Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

vaux indignes de leur noble enthousiasme. Courage, jeunesse studieuse! notre auguste chef vous contemple, il encourage vos efforts, et sa munificence n'attend que l'occasion de récompenser vos talens. Pour toi, Thelesinus, si tu comptes sur un autre appui, et que cet espoir encourage ta fécondité 10, va, cours jeter au feu tes écrits, sacrifie-les à l'époux de Vénus, ou laisse-les devenir dans ton coffre la pâture des vers. Et toi, brise ta plume, efface ces combats, triste fruit de tes veilles, toi qui, dans un misérable réduit, composes des vers sublimes pour n'obtenir un jour qu'un lierre stérile ou de maigres statues 11. N'attends rien de plus : le riche avare, tel qu'un enfant à l'aspect de l'oiseau de Junon, ne sait qu'admirer nos vers. Cependant les années s'écoulent; nous devenons inhabiles aux travaux de Neptune, de Mars et de Cérès dès lors le dégoût s'empare de notre âme, et le talent, vieilli dans l'indigence, maudit et les muses et lui-même.

:

APPRENEZ comment le protecteur, pour lequel vous désertez le temple d'Apollon et des neuf sœurs, se dispensera d'être généreux. Il fait aussi des vers 12, et, s'il le cède à Homère, c'est par déférence pour ses mille ans d'antiquité. Séduit par l'amour des applaudissemens, voulez-vous réciter vos œuvres? Maculonus vous prêtera sa maison 13 : vous pourrez disposer en maître de cet édifice, où les portes, armées de fer, ressemblent aux barrières d'une citadelle 14. Il ira même jusqu'à disposer ses affranchis au fond de la salle, et préparer en votre faveur les voix so nores de ses clieus. Mais aucun de vos riches patrons ne

Et quæ conducto pendent anabathra tigillo,

Quæque reportandis posita est orchestra cathedris.
Nos tamen hoc agimus, tenuique in pulvere sulcos
Ducimus, et litus sterili versamus aratro.

Nam si discedas, laqueo tenet ambitiosi
Consuetudo mali; tenet insanabile multos

Scribendi cacoethes, et ægro in corde senescit.

SED vatem egregium, cui non

Sit

publica vena,

Qui nil expositum soleat deducere, nec qui
Communi feriat carmen triviale moneta;

Hunc qualem nequeo monstrare, et sentio tantum,
Anxietate carens animus facit, omnis acerbi
Impatiens, cupidus silvarum, aptusque bibendis
Fontibus Aonidum. Neque enim cantare sub antro
Pierio, thyrsumve potest contingere sana
Paupertas; atque æris inops, quo nocte dieque
Corpus eget. Satur est, quum dicit Horatius, EUOE!
Quis locus ingenio, nisi quum se carmine solo
Vexant, et dominis Cirrhæ Nysæque feruntur
Pectora nostra duas non admittentia curas?
Magnæ mentis opus ; nec de lodice paranda
Attonitæ, currus, et equos, faciesque deorum
Aspicere, et qualis Rutulum confundat Erinnys.
Nam si Virgilio puer, et tolerabile deesset
Hospitium, caderent omnes a crinibus hydri;

paiera les frais des bancs, des gradins et des siéges de l'orchestre 15, qu'il faut remporter aussitôt après la séance. Nous n'en écrivons pas moins 16, traçant sur le sable d'inutiles sillons, et labourant un rivage stérile. Vouonsnous briser nos fers, une funeste habitude, une ambitieuse manie nous retient et nous arrête la rage d'écrire, qui possède aujourd'hui tant de gens, cette rage incurable vieillit avec nous dans notre cœur malade *7.

QUE faut-il pour former le grand poète, le poète qui marche hors des routes frayées, et dont le vers soit marqué au coin d'une heureuse originalité, le poète tel que je ne saurais le peindre, mais tel que je le sens? C'est un esprit exempt de soucis et de contradiction, amant de la retraite, et qui puisse à loisir boire aux sources d'Aonie. La froide pauvreté 18, que les besoins renaissans assiégent jour et nuit, ne peut, dans un heureux délire, saisir le thyrse, ni faire retentir de ses chants les grottes du Parnasse. Horace a bien dîné, lorsqu'il s'écrie: EuoÉ19! Comment le génie se développerait-il, si la poésie n'est notre unique tourment, si Bacchus et le dieu de Cirrha 20 ne transportent seuls notre âme qui ne sait point se partager? Celle du poète a besoin de toute son énergie, et doit être affranchie des soins vulgaires pour se représenter les chars, les coursiers, l'auguste front des dieux et la furie qui agite le cœur du Rutule 21. Otez à Virgile son esclave et son modeste asile, Erinnys n'aura plus de serpens; on n'entendra plus les sons lugubres de la trompette infernale 22. Rubrenus peut-il s'élever à la hauteur du cothurne antique, lui qui est réduit à hypothé

Surda nihil gemeret grave buccina. Poscimus, ut si
Non minor antiquo Rubrenus Lappa cothurno,
Cujus et alveolos et lænam pignerat Atreus.
Non habet infelix Numitor quod mittat amico;
Quintillæ qnod donet, habet: nec defuit illi,
Unde emeret multa pascendum carne leonem
Jam domitum constat leviori bellua sumptu.
Nimirum, et capiunt plus intestina poetæ.

CONTENTUS fama jaceat Lucanus in hortis
Marmoreis; at Serrano tenuique Saleio

Gloria quantabilet quid erit, si gloria tantum est ?`
Curritur ad vocem jucundam, et carmen amica
Thebaidos, lætam fecit quum Statius urbem,
Promisitque diem, tanta dulcedine captos
Afficit ille animos, tantaque libidine vulgi
Auditur! sed quum fregit subsellia versu,
Esurit, intactam Paridi nisi vendat Agaven.
Ille et militiæ multis largitur honorem,
Semestri vatum digitos circumligat auro.

Quod non dant proceres, dabit histrio. Tu Camerinos
Et Bareas, tu nobilium
tu nobilium magna atria curas!
Præfectos Pelopea facit, Philomela tribunos.
Haud tamen invideas vati, quem pulpita pascunt..
Quis tibi Mæcenas? quis nunc erit aut Proculeius,
Aut Fabius? quis Cotta iterum, quis Lentulus alter?

quer sur le succès futur de son Atrée le paiement d'un manteau et d'un meuble grossier 23? Numitor est trop pauvre pour aider un ami malheureux : il est assez riche pour payer les faveurs de Quintilla, pour acheter ce lion dompté qu'il nourrit à grands frais. L'estomac d'un poète est sans doute plus difficile à satisfaire que les entrailles

d'une bête féroce.

QUE Lucain, satisfait de sa renommée, dorme à l'ombre de ses jardins; mais qu'importe à Serranus, au pauvre Saleius, la gloire, quelle qu'elle soit, s'ils n'ont rien que la gloire? Stace a-t-il promis de réciter sa Thébaïde tant désirée 24, la joie se répand dans la ville: au jour prescrit chacun accourt avec transport; tant il sait toucher le cœur! tant sa voix et son genie sont en faveur auprès du public! Mais après avoir essuye de bruyantes acclamations 25, la faim le surprend s'il ne vend à Pâris les prémices de son Agavé 26. Un histrion dispense Tes honneurs militaires; il accorde aux poètes l'anneau de chevalier 27. Ce que les grands ne sauraient donner, un histrion le donne 28. Tu fais ta cour aux Camerinus, aux Bareas, tu fréquentes les salons des grands! Oublies-tu que la tragédie de Pélops valut un gouvernement, et celle de Philomèle, le tribunat? Gardons-nous cependant d'insulter au poète que nourrit son talent? Où sont les Mécène, les Proculeius, les Fabius? où trouver un Cotta, un autre Lentulus? Alors les dons égalaient le génie;

« ZurückWeiter »