objets de la législation. A Rome, les comices n'avaient lieu que pour des cas particuliers, tantôt par centuries, tantôt par curies, et plus rarement par tribus; le sénat ne s'assemblait pas tous les jours. Les Vénitiens ne convoquaient leur sénat que dans des cas urgens. En Pologne, les diètes ordinaires ne duraient que quinze jours, les diètes extraordinaires ne pouvaient durer plus de six semaines. Le parlement d'Angleterre et le congrès américain ont leurs sessions et leurs ajournemens.

Le gouvernement veut s'environner des lumières, et demander les conseils des hommes instruits dans la science de la politique et de la législation.

Il a créé un conseil d'état qui discute, examine les lois qu'il doit proposer au corps législatif. Les chefs des nations ont besoin d'un conseil qui soit le principe et le modérateur de leur action: tel est, dans le corps, cet esprit invisible qui pense, délibère, ordonne, et imprime un nouveau degré d'activité aux rouages de la machine politique. Il faut que ce conseil soit composé d'hommes sages, prudens, qui réunissent la moralité aux talens. C'est à la vigueur et à la sagesse de ce conseil que la prospérité de l'état est attachée; c'est lui qui formera une masse redoutable de toutes les forces séparées, qui déterminera le besoin, le moment, et le degré de l'impulsion, qui créera, pressera, ou ralentira tous les mouvemens ; c'est lui qui interrogera le passé, étudiera le présent, calculera l'avenir, ordonnera aux événemens de naître; il les suspendra, il les accélèrera; il associera à la conservation et à la grandeur de l'état tous les êtres qui l'environnent; il s'appliquera par des travaux constans à vivifier toutes les parties de l'administration; il éclairera le premier magistrat de la République, et ne lui proposera que des lois utiles, et des réglemens salutaires.

Notre constitution renferme les véritables principes qui doivent régir les sociétés politiques; la séparation des pouvoirs y est fixée d'une manière

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