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» Que cet exemple, Sire, s'applique heureusement à Votre Majesté impériale! non pas qu'elle ait besoin de nous adresser ces paroles; c'est le Sénat conservateur et le peuple français qui vous assurent par ma voix qu'ils sont fiers de leur empereur. S'ils vous ont offert la couronne, s'ils la rendent héréditaire dans votre descendance et dans celle de vos deux frères, c'est parce qu'il n'existe dans le monde aucun homme plus digne de porter le sceptre de la France, ni aucune famille plus chérie des Français. Commandés par Napoléon, ou par ses fils ou ses neveux, imbus de son esprit, formés à son exemple, liés enfin par son serment, nous, Sire, et les fils de nos fils, nous défendrons jusqu'à la mort ce gouvernement tutélaire, objet de notre orgueil comme de notre amour, parce qu'en lui nous défendrons notre chef et nos biens, nos familles et notre honneur.

» Sire, vous avez pris pour devise de nos monnaies ces mots que vous justifiez : Dieu protége la France. Oh! oui, Dieu protége la France, puisqu'il vous a créé pour elle. Père de la patrie, au nom de ce Dieu protecteur, bénissez vos enfans, et, sûr de leur fidélité, comptez que rien ne peut ni effacer de leur esprit ni déraciner de leur cœur les engagemens résultans du contrat mutuel qui vient d'intervenir entre la nation française et la famille impériale!

>> Mais il faut compléter tout ce qui a rapport à ce contrat auguste, et pour y parvenir le Sénat m'a chargé de prier Votre Majesté de faire promulguer d'une manière solennelle le senatus-consulte du 15 brumaire dernier, qui proclame le vœu du peuple pour l'hérédité de l'empire; ce grand acte national est lié naturellement à l'auguste cérémonie du sacre et du serment de Votre Majesté impériale. L'établissement de l'Empire est un phénomène éclatant; mais nous désirons qu'il soit stable, et il ne peut le devenir que par l'ordre établi pour la succession au trône. La sécurité du grand peuple et la vôtre, Sire, en dépendent; on ne saurait donc prendre trop de précautions ni déployer trop d'appareil pour graver cette idée, et pour l'enfoncer plus avant dans les imaginations. Ce fut jadis un sentiment: la révolution eut pour objet de l'étouffer. Nous ranimons ce feu sacré sur les autels de la patrie; la politique le rallume; la religion le consacre; la liberté lui applaudit: il ne doit plus s'éteindre.

» Souffrez que le Sénat insiste sur ce point capital. C'est par là surtout qu'il mérite son titre de conservateur; n'eût-il rendu que ce service, il aurait bien justifié et le rang qu'il tient dans l'Etat, et la perspective qu'il offre à l'émulation des meilleurs citoyens.

» Dans l'absence du trône, Sire, tous les grands caractères

se livrent à des factions: un peuple est d'autant plus à plaindre qu'il a des enfans plus illustres; tout ce qui pourrait faire l'orgueil des nations en devient alors le fléau. Dès qu'il y a un trône dignement occupé, les sublimes vertus ont une récompense; c'est d'en approcher de plus près, et la distinction est d'autant plus flatteuse que des dignités plus réelles portent des noms plus imposans. Le titre d'empereur a toujours rappelé non cette royauté devant laquelle s'humilient et se prosternent des sujets, mais l'idée grande et libérale d'un premier magistrat commandant au nom de la loi, à laquelle des citoyens s'honorent d'obéir. Le titre du Sénat indique aussi une assemblée de magistrats choisis, éprouvés par de longs travaux, et vénérables par leur âge. Plus l'empereur est grand, plus le Sénat doit être auguste.

» Heureux à cet égard les membres du Sénat français! Il n'y a pas d'ambition, militaire ou civile, qui ne puisse être satisfaite de l'espoir d'arriver au rang de ces pères conscrits, appelés les premiers à se trouver présens lors du serment que l'empereur doit prêter au peuple français. Oui, Sire, nous regarderons comme le plus beau de nos jours celui où nous aurons été les premiers témoins nécessaires de votre engagement envers la nation; et nous demanderons au ciel que la pompe d'un si grand jour ne se répète en France que dans les temps les plus lointains, et pour nos arrière-neveux. Ah! puisse-t-il en être des fêtes du couronnement comme des fêtes séculaires, que nul individu romain dans le cours de sa vie ne put jamais voir qu'une fois!

» Enfin, Sire, la conséquence de l'hérédité proclamée c'est le dépôt dans nos archives des actes qui constatent l'état civil des princes du sang impérial. Nous réclamons ce grand dépôt, et le Sénat conservateur prie Votre Majesté de donner promptement les ordres nécessaires pour que ces actes importans, confiés à sa garde par l'article 13 du titre III de l'Acte des Constitutions du 28 floréal dernier, lui soient apportés dans les formes et avec la solennité qui peuvent garantir au peuple l'authenticité de ces actes, auxquels doit s'attacher l'éternelle durée de l'Empire français.

>>

RÉPONSE de l'empereur.

«Je monte au trône où n'a appelé le vœu unanime du Sénat, du peuple et de l'armée, le cœur plein du sentiment des grandes destinées de ce peuple, que du milieu des camps j'ai le premier salué du nom de grand.

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Depuis mon adolescence mes pensées tout entières lui

sont dévolues; et, je dois le dire ici, mes plaisirs et mes peines ne se composent plus aujourd'hui que du bonheur ou du malheur de mon peuple.

» Mes descendans conserveront longtemps ce trône.

Dans les camps ils seront les premiers soldats de l'armée, sacrifiant leur vie pour la défense de leur pays.

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Magistrats, ils ne perdront jamais de vue que le mépris des lois et l'ébranlement de l'ordre social ne sont que le résultat des faiblesses et de l'incertitude des princes.

D

Vous, sénateurs, dont les conseils et l'appui ne m'ont jamais manqué dans les circonstances les plus difficiles, votre esprit se transmettra à vos successeurs; soyez toujours les soutiens et les premiers conseillers de ce trône, si nécessaire au bonheur de ce vaste empire.

II.

SESSION DE L'AN XIII.

DISCOURS (1) prononcé par l'empereur à l'ouverture de la session du Corps législatif, le 6 nivose an 13. (27 décembre 1804.)

« Messieurs les députés des départemens au Corps législatif, messieurs les tribuns et les membres de mon Conseil d'état, je viens présider à l'ouverture de votre session : c'est un caractère plus imposant et plus auguste que je veux imprimer à vos tra

vaux.

>> Princes, magistrats, soldats, citoyens, nous n'avons tous dans notre carrière qu'un seul but; l'intérêt de la patrie. Si ce trône, sur lequel la Providence et la volonté de la nation m'ont fait monter, est cher à mes yeux, c'est parce que, seul, il peut défendre et conserver les intérêts les plus sacrés du peuple français. Sans un gouvernement fort et paternel, la France aurait à craindre le retour des maux qu'elle a soufferts.

» La faiblesse du pouvoir suprême est la plus affreuse calamité des peuples. Soldat ou premier consul, je n'ai eu qu'une pensée; empereur, je n'en ai point d'autre : les prospérités de la France. J'ai été assez heureux l'illustrer pour toires , pour la consolider par des traités, pour l'arracher aux discordes civiles, et y préparer la renaissance des mœurs, de

(1) C'est la première session ouverte par l'empereur.

par

des vic

la société et de la religion. Si la mort ne me surprend pas au milieu de mes travaux, j'espère laisser à la postérité un souvenir qui serve à jamais d'exemple ou de reproche à mes suc

cesseurs.

» Mon ministre de l'intérieur vous fera l'exposé de la situation de l'Empire. Les orateurs de mou Conseil d'état vous présenteront les différens besoins de la législation. J'ai ordonné qu'on mit sous vos yeux les comptes que mes ministres m'ont rendus de la gestion de leur département. Je suis satisfait de l'état prospère de nos finances; quelles que soient les dépenses, elles sont couvertes par les recettes. Quelque étendus qu'aient été les préparatifs qu'a nécessités la guerre dans laquelle nous sommes engagés, je ne démanderai à mon peuple aucun nouveau sacrifice.

» Il m'aurait été doux, à une époque aussi solennelle, de voir la paix régner sur le monde; mais les principes politiques de nos ennemis, leur conduite récente envers l'Espagne, en font assez connaître les difficultés. Je ne veux pas accroître le territoire de la France, mais en maintenir l'intégrité. Je n'ai point l'ambition d'exercer en Europe une plus grande influence; mais je ne veux pas déchoir de celle que j'ai acquise. Aucun état ne sera incorporé dans l'Empire; mais je ne sacrifierai point mes droits, les liens qui m'unissent aux états que j'ai créés.

» En me décernant la couronne, mon peuple a pris l'engagement de faire tous les efforts que requerraient les circonstances pour lui conserver cet éclat qui est nécessaire à sa prospérité, et à sa gloire comme à la mienne. Je suis plein de confiance dans l'énergie de la nation et dans ses sentimens pour moi ses plus chers intérêts sont l'objet constant de mes sollicitudes.

>> Messieurs les députés des départemens au Corps législatif, messieurs les tribuns et les membres de mon Conseil d'état, votre conduite pendant les sessions précédentes, le zèle qui vous anime pour la patrie, pour ma personne, me sont garans de l'assistance que je vous demande, et que je trouverai en vous pendant le cours de cette session. »

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EXPOSE de la situation de l'Empire français.- Lu devant le Corps législatif par M. Champagny, ministre de l'intérieur, dans la séance du 10 nivose

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(51 décembre 1804.)

an 13.

La situation intérieure de la France est aujourd'hui ce qu'elle fut dans les temps les plus calmes point de mouvement qui puisse alarmer la tranquillité publique; point de délit qui appartienne au souvenir de la révolution; partout des entreprises utiles, partout l'amélioration des propriétés publiques et privées attestent les progrès de la confiance et de la

sécurité.

» Le levain des opinions n'aigrit plus les esprits, le sentiment de l'intérêt général, les principes de l'ordre social, mieux connus et plus épurés, ont attaché tous les cœurs à la prospérité commune. C'est ce que proclament tous les administrateurs ; c'est ce qu'a reconnu l'empereur dans tous les départemens qu'il a parcourus; c'est ce qui vient d'être démontré de la manière la plus éclatante. Toutes les armées se sont vues à la fois séparées de leurs généraux; tous les corps militaires de leurs chefs; les tribunaux supérieurs privés de leurs premiers magistrats; le ministère public de ses premiers organes; les églises de leurs principaux pasteurs; les villes, les campagnes délaissées simultanément par tout ce qui a du pouvoir et de l'influence sur les esprits; le peuple partout abandonné à son génie; et le peuple partout s'est montré voulant l'ordre et des

lois.

» Dans le même moment le souverain pontife traversait la France. Des rives du Pô jusqu'aux bords de la Seine, partout il a été l'objet d'un hommage religieux que lui a rendu avec amour et respect cette immense majorité qui, fidèle à l'antique doctrine, voit un père commun et le centre de la commune croyance dans celui que toute l'Europe révère comme un souverain élevé au trône par sa piété et ses vertus.

>> Une trame ourdie par un gouvernement implacable allait replonger la France dans l'abîme des guerres civiles et de l'anarchie. A la découverte de cette horrible trame, la France entière s'est émue, des inquiétudes mal assoupies se sont réveillées; et dans tous les esprits à la fois se sont retrouvés des principes qui ont été ceux de tous les sages, et qui furent constamment les nôtres avant que l'erreur et la faiblesse eussent aliéné les esprits, et que de coupables intrigues eussent égaré les opi

mons.

» On avait éprouvé que le pouvoir partagé était sans accord

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