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l'Angleterre. Le ministre des relations extérieures écrivit à lord Castelreagh; il réduisait les causes de la guerre entre la France et la Grande-Bretagne à deux points les plus difficiles à concilier, les affaires d'Espagne et celles des Deux-Siciles; il proposait d'en établir l'arrangement sur les bases suivantes : L'intégrité de l'Espagne serait garantie; la France renoncerait à toute extension du côté des Pyrénées; la dynastie actuelle serait déclarée indépendante, et l'Espagne régie par une constitution nationale des cortès; l'indépendance et l'intégrité du Portugal seraient également garanties, et la maison de Bragance y régnerait. Le royaume de Naples resterait au roi de Naples; le royaume de Sicile serait garanti à la maison actuelle de Sicile. Par suite de ces stipulations, l'Espagne, le Portugal, la Sicile seraient évacués par les troupes anglaises et françaises de terre et de mer. Quant aux autres objets de discussion, ils pourraient être négociés sur cette base, que chaque puissance garderait ce que l'autre ne pourrait lui ôter, 1

Avant d'entrer en explications sur cette ouverture, lord Castelreagh demanda qu'on fixât le sens précis de ces mots relatifs à l'Espagne, « la dynastie actuelle serait déclarée indépendante et l'Espagne régie par une constitution nationale des cortès. » S'il s'agissait de Joseph et de cortès formées sous son autorité, il déclarait franchement et explicitement

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que des engagemens existans ne permettaient pas d'adopter cette base. S'il s'agissait de Ferdinand VII et des cortès gouvernant en son nom, on était disposé à s'expliquer pleinement sur cette base.1

Par les mots de dynastie actuelle Napoléon entendait celle de son frère. La négociation ne fut donc pas poussée plus loin; s'il eût cédé sur ce point, l'Angleterre aurait-elle fait la paix ? cela n'est pas probable; elle avait eu des avantages en Espagne; avec la Russie les choses étaient trop avancées. Napoléon ne pouvait restaurer Ferdinand, sans livrer l'Espagne à l'Angleterre. Son ouverture à cette puissance ne pouvait avoir d'autre but, que de paraître avoir tout épuisé pour faire la paix avant de s'engager dans une nouvelle guerre.

Dans une guerre avec la Russie, la question du rétablissement de la Pologne revenait en premier ordre. Les Polonais desiraient donc vivement la guerre, comme devant amener nécessairement la résurrection de leur patrie. On a douté et nié même que Napoléon ait jamais voulu refaire de la Pologne une nation indépendante; c'était un projet qui touchait aux intérêts de trois grandes puissances, et qui dèslors présentait de graves difficultés. Il y aurait eu de la folie à se heurter contre elles pour se faire, par un sentiment de pure chevalerie, le don Quichotte des Polonais. Napoléon n'étant que général des armées républicaines avait conçu le rétablissement de leur

Lettre du 23.

nationalité. Parvenu au gouvernement, il avait nourri ou laissé dormir ce projet suivant les intérêts variables de sa politique; des actes solennels prouvent qu'il ne l'abandonna jamais. La création du duché de Varsovie et l'adjonction d'une partie de la Galicie étaient un assez beau commencement d'exécution.

En 1812 il n'y avait plus à craindre d'opposition de la part de la Prusse; pour sa portion, la victoire et les traités l'avaient mise hors de cause. Quant à l'Autriche elle s'était montrée, par le traité du 14 mars, disposée à céder sa part moyennant une large indemnité. La Saxe ne gênait pas, elle tenait fort peu au grand-duché de Varsovie, qui la plaçait dans une fausse position à l'égard de la Prusse, de la Russie et de l'Autriche; il était facile de l'indemniser: Il ne restait donc que la Russie. A mesure qu'Alexandre s'était refroidi pour la France et qu'il avait manifesté ses craintes sur le rétablissement de la Pologne, Napoléon lui avait fait les protestations les plus rassurantes; mais la guerre, qui rompait les traités, affranchissait de tout ménagement; le rétablissement de la Pologne était un moyen de faire la guerre à la Russie, et promettait à la France un puissant auxiliaire; il satisfaisait à-la-fois à la politique actuelle de Napoléon et aux vues qu'on lui suppose, à cette époque, sur l'organisation de l'Europe.

Pour préparer d'avance le mouvement de la Pologne, le lui imprimer et le diriger, quand le moment serait venu, il fallait un homme habile, adroit,

et expérimenté dans les révolutions. Dès la fin de 1811, l'Empereur jeta les yeux sur Talleyrand, depuis la guerre d'Espagne étranger aux affaires, et avide d'y rentrer. Il accepta une mission qui le rappelait dans la politique. Le secret lui avait été recommandé, elle fut cependant ébruitée à Vienne, où il importait le plus qu'elle fût ignorée, suivant les uns, pour la faire avorter, suivant d'autres, par une spéculation financière. Napoléon, indigné, fut sur le point de sévir; mais au moment de frapper Talleyrand, son bras s'arrêtait toujours; il différa la mission jusqu'après l'alliance avec l'Autriche.

Les sentimens exprimés par l'empereur Alexandre dans ses conversations avec l'envoyé prussien Knesebeck, les explications données par Napoléon à l'aidede-camp, Czernicheff, et les propositions qu'il avait été chargé de porter à Pétersbourg, permettaient de croire qu'il n'était pas difficile aux deux empereurs de s'entendre, et de concilier leurs différends. Mais le temps avait changé les dispositions modérées d'Alexandre, ou plutôt ses démonstrations n'avaient pas été sincères; c'est le colonel Boutourlin qui l'apprend. L'empereur de Russie sentait trop bien que les griefs avoués ne portaient que sur des accessoires; que le fond de la querelle qui divisait les deux empires consistait dans la domination arbitraire que la France s'arrogeait sur toute l'Europe. D'après cela, on n'eût pas avancé grand'chose en obtenant le redressement de ces griefs, car la question principale, celle du pouvoir dictatorial de la France sur

toutes les autres puissances, n'était susceptible d'étre résolue qué par les armes.1

Czernicheff était arrivé le ro mars à Pétersbourg: son gouvernement fit long-temps attendre une réponse. Le baron Serdobin l'apporta enfin, le 24 avril. Kourakin alla de suite la communiquer au ministre Maret; elle était impérieuse et offensante. L'ambassadeur sollicita une audience de Napoléon. Elle lui fut accordée, le 27. Il paraît que l'Empereur évita d'entrer en explication; il le renvoya au ministre pour la discussion des propositions de la Russie, et donna à Maret l'ordre secret de l'éluder. Le prince Kourakin prit le parti de lui écrire. D'après sa lettre, la conservation de la Prusse et son indépendance de tout lien politique dirigé contre la Russie, était indispensable aux intérêts de cet empire. Pour arriver à un véritable état de paix avec la France, il fallait nécessairement qu'il y eût entre elle et la Russie un pays neutre, qui ne fût occupé par les troupes d'aucune des deux puissances. La première base de toute négociation ne pouvait être que l'engagement formel de l'entière évacuation des états, et de toutes les places fortes de la Prusse, une diminution de la garnison de Dantzig, l'évacuation de la Poméranie suédoise, et un arrangement avec le roi de Suède propre à le satisfaire ainsi que la France. A ces conditions, l'empereur de Russie, sans déroger aux principes adoptés par lui pour le

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