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terre; les Arabes l'atteignirent et le massacrèrent. Aux coups de fusil, l'escorte força sa marche, arriva et repoussa les Arabes dans le village. Ils se jetèrent dans une espèce de château fort, s'y maintinrent le reste du jour malgré l'attaque des troupes, qui ne les en débusquèrent que dans la nuit. Menou eut un cheval tué sous lui, et rentra avec un certain nombre de blessés à Rosette.

Dans sa correspondance avec le général en chef, Menou insistait sur une extrême sévérité contre les voleurs, pour faire sentir au peuple la différence qui existait entre le gouvernement français et celui des beys. Toutes les observations qu'il avait faites, le portaient à croire que les véritables habitans du pays étaient, pour la majeure partie, honnêtes gens. C'était ce que Bonaparte, devinant les hommes, lui avait dit à Alexandrie dans ses instructions, en parlant de la seconde classe des habitans, composée de véritables Musulmans. Les intrigans, les malhonnêtes gens se trouvaient parmi les étrangers; c'étaient les Turcs de Constantinople et d'Asie, les Juifs, les Cophtes, qui, quoique indigènes, faisaient une classe à part, et ces ramas de Chrétiens de toute espèce qui ne venaient en Égypte que pour offrir aux beys leur expérience dans l'art de piller et de vexer les peuples. C'était ainsi que Menou aimait à s'épancher avec celui qui lui avait inspiré estime et respect, et auquel il avait voué le plus inviolable attache

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1 Lettre du 20 vendémiaire an VII.

Marmont était toujours dans ces parages; Bonaparte lui écrivit : « L'intrigant Abdalon, intendant de Mourad-Bey, est passé, il y a trois jours, à Choarah, avec 30 Arabes; on croit qu'il se rend dans les environs d'Alexandrie : je désirerais que vous pussiez le faire prendre; je donnerais bien mille écus de sa personne; ce n'est pas qu'elle les vaille; mais ce serait pour l'exemple : c'est le même qui était à bord de l'amiral anglais. Si l'on pouvait parler à des Arabes, ces gens là feraient beaucoup de choses pour mille sequins. »

Une djerme allant de Rosette au Kaire et portant 7 hommes de la 22o. demi-brigade, fut attaquée par huit bateaux remplis de fellâh du village de Nakleh et d'Arabes. La résistance des sept Français dura autant que leurs munitions; quand ils les eurent épuisées, et après avoir perdu un des leurs, ils se retirèrent sur la rive droite du fleuve, auprès du village de Gobâris : les habitans, ayant à leur tête le cheyk, Habsab-Allah, les recueillirent et leur donnèrent l'hospitalité. Les fellâh de Nakleh et les Arabes offrirent cent piastres pour se faire livrer les Français. Les habitans de Gobâris refusèrent cette offre, prirent les armes, et le cheyk les conduisit lui-même sur une djerme à Rahmanieh. Le général en chef ordonna que ce cheyk se rendrait au Kaire pour y être revêtu d'une pelisse.

'Lettre du 26 vendémiaire.

RÉVOLTE DU KAIRE.

Malgré les soulèvemens partiels qui se manifestaient dans plusieurs provinces, il n'y avait rien d'alarmant dans leur situation. Une poignée de Français, partout où ils se présentaient, suffisait pour triompher des révoltés, quel que fût leur nombre; leurs défaites répétées, usaient l'esprit de sédition, et tout faisait présager que dans peu de temps l'Égypte, déjà conquise, serait bientôt soumise toute entière. Depuis l'occupation du Kaire, cette ville avait été parfaitement tranquille, et là, comme dans la plupart des États de l'Europe, l'exemple de la capitale avait une grande influence sur les provinces. Étonnés d'abord des moeurs égyptiennes, les Français s'y étaient bientôt accoutumés et les respectaient. Les habitans, s'ils ne montraient pas un grand empressement à se mêler avec leurs vainqueurs, semblaient du moins les voir sans répugnance. D'ailleurs comprimés par l'appareil militaire et la présence du général en chef, les hommes impatiens du joug étranger n'osaient pas le secouer et courbaient la tête. Cependant sous ce calme apparent fermentait un orage; il éclata à l'improviste; on ne le soupçonnait pas.

Le 30 vendémiaire (21 octobre), à la pointe du jour, des rassemblemens se formèrent dans divers quartiers du Kaire. A sept heures, une populace

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nombreuse se porta à la maison du qady IbrahimEhctem-Efendi, homme respectable par ses moeurs et son caractère. Une députation de 20 personnes les plus marquantes, entra chez lui et l'obligea à monter à cheval pour se rendre, tous ensemble chez le général en chef, sous prétexte de lui demander la révocation de la mesure relative aux titres des propriétés. On se mettait en marche, lorsqu'un homme de bon sens fit observer au qady que le rassemblement était trop nombreux, et trop mal composé pour des hommes qui ne voulaient que présenter une pétition. Il fut frappé de l'observation, descendit de cheval et rentra chez lui. La populace mécontente le maltraita ainsi que ses gens à coups de pierre et de bâton, et ne manqua pas cette occasion de piller sa maison 1.

Mais les attroupés se croyant alors assez forts pour attaquer les Français, se portèrent dans les différens quartiers qu'ils habitaient, et les prenant au dépourvu, en massacrèrent plusieurs. La maison du général Cafarelly fut investie et pillée; il était sorti avec le général en chef pour visiter des travaux ; deux ingénieurs des ponts et chaussées, Duval et Thévenot qui se trouvaient chez lui, y périrent après s'être défendus avec un grand courage. Les chirurgiens de première classe, Roussel et Mongin, eurent le même sort en défendant l'entrée de l'hôpital que les révoltés ne purent forcer. La maison de Kassim-Bey, habitée par les membres. de la commission des arts fut assaillie; mais aidés

'Lettre de Bonaparte au Directoire, du 6 brumaire.

seulement de leurs domestiques, ils s'y défendirent et donnèrent le temps à la troupe de venir les dégager.

Le commandant de la place, Dupuis, s'était d'abord contenté d'envoyer des patrouilles ; mais la révolte prenant un caractère sérieux, il sortit accompagé de son aide-de-camp Maury, de son interprète Baudeuf, et de 15 dragons. Quoique toutes les rues fussent obstruées, il était parvenu de la place de Birket-el-Fil jusqu'au Mouski, près le quartier des Francs, et avait même dissipé quelques attroupemens. Arrivé dans la rue des Vénitiens, un flot immense de peuple voulut s'opposer à son passage. Il fit entendre quelques paroles de paix, on ne l'écouta pas. Un chef de bataillon turc attaché à la police, qui venait par derrière, voyant le tumulte et l'impossibilité de le faire cesser par la douceur, tira un coup de tromblon. La populace devint furieuse. Dupuis la chargea avec son escorte, culbuta tout ce qui était devant lui, et s'ouvrit un passage; mais un coup de lance l'atteignit au-dessous de l'aissèle gauche et lui coupa l'artère. Son aide-de-camp fut jeté à bas de son cheval; Dupuis lui tendit la main pour le faire remonter; ce mouvement ouvrit un large passage au sang, il perdit connaissance. On le transporta chez Junot, son ami, où il mourut. Solidaire de la gloire immortelle que s'était acquise en Italie la 32°. demi-brigade, dont il avait été commandant, nommé général de brigade sur le champ de bataille des Pyramides, il était entré le premier avec moins de 200 hommes au Kaire, dans une

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