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il les établirait lui-même s'ils pouvaient être litigieux, par la démarche qu'il fait en ce moment.

» J'ignore quels sont les desseins de Dieu sur ma race, et sur moi; mais je connais les obligations qu'il m'a imposées par le rang où il lui a plu de me faire naître. Chrétien, je remplirai ces obligations jusqu'à mon dernier soupir fils de saint Louis, je saurai, à son exemple, me respecter jusque dans les fers; successeur de François Ier. je veux du moins dire comme lui: Nous avons tout perdu, fors l'honneur. (Note 8.)

Le danger d'être ensuite assassiné ou empoisonné par des émissaires perfides, l'abandon même de tous les autres souverains de l'Europe, n'avaient pu rien lui faire rabattre de cette juste fierté.

Le 5 juin 1804, il avait réclamé en ces termes contre l'envahissement du trône par Bonaparte : << En prenant le titre d'empereur, en voulant le rendre héréditaire dans sa famille, Bonaparte vient de mettre le sceau à son usurpation. Ce nouvel acte d'une révolution, où tout, dès l'origine, a été nul, ne peut sans doute infirmer mes droits; mais comptable de ma conduite à tous les souverains dont les droits ne sont pas moins lésés que les miens, et dont les trônes sont tous ébranlés par les principes dangereux que le sénat de Paris a osé mettre en avant; comptable à la France, à ma famille, à mon propre honneur, je croirais trahir la cause commune en gardant le silence dans cette

occasion. Je déclare donc en présence de tous les souverains, que loin de reconnaître le titre impérial que Bonaparte vient de se faire déférer par un corps qui n'a pas même d'existence légale, je proteste et contre ce titre et contre tous les actes subséquens auxquels il pourrait donner lieu. »

Le roi d'Espagne ayant, un peu plus tard, envoyé l'ordre de la Toison-d'Or à Bonaparte, S. M. Louis XVIII écrivit aussitôt à ce prince, la lettre suivante :

« C'est avec regret que je vous renvoie les insignia de l'ordre de la Toison-d'Or, que sa majesté votre père, de glorieuse mémoire, m'avait confiés. Il ne peut y avoir rien de commun entre moi et le grand criminel dont l'audace et la fortune l'ont placé sur mon trône, qu'il a eu la barbarie de teindre du sang pur d'un Bourbon, le duc d'Enghien.

>> La religion peut m'engager à pardonner à un assassin; mais le tyran de mon peuple doit toujours être mon ennemi.

» Dans le siècle présent il est plus heureux de mériter un sceptre, que de le portor.

» La Providence, par des motifs incompréhensibles, peut me condamner à finir mes jours en exil; mais, ni la postérité, ni mes contemporains ne pourront dire que dans le temps d'adversité, je me suis montré indigne d'occuper, jusqu'au dernier soupir, le trône de mes ancêtres, »>

A l'époque où S. M. avait reçu, à Varsovie, l'envoyé de Bonaparte, cet homme lui fit entendre qu'il était probable que, pour prix de sa résistance, il allait se voir banni de tous les pays où son maître avait quelqu'influence; et cette influence commençait dès-lors à s'étendre bien loin : « Je plaindrai le souverain qui se croira forcé de prendre un parti de ce genre, répondit le roi, et et je m'en irai. » Il se vit en effet peu à peu contraint d'abandonner le continent et de se réfugier en Angleterre, seul asile qui lui restât en Europe. Tout contribua à rendre ce voyage terrible. Sa majesté n'eut que vingt-quatre heures pour quitter Mittau, et le voyage de cette ville au bord de la mer fut cruel. Une tempête horrible, des tourbillons de neige aveuglant les hommes et effrayant les chevaux, interrompirent la dernière journée. Rien ne put cependant altérer la fermeté de notre souverain. Le dévouement de son auguste nièce l'égala seul. Uniquement occupée du meilleur des oncles et des rois, tout était bien, tout était bon pour elle : ici la chaleur étouffante, là le froid glacial d'une chambre sans feu ne pouvait lui arracher une plainte, tant qu'elle était sûre que sa majesté en occupait une plus commode ou plus chaude. Cette princesse vertueuse et aimable était devenue, en 1799', la digne épouse du fils aîné de ce prince qui fut, toute sa vie, le modèle des chevaliers français ( Note 9 ).

Relativement à son érection sur le trône impé

rial, plus heureux envers le saint père qu'il ne l'avait été envers le roi légitime, Napoléon finit cependant par recevoir aussi de la cour de Rome le sujet de chagrin le plus grave qui puisse atteindre un prince chrétien au comble de la gloire et de la puissance; il apprit, vers le commencement de 1811, que le souverain pontife, en réparation de tout ce que depuis quelque temps la religion souffrait de sa part en la personne de son chef visible, avait lancé contre lui une bulle d'excommunication. En vain essaya-t-il d'opposer un concile à l'interdiction que cette bulle imposait à l'empire : ce concile assemblé solennellement à Paris le 17 juin, refusa de se prononcer contre le successeur de SaintPierre, et ses membres les plus distingués préférèrent la prison à l'espèce d'apostasie que l'on vou- lait exiger d'eux.

Du reste, tout réussissait alors à celui qui avait déjà, tant de fois et de tant de façons, éprouvé la fortune. Par ses qualités, plus brillantes il est vrai que solides, il se voyait devenu un objet d'admiration pour l'univers entier; tous les souverains étrangers recherchaient son amitié, et s'en faisaient publiquement honneur; le concert de louanges qu'il entendait sans cesse retèntir autour de lui, ne lui laissait aucun doute qu'il ne fût regardé par les nombreux sujets qu'il s'était créés, comme un grand homme nécessaire à leur gloire et à leur bonheur. Il faut convenir en effet que depuis le règne de

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Charlemagne, la France n'avait jamais été si puissante à l'extérieur, et que jamais non plus sa situation intérieure n'avait promis à ses enfans, autant de prospérités de tous les genres. Un gouvernement fort et vigoureux, assurait la tranquillité publique, en comprimant tous les partis, et essayant de rattacher tous les intérêts au grand intérêt de l'état. Une institution perfectionnée de l'ancienne chevalerie présentait au mérite et à la vertu un glorieux incitament, et semblait une garantie certaine, qu'à l'avenir, les fiers descendans des Francs ne seraient plus soumis qu'à des autorités respectables et à de nobles déférences. Un code civil, savamment formé, simplifiait les procédures, et mettait chacun en état de juger par lui-même, dans chaque affaire, de son bon droit et de la manière de le faire valoir. Les sciences, les lettres et les arts, sagement soutenus et encouragés, sortaient des ténèbres où les avait plongés la révolution, et brillaient déjà d'un éclat radieux. Les monumens nationaux, dignes des beaux temps d'Athènes et de Rome, et les établissemens utiles, qui se construisaient sur tous les points, eussent à eux seuls suffi pour remplir tous les cœurs de joie et de satisfaction. Les yeux n'osaient plus en quelque sorte se reporter sur l'origine d'une autorité exercée avec tant d'avantage pour l'universalité des citoyens de l'empire, et son emploi étourdissait sur sa fondation. Mais fondée par la guerre, cette autorité de

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