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Note de M. de Talleyrand, en réplique à celle de

lord Grenville.

Paris, 28 nivose an 8. (18 janvier 1800.)

«LA note officielle, en date du 14 nivôse an 8, adressée par le ministre de S. M. britannique, ayant été mise sous les yeux du premier Consul de la République française, il a remarqué avec surprise qu'elle reposait sur une opinion qui n'est point exacte relativement à l'origine et aux conséquences. de la guerre actuelle. Bien loin que ce soit la France qui l'ait provoquée, on se rappelle que, dès le principe de sa révolution, elle avait solennellement proclamé son amour pour la paix, son éloignement pour les conquêtes, son respect pour l'indépendance de tous les gouvernemens ; et il n'est pas douteux qu'occupée alors et sans partage de ses affaires intérieures, elle eût évité de prendre part à celle de l'Europe et fût demeurée fidèle à ses déclarations.

» Mais par une disposition opposée, aussitôt que la révolution française eut éclaté, l'Europe presque entière se ligua pour la détruire. L'agression fut réelle long-temps avant d'être publique : on excita les résistances intérieures, on accueillit les opposans, on toléra leurs réunions armées, on favorisa leurs complots secrets, on appuya leurs déclamations ex

travagantes, on outragea la nation française dans la personne de ses agens, et l'Angleterre donna particulièrement cet exemple par le renvoi du ministre accrédité près d'elle. Enfin, la France fut attaquée de fait dans son indépendance, dans son honneur et dans sa sûreté, long-temps avant que la guerre fût déclarée.

>> Ainsi c'est aux projets d'asservissement, de dissolution et de démembrement qui ont été préparés contre elle, et dont l'exécution a été plusieurs fois tentée et poursuivie, que la France est en droit d'imputer les maux qu'elle a soufferts et ceux qui ont affligé l'Europe. De tels projets depuis long-temps sans exemple, à l'égard d'une aussi puissante nation, ne pouvaient manquer d'amener les plus fatales conséquences.

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» Assaillie de toutes parts, la République a dû porter partout les efforts de sa défensive ; et ce n'est que pour le maintien de sa propre indépendance qu'elle a fait usage des moyens qui étaient dans sa puissance et dans le courage de ses citoyens. Tant qu'elle a vu que ses ennemis s'obstinaient à méconnaître ses droits, elle n'a compté que sur l'énergie de sa résistance: mais aussitôt qu'ils ont dû renoncer à l'espoir de l'envahir, elle a cherché des moyens de rapprochement, elle, a manifesté des intentions de paix ; et si elles n'ont point toujours été efficaces,

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si, au milieu des crises intérieures que la révolution et la guerre ont successivement amenées, les précédens dépositaires de l'autorité exécutive en France n'ont pas toujours montré autant de modération que la nation elle-même a déployé de courage, il faut en accuser surtout l'acharnement funeste avec lequel les ressources de l'Angleterre ont été prodiguées pour consommer la ruine de la France.

» Mais si les voeux de S. M. britannique, comme elle en donne l'assurance, d'accord avec ceux de la République française, sont pour le rétablissement de la paix, pourquoi, au lieu d'essayer l'apologie de la guerre, ne pas mettre son soin à la terminer? Et quel obstacle peut empêcher un rapprochement dont l'utilité est commune et sentie, surtout quand le premier Consul de la République française a personnellement donné tant de preuves de son empressement à mettre un terme aux calamités de la guerre, et de sa disposition à maintenir l'observation rigide des traités conclus.

» Le premier Consul de la République française ne pouvait pas douter que S. M. britannique ne reconnût le droit des nations à choisir la forme de leur gouvernement, puisque c'est de l'exercice de ce droit qu'elle tient sa couronne; mais il n'a pu comprendre comment, à côté de ce principe fondamental, et sur lequel repose l'existence des sociétés poli

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tiques, le ministre de S. M. a pu placer des insinuations par lesquelles il tend à s'immiscer aux affaires intérieures de la République, et qui ne sont pas moins injurieuses pour la nation française et pour son gouvernement, que ne le seraient pour l'Angleterre et pour S. M. une sorte de provocation vers le régime républicain, dont l'Angleterre adopta les formes au milieu du siècle dernier, ou une exhortation à rappeler au trône cette famille que la naissance y avait placée et qu'une révolution en a fait descendre.

» Si, à des époques peu éloignées, et quand le système constitutif de la république ne présentait ni la force ni la solidité qu'il renferme aujourd'hui, S. M. britannique a cru pouvoir provoquer ellemême un rapprochement et des conférences de paix, comment ne serait-elle pas empressée de renouer des négociations auxquelles l'état présent et réciproque des affaires promet une marche prompte? De toute part la voix des peuples et de l'humanité implore la fin d'une guerre marquée déjà par de si grands désastres, et dont la prolongation menace l'Europe d'un ébranlement universel et de maux sans remède. C'est donc pour arrêter le cours de ces calamités, ou afin que leurs terribles conséquences ne soient reprochées qu'à ceux qui les auraient provoquées, que le premier Consul de la République française

propose de mettre sur-le-champ un terme aux hostilités, en convenant d'une suspension d'armes, et en nommant immédiatement de part et d'autre des plénipotentiaires qui se rendraient à Dunkerque, ou dans toute autre ville non moins avantageusement située pour la rapidité des communications respectives, et qui travailleraient, sans aucun retard, au rétablissement de la paix et de la bonne amitié entre la République française et l'Angleterre. » Le premier Consul offre, à cet égard, de donner les passeports qui seraient nécessaires.

» Signé, CH.-MAURICE TALLEYRAND ».

Note de M. Otto.

12 germinal an 9 (2 avril 1801.)

LE soussigné a communiqué à son gouvernement la note de son excellence milord Hawkesbury, en date du 21 mars 1801.

Le premier Consul persiste dans son amour constant pour la paix; et le soussigné est spécialement chargé de faire connaître la vive satisfaction que lø premier Consul a éprouvée, en voyant que le cabinet britannique se montrait enfin disposé à mettre un erme au fléau qui désole l'Europe depuis huit années entières.

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