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rapport à la langue, je pris le parti d'écrire à S. M. le roi de Prusse et de lui demander la faveur de garder cet officier auprès de moi. Sa Majesté eut la gracieuse bonté, en me répondant, de m'accorder ma demande.

Voici la lettre du roi :

<<< MONSIEUR LE COLONEL,

«Je vous laisse très volontiers le lieutenant de Klitzing pour le service de la guerre. J'ai fait connaître cette décision au général-lieutenant von Hirschfeld avec ordre de la communiquer au 6° régiment de cavalerie de landwehr de la Marche Electorale.

« FRÉDÉRIC-GUILLAUME.

<< Francfort-sur-le-Mein, 20 décembre 1813. »

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Eisleben. J'arrivai fort tard à Eisleben et j'y fis séjour, attendant des ordres du général en chef. Le lendemain, je fis une partie de chasse chez un Oberamtmann, grand-bailli des environs, et le soir quelques visites aux jolies femmes de la ville, et je me régalai de l'excellente musique qu'exécutèrent les mi

Incident avec le bourguemestre.

neurs.

Comme le bourgmestre m'avait logé à l'auberge, qu'on m'y servit de fort mauvais vin et qu'on me dit ne pas en avoir de meilleur, je fis venir ce bourguemestre en lui ordonnant de m'en faire donner d'autre. Il me répondit d'un ton très insolent qu'il n'y en avait pas de meilleur en ville. Alors je me fâchai et je le menaçai de ne pas lui permettre de retourner à la maison s'il ne me faisait pas avoir quelques bouteilles de bon vin. C'était la seule chose qui me restaurait et me faisait plaisir.

Apparemment ma figure, sur laquelle une feinte colère était peinte, lui fit peur. Car ses genoux se mirent à trembler, et j'eus réellement peur que la frayeur ne lui fit avoir une attaque d'apoplexie. Mais enfin il se remit et, un quart d'heure après, j'eus le meilleur vin que j'ai peut-être bu de ma vie. Je l'engageai à vider une couple de verres avec moi, et nous nous séparâmes les meilleurs amis du monde. C'est un triste et rude métier d'être à la tête d'une administration en temps de guerre. Il faut avoir une tête bien organisée pour cela car on est diablement turlupiné. Je les ai ménagés tant que j'ai pu; mais j'ai toujours puni la mauvaise volonté.

Marche sur Heiligenstadt. Nordhausen et le commissaire suédois. J'eus le lendemain un courrier du général Winzingerode (le lieutenant Schilling) avec l'ordre de marche sur Heiligenstadt et de m'y mettre à la disposition du maréchal Stedingk.

Je partis de grand matin et je me dirigeai par Rossla, où j'eus le plaisir de voir le vieux comte de Stolberg, que j'avais déjà visité une fois, et j'arrivai assez tard à Nordhausen. J'y restai la nuit. On me reçut avec joie et allégresse. On n'avait pas encore oublié mon apparition du printemps. La ville fut illuminée, et un bal de nuit fut improvisé par les habitants les plus marquants.

Un commissaire suédois y était et avait frappé la ville d'une contribution très forte en effets d'habillements, en vivres et en outre de 10.000 louis d'or. Les habitants exaspérés vinrent solliciter auprès de moi et me prièrent de les exempter de payer cette somme, en m'assurant qu'ils fourniraient volontiers les autres objets requis.

Je fis venir le commissaire suédois et le sommai de me communiquer ses ordres.

Il me pria de passer avec lui dans la pièce voisine pour me donner des explications suffisantes, et, lorsque nous fûmes seuls, il m'avoua qu'il n'avait pas d'ordre par écrit de frapper une contribution en argent, mais que le maréchal Stedingk l'avait chargé verbalement de demander 10.000 louis d'or et qu'il avait mis un escadron de hussards à sa disposition pour mieux appuyer sa demande.

Sur le refus que je lui fis de permettre cet acte arbitraire, il me proposa de partager cette somme et de prendre 5.000 louis d'or pour moi. Mais je lui manifestai si fermement ma manière de penser sur des matières de ce genre qu'il perdit l'envie de réitérer sa proposition. Et, en sortant de mon cabinet, j'annonçai, à la grande joie de la municipalité, qu'elle n'était pas tenue de payer les 10.000 louis d'or, et j'engageai M. le commissaire suèdois à quitter la ville de suite.

Il était furieux; mais, comme j'étais le plus fort, il n'y avait pas à dire : Non; et il partit.

La ville, reconnaissante de mon procédé, m'envoya une députation pour me remercier et me fit hommage d'un superbe fusil fait à Nordhausen même. Je ne pus refuser de l'accepter, et je crois que je pouvais le faire en toute conscience et en tout honneur.

Il est agréable, que la guerre, avec ses calamités, donne à l'homme de bien souvent l'occasion d'en faire sans que cela lui coûte davantage que de suivre les principes de l'honneur et de faire son devoir.

Je partis le lendemain de Nordhausen, et j'eus de la peine à traverser les rues, tant l'affluence était grande pour me remercier et me souhaiter prospérité et gloire.

Il n'y a rien de si adroit en ce monde que de faire ce qui est bien. La récompense vous suit sur-le-champ, car votre conscience, qui ne vous quitte jamais, vous en tient compte. 5.000 louis d'or ne sont assurément pas à dédaigner; mais, si

l'on pense combien de larmes auraient été attachées à ce magot, l'envie de les posséder vous quitte bien vite.

J'avais engagé la musique des mineurs d'Eisleben à me suivre, moyennant un louis d'or que je leur payais par jour et en les défrayant, ce qui ne me coûtait rien, de sorte que j'eus pendant la route cette belle musique toujours à ma disposition.

De Nordhausen, je me

Ordre du prince royal de Suède. dirigeai sur Bodenrode, où j'eus un courrier du prince royal de Suède et l'ordre de venir de suite de ma personne à son quartier-général à Heiligenstadt.

Aussitôt arrivé, je me présentai au général Adlerkreuz, chef de l'État-major de l'armée du Nord, qui, avant de m'annoncer au Prince Royal, me remit l'ordre suivant:

ARMÉE COMBINÉE

DU NORD DE L'ALLEMAGNE.

N° 1193.

Bureau

de l'Etal-major général.

<< Comme vous avez été mis avec vos Cosaques sous les ordres de S. Exc. le maréchal comte de Stedingk, Son Altesse Royale vous ordonne de faire avec vos troupes une expédition sur Göttingen, Hildesheim et Brunswick.

« Vous ferez dans chaque endroit des réquisitions pour le compte de l'armée suédoise pour 40.000 rations de viande, de pain et d'eau-de-vie, de 12.000 paires de souliers, de bas et de chemises, et de 20.000 aunes de drap bleu et gris et de la doublure en proportion.

« Vous ferez répandre le bruit que Son Altesse Royale se porte avec l'armée suédoise à Wesel en ne faisant que passer par Göttingen.

«Le prince désire également que vous interrompiez toute

communication entre Hambourg et le pays de Hanovre et que vous vous procuriez des nouvelles sûres des mouvements du maréchal prince d'Eckmühl.

<< Son Altesse Royale a ordonné à son aide de camp, le capitaine aux gardes à cheval baron d'Adlerkreuz et au capitaine Pereyra de suivre vos mouvements pour lui donner des notices qu'ils pourront se procurer d'après les instructions dont ils sont munis, indépendamment des nouvelles que vous donneriez.

<< Par ordre de Son Altesse Royale:

« ADLERKREUZ,

« Chef d'État-Major.

« Au quartier-général d'Heiligenstadt, 30 octobre 1813. >>

Je suis reçu par le prince royal de Suède. Aussitôt que j'en eus pris lecture, le général Adlerkreuz alla m'annoncer au prince royal, qui me fit aussitôt entrer dans son cabinet et me dit:

(( Je suis enchanté de vous voir, mon ami, entendezvous, mon ami. Adieu, mon ami. »

C'est son habitude de terminer chaque phrase avec cet Adieu, mon ami. » Comme j'étais prévenu, je n'en fus point embarrassé, et je ne le pris pas au mot.

((

Il continua: « Vous avez eu l'ordre que je viens de vous faire donner par le général Adlerkreuz, eh bien ! entendezvous, mon ami. Adieu, mon ami, je vous charge d'une mission de confiance. Mon armée a besoin de se vêtir. Faites de votre mieux et distinguez-vous et dépêchez-vous. Mais ce que j'ai oublié de vous dire dans vos instructions, c'est que j'ai besoin d'un millier de chevaux. Vous occuperez de beaux pays. Je les connais d'ancienne date. Ménagez-les

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