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d'exil, où nous achevons un court pélerinage, et où nous devons tourner toutes nos espérances vers un monde meilleur; qui, enfin, nous apprend à modérer nos passions, et à n'apprécier les biens de cette vie que le peu qu'ils valent.

Mais s'il n'est pas un théologien exact, il est au moins un chrétien docile, et on ne trouvera rien dans son livre qui mette la foi en danger. Il reconnoît la spiritualité et l'immortalité de l'ame, la moralité des actions humaines, et par conséquent une autre vie où le crime sera puni et la vertu récompensée. Il rend hommage à cette admirable tradition du christianisme, par laquelle tout se suit, se tient et s'enchaîne depuis le moment de la création jusqu'à la fin du monde; où la promesse d'un réparateur date de la première faute; où l'accomplissement de cette promesse fait l'attente des patriarches, et le sujet des écrits des prophètes; où ce réparateur vient au temps précis qu'ils avoient désigné, prouve sa mission par des miracles, meurt comme il avoit été prédit, ressuscite, charge de la propagation de la doctrine douze pauvres pécheurs, devant lesquels s'humilie l'orgueil des philosophes, et qui fondent une religion qui doit durer autant que le monde. Tel est l'abrégé de la profession de foi de l'auteur. Une morale saine, douce, se joint dans son livre à l'attachement aux principes religieux. Quant à la métaphysique, elle n'y est pas toujours irréprochable. Il paroîtra assez singulier qu'après avoir rendu un hommage solennel à la spiritualité de l'ame, et repoussé toutes les idées de matérialisme, l'auteur ose la définir un feu électrique qui anime et vivifie le corps de l'homme. Fait-il bien entendre ce que c'est

que ce feu électrique, en disant que c'est l'éther de l'éther, et par conséquent, ajoute-t-il, un pur esprit ? Est-il mieux fondé, quand il donne pour un dogme positif la préexistence des ames? Pourquoi sur les choses qui sont au-dessus de notre portée, et sur lesquelles la révélation s'est tue, ne pas savoir se taire aussi? Il n'y a pas de honte à être ignorant sur ces matières; il y a de la présomption à vouloir les expliquer.

Ce n'est pas sans surprise encore qu'à propos de quelques systêmes sur les idées mises en avant par de faux esprits, j'ai vu Descartes accouplé avec Condillac et Helvétius. Il y a, ce me semble, entre le premier et ceux-ci une telle distance, qu'elle ne permet ni la qualité d'esprit faux, ni aucun rapprochement. Et cette distance est encore plus marquée sous le rapport des principes religieux. Descartes étoit éminemment chrétien. Ses ouvrages respirent la piété. Il remplissoit fidèlement les devoirs du christianisme. On en trouveroit la preuve s'il en étoit besoin dans un des articles de ce Journal (1), et mieux encore dans un livre intitulé: Pensées de Descartes sur la religion et la morale (2). Descartes y paroît bien différent de ceux qui, depuis, se sont arrogé le nom de philosophes, ou qui du moins ont déshonoré la philosophie qu'ils disoient professer, en lui associant des principes que la vraie philosophie a toujours désa

voués.

(1) No. XXXII.

(2) Un très-gros vol. in-8°.; par M. Emery, ancien supérieur-général de la congrégation de Saint-Sulpice, chez Le Clere, libraire, quai des Augustins, n°. 35; prix, 7 fr. et 8 fr. 75 c. franc de port.

En général, cet ouvrage paroît être le fruit de nombreuses lectures dont l'auteur aura conservé des notes. il y a joint des observations qui souvent sout justes. Il est impossible de ne point y reconnoître un homme honnète, animé d'intentions bonnes et louables. Si j'avois à prononcer sur le style, je dirois qu'il est ordinairement pur. Je serois obligé néanmoins de sigualer quelques mots que je ne crois pas pouvoir être supportés par une oreille françoise. Tel est celui d'impulser. Telles sont encore ces phrases, je vois ses yeux me fixer, les prémices de Flore ou ceux de Pomone, sectateurs de vice dont la perversité base les principes, et plusieurs autres.

L.

Histoire littéraire des huit premiers siècles de l'ère chrétienne, traduite de l'anglois de J. Berington (1).

Autant la littérature du siècle d'Auguste est connue, autant celle des âges suivans l'est peu. L'éclat du premier attire exclusivement les regards et l'intérêt; les nuages qui couvrent les autres dégoûtent et effraient. On cueille avec empressement les fleurs qui couvrent un champ fécondé par la nature et par l'art, et on néglige celles qui croissent au milieu des épines dans un terrain productif, mais inculte. Cependant celles-ci ont aussi leur éclat et leur mérite. La littérature des siècles qui suivirent celui d'Auguste, quoique depuis elle ait toujours été en

(1) I vol. in-8°.

décadence, offre néanmoins encore des époques et des écrivains dignes d'intérêt. On a demandé souvent quelles avoient été les causes de cette décadence, et on a tâché de les assigner. M. Berington s'est aussi occupé de cet examen, et s'il n'a pas assez fait valoir, à ce qu'il me semble, toutes les causes qui ont contribué à cette décadence, il en a présenté pourtant plusieurs qui sont incontestables. Il s'est occupé aussi de cette question : Si l'établissement du christianisme a eu de l'influence sur l'état des lettres. Ce point de critique a été traité dans les derniers temps par plusieurs historiens qui n'y ont pas toujours apporté l'impartialité désirable. On a voulu rendre la religion chrétienne responsable des ténèbres de la barbarie, et on a accusé des papes et des évêques d'avoir fomenté l'ignorance. Mais ces imputations, accréditées par la mauvaise foi, doivent tomber devant des recherches exactes et des considérations désintéressées. M. Berington fait voir que la décadence des lettres avoit commencé avant l'ère chrétienne. Il rappelle les causes qui, de l'aveu des païens mêmes, étoient suffisantes pour produire cet effet. Il nomme les auteurs chrétiens qui se distinguèrent dans la culture des lettres. Chacun des premiers siècles du christianisme en offre un assez grand nombre. Les pères et les docteurs se trouvent dans l'une et l'autre église. Le mérite et les talens de saint Ambroise, de saint Jérôme, de saint Augustin, de saint Léon, parmi les Latins, sont éclatans et reconnus. Les Grecs nous en offriroient davantage encore. Il y avoit dans beaucoup de villes des écoles et des bibliothèques. Les études ecclésiastiques tendoient au contraire à retarder la décadence. Elle servoit à entretenir l'es

prit des recherches. Ce sont elles qui ont préservé d'une entière extinction la langue latine. Elles adoucirent les mœurs barbares des tribus septentrionales, réprimèrent le goût général qui portoit vers la guerre et les armes, attirèrent les esprits plus tranquilles vers les occupations de la retraite, et ouvrirent dans les monastères et dans les églises des dépôts où l'on conservoit ceux des ouvrages sacrés et profanes qui avoient échappé aux ravages de la guerre. L'institution monastique devint même un moyen de multiplier ces ouvrages.

Saint Grégoire-le-Grand, qui a été si injuriensement et si injustement traité par quelques modernes, méritoit le surnom que lui a donné son siècle et la postérité. On a dit, et d'autres ont répété, qu'il avoit détruit beaucoup de monumens des arts, et interdit des études utiles. M. Berington ne s'est pas donné la peine de réfuter des assertions qui ont été, dit-il, victorieusement repoussées. Il renvoie à l'Histoire de la littérature italienne, par Tiraboschi, qui a combattu avec beaucoup de sagacité les raisonnemens de Brucker. M. Berington ne connoissoit probablement pas une Dissertation curieuse sur le même sujet. Elle est de feu M. Emery, et se trouve à la fin de son Christianisme de Bacon. Il y discute les faits en érudit qui connoissoit les sources, et en critique instruit qui pesoit les témoignages; et quand on a lu son Eclaircissement, il ne peut plus rester le moindre doute sur peu de fondement du reproche intenté à un Pape

le

savant et modéré.

M. Berington ne s'est pas borné à l'histoire littéraire des huit premiers siècles. Il a fait aussi celle des suivans, qui ne sera pas la moins intéressante,

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