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Majesté me reconnait dans la foule. --Gaîté de l'empereur. - L'empereur se montrant plus souvent en public. — Leurs Majestés à l'Opéra, et le ballet de Nina.

Vive satisfaction causée à l'empereur par les acclamations populaires. - L'empereur et l'impératrice aux Italiens; représentation extraordinaire et madame Grassini. — Visite de l'empereur à l'établissement de Saint-Denis. Les pages, et

gaité de l'empereur. - Réflexion sérieuse.

Je me suis un peu éloigné dans le chapitre précédent de mes souvenirs de Paris, depuis notre retour d'Allemagne, après la bataille de Leipzig et le court séjour de l'empereur à Mayence. Je ne puis aujourd'hui encore tracer le nom de cette dernière ville, sans me rappeler le spectacle de tumulte et de confusion qu'elle offrait après la glorieuse trouée de Hanau, où furent si vigoureusement battus les Bavarois, la première fois que dans une affaire sérieuse, ils se présentèrent comme ennemis à ceux dans les rangs desquels ils avaient précédemment combattu. Ce fut, si je ne me trompe, à cette dernière affaire que le général Bavarois de Wrede et sa famille même furent immédiatement victimes de leur trahison. Le général, que l'empereur avait

comblé de bontés, fut blessé mortellement; tous les parens qu'il avait dans l'armée bavaroise furent tués, et son gendre le prince d'Oettingen éprouva le même sort. C'était un de ces événemens qui ne manquaientguère de frapper l'esprit de Sa Majesté, parce qu'ils rentraient dans ses idées de fatalité.Ce fut également de Mayence que l'empereur rendit le décret de convocation du Corps-Législatif pour le 2 décembre; mais, comme on le verra, l'ouverture en fut retardée, et plut à Dieu que la réunion en eût été indéfiniment ajournée; car alors Sa Majesté n'aurait pas éprouvé les tribulations que lui causèrent plus tard les symptômes d'opposition qui se manifestèrent pour la première fois, et d'une manière au moins intempestive.

Une des choses qui m'étonnaient le plus, et qui m'étonne encore bien plus aujourd'hui quand j'y pense, c'est l'inconcevable activité de l'empereur; bien loin de diminuer, elle semblait prendre chaque jour une nouvelle extension, comme si l'exercice même de ses forces les avait doublées. A l'époque dont je parle, je ne saurais donner une idée de la manière dont le temps de Sa Majesté était rempli, Depuis, d'ailleurs, qu'il avait revu l'impératrice et son fils, l'empereur avait repris sa sérénité: alors je ne surpris même que très-rarement en lui de ces signes extérieurs d'abattement qu'il n'avait pas

toujours dissimulés dans son intérieur, après notre retour de Moscou. Il s'occupa plus ostensiblement encore que de coutume des nombreux travaux qu'il faisait exécuter dans Paris. C'était une utile distraction à ses grandes pensées de guerre et aux nouvelles affligeantes qui lui arrivaient de l'armée. Presque chaque jour des troupes équipées comme par enchantement étaient passées en revue par Sa Majesté, et dirigées immédiatement sur le Rhin, dont la ligne était presque entièrement menacée; le danger, auquel nous ne songions guère, dut paraître alors imminent aux habitans de la capitale, qui n'étaient pas tous entraînés comme nous par l'espèce de charme que l'empereur répandait sur tous ceux qui avaient l'honneur d'approcher son auguste personne. En effet, on vit alors pour la première fois demander au sénat un contingent d'hommes par anticipation sur l'année suivante, et d'ailleurs chaque jour apportait des nouvelles fâcheuses. Nous vimes ainsi revenir dans le courant de l'automne le prince archi-trésorier, forcé de quitter la Hollande après l'évacuation de ce royaume par nos troupes, tandis que M. le maréchal Gouvion Saint-Cyr était contraint de signer à Dresde une capitulation pour lui et les trente mille hommes qu'il avait conservés dans cette place.

La capitulation de M. le maréchal Saint-Cyr ne

tiendra sûrement jamais une place honorable dans l'histoire du cabinet de Vienne. Il ne m'appartient pas de juger ces combinaisons de la politique; mais je ne puis oublier l'indignation que tout le monde manifesta au palais, quand on apprit que cette capitulation avait été outrageusement violée par ceux qui étaient devenus les plus forts. Il était dit dans la capitulation que le maréchal reviendrait en France avec les troupes sous ses ordres; qu'il amènerait avec lui une partie de son artillerie; que ces troupes pourraient être échangées contre un pareil nombre de troupes des puissances alliées ; que les malades français restés à Dresde seraient dirigés sur la France à mesure de leur guérison, et qu'enfin le maréchal se mettrait en mouvement le 16 de novembre. Rien de tout cela n'eut lieu. Qu'on juge donc de l'indignation que dut éprouver l'empereur, déjà si profondément affligé de la capitulation de Dresde, quand il apprit qu'au mépris des conventions stipulées, ses troupes étaient faites prisonnières par le prince de Schwartzenberg. Je me rappelle qu'un jour M. le prince de Neufchâtel étant dans le cabinet de Sa Majesté, où je me trouvais en ce moment, l'empereur lui dit avec un peu d'emportement : « Vous me parlez de la paix!.. Eh f.....! comment voulez-vous que je croie à la bonne foi de ces gens-là ?... Voyez ce qui arrive à

Dresde!... Non! vous dis-je, ils ne veulent pas traiter; ils ne veulent que gagner du temps.C'est à nous de n'en pas perdre. » Le prince ne répondit rien, ou du moins je n'entendis pas sa réponse, car je sortis alors du cabinet où j'avais fini d'exécuter l'ordre qui m'y avait appelé. Au surplus, je puis ajouter comme nouvelle preuve de la confiance dont Sa Majesté daignait m'honorer, que jamais quand j'entrais elle ne s'interrompait de ce qu'elle disait, quelle qu'en fùt l'importance, et j'ose affirmer que si ma mémoire était meilleure, ces souvenirs seraient beaucoup plus riches qu'ils ne le

sont.

Puisque j'ai parlé des mauvaises nouvelles qui assaillirent l'empereur presque coup sur coup pen. dant les derniers mois de 1813, il en est une que je ne saurais omettre, tant Sa Majesté en fut péniblement affectée : je veux parler de la mort de M. le comte Louis de Narbonne. De toutes les personnes qui n'avaient pas commencé leur carrière sous les yeux de l'empereur, M. de Narbonne était peut-être celle qu'il affectionnait le plus ; et il faut convenir qu'il était impossible de joindre à un mérite réel des manières plus séduisantes. L'empereur le regardait comme le plus propre à amener à bien une négociation; aussi disait-il un jour de lui: « Narbonne est né ambassadeur. » On savait dans

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