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Assurément si j'avois été secondé par une autre canonnière, il n'auroit plus été question de leur flottille, quoiqu'ils en avoient sept, et pour lors je n'avois que six bâtimens, dont trois ont été abandonnés, et pris par les ennemis, qui ont eu l'audace de s'en emparer à portée de pistolet de moi.

Pour lors j'ai fait diriger toutes mes forces dessus, fait couler à fond la canonnière de l'amiral, et je les ai forcés à lâcher mes canonnières, que j'ai réintégrées de suite. J'avois encore deux batteries de 12 canons de campagne, dirigées sur moi à très-petite portée. Les troupes étoient très-éloignées, et ne pouvoient me donner aucun secours (2). Le combat a commencé à neuf heures moins un quart, et a fini à une heure et demie que notre armée les a mis en déroute.

Je t'assure que nous avons été trompés beaucoup sur la navigation du Nil. Il ne

(2) Cela n'est pas exact, ce fut l'apparition de l'armée qui le sauva d'une entière destruction.

peut y monter aucun bâtiment tirant plus, de cinq pieds à l'époque d'où j'ai monté ; tant qu'à la fertilité du pays, je crois que l'on a beaucoup à décompter (3). La férocité des habitans est pire que les sauvages; majeure partie habillés en paille. Enfin le pays n'est pas de mon goût. Cependant après la peine, le plaisir; en ce moment je suis assez bien, tant pour les nourritures que pour les plai

(3) Il est curieux de marquer les progrès de la conviction parmi les Français. Alexandrie est généralement reconnue pour être une position détestable. Personne n'exprime le moindre doute à cet égard. « Oui, mais ce sera délicieux d'être à Rosette »!« Non, disent ceux qui y sont stationnés, Rosette est loin d'être un séjour délicieux; c'est seulement un lieu un peu moins misérable qu'Alexandrie ». « Il est >> vrai : mais le Delta! c'est là une riche et belle >>ville; et puis n'avons-nous pas le Caire, la plus » opulente, la plus grande, la plus magnifique cité du monde »? — « Quant au Delta, dit » Perrée, je viens de le traverser, et je puis » vous assurer qu'il n'est rien moins que riche et >>beau»-« Et pour le Caire, s'écrient dix mille

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sirs. Les beys nous ont laissé quelques jolies Arméniennes et Géorgiennes, dont nous nous sommes emparés au profit de la nation. Je te prie; mon bon ami, de m'envoyer une barique de vin: tu obligeras,

Ton ami,

EM. PERRÉ E.

Assure de mon amitié tous mes amis.

>> voix de concert, c'est le plus misérable trou » qu'on puisse voir sur la surface de la terre. » Ainsi les illusions se succèdent et se détruisent, » et les Français, aussi chauds dans leurs espé»rances que crédules, finissent par être livrés >> au mécompte et au désespoir ».

Observation.

Il n'y a rien de si commode que de faire les demandes et les réponses! Nous pourrions si nous voulions, user de cette recette pour enfler les pages; mais nous laissons cette ressource aux ingénieux Scriblers à qui Pitt a demandé un certain nombre de feuilles, pour que la correspondance interceptée arrivât aux dimensions d'un volume.

No. X X.

LE TURCQ, aide-de-camp du Général B., chef de l'état-major-général de l'armée, au citoyen LE TURCQ son père.

Au quartier-général du Grand Caire,

le 10 thermidor.

DEPUIS Votre lettre datée du 23 floréal dernier, je n'ai reçu aucune de vos nouvelles, cher père; vous devez sentir combien cela doit m'inquiéter. Je n'ai rien négligé pour profiter de tous les courriers. que nous avons expédiés pour Paris, de Toulon, de Malte et d'Alexandrie, ainsi que celui-ci que nous expédions du Caire.

Je ne vous peindrai pas la position dans laquelle nous nous trouvons tous dans ce pays: je me bornerai seulement à vous dire que nous avons tous été trompés dans notre attente sur le pays de l'Egypte ; mais heureusement pour moi, j'ai le bonheur de

jouir d'une assez bonne santé, c'est-à-dire jusqu'à ce jour, un des mieux portans de l'armée. Je desire bien ardemment être de retour près de vous, pour vous faire un tableau fidèle du pays, d'après lequel vous jugerez aisément que nous devons beaucoup nous y ennuyer sous bien des rapports.

Je vous joins ici, cher père, une relation (1) de ce qui nous est arrivé dans notre marche d'Alexandrie au Caire, et des différens combats que nous avons eus pendant cette marche, avec les mamelouks et les bédouins. Il vous sera facile de juger de notre position dans ce désert, qui eût été la défaite de l'armée sans le secours du Nil, branche d'un fleuve qui se jette dans le

(1) Nous avons supprimé cette relation. Ce n'est qu'un détail fastidieux et mal écrit des mêmes opérations rapportées avec plus d'intérêt par Boyer (n°. XXII), dont celle de le Turcq ne diffère que dans l'énumération des fatigues et des pertes de l'armée qu'il fait un peu plus grandes que Boyer.

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