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grand-maréchal du Palais. Quoi qu'il en soit de M. Fouché, c'est une chose bien certaine que peu de personnes étaient aussi convaincues de la supériorité de ses talens pour la police que Sa Majesté elle-même; plusieurs fois, quand il s'était passé à Paris quelque chose d'extraordinaire, et notamment quand il eut appris la conspiration de Mallet, l'empereur, revenant le soir sur ce qui l'avait le plus affecté dans le jour, conclut en disant: << Cela ne serait pas arriyé si Fouché eût été mi>> nistre de la police. » Peut-être était-ce une prévention, car certainement l'empereur n'a jamais eu de serviteur plus fidèle et plus dévoué que M.le duc de Rovigo, quoiqu'on ait fort plaisanté dans Paris de sa captivité de quelques heures.

Le prince Eugène étant retourné en Italie au commencement de la campagne, pour y organiser une nouvelle armée, nous ne le vîmes point à Dresde; le roi de Naples, arrivé dans la nuit du 13 au 14 d'août, s'y présenta presque seul, n'ayant plus dans la grande armée que le petit nombre de troupes napolitaines qu'il y avait laissées lors de son départ pour Naples.

J'étais dans la chambre de l'empereur quand le roi de Naples y entra et le vit pour la première fois. Je ne sus à quoi l'attribuer, mais je crus remarquer que l'empereur ne faisait pas à son beau

frère un accueil aussi amical que par le passé. Le prince Murat dit qu'il n'avait pu demeurer plus long-temps tranquille à Naples, sachant que l'armée française, à laquelle il n'avait jamais cessé d'appartenir, se battait, et qu'il ne demandait qu'à combattre dans ses rangs. L'empereur l'emmena avec lui à la parade, et lui donna le commandement de la garde impériale: il eût été difficile de le confier à un chef plus intrépide. Plus tard, il eut le commandement général de la cavalerie.

Pendant toute la durée de l'armistice, occupée plutôt que remplie par les lentes et inutiles conférences du congrès de Prague, il serait impossible de se figurer tous les travaux divers auxquels l'empereur se livrait du matin au soir, et souvent pendant la nuit. On le voyait sans cesse couché sur ses cartes, faisant pour ainsi dire une répétition des batailles qu'il méditait. Cependant, souvent impatienté de la lenteur des négociations, sur l'issue desquelles il ne paraissait plus se faire d'illusion, il me dit, un peu avant la fin de juillet, de voir si l'on avait préparé ce qui lui était nécessaire pour une excursion que nous allions faire jusqu'à Mayence. Il y avait donné rendez-vous à l'impératrice, qui devait y arriver le 25, de sorte que l'empereur combina son départ de manière à y arriver peu de temps après elle. Au sur

plus, je ne rapporte ce voyage pour ainsi dire que comme un fait, car il ne fut signalé par aucune circonstance remarquable, si ce n'est que ce fut pendant notre excursion à Mayence que l'empereur apprit la mort du duc d'Abrantès, qui venait de succomber à Dijon aux violens accès de la maladie terrible dont il était atteint. Quoique l'empereur, sachant déjà qu'il était dans un état déplorable d'aliénation mentale, dût s'attendre à cette perte, elle ne lui fut pas moins sensible, et il donna de sincères regrets à son ancien aide-de-camp.

L'empereur ne resta que peu de jours avec l'impératrice, qu'il avait revue avec une vive satisfaction. Mais les grands intérêts de sa politique le rappelaient à Dresde; il y revint en visitant plusieurs places situées sur la route, et le 4 d'août nous étions de retour dans la capitale de la Saxe. Les voyageurs qui n'avaient vu cette belle ville que dans un temps de paix auraient eu de la peine à la reconnaître; d'immenses travaux l'avaient métamorphosée en ville de guerre; de nombreuses batteries étaient élevées aux environs pour pouvoir dominer la rive opposée de l'Elbe. Tout prit une attitude guerrière; et les occupations de l'empereur devinrent multipliées et pressées au point qu'il resta près de trois jours sans sortir de son cabinet.

Cependant, au milieu des préparatifs de guerre, tout se disposait à célébrer, le 1ổ d'août, la fête de l'empereur, que l'on avait avancée de cinq jours, parce que, ainsi que je crois l'avoir fait observer, l'armistice expirait précisément le jour anniversaire de la Saint-Napoléon; et l'on peut dire qu'avec son caractère belliqueux la reprise des hostilités n'était pas pour l'empereur un bouquet de fête qu'il fût tenté de dédaigner.

Comme à Paris, il y eut à Dresde spectacle gratis la veille de la fête de l'empereur. Les acteurs du Théâtre-Français jouèrent deux comédies le 9 à cinq heures du soir; et cette représentation fut la dernière, la Comédie française ayant immédiatement après reçu l'ordre de retourner à Paris. Le lendemain, le roi de Saxe, accompagné de tous les princes de sa famille, se rendit à neuf heures du matin au palais Marcolini, pour y présenter ses hommages à l'empereur; ensuite il y eut grandlever comme aux Tuileries, une revue dans laquelle l'empereur inspecta une partie de sa garde, plusieurs régimens, et quelques troupes saxonnes qui furent invitées à dîner par les troupes françaises. Ce jour-là, on aurait pu sans trop d'exagération comparer la ville de Dresde à une vaste salle à manger. En effet, pendant que Sa Majesté dînait en grand couvert au palais du roi de Saxe, où toute

la famille de ce prince se trouvait réunie, tout le corps diplomatique était assis à la table de M. le duc de Bassano; M. le baron Bignon, envoyé de France à Varsovie, traitait tous les Polonais de distinction présens à Dresde; M. le comte Daru donnait un grand dîner aux autorités françaises; le général Friant aux généraux français et saxons; et le baron de Serra, ministre de France à Dresde, aux chefs des colléges saxons. Enfin cette journée de dîners fut couronnée par un souper de près de deux cents couverts, que le général Henri Durosnel, gouverneur de Dresde, donna le soir même à la suite d'un bal magnifique dans l'hôtel de M. de Serra.

A notre retour de Mayence à Dresde, j'avais appris que la maison du général Durosnel était le lieu de rendez-vous de la haute société, tant parmi les Saxons que parmi les Français. Pendant l'absence de Sa Majesté, le général, profitant de ses loisirs, donna des fêtes, et entre autres une aux acteurs et aux actrices de la Comédie française. Je me rappelle même à ce sujet une anecdote comique que l'on me raconta alors. Sans manquer aux bienséances ni à la politesse, Baptiste cadet, me dit-on, contribua beaucoup à l'agrément de la soirée. Il s'y présenta sous le nom de milord Bristol, diplomate anglais, se rendant au congrès de Pra

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