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La messe finie, tout le monde s'est rendu processionnellement au Port-Ringeard; c'est le nom du monastère. Une foule considérable de peuple de tous les environs s'y étoit rendu pour jouir de ce pieux spectacle, et on a compté plus de cinquante voitures. On est arrivé au monastère. Les religieux y ont chanté le Te Deum et le Domine salvum fac Regem. Le curé d'Entrammes a prononcé un petit discours, et s'est félicité de ce que sa paroisse acquéroit des modèles si frappans de pénitence et de ferveur. La cérémonie finie, le père prieur a invité tout le clergé à partager leur frugal repas, qui consistoit en légumes cuits à l'eau. On a accepté son invitation. C'est ainsi que ces bons religieux. ont pris possession de leur nouveau local. Il n'y a encore que cinq pères et dix frères convers; mais ils en attendent d'autres. Nos cantons s'applaudissent d'avoir de tels hôtes, qui attireront les bénédictions de Dieu sur nous.

NOUVELLES POLITIQUES.

PARIS. MONSIEUR, frère de S. M., est parti le 6 mars pour Lyon. On annonce le départ de Mgr. le duc de Berry. Une proclamation du Roi convoque les deux Chambres. Toutes ces mesures ont été provoquées par une nouvelle à peine croyable, mais cependant certaine. L'audacieux personnage, dont la domination a fait verser tant de larmes et de sang, s'est échappé de son île. Il a osé rentrer armé dans ce royaume, dont la tranquillité l'importune. Ce nouvel attentat hâtera sans doute sa perte. Sa tête est mise à prix. Il ne réussira pas dans ses noirs projets. Quel François pourroit lui prêter son appui? Qui ne trembleroit au contraire du retour d'un tel ennemi? L'activité des Princes et le zèle des sujets dissiperont ce complot désespéré. Nous mettons ici le préambule de la proclamation qui convoque les deux Chambres, puis le texte de l'ordonnance de S. M., qui contient des mesures de sûreté générale :

<«< Nous avions, le 31 décembre dernier, ajourné les chambres pour reprendre leurs séances au 1er. mai, pendant ce temps, nous nous attachions à préparer les objets dont elles devoient

s'occuper. La marche du congrès de Vienne nous permettoit de croire à l'établissement général d'une paix solide et durable, et nous nous livrions sans relâche à tous les travaux qui pouvoient assurer la tranquillité et le bonheur de nos peuples: cette tranquillité est troublée; ce bonheur peut être compromis par la malveillance et la trahison: la promptitude et la sagesse des mesures que nous prenons en arrêtera les progrès. Pleins de confiance dans le zèle et le dévouement dont les chambres nous ont donné des preuves, nous nous empressons de les rappeler auprès de nous.

« Si les ennemis de la patrie ont fondé leur espoir sur les divisions qu'ils ont toujours cherché à fomenter, ses soutiens, ses défenseurs légaux, renverseront ce criminel espoir par l'inattaquable force d'une union indestructible »..

Ordonnance du Roi concernant des mesures de sûreté générale.

Louis, par la grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre, à tous ceux qui ces présentes verront, salut :

L'art. 12 de la charte constitutionnelle nous charge spécialement de faire les réglemens et ordonnances nécessaires pour la sûreté de l'Etat; elle seroit essentiellement compromise si nous ne prenions des mesures promptes pour réprimer l'entreprise qui vient d'être formée sur un des points de notre royaume, et arrêter l'effet des complots et attentats tendans à exciter la guerre civile et détruire le gouvernement.

A ces causes, et sur le rapport qui nous a été fait par notre amé et féal chevalier, chancelier de France, le sieur Dambray, commandeur de nos ordres, sur l'avis de notre conseil, nous avons ordonné et ordonnons, déclaré et déclarons ce qui suit :

Art. 1. Napoléon Buonaparte est déclaré traître et rebelle pour s'être introduit à main armée dans le département du Var. Il est enjoint à tous les gouverneurs, commandans de la force armée, gardes nationales, autorités civiles et même aux simples citoyens, de lui courir sus', de l'arrêter, et de le traduire incontinent devant un conseil de guerre qui, après avoir reconnu l'identité, provoquera contre lui l'application des peines prononcées par la loi.

2. Seront punis des mêmes peines, et comme coupables des mêmes crimes, les militaires et les employés de tout grade qui auroient accompagné ou suivi ledit Buonaparte dans son invasion du territoire françois, à moins que dans le délai de huit

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jours, à compter de la publication de la présente ordonnance, ils ne viennent faire leur soumission entre les mains de nos gouverneurs, commandans de divisions militaires, généraux ou administrations civiles.

3. Seront pareillement poursuivis et punis comme fauteurs et complices de rebellion et d'attentats tendant à changer la forme du gouvernement et provoquer la guerre civile, tous administrateurs civils et militaires, chefs et employés dans lesdites administrations, payeurs et receveurs de deniers pu blics, même les simples citoyens qui prêteroient directement ou indirectement aide et assistance à Buonaparte.

4. Seront punis des mêmes peines, conformément à l'article 102 du Code pénal, ceux qui, par des discours dans des lieux ou réunions publiques, par des placards affichés ou par des écrits imprimés, auroient pris part ou engagé les citoyens à prendre part à la révolte, ou à s'abstenir de la repousser.

5. Notre chancelier, nos ministres secrétaires d'Etat, et notre directeur-général de la police, chacun en ce qui le con cerne, sont chargés de l'exécution de la présente ordonnance qui sera insérée au Bulletin des Lois, adressée à tous les gouverneurs de divisions militaires, généraux, commandans, préfets, sous-préfets et maires de notre royaume, avec ordre de la faire imprimer et afficher, tant à Paris qu'ailleurs, et partout où besoin sera.

Donné au château des Tuileries, le 6 mars 1815, et de notre règne le vingtième.

Par le Roi,

Signé, LOUIS.

Le chancelier de France, signé, DAMBRAY.

Le 3 mars, MONSIEUR, comte d'Artois, a visité l'HôtelDieu de Paris. S. A. R. a été reçue par M. de Marbois, membre du conseil-général des hospices, qui a eu l'honneur de haranguer le Prince. MONSIEUR lui a répondu avec bonté. Il s'est entretenu avec les aumôniers et les religieuses, a parcouru toutes les salles, et s'est arrêté auprès de plusieurs malades, auxquels il a adressé des paroles de consolation. On sait que dans les projets d'embellissemens arrêtés, il y a quelques années, l'Hôtel-Dieu devoit être abattu presque en totalité. On a lieu de croire que ce projet ne sera pas de sitôt mis à exécution. Un Hôtel-Dieu vaut mieux qu'un quai, et des asiles pour les malades sont au moins aussi intéressans que la régularité d'un beau plan, ou un point de vue.

y

De l'année dernière, et de cette année.

DANS quel état étions-nous il y a un an? Qui nous avoit mis? Qui nous en a tirés? Ce sont trois questions bien simples, et dont la solution suffiroit pour détromper, s'ils consentoient à l'être, ceux qui s'obstinent encore à méconnoître le bienfait même dont ils jouissent, et qui ne peuvent se décider à goûter le bonheur qu'on leur procure; insensés, qui semblent s'ennuyer d'un calme profond; qui jettent des regards d'envie vers un passé où ils étoient condamnés à souffrir et à se taire; qui ont toujours à la bouche des plaintes et des reproches sur ce qui se fait, comme des excuses toutes prêtes pour ce qui se faisoit; qui crient contre des minuties, après avoir souffert, en silence, d'horribles iniquités; à qui enfin il faut apparemment, pour satisfaire leur activité inquiète, de l'agitation, du mouvement, du trouble même, et les autres accessoires agréables auxquels nous avoit accoutumés vingt années de révolutions et de désastres. Mais je reviens à mes trois questions.

Dans quel état étions-nous il y a un an? On ose à peine y songer. Quelle suite d'inquiétudes et d'alarmes! La France envahie de quatre ou cinq côtés à la fois; le nord, l'orient, le midi nous envoyant des légions qui se succédoient sans relâche; nos murs, si long-temps paisibles, s'étonnant de voir des drapeaux étrangers; des combats sanglans et journaliers; nos provinces couvertes d'armées qui les parcouroient en tout sens, des villes prises et reprises, des camTome IV ́. L'Ami de la R. et du R. No. 93.

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pagnes jonchées de morts, de malheureux habitans fuyant de tous côtés, des villages embrasés, des cités pillées, bombardécs, détruites; le canon d'alarmes grondant là où ne retentissoit pas celui des combats; la désolation, le deuil et la terreur glaçant tous les cœurs; la jeunesse, et même l'âge mûr, arrachés à leurs habitudes tranquilles, pour aller reponsser des attaques toujours renaissantes; d'énormes levées se succédant sans relâche pour couvrir le déficit des combats ou celui des maladies; des décrets terribles augmentant l'effroi, organisant les mesures les plus violentes, ordonnant le pillage et l'assassinat; l'autorité qui devoit nous protéger contribuant à notre ruine, nous trompant par des récits infidèles, nous accablant de réquisitions, nous menaçant de la mort; enfin, chaque jour marqué par de nouveaux désastres, et ajoutant à la gravité de nos maux; la joie baunie de nos entretiens, et chacun craignant pour le salut de ce qu'il avoit de plus cher, voilà dans quelle situation nous passâmes les trois premiers mois de l'année dernière; voilà où nous en étions il y a un an en ce moment. Près de la moitié de la France étoit occupée par les étrangers, et l'autre moitié, déja fatiguée du joug présent, trembloit d'un avenir qui se présentoit sous les apparences les plus sinistres. Affoiblis par vingt ans de guerres étrangères, nous étions encore en proie aux horreurs d'une guerre intérieure, et cette superbe capitale, qui, depuis des siècles, n'avoit pas vu la fumée d'un camp ennemi, entendoit le bruit des dévastations, et redoutoit pour elle un sort pareil à celui de Moscow. Quelle effrayante perspective!

Qui nous avoit mis dans cet état? faut-il le demander, et les enfans mêmes ne pourroient-ils pas satis

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