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L'impulsion de constitutionnalité une fois donnée par le Roi, tous les corps politiques s'empressèrent d'entrer dans les mêmes idées. Déjà M. Delorme avait proposé de mettre la Charte sous la protection des gardes nationales du royaume. Dans la séance du 18, sur la proposition de M. Barrot, la Chambre adopta une sorte de protestation dirigée tout entière contre l'empereur Napoléon. « Considérant que la nation s'est levée en masse en 1789 pour reconquérir, de concert avec son Roi, les droits naturels et imprescriptibles qui appartiennent à tous les peuples, que la jouissance lui en était assurée par les Constitutions qu'elle a librement acceptées en 1791, en l'an V et l'an VIII, que la Charte de 1814 n'est que le développement des principes sur lesquels ces Constitutions étaient basées; considérant que depuis 1791, tous les gouvernements qui ont méconnu les droits de la nation ont été renversés, et que nul gouvernement ne peut se soutenir qu'en suivant la ligne des principes constitutionnels; que Bonaparte les avait tous méconnus, et violés au mépris des serments les plus solennels; que le vœu général et spontané appela sur le trône une famille que la France était accoutumée à vénérer, et un Prince qui, à l'époque de notre régénération, avait puissamment secondé les efforts que son auguste frère avait faits pour opérer cette régénération, la Chambre des Députés déclarait nationale la guerre contre Bonaparte; elle appelait tous les Français aux armes, accordait des récompenses nationales à tous les défenseurs de la patrie, décernait des médailles, et punissait enfin toutes tentatives pour favoriser le retour de la tyrannie! » En même temps quelques mouvements militaires s'organisaient aux environs de la capitale. M. le duc de Berri avait été nommé commandant en chef; le général Maison avait la direction du premier corps, le second était sous les ordres de Rapp, la cavalerie sous ceux du général Kellerman, le comte Rutty commandait l'artillerie, Axo le génie. Le 17, le général Maison annonça qu'on allait se porter en avant; mais les dispositions des troupes était si mauvaises, et Napoléon s'avançait! Alors on mit en délibération si le Roi défendrait la capitale ; s'il resterait aux Tui

leries; telle était l'opinion personnelle du Roi; il la consigna dans sa dernière proclamation aux soldats, tout entière écrite de sa main et qu'il envoya lui-même au Moniteur; le 19, il annonça aux ambassadeurs qu'il resterait sur son trône, et qu'il les attendait le 21 à la réception au château ; cependant le 19 au matin un conseil extraordinaire fut réuni aux Tuileries, et l'on mit en délibération les trois points suivants : le Roi resterait-il à Paris? se retirerait-il dans une ville forte où l'on transporterait le siége du Gouvernement, et quelle ville choisirait-on? le Roi irait-il à l'étranger? Louis XVIII persista dans sa première résolution. « Je resterai aux Tuileries, je veux voir en face l'homme qui prétend s'asseoir sur mon trône; je compte sur l'affection de mon peuple. » M. Lainé partageait cette résolution du Roi; il lui conseillait de s'entourer des deux Chambres en permanence, et d'attendre avec ce cortége imposant l'usurpateur: « Osera-t-il porter la main, répétait M. Lainé, sur la représentation nationale?»> D'autres, plus prudents, faisaient entrevoir tous les dangers, pour le Roi et la Famille royale, d'une telle résolution. « Vous ne connaissez pas Bonaparte, disaient-ils, si vous croyez le frapper par l'éclat du diadème légitime! Serait-ce le premier attentat qu'il a commis? Il a déjà goûté du sang des Bourbons; la tête vénérable de Louis XVIII ne l'arrêtera pas; sauvez le Roi, il y aura des ressources pour sauver la monarchie. »> Ce second parti inclinait donc pour qu'on se retirât dans une ville forte. On proposait également Lille et Dunkerque : Dunkerque présentait le voisinage de l'Angleterre, Lille celui des Pays-Bas. Un troisième parti, celui de MM. Ferrand, Dambray, et en général des émigrés, penchait pour l'étranger. Il ne croyait pas le Roi en sûreté tant qu'il serait sur le sol français qu'ébranlait une si puissante conspiration. Les habitudes d'émigration, les nouvelles reçues du congrès de Vienne donnaient de l'ascendant à ce parti, mais il trouva une opposition personnelle dans les répugnances de Louis XVIII pour l'étranger. A six heures on se sépara; le Roi avait déjà dit : « J'irai à Lille »; il se retira un moment dans son cabinet et rédigea de sa main ses adieux à sa capitale.

« Nous pourrions, y disait-il, profiter des dispositions fidèles et patriotiques de l'immense majorité des habitants de Paris pour en disputer l'entrée aux rebelles, mais nous frémissons des malheurs de tout genre qu'un combat dans ses murs attirerait sur şes habitants; nous irons plus loin rassembler des forces et chercher sur un autre point du royaume, non pas des sujets plus aimants et plus fidèles que nos bons Parisiens, mais des Français plus avantageusement placés pour se déclarer en faveur de la bonne cause. » Dans la nuit du 19 mars le Roi quitta la capitale; jamais spectacle plus touchant; la maison du Roi, les vo~ lontaires, tous pleuraient en suivant ce Prince, qui avait pris, dans des circonstances si difficiles, une force d'âme héroïque. Louis XVIII était souffrant, mais son visage était calme; on em porta du château les diamants de la couronne, quelques millions en or ou en billets, et on se dirigea avec un temps affreux sur la route de Lille.

Le matin du 20 mars, Paris était sans autorités supérieures; toutes avaient suivi le Roi ou quitté son administration. Ainsi les autorités secondaires furent enfin soulagées d'une grande perplexité; en effet, pour les gens qui tenaient à leurs places plus qu'à un principe, comment se décider entre Louis XVIII, alors à Paris, et Bonaparte à Autun ou à Fontainebleau? Cela parut d'une manière assez singulière au tribunal de la Seine, le 19 mars : les rédacteurs du Censeur avaient assigné la Quotidienne en calomnie, parce qu'elle avait dit que les Patriotes avaient conspiré pour appeler Napoléon. Bonaparte allait arriver à Paris comment condamner pour calomnie ce qui, le lendemain, serait considéré comme un éloge? MM. Comte et Dunoyer, avec une grande inflexibilité de caractère, persistèrent dans leur plainte. Quel embarras ! Le président n'eut d'autre parti que de renvoyer à quinzaine. Qu'on s'imagine la joie des Bonapartistes: ils avaient passé les derniers jours dans des transes cruelles! le désespoir avait fait prendre aux Royalistes des résolutions plus bavardes qu'énergiques; ils annonçaient qu'ils ne quitteraient pas Paris sans avoir égorgé tous les partisans de Napoléon. Quelles

étaient les transes de ces femmes, l'âme du complot : la duchesse de Saint-Leu et madame Hamelin! La joie tint de l'ivresse! Enfin l'Empire était revenu; on aurait encore une cour, des pompes, des fêtes! On ne serait plus humilié par le vieux cortége de l'émigration! On aurait le pouvoir, l'argent, les affaires! Chacun se hâta d'annoncer l'heureux événement à Napoléon, alors à Fontainebleau ; madame Hamelin eut l'honneur d'avoir lancé le premier courrier; ce fut elle qui donna la bonne nouvelle et pressa l'Empereur d'arriver, car il était à craindre que les Patriotes n'organisassent sans lui un Gouvernement provisoire; c'était le plan de Carnot, Quinette, et des chefs des Républicains; en même temps que des courriers étaient expédiés à Napoléon, M. Lavalette s'emparait des postes et donnait partout la nouvelle de l'arrivée de l'Empereur dans sa capitale; les actes, les proclamations émanées de Napoléon depuis le golfe Juan étaient envoyées au Moniteur, avec un ordre d'insérer, signé Regnault de Saint-Jean-d'Angely. Enfin à sept heures du soir l'Empereur entra dans Paris par la barrière de Fontainebleau ; il n'y eut ni pompe ni joie publique, on ne l'attendait pas; et puis d'ailleurs il y a dans la classe moyenne une certaine pudeur politique; elle ne change pas de couleur et d'affection du jour au lendemain. Aux Tuileries, au contraire, tout fut fête, Napoléon se vit comme porté sur les bras des officiers réunis dans la cour; ce fut de l'ivresse militaire, une de ces joies des camps romains saluant César et les aigles. Napoléon était moins radieux qu'on ne l'aurait cru. A Paris, il envisageait sa situation avec bien plus d'étendue qu'au golfe Juan, car il était en présence de l'Europe.

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Les populations de la France.
Bordeaux et

Louis XVIII à Lille. Le Midi et le duc d'Angoulême.

Madame.

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Louis XVIII à Gand.

M. de Talleyrand à Vienne. Prévoyances d'une nouvelle Restauration. Examen des Cent-Jours par les Royalistes. Impossibilité de duréc.-La Cour de Gand.-Rapports des Bourbons avec Paris. Instinct de la chute de Bonaparte. avec le parti patriote.

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- Liaison

Les Bourbons après Waterloo. Marche des
Le duc de Wellington mêlé aux
Arrivée de M. de Talleyrand à Mons.
-Louis XVIII à Arnouville.

combinaisons ministérielles.

Formation d'un nouveau Ministère.

Avril à Juillet 1815.

LES Cent-Jours ne forment qu'un court et terrible épisode dans l'histoire de la Restauration; cette folie glorieuse a coûté plus de sacrifices à la France que dix batailles perdues : son territoire s'est amoindri, ses forteresses ont été détruites, son influence européenne fatalement diminuée; il n'y a plus eu d'alliances possibles, on s'est méfié de ses propositions de paix ; tous se sont mis contre elle; on s'est habitué à la voir comme un objet d'inquiétude. La période des Cent-Jours a formé pour moi un travail spécial; une histoire de la Restauration doit courir sur ces événements pour arriver aux démarches que la Maison de Bourbon fit une seconde fois pour recouvrer sa couronne. Hélas! elle devait tomber sans efforts cette noble Maison. Louis XVIII quitte sa capitale; en vain il cherche l'appui des Chambres, en vain les Princes veulent se mettre à la tête des mouvements dans le Midi. Les héroïques efforts de Madame

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