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‹ a-t-il agi? Il vous a donné une province qui paye plus que tous les ‹frais que vous avez faits pour la guerre, et il déclare tout haut que « Vous avez réuni la Finlande, la Moldavie et la Valachie à votre empire. >>

Quelque délicates que fussent les circonstances et la question qu'il devait poser, M. de Caulaincourt obéit. L'empereur Alexandre n'était pas éloigné de prêter l'oreille aux propositions qui lui étaient faites; il eût désiré s'assurer d'abord le prix de sa condescendance par la signature de la convention relative à la Pologne; l'impératrice mère, mécontente et malveillante, suscitait des objections religieuses; les complaisances de Na poléon semblaient sans limites; l'empereur Alexandre et ses conseillers demandèrent le loisir de la réflexion.

Cependant la nouvelle du divorce projeté avait éclaté à Paris, dans le sein même de la famille impériale. Napoléon n'avait pu retenir plus longtemps son secret. Quelque remords de l'acte qu'il méditait en silence pesait à son âme en présence des sourdes inquiétudes de l'impératrice; il lui laissa enfin entrevoir ses intentions, les raisons qui le décidaient et la douleur qu'il en éprouvait. La malheureuse Joséphine poussa un cri aigu et tomba évanouie. Lorsqu'elle revint à elle, sa fille, la reine de Hollande, la soutenait, en larmes elle-même, et fièrement irritée de la dureté que Napoléon lui avait témoignée dans le premier moment de sa colère à la vue des souffrances de Joséphine. Bientôt ému par le retour des sentiments meilleurs et plus vrais qui exerçaient encore sur lui une certaine influence, l'empereur s'attrista avec la mère et la fille, sans jamais faiblir un instant ni dans ses paroles, ni dans sa pensée, sur la résolution qu'il avait arrêtée. Le prince Eugène, comme la reine Hortense, avaient annoncé le projet suivre leur mère dans la retraite; Napoléon s'y opposa, accumulant largesses et ses faveurs sur la femme qu'il abandonnait par raison. d'État. Deux jours après avoir solennellement rompu le lien qui les unissait, il lui écrivait à la Malmaison, non sans une préoccupation affectueuse sous la bizarrerie impérieuse de la forme: « Mon amie, je t'ai trouvée aujourd'hui plus faible que tu ne devais être. Tu as montré du courage, il faut que tu en trouves pour te soutenir. Il ne faut pas te laisser aller à une funeste mélancolie. Il faut te trouver contente et surtout soigner ta santé qui m'est si précieuse. Si tu m'es attachée et si tu m'aimes, tu dois te comporter avec force et te placer heureuse. Tu connaîtrais bien mal les sentiments que je te porte, si tu supposais

de

ses

que je puis être heureux quand tu n'es pas heureuse, et content si tu ne te tranquillises pas. Adieu, mon amie, dors bien, songe que je le

veux. >>

L'impératrice Joséphine avait souvent fait preuve d'un caractère léger et d'un esprit frivole; elle était bonne, obligeante et douée d'une grace qui lui avait assuré beaucoup d'amis avant le moment où la grandeur l'avait entourée de courtisans et de flatteurs. Elle était populaire, et le bruit de sa douleur attristait le public, assez peu favorable au divorce. Le 15 décembre 1809, dans une réunion solennelle de la famille impériale, à laquelle assistaient l'archichancelier et le comte Regnault Saint-Jean d'Angély, Napoléon avait lui-même déclaré hautement la résolution qu'il avait prise. « La politique de ma monarchie, l'intérêt et le besoin de mes peuples qui ont constamment guidé toutes mes actions, veulent, dit-il. qu'après moi je laisse à des enfants héritiers de mon amour pour mes peuples ce trône où la Providence m'a placé. Cependant, depuis plusieurs années, j'ai perdu l'espérance d'avoir des enfants de mon mariage avec ma bien-aimée épouse, l'impératrice Joséphine : c'est ce qui me pousse à sacrifier les plus douces affections de mon cœur, à n'écouter que le bien de l'État et à vouloir la dissolution de notre mariage. Dieu sait combien une pareille résolution a coûté à mon cœur, mais il n'est aucun sacrifice qui soit audessus de mon courage, lorsqu'il m'est démontré qu'il est utile au bien de la France. »

L'impératrice Joséphine voulut parler; les larmes étouffaient sa voix; elle remit au comte Regnault Saint-Jean d'Angély le papier qui témoignait de son assentiment aux volontés de l'empereur. Quelques paroles du prince Eugène, en prenant place au Sénat, confirmèrent le sacrifice. Un sénatus-consulte rompit solennellement le mariage civil. Le lien religieux avait causé plus d'embarras. L'absence du propre curé et le défaut des témoins exigés par les règles canoniques servirent de prétexte, malgré les protestations du cardinal Fesch qui avait célébré le mariage de l'empereur avec Joséphine et qui assurait avoir reçu toutes les dispenses du pape. Le pontife ne devait pas être consulté en cette affaire. L'empereur s'adressa à l'officialité de Paris comme le plus humble de ses sujets; il affirma que son consentement n'avait pas été complet; il n'avait accepté une formalité vaine que dans le but de tranquilliser la conscience de l'impératrice et celle du saint-père, assuré qu'il était dès lors de se voir contraint de recourir au divorce.

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LA MALHEUREUSE JOSEPHINE POUSSA UN CRI AIGU ET TOMBA ÉVANOUIE

Les scrupules des ecclésiastiques furent vaincus; le mariage religieux fut déclaré nul par les autorités diocésaines et métropolitaines. La nouvelle en fut insérée au Moniteur, en même temps que le décret assurant à l'impératrice répudiée la plus magnifique dotation.

Cependant la réponse de Saint-Pétersbourg se faisait attendre, et l'empereur en concevait une vive humeur; déjà le roi de Saxe avait fait des ouvertures, offrant la main de sa fille à son illustre allié; bientôt on conçut des espérances plus flatteuses encore. Le parti de la paix l'emportait à Vienne; M. de Metternich avait remplacé au pouvoir M. de Stadion; des propos attribués au nouvel ambassadeur à Paris, M. de Schwartzenberg, parurent contenir des avances matrimoniales. L'archiduchesse Marie-Louise avait dix-huit ans, elle était agréable et douce; l'alliance était éclatante et confirmait à jamais la bonne intelligence entre l'Autriche et la France. Les intrigues se multiplièrent;

ceux

des politiques ou des courtisans qui tenaient à l'ancien régime par tradition et par goût penchaient pour le mariage autrichien; ils étaient appuyés par le prince Eugène, par la reine Hortense, au fond par l'impératrice Joséphine elle-même; la famille impériale et les conseillers impériaux, sortis de la révolution française, répugnaient à l'alliance de la maison d'Autriche, comme à un retour vers le passé encore présent à tous les souvenirs; ils insistaient sur les dangers d'une rupture avec la Russie, qui se verrait avec humeur dédaignée après avoir été recherchée. Les inconvénients étaient moins grands du côté de l'Autriche, déjà vaincue et humiliée. L'empereur hésitait, il consulta deux fois son plus intime conseil. A la seconde séance, son parti était pris; les lenteurs de la Russie avaient excité sa colère; selon sa coutume, il n'écoutait plus que son orgueilleuse et implacable volonté. Ordre fut donné à M. de Caulaincourt de rompre les négociations au sujet de la grande-duchesse Catherine; le mariage avec l'archiduchesse Marie-Louise était résolu.

L'empereur François n'avait témoigné aucune des répugnances ou des hésitations qui irritaient Napoléon contre les Russes; aucun douloureux présage ne parut traverser la pensée de cette famille auguste qui avait vu naguère Marie-Antoinette quitter Vienne pour s'asseoir à Paris sur un trône funeste. Tout l'effort de l'empereur des Français comme de l'empereur d'Autriche tendit, au contraire, à susciter de constantes analogies. Le contrat de Napoléon fut copié sur l'acte qui avait lié les destinées de Louis XVI et de Marie-Antoinette;

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