Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

il paroît qu'il y a un grand mécontentement dans l'armée. En général, il est difficile de se figurer les maux qu'a soufferts l'armée pendant 17 jours de marche; ne trouvant de pain, ni vin, nous avons vécu de melons, citrouilles, volailles, viande de buffle, et d'eau du Nil.

nulle part

Voilà, mon Général, un récit succinct

de nos opérations.

On parle déjà de remonter l'Egypte, jusqu'aux Cataractes du Nil; cette marche occasionnera beaucoup de démissions.

Présentez, je vous prie, mes hommages respectueux à Madame Kilmaine, et croyez

moi

Votre subordonné,

BOYER.

Rappelez-moi, je vous prie, au souve

[ocr errors]

nir de mes camarades Rivaud, d'Arbois et Villard.

1

N. XXII.

Au Grand Caire, le io Thermidor.

Mes chers Parens,

NOTRE entrée au Grand Caire est une occasion pour moi de vous donner de mes nouvelles, et comme mon intention est de vous mettre entièrement au fait d'une expédition aussi singulière qu'étonnante, je vais récapituler tous nos hauts faits du jour de notre départ de Toulon.

L'armée composée de 30,000 hommes, embarqués partie à Marseille, Toulon, Gênes et Civita Vecchia, a mis à la voile le 30 Floréal, convoyée par 15 vaisseaux de guerre, dont deux armés en flûte, 14 frégates, et plusieurs autres petits bâtimens de guerre. Le convoi en tout formoit un total de 400 voiles; depuis les Croisades l'on n'avoit pas vu pareille armée dans la Méditerranée.

Sans calculer les dangers de l'élément sur lequel nous voguions, ni ceux qu'un ennemi redoutable sur l'eau pouvoit nous faire craindre, l'armée cingle vers l'île de Malte, où nous arrivons le 22 Prairial. Cette

[ocr errors]

[ocr errors]

conquête très importante par elle-même nous coûta peu de monde. Le 24 la place capitula, l'Ordre fut anéanti, le GrandMaître renvoyé en Allemagne avec de belles promesses: tout enfin succède à nos voeux. Il ne falloit pas perdre de temps, ni s'occuper trop à contempler et raisonner l'avantage que nous tirions de l'occupation de Malte, une escadre angloise forte de 13 grosses voiles, commandée par Nelson, mouilloit dans les eaux de Naples, et épioit nos mouvemens. Buonaparte instruit de la présence de l'ennemi, donne à peine à son escadre le temps de faire de l'eau, il ordonne qu'on mette à la voile, et, le 30 Prairial, l'armée et l'escadre sortent du port de Malte. Nous forçons de voile pour atteindre le second but de notre expédition. Le 7 Messidor, nous signalons l'île de Candie, enfin, le 12 notre escadre légère signale Alexandrie.

Le même jour, à midi l'escadre de l'Amiral Nelson arrivoit en face du port de cette ville, et offroit aux Turcs de mouiller dans leur port, pour les défendre contre nous; cette offre refusée, l'Anglois met à la voile, fait route sur Chypre, tandis que nous, profitant de toutes ses fautes et utilisant son

ineptie, nous descendons la nuit du 13 au 14 sur Marabou ou la Tour des Arabes; à la pointe du jour, toute l'armée étoit à terre. Buonaparte se met à la tête, marche droit sur Alexandrie à travers un désert de trois lieues qui n'offroit pas même de l'eau pour ressource dans un climat où la chaleur est insupportable.

---

Malgré toutes ces difficultés, nous arrivons sous les murs; une garnison d'à-peuprès 500 Janissaires, les défendoient. Le reste de la population de la ville se jette dans les forts, d'autres se portent sur leurs toits. Ainsi disposés, ils attendent notre attaque, la charge bat, nos soldats se précipitent avec fureur sur les remparts qu'ils escaladent, malgré la défense opiniâtre des attaqués; plusieurs généraux sont blessés, entre autres Kleber. Nous perdons àpeu-près 150 hommes, mais la valeur met fin à l'opiniâtreté des Turcs. Ceux-ci repoussés de tout côté, se refugient chez leur Dieu et leur Prophète; ils remplissent leurs mosquées; hommes, femmes, vieillards, jeunes, et enfans, tous sont massacrés. Au bout de quatre heures, nos soldats mettent fin à leur fureur la tranquillité renaît en

ville plusieurs forts capitulent; j'en ai moi même fait rendre un où 700 Turcs s'étoient retirés. La confiance reprend enfin dans la ville, et le lendemain tout étoit tranquille.

C'est ici le moment de faire une petite digression pour vous mettre au fait du sujet qui nous amène sur ces terres, et va engager Buonaparte de s'emparer de l'Egypte.

La France, par les divers événemens de cette guerre, et de sa révolution, perdant ses colonies, ses comptoirs, verroit infailliblement décheoir son commerce, et un peuple aussi industrieux seroit enfin obligé de négocier en secondes mains les objets les plus essentiels de son commerce; plusieurs probabilités font envisager comme impossible au gouvernement, sinon de récupérer nos colonies, du moins d'en tirer l'avantage que nous en avions, sur-tout après la destruction et les horreurs qui se sont commises, joint au décret d'abolition.

Pour s'indemniser d'une perte qui paroît presque réelle, le gouvernement a jeté les yeux sur l'Egypte et la Syrie, contrées qui par leur climat, la bonté de leur sol, et leur fertilité, peuvent devenir les greniers

« ZurückWeiter »