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Combat de Weissenfels.

Mort du maréchal Bessières.

Α

peine avais-je traversé la ville que je rencontrai Ilowaïsky avec quatre régiments de Cosaques. Nous primes position entre Loësau et la Rippach.

L'ennemi ne tarda pas à nous y attaquer. Tous nos efforts de résistance auraient été inutiles si le général Lanskoï ne fût arrivé à notre soutien avec toute sa cavalerie et son artillerie à cheval.

L'infanterie française commença à déborder notre gauche; les hussards de la Russie Blanche (Prince d'Orange) la chargèrent et la culbutèrent. Ce succès donna le temps au général Lanskoï de m'envoyer deux pièces de canon sous les ordres du lieutenant Gorsky, que je fis placer sur la chaussée. Un ravin couvrait encore pour le moment les mouvements de l'ennemi de ce côté, de sorte que je n'en fis point encore usage.

Le général Lanskoï, avec son activité ordinaire, était partout. Il vint à moi pour savoir pourquoi je ne faisais pas usage de mes deux pièces, ignorant les difficultés du terrain que j'avais devant moi.

Au même moment, un officier général français parut sur la crête du ravin, suivi d'un seul ordonnance, que je reconnus être un grenadier à cheval:

<< Visez et tirez sur ce général, commandai-je au lieutenant Gorsky1.

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L'officier pointa sa pièce, le coup partit, et nous vimes le général ennemi tomber de cheval. Nous apprimes plus tard que c'était le maréchal Bessières, duc d'Istrie, qui avait été tué. C'était assurément un de ces coups de hasard qui n'arrivent

1. Le même Gorsky, très brave officier, termina mal sa carrière. Il était au nombre des malencontreux conspirateurs pendant la journée du 14 (L.). Il s'agit ici des événements de Saint-Pétersbourg du 14/26 décembre 1823, des troubles qui eurent lieu lors de l'avénement de Nicolas 1er et qui coùtèrent la vie au général Miloradovitch.

pas souvent à la guerre. Il n'est pas surprenant de voir des généraux tués; mais ce qu'il y a d'étonnant, c'est que le boulet lui fut personnellement destiné par mon ordre et le tua raide. Cet exemple est sinon unique, au moins très rare.

Après le coup funeste qui avait tué le maréchal Bessières, l'hésitation se mit dans les mouvements de l'ennemi et la journée se passa sans résultats.

Le général Winzingerode et le général en chef comte de Wittgenstein arrivèrent lorsque le combat était déjà terminé. Ils reconnurent la position de l'ennemi et s'en retournèrent bientôt après avoir ordonné au général Lanskoï de se concentrer entre Lützen et la Rippach et d'attendre les événements.

Loësau. J'eus le commandement des avant-postes et je m'établis à Loësau. Une forte pluie nous incommoda beaucoup, et le matin, à six heures, un régiment badois, profitant de la pluie et d'un fort brouillard, m'attaqua. Mais il fut repoussé et culbuté jusque sous ses batteries avec une perte de 40 prisonniers. J'eus à regretter un excellent officier qui fut blessé mortellement d'un coup de sabre.

Le général Lanskoï accourut au moment même et, ayant vu la brillante charge que je venais d'exécuter avec le brave régiment d'Ilowaïsky XII, me témoigna toute sa satisfaction.

Le reste de la journée se passa à s'observer réciproquement et, la nuit, j'eus ordre de me replier jusqu'à Roken et Groeben. Toute la cavalerie du général Lanskoï, du prince Troubetzkoï et du comte de Witt et plusieurs batteries à cheval s'y trouvèrent réunies, et nous nous proposàmes d'opposer une forte résistance aux attaques de l'ennemi.

En effet, le lendemain à onze heures, je découvris de fortes colonnes d'infanterie et de cavalerie se mouvoir le long et des deux côtés de la chaussée et se diriger contre

nous. Il n'y eut plus de doute que c'était Napoléon lui-même qui venait avec son armée pour nous déloger.

Je fus envoyé à la rencontre de l'ennemi avec deux régiments (Ilowaïsky XII et Popoff XIII).

L'affaire s'engagea aussitôt. J'employai le régiment Ilowaisky tout entier en flanqueurs, et le fis soutenir par Popoff XIII. Nous escarmouchâmes assez longtemps. Mais l'ennemi ayant fait avancer les chasseurs rouges de la garde et les lanciers polonais pour me prendre en flanc, je fus focé de rallier mon monde et de me replier sur la position du général Lanskoï, qui m'ordonna d'occuper son extrême droite. Une forte canonnade commença alors de part et d'autre et l'engagement fut très chaud. Plusieurs charges de cavalerie s'exécutèrent.

Le comte Wittgenstein, ayant l'intime conviction que Napoléon méditait une bataille générale, donna l'ordre au général Lanskoï et au prince Troubetzkoï, de mème qu'au comte de Witt, d'effectuer leur retraite sur Lützen et de se placer derrière cette ville.

Un combat avait eu lieu le même jour à Merseburg, et le passage de la Saale fut ainsi pris sur tous les points par l'ennemi.

Toute l'armée alliée se concentra derrière le Flossgraben, et on attendit avec calme et assurance le lendemain.

Le général Ilowaïsky fut chargé du commandement des avant-postes. J'eus le commandement de l'aile droite de sa chaine.

Jusqu'à présent l'ennemi n'avait encore eu aucun avantage partiel sur nous. Dans toutes les rencontres, nous avions toujours eu le dessus. La terreur que les Cosaques avaient inspirée aux Français pendant les campagnes de Russie

1. Le vice-roi était entré à Merseburg le 29 avril.

agissait encore sur l'esprit de l'ennemi. Nous n'avions qu'à paraitre pour lui en imposer.

Napoléon arriva et le prestige disparut. Il sut encore enchaîner la victoire, et la bataille de Lützen ternit les lauriers que nous avions cueillis avec tant de peine.

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Bataille de Lützen. La nuit était superbe la matinée fut encore plus belle. J'avais été sur pied toute la nuit pour veiller à ma besogne, car nous étions bec à bec avec l'ennemi. Je vis successivement arriver à nos avant-postes les généraux Wittgenstein, Blücher, Scharnhorst, Ziethen, Kleist, Winzingerode et d'autres, et plus tard même l'empereur de Russie et le roi de Prusse.

Le comte Wittgenstein, qui commandait en chef l'armée combinée, résolut de prendre l'offensive et d'attaquer Napoléon qui marchait sur Leipzig et qui avait déjà détaché Lauriston et le vice-roi sur cette ville.

La résolution fut aussitôt exécutée que prise. Nos colonnes se mirent en mouvement et tombèrent sur les colonnes de marche de Napoléon.

Lui, avec son œil de génie, saisit d'un trait tout le plan de Wittgenstein. Il expédia sur-le-champ des ordres aux corps qui étaient déjà en mouvement de rebrousser chemin. et leur assigna les positions à prendre.

Ney eut ordre d'occuper Wittgenstein en attendant et de s'emparer de Gross et Klein-Görschen et de Starsiedel et de se défendre à outrance.

Les Prussiens commencèrent l'attaque et la soutinrent avec courage et même avec impétuosité. Ney fit une résistance opiniâtre et énergique. Les villages furent plusieurs fois pris et repris. Le carnage fut affreux et les pertes énormes des deux côtés.

Napoléon, voyant le succès de ce combat devenir douteux,

fit avancer une partie de sa jeune garde pour soutenir Ney et rétablir le combat, qui commençait à tourner au désavantage des Français. La canonnade s'établit sur toute la ligne. et le feu ne discontinua pas un instant. Mille bouches à feu semèrent la mort partout.

J'avais eu l'ordre de me transporter sur l'extrême gauche des Français et d'observer tout ce qui se passait de ce côté. J'eus pendant quelques heures le beau spectacle d'une bataille, sans être exposé au moindre danger. Je voyais les efforts que les Prussiens firent pour s'emparer des villages de Görschen, l'ardeur de leurs chasseurs volontaires (Freiwillige Jäger), tous, des jeunes gens de bonne famille et qui, dans cette journée, firent des merveilles par leur bravoure et leur constance, mais allèrent presque tous se faire écraser contre les phalanges françaises, composées, il est vrai, de conscrits, mais conduites par des généraux tels que Ney et autres.

Je profitai d'un moment où l'ennemi se repliait en confusion et à la débandade pour le charger, et je fis quelques centaines de prisonniers. J'avais passé le Flossgraben et j'envoyai des éclaireurs sur le chemin de Lützen et de MarkRannstedt. Ils ne furent pas longtemps sans apercevoir une colonne ennemie qui s'avançait d'un pas rapide. Je courus aussitôt moi-même à sa rencontre, et je m'aperçus que c'était tout un corps d'armée avec une formidable artillerie. J'en fis mon rapport de suite au comte de Wittgenstein. Il était alors trois heures après midi.

Je continuai de côtoyer cette colonne durant toute sa marche et ne la perdis pas de vue un seul instant. Je fis un second rapport au comte de Wittgenstein, écrit au crayon et à cheval, dans lequel je lui annonçai que c'était le corps du viceroi d'Italie qui arrivait au pas de course. Arrivé à l'extrémité de notre flanc droit, le vice-roi établit une batterie de

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