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sont nécessaires devant les cours d'équité, comme devant les cours de la loi, pour établir la vérité d'un fait, Il est encore de règle, dans les deux juridictions, que la preuve testimoniale n'est point reçue contre et outre le contenu aux actes, et que l'interprétation des actes ne peut être recherchée que dans leurs propres termes; il n'y a d'exception qu'en cas d'accidents, erreur ou fraude, où les cours d'équité sont dans l'usage d'admettre la preuve orale, à l'effet de modifier, de corriger ou d'annuler le contenu d'un acte écrit.

FELIX.

XV. Traité de la séparation des patrimoines, considérée spécialement à l'égard des immeubles; par M. Blondeau, doyen de la faculté de droit de Paris'.

Compte rendu par M. BERRIAT SAINT-PRIX, docteur en droit, à Paris.

Lorsque nous contractons avec une personne sans exiger qu'elle nous affecte ses biens actuels, comme garantie de son engagement, nous lui laissons implicitement la libre faculté de disposer de ces mêmes biens, en nous réservant pour sûreté unique le droit général de gage attribué par la loi à tout créancier, c'est-à-dire le droit de faire saisir et vendre les biens que le débiteur aura au jour de la poursuite. Si ces biens se trouvent alors insuffisants, soit par suite d'aliénations opérées dans l'intervalle, soit par suite d'affectations

1 Un vol. in-8o, de 280 et xxvm pages. Videcoq. L'ouvrage commence à la page 473, sans doute parce qu'il est destiné à faire suite à d'autres essais déjà publiés par le même auteur.

concédées à d'autres créanciers plus soigneux de leur intérêt, nous ne devons l'imputer qu'à nous-mêmes, qui avons mal à propos suivi la foi de notre débiteur.

Le même reproche ne peut être adressé au créancier dont le débiteur vient à mourir, laissant à sa place un héritier avec lequel le contrat n'a pas été passé. Cette substitution d'un nouveau débiteur à l'ancien, opérée par la volonté de la loi, sans le fait du créancier, autorise d'autant mieux ce dernier à réclamer un surcroît de garanties, que, si le passif de l'héritier excède son actif, la confusion des patrimoines produit une véritable soustraction qui peut rendre la succession elle-même insolvable.

C'est à ce point de départ que se place M. Blondeau en commençant son Traité de la séparation des patrimoines. Négligeant cinq articles de loi dont l'excessive brièveté ne permet pas de bien saisir le principe, l'auteur recherche à priori par quels moyens on pouvait protéger les créanciers d'un débiteur défunt contre l'insolvabilité de son héritier. Il n'y a sans doute qu'un moyen possible, en ce sens qu'il s'agit toujours de conférer aux créanciers du défunt un droit de préférence au préjudice des créanciers de l'héritier; mais deux combinaisons se présentent, selon que l'on voudra conférer ce droit de préférence à la masse des créanciers ou à chaque créancier pris isolément. De là deux espèces de séparation des patrimoines: la séparation collective et la séparation individuelle.

La séparation collective entraîne comme conséquence presque inévitable le dessaisissement de l'héritier; le patrimoine du défunt doit, comme celui d'un failli, être régi au profit commun de la masse, jusqu'à la satisfaction complète, s'il est possible, des créanciers héré

ditaires. En un mot, la séparation collective produit un régime d'administration comptable.

La séparation individuelle ne profite qu'aux créanciers diligents. Il suffit donc qu'on leur ménage un délai pour prendre leurs sûretés. Du reste, peu importe que l'héritier aliène ou hypothèque à ses propres créan

ciers les biens héréditaires. La succession demeure dès lors soumise à un régime de libre disposition.

Le premier système s'oppose à ce que les créanciers du défunt acquièrent des droits de préférence les uns par rapport aux autres. Ils doivent être traités comme si une répartition immédiate avait eu lieu au moment du décès. Les délais qu'entraîne la liquidation n'ont pas pour but de favoriser les plus diligents. Le régime d'administration comptable ou de séparation collective pourrait donc s'appeler aussi un régime d'égalité ou de statu quo.

Au contraire, le second système favorisant les individus soigneux de leurs priviléges, nuit par cela même aux créanciers négligents, et peut très-bien se concilier avec l'inégalité des droits qu'entraînera l'inégalité des diligences. Donc la séparation individuelle, en produisant un régime de libre disposition à l'égard de l'héritier, produit un régime de préférence en ce qui concerne les créanciers héréditaires.

Lequel de ces deux systèmes a été adopté par le Code civil?

En comparant les rares dispositions relatives aux obligations d'un débiteur décédé, on reconnaît que le législateur n'a soumis la succession au régime d'administration comptable, et par conséquent de séparation collective, que dans le cas d'acceptation sous bénéfice d'inventaire. L'héritier qui accepte purement et simple

ment, conserve la libre disposition des biens, sauf aux créanciers à se procurer individuellement un droit de préférence.

Cette dernière proposition peut paraître douteuse en présence de l'expression séparation des patrimoines » dont se sert le Code civil (art. 878, 881, 2111), d'autant mieux que la séparation ne figure pas dans l'énumération des priviléges immobiliers (art. 2103). Mais d'une part cette omission, qui n'en est peut-être pas une après les art. 878 à 880, est suffisamment réparée par l'art. 2111. D'autre part, la garantie des créanciers consiste uniquement, à l'égard des immeubles, dans une hypothèque légale (2113) assujettie à une inscription qui lui confère même le caractère de privilége (2111), si elle est prise dans les six mois de l'ouverture de la succession. Or, nul article ne charge un des créanciers de prendre inscription pour les autres, aucun n'attribue à la diligence d'un seul l'effet de conserver le privilége au profit de la masse entière, comme cela a lieu en matière de faillite (V. C. com., 490). D'ailleurs, l'héritier pur et simple n'est pas astreint à rendre compte des biens de la succession (arg. à contrario de l'art. 803). Il conserve le droit d'en disposer librement, sans toutefois pouvoir préjudicier par ses aliénations au privilége des créanciers inscrits dans les six mois', puisqu'il ne pourrait

1 M. Blondeau (p. 480, note 2) déclare l'aliénation valable à l'égard des créanciers tardifs, mais il entend sans doute réserver même à ces derniers le droit de s'inscrire dans la quinzaine de la transcription (C. pr. 834). Suivant M. Troplong (no 327), le privilége est éteint par la seule aliénation que l'héritier fait des biens de la succession, sans que l'acquéreur ait rien à redouter du droit de séparation. Cet auteur admet cependant (no 383) que le privilege de l'art. 2111 peut dégénérer en hypothèque; mais il en

pas même y porter atteinte en constituant une simple hypothèque (arg. à fortiori de l'art. 2111-2o).

:

Du principe posé que les créanciers qui demandent la séparation des patrimoines ont seulement un droit de préférence individuel, privilége ou hypothèque, et sont tenus de le faire inscrire chacun de son côté, il résulte plusieurs conséquences importantes :

1o Ils n'ont de privilége ou d'hypothèque que sur les immeubles sur lesquels ils ont pris inscription (2111-1o). Dès lors, faute d'inscription, ils ne seraient pas même préférés aux simples créanciers chirographaires du défunt'.

2° Leur hypothèque, privilégiée ou non, est indivisible comme toute autre (2114-3°), et, par suite, l'héritier détenteur de l'immeuble qui en est grevé peut être contraint à payer toute la dette, nonobstant sa division (1221-1°), si mieux il n'aime délaisser ou subir l'expropriation'.

3o Si plusieurs créanciers du défunt se sont inscrits dans les six mois, ils concourent, malgré la différence de dates (2096, 2097), à moins que quelques-uns d'entre eux n'eussent acquis déjà quelque droit de préférence du vivant du défunt (M. Blondeau, p. 491, note 1).

4° Si quelques-uns se sont inscrits dans les six mois,

tend peut-être par là une hypothèque contenant un simple droit de préférence détaché du droit de suite.

1 Cette conséquence est contraire à l'opinion de Merlin, Grenier, Toullier, Chabot.

2 Cette conséquence me paraît résulter du système de M. Blondeau; toutefois, je ne crois pas qu'il l'ait expressément déduite. Il parait même s'en écarter p. 573. Elle est conforme à l'opinion de M. Duranton (t. XIX, n° 224).

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