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1804.

ensuite à les réunir dans une seule fondée sur la doctrine de l'évangile, et qu'il eût fait déclarer nationale par un sénatus-consulte organique; enfin, à l'exemple d'Auguste, de Henri VIII et de Pierre-le-Grand, à prendre le gouvernement de cette nouvelle église, et à le réunir à celui de l'état. Dès que ce plan fut arrêté, on ne parla de tolérer tous les cultes. Ses confidents, ses apôtres, ses prêtres se mirent à prêcher ouvertement une espèce de fatalisme religieux et moral, aussi favorable à ses vues que contraire aux principes de la religion romaine.

plus que

de

Ce fut alors qu'il donna de nouvelles instructions à son ministre des cultes, et que celui-ci fut chargé spécialement de lui rendre un compte exact faice que soient, de ce que disoient, de ce que pensoient les évêques, les curés et les vicaires des campagnes les plus éloignées; et, par leur ministère, de ce que disoient et de ce que pensoient de son gouvernement les dévots et les dévotes, les royalistes et les républicains qui fréquentoient les temples catholiques.

Ce fut alors que la plupart des ecclésiastiques, placés entre l'indigence et l'infamie, n'eurent pas le courage de se réfugier dans l'indigence, se firent les apôtres du despotisme et les espions d'un gouver nement qui les avilissoit,

Ce fut alors que la religion, dont il se vantoit d'avoir relevé les autels, ne fut plus pour lui qu'un moyen d'inquisition, un gage d'obéissance aveugle pour le clergé, et un objet d'indifférence pour la

nation.

Les catéchismes et les livres élémentaires, rédigés dans cet esprit, mélèrent le profane au sacré, assimilèrent le prince à Dieu, érigèrent le pouvoir absolu en dogme, et l'obéissance aveugle en devoir.

C'étoit autant de blasphèmes et d'impiétés; car la religion chrétienne, ses dogmes sacrés, sa discipline la plus pure, ses traditions les plus respectables, réprouvent et condamnent ces doctrines monstrueuses. Le plus beau triomphe de la religion chrétienne est d'avoir affranchi les hommes du joug du fatalisme et de la

nécessité.

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rieur.

Tandis que par le ministre des cultes, Ministère l'empereur s'efforçoit de rattacher les con- de l'intésciences à son gouvernement, il employoit avec plus de suc s le ministre de l'intérieur à concentrer à Paris toutes les branches de l'administration. Que le chef de ce ministère eût exercé une surveillance attentive sur la comptabilité des départements et des communes, sur les prisons et les hôpitaux, sur la confection et l'entretien des routes, des ports marchands, des ponts et des canaux, sur les

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manufactures, l'agriculture, les arts et l'instruction publique, sur les théâtres et les sociétés savantes, etc...... il n'en pouvoit résulter que du bien; il eût été dans ces cas-là l'œil d'une providence bienfaisante qui voit tout, qui préside à tout, et qui ne se montre nulle

part.

Mais attirer dans ses bureaux toutes les comptabilités, faire administrer par ses commis les biens communaux et le patrimoine des pauvres, gêner, entraver, décourager le commerce, l'agriculture et l'industrie, sous prétexte d'en connoître les produits et d'en régler les intérêts; réduire les maires, les sous-préfets et les préfets à n'être que les commis de ses commis, etc...... c'étoit vouloir tout encombrer et ne rien finir,

A l'exemple du maître, le ministre exerçoit un pouvoir absolu; à l'exemple du ministre, les préfets étoient de véritables tyrans. Rien ne se faisoit dans les départements sans leur permission: ils gouvernoient arbitrairement les autorités communales par leurs instructions; ils intimidoient les autorités judiciaires par leur police; ils corrompoient l'esprit public par leurs journaux. On ne pouvoit ni replacer un pavé dans une grande route, ni allumer une lanterne dans une petite ville, sans l'agrément de M. le préfet.

Dans les gouvernements bien réglés,

l'administration est à découvert. Dans celui de Buonaparte, l'administration, comme tout le reste, étoit sombre et mystérieuse. Le même mystère enveloppoit la pensée du maître et les opérations de ses

ministres.

Les bureaux de l'intérieur se composoient de demi-philosophes, de deinihommes de lettres, de demi-patriotes, d'hommes enfin qui n'avoient rien d'entier que la morgue de l'orgueil et l'obstination de la sottise, compagnes ordinaires de ces demi-lumières aujourd'hui si répandues.

Au milieu des monopoles, des vexations et d'une oppression froidement calculée par tous les agents du pouvoir, le ministre de l'intérieur publioit annuellement un tableau magnifique de la prospérité de notre agriculture, de l'accroissement de la population, du progrès des sciences et des arts, de l'activité de l'industrie, et de la richesse de notre com

merce.

Ce fut par ce canal que nous apprîmes un jour, à notre grand étonnement, les heureux effets de la conscription militaire. « Sire, disoit le ministre, plus on enlève d'hommes à la France pour le triomphe de vos armes, et plus la population aug

mente! »

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On a dit de Louis XIV qu'il avoit été son Ministère premier ministre, et que Colbert, Lou

de la

guerre.

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vois, Le Tellier et tous les autres, malgré leur mérite, n'avoient été que ses secrétaires. On pourroit en dire autant de Buonaparte, quant au ministère de la guerre.

Non seulement il fit la guerre en conquérant, mais il voulut la conduire en administrateur. Son ministre ne fut que son premier commissaire-général. La veille du jour où il déclara pour la seconde fois la guerre à l'Autriche, il dit à M. Lacuée (1): « J'ai besoin de 158 millions et de deux cent mille conscrits; voici mes plans. » M. Lacuée prit les plans, demanda les conscrits aux préfets et les millions au trésor public; et Buonaparte régla l'emploi des uns et des autres.

On conçoit ce qu'une telle méthode pouvoit aplanir de difficultés, mais on auroit peine à concevoir quels abus, quels désordres, quelles injustices elle devoit entraîner dans son application. Il ne seroit pas plus facile de donner une idée de l'insolence de la plupart des commis de ce ministère, de la négligence qu'ils apportoient à remplir leurs devoirs, de l'arbitraire qu'ils portoient dans toutes leurs décisions, de la dureté avec laquelle ils traitoient les officiers de la ligne. Les grades au-dessous de celui de colonel étoient à peine aperçus dans leurs bu

reaux.

(1) Ministre de la guerre.

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