Abbildungen der Seite
PDF
EPUB
[merged small][merged small][merged small][merged small][graphic][subsumed][subsumed][merged small]

MARCHANT, LIBRAIRE-ÉDITEUR,

BOULEVART SAINT-MARTIN, No 12.

-

1835.

[merged small][merged small][ocr errors][ocr errors][merged small]
[blocks in formation]

EPRÉSENTÉE POUR LA PREMIÈRE FOIS, SUR LE THÉATRE DE LA PORTE-SAINT-MARTIN,
LE 30 MAI 1829.

[blocks in formation]

ÉLÉNA. Elle est assise et brode une écharpe. Une écharpe de deuil, sans chiffre, sans devise! Hélas! triste présent, mais je l'avais promise, Je devais l'achever... Vaincu par ses remords, Du moins après ma faute, il a quitté nos bords; Il recevra ce prix de l'exil qu'il s'impose.

Elle se lève et s'approche de la fenêtre.

Le beau jour! que la mer où mon oeil se repose,
Que le ciel radieux brillent d'un éclat pur;
Et que Venise est belle entre leur double azur!
Lui seul ne verra plus nos lagunes chéries :

Il n'est qu'une Venise! on n'a pas deux patries!...
Je pleure... oui, Fernando, sur mon crime et le tien.
Pourquoi pleurer? j'ai tort : les pleurs n'effacent rien.
Mon bon, mon noble époux aime à me voir sourire;
Eh bien! soyons heureuse, il le faut... Je veux lire.

Elle s'assied et ouvre un livre.

Le Dante, mon poète! essayons... Je ne puis Nous le lisions tous deux je n'ai pas lu depuis. Elle reprend le livre qu'elle avait ferme Ses beaux vers calmeront le trouble qui m'agite.

[ocr errors][ocr errors][merged small][merged small]

SCÈNE II.

ÉLÉNA, FERNANDO.

FERNANDO.

Demeurez! e doge suit mes pas; c'est lui que vous fairez. Près de vous, Éléna, son neveu doit l'attendre.

ÉLÉNA.

Vous ne me direz rien que je ne puisse entendre, Fernando, je demeure.

FERNANDO."

Eh quoi! vous détournez Vos yeux qu'à me revoir j'ai trop tôt condamnés! Qu'ils me laissent le soin d'abréger leur supplice. Quelques jours, et je pars, et je me fais justice; Faut-il vous le jurer? ÉLÉNA.

Ce serait vainement :

Lorsqu'on doit le trahir, que m'importe un serment?

FERNANDO.

Quel prix d'un an d'absence où j'ai langui loin d'elle !
ÉLÉNA.

Cette absence d'un an devait être éternelle;
Mais j'ai donné l'exemple, et ce n'est plus de moi
Qu'un autre peut apprendre à respecter sa foi.

FERNANDO.

Ne vous accusez pas, quand je suis seul parjure.
ÉLÉNA.

Quelque reproche amer qui rouvre ma blessure,
Pourquoi me l'épargner? Le plus cruel de tous
N'est-il pas votre aspect, et me l'épargnez-vous?
Où fuir? comment me vaincre? où trouver du courage
Pour comprimer mon cœur, étouffer son langage?
Pour me taire en voyant s'asseoir entre nous deux
L'oncle par vous trahi, l'époux... Mais je le veux;
Je veux forcer mes traits à braver sa présence,
A sourire, à tromper, à feindre l'innocence;
Ils mentiront en vain si ma voix, si mon front,
Si mes yeux sont muets, ces marbres parleront.

FERNANDO.

Ah! craignez seulement de vous trahir vous-même! Vos remords sont les miens près d'un vieillard qui [m'aime.

Je me contrains pour lui, que la douleur turait,
Pour vous, que son trépas au tombeau conduirait.
Mais tout à l'heure encor quelle angoisse mortelle
Me causait de ses bras l'étreinte paternelle?
Tout mon sang s'arrêtait, quand sa main a pressé
Ce coeur qui le chérit et l'a tant offense!

Ses pleurs Brûlaient mon front qui rougissait de honte.

ÉLÉNA.

Et le tourment qu'il souffre à plaisir il l'affronte, Il le cherche, et pourquoi ?

FERNANDO.

Pour suspendre un moment, En changeant de douleurs, un plus affreux tourment. Ce n'est pas mon amour,n'en prenez point d'ombrage, Restez, ce n'est pas lui qui dompta mon courage; J'en aurais triomphe! mais c'est ce désespoir Que n'ont pu, dans l'exil, sentir ni concevoir Tous ces heureux bannis de qui l'humeur légère A fait des étrangers sur la rive étrangère.

[blocks in formation]

O bien qu'aucun bien ne peut rendre!
O patrie! ô doux nom que l'exil fait comprendre,
Que murmurait ma voix, qu'étouffaient mes sanglots,
Quand Venise en fuyant disparut sous les flots!
Pardonnez, Eléna; peut-on vivre loin d'elle?
Si l'on a vu les feux dont son golfe étincelle,
Connu ses bords charmans, respiré son air doux,
Le ciel sur d'autres bords n'est plus le ciel pour nous.
Que la froide Allemagne et que ses noirs orages
Tristement sur ma tête abaissaient leurs nuages!
Que son pâle soleil irritait mes ennuis! [bres nuits.
Ses beaux jours sont moins beaux que nos plus som-
Je disais, tourmenté d'une pensée unique:
Soufflez encor pour moi, vents de l'Adriatique!
J'ai cédé, j'ai senti frémir dans mes cheveux
Leur brise qu'à ces mers redemandaient mes vœux
Dieu! quel air fiais et pur inondait ma poitrine!
Je riais, je pleurais; je voyais Palestrine,
Saint-Marc que j'appelais, s'approcher à ma voix,
Et tous mes sens émus s'enivraient à la fois,
Dé la splendeur du jour, des murmures de l'onde,
Des trésors étalés dans ce bazar du monde ;
Des jeux, du bruit du port, des chants du gondolier!...
Ah! des fers dans ces murs qu'on ne peut oublier!
Un cachot, si l'on veut, sous leurs plombs redoutables,
Plutôt qu'un trône ailleurs, un tombeau dans nos sables,
Un tombeau, qui parfois, témoin de vos douleurs,
Soit foulé par vos pieds et baigné de vos pleurs!
ÉLÉNA.

Que les vôtres déjà n'arrosent-ils ma cendre!
Mais... ce ne fut pas moi, je me plais à l'apprendre,
Qui ramenai vos pas vers votre sol natal.
Il n'est plus cet amour qui me fut si fatal.
Quand sa chaîne est coupable un noble cœur la brise;
N'est-ce pas, Fernando?... Je voudrais fuir Venise,
Dont les bords désormais sont votre unique amour,
pour vous y
laisser m'en bannir à mon tour.

Et

[blocks in formation]

Et

Lui dénonçait son crime à son heure suprême;
que de fois alors je pris pour mon arrêt
Les accens étouffés que sa voix murmurait!
Comment peindre le doute où flottaient mes pensées,
Quand ma main, en passant sur ses lèvres glacées,
Interrogeait leur souffle, et que, dans mon effroi
Tout, jusqu'à son repos, était sa mort pour moi?
Je fus coupable, ô Dieu! mais tu m'as bien punie,
La nuit où, dans l'horreur d'une ardente insomnie,
Il se leva, sur moi pencha ses cheveux blancs,
Et påle me bénit de ses bras défaillans;
Il me parla de vous!

[blocks in formation]

Mais ce sang que le fer va tarir, Avant de se répandre où Venise l'envoie, A battu dans mon sein d'espérance et de joie. Il palpite d'amour! à quoi bon retenir Ce tendre et dernier cri que la mort doit punir? Je vous trompais; c'est vous, ce n'est pas la patrie, Vous, qui rendez la force à cette ame flétric; Vous, vous que je cherchais sous ce climat si doux, Sur ce rivage heureux qui ne m'est rien sans vous! C'est votre souvenir qui charme et qui dévore. C'est ce mal dont je meurs, et je voulais encore Parler de ma souffrance aux lieux où vous souffrez, Respirer un seul jour l'air que vous respirez, Parcourir le Lido, m'asseoir à cette place Où les mers de nos pas ont effacé la trace, Voir ces murs pleins de vous, ce balcon d'où mes yeux En vous les renvoyant recevaient vos adieux...

[blocks in formation]
[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][ocr errors]

FALIARO absorbé dans sa rêverie. Tous mes droits envahis! mon pouvoir méprisé! Que n'ai-je pas souffert, que n'ont-ils point ose? Mais après tant d'affronts dévorés sans murmure Cette dernière insulte a comblé la mesure.

Qu'entends-je?

ÁLÁNA.

FERNANDO.

[blocks in formation]

Qui? moi. Tu reviendras. La mort, plus qu'on ne pense, épargne le courage. Regarde-moi! j'ai vu plus d'un jour de carnage; Sous le fanal de Gênes et les murs des Pisans, Plus d'un jour de victoire, et j'ai quatre-vingts ans. Tu reviendras. Ce sceptre envié du vulgaire Moissonne, Fernando, plus de rois que la

Ecartez vos ennuis!

FERNANDO

guerre.

« ZurückWeiter »