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classes de cette république. La Consulta avait été formée sous le prétexte de faire connaître les citoyens qui étaient propres à remplir les principales places du gouvernement. Elle adjugea la première à Bonaparte. Le lieu où elle fut convoquée, dit assez qu'on l'influença; il faut ajouter que, pour être plus sûr de son coup, Bonaparte vint lui-même à Lyon pendant qu'elle y tenait ses séances. Au reste il ne prit pas la peine de dissimuler que les décisions de cette assemblée avaient été d'avance dictées par lui. Qu'on en juge par les fragmens suivans du discours qu'il adressa à cette Consulta, en acceptant le titre de président de la république qu'elle représentait :

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« La république cisalpine, reconnue depuis Campo-Formio, a déjà éprouvé bien des vicissitudes, lui dit-il.

>> Les premiers efforts que l'on a faits pour la constituer, ont mal réussi.

Enyahie depuis par des armées ennemies, son existence, ne, paraissait plus probable, lorsque le peuple français, pour la seconde fois, chassa, par la force de ses armes, vos ennemis de votre territoire...........

Composés de six nations différentes, vous allez être réunis sous le régime d'une constitution plus adaptée que toute autre, à vos mœurs et à vos circonstances.

» Je vous ai réunis à Lyon, autour de moi,

comme les principaux citoyens de la Cisalpine. Vous m'avez donné les renseignemens nécessaires pour remplir la tâche auguste que m'imposait mon devoir, comme premier magistrat du peuple français, et comme l'homme qui a le plus contribué à votre création.

» Les choix que j'ai faits pour remplir vos premières magistratures, l'ont été indépendamment de toute idée de parti, de tout esprit de localité.

» Celle de président, je n'ai trouvé personne parmi vous qui eût encore assez de droits sur l'opinion publique, qui fût assez indépendant de l'esprit de localité, et qui eût enfin rendu d'assez grands services à son pays, pour la lui confier.......... Je conserverai encore, pendant le temps que les circonstances le voudront, la grande pensée de vos affaires.

Tant que dura la magistrature dont Bonaparte s'investit ce jour-là, il prit dans tous les actes publics, le titre de président de la république italienne, et non cisalpine, puisque cela était ainsi convenu avec la Consulta. Il avait aussi été décidé, que le président de la république italienne, devant rester dix ans en fonctions, était indéfiniment rééligible.

Six mois après, la situation des affaires étant toujours aussi favorable, Bonaparte, poursnivant son chemin, se fit donner en France le premier consulat à vie. On y ajouta la faculté de désigner son successeur. Ses partisans crurent, dans ce moment,

faire pour lui tout ce qu'il était possible de faire; encore prit-on bien du temps et du soin pour préparer les esprits.

Quelques mois encore, et changeant la répu blique helvétique ( la Suisse) en confédération hel vétique, il s'en fit déclarer le protecteur.

On ne se hasarda à parler de l'empire que près de deux ans plus tard. On y mit aussi bien de la précaution et de la manœuvre. On s'appuya surtout des craintes que pouvaient inspirer aux hommes de la révolution deux événemens dont nous allons rendre compte à nos lecteurs.

Louis - Antoine-Henri de Bourbon Condé, duc d'Enghien, était né à Chantilly, près Paris, le 22 août 1772. Ce prince, ayant quitté la France à l'époque de la révolution, avec son père et son grandpère, le duc de Bourbon et le prince de Condé, avait servi avec gloire dans les troupes, au moyen desquelles les différens souverains de l'Europe avaient long-temps essayé de rétablir le trône des Bourbons; mais en 1804, il vivait à Etteinheim, dans le Brisgaw, absolument tranquille, et, en appa rence du moins, étranger à tout projet politique. Tout à coup deux généraux français arrivèrent à Etteinheim, à la tête de quelques troupes, qui cernèrent la maison occupée par le prince. On était alors au 14 de mars, et cette scène se passait au commencement de la nuit. Le duc d'Enghien fut enlevé.

On le fit voyager très-rapidement. Arrivé à Vincennes, qui devait être le terme de son fatal voyage, le prince, exténué de besoin et de fatigue, prit à peine un léger repas; il se jeta ensuite sur un mauvais lit disposé précipitamment dans une pièce à l'entresol, et s'endormit profondément. Vers les onze heures du soir, on l'éveilla. On le conduisit dans une pièce du pavillon du milieu, faisant face au bois; là, il était attendu par huit officiers supérieurs composant une commission militaire. Divers chefs d'accusation furent articulés contre lui, entre autres ceux d'être le chef d'un rassemblement d'émigrés formé sur les frontières de France, dans les pays de Fribourg et de Bade, et le complice d'une conspiration tramée par les Anglais contre les jours du premier consul. « Je me bats, et ne conspire pas», répondit le prince; et il demanda qu'on lui donnât le temps convenable pour rassembler les documens nécessaires à sa justification. On dit que les juges ne furent pas maîtres de leur conduite; que ne trouvant point matière à asseoir un jugement, ils en référérent à Bonaparte, qui pour toute réponse écrivit ces mots au bas de la lettre qu'ils lui avaient adressée condamné à mort. Quoi qu'il en puisse être, ils prononcèrent effectivement la peine capitale contre l'infortuné prince. C'était un héros, mais un héros chrétien; il demanda un confesseur. Un sourire insultant, et presque général, accompagna la réponse suivante que lui fit un de ses juges : « Est

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ce que tu veux mourir en capucin : un prêtre ! bah! ils sont tous couchés à cette heure. » Le prince, indigné, ne répondit pas un seul mot; il s'agenouilla, éleva son âme à Dieu, et après un moment de recueillement, il se releva et dit : « Marchons. >>

On le fit descendre dans le fossé sec du château, par un escalier étroit, obscur et tortueux. Le prince se retourna vers l'officier qui commandait le détachement de soldats par lequel il était suivi, et lui dit : «Est-ce que l'on veut me plonger tout vivant dans un cachot? Suis-je destiné à périr dans les oubliettes?

Non, monseigneur, lui répondit en pleurant cet officier qui avait été élevé dans la maison de Condé, et qui, en ce moment, en conservait un cher et douloureux souvenir, soyez tranquille. » — On arriva au lieu de l'exécution. Le duc d'Enghien, voyant à l'appareil qui l'environnait, qu'il s'agissait d'être passé par les armes, s'écria : « Ah! grâce au ciel, je mourrai de la mort d'un soldat! » Au moment d'être frappé, le descendant du grand Condé, dit de l'air le plus intrépide aux militaires qui allaient lui donner la mort : « Allons, mes amis ! »

La mort du duc d'Enghien fit généralement la plus mauvaise impression. On murmura hautement dans Paris autour des colporteurs, qui le lendemain crièrent son arrêt. La troupe, que la discipline militaire avait contrainte à l'exécution, parut pendant plusieurs jours, triste, morne et embarrassée.

Beaucoup de royalistes, plus jaloux du triomphe

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