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contre la nation, s'il sort du royaume sans l'agrément du corpslégislatif; l'abdication le rejette dans la classe commune des citoyens; il pourra être accusé et jugé comme eux, pour les actes postérieurs à son abdication. - Des juges élus à temps par le peuple, sont investis du pouvoir judiciaire. Le corps législatif délibère et fixe chaque année les contributions publiques.

L'assemblée nationale, qui s'est attribuée de son chef, sans institution antérieure, sans mandats, sans loi quelconque, et même contre l'attente générale, le pouvoir absolu et illimité sous le nom de pouvoir constituant, a, dans le pacte social qu'elle vient de créer, favorablement traité le peuple dont elle s'est aidée, et lui a fait une large part de domination. Elle a bien inscrit le mot de monarchie sur le frontispice de l'édifice, mais elle n'a construit qu'un gouvernement démocratique. N'est-ce pas, en effet, de la démocratie sans mélange, qu'une assemblée unique (V. 10 septembre 1789) dont les éléments sont pris au plus bas étage de la propriété; un véto suspensif; des assemblées départementales et municipales élues par le peuple; des juges temporaires nommés par la masse entière des justiciables, la licence de la presse, des clubs, etc.? Cette assemblée constituante, qui se compose de plus de discoureurs que de propriétaires, ne se borne pas à prévenir l'abus de la puissance législative dans les mains du roi, elle l'en dépossède entièrement. Elle conserve la royauté comme pouvoir exécutif, et ne l'investit pas de ces attributions nécessaires pour faire observer les lois. Elle annonce la liberté et viole les principes de la propriété. Elle a proclamé les droits métaphysiques de l'homme, et confond tous les élémens de la société; elle déchaîne les passions populaires; elle autorise ou tolère les vexations sur les routes, les perquisitions à domicile, les arrestations provisoires, les jugements de proscription, toutes les infractions au droit commun, toutes les violations de l'ordre public; elle érige dans son sein un comité des recherches, et lui laisse prendre toutes les odieuses attributions des lieutenants de police sous l'ancien gouvernement. Par ses décrets des 2 novembre et 19 décembre 1789, des 17 mars et 29 septembre 1790, elle a ouvert le gouffre où seront jetés tous les créanciers de l'État, ce gouffre qui se refermera sur eux à jamais. Ces déclamateurs si dépourvus d'expérience auraient dû prendre pour modèle les Américains, qui ont assis la liberté sur les solides bases de la justice, et qui, pour jouir de la plénitude de ses bienfaits, n'attaquèrent jamais le droit sacré de propriété. Adams, Morris, Washington, avaient fait diviser le corps législatif, et attri

buer au président du congrès plus de dignité ou de pouvoir que n'en ont conservé au prétendu monarque des Français, ces légistes subalternes, Thouret, Target, Chapelier, Péthion, etc., et leurs associés Talleyrand et Sieyes.

Septembre 3. Une députation de l'assemblée nationale présente l'acte constitutionnel à l'acceptation du roi. En même temps, elle lui rend la faculté de donner tous les ordres qu'il jugera convenables pour sa garde et la dignité de sa personne. Les scellés sont levés dans ses appartements, et le jardin ainsi que le château des Tuileries sont rouverts au public.

13. Décret. D'après les desirs du roi, qui accepte la constitution, et sur la motion de la Fayette, l'assemblée décrète par acclamation une amnistie générale pour délits politiques, ainsi que l'abolition des passe-ports.

14. Décret qui réunit à la France Avignon et le comtat Venaissin. 14. Le roi se rend à l'assemblée nationale, y prête serment à la constitution, s'engageant à la maintenir de tout le pouvoir qui lui est délégué.

Son acquiescement fait sans restriction, n'a pas été obtenu sans beaucoup d'intrigues. Ce prince éclairé pénètre les vices, l'incohérence, les dangers du nouveau régime. Puisque l'assemblée persiste dans l'adoration de son ouvrage, Louis XVI pourrait la déclarer seule garante de ses effets, et demander que, pour la responsabilité de ses auteurs, ils rennent eux-mêmes les rênes du ministère; il pourrait avec un pea de cette énergie que déploierait si à propos un descendant d'Henri IV, déclarer, qu'il ne peut accepter des lois qu'il estime dangereuses et inexécutables; qu'il n'abdiquera point, parce que ce serait souscrire à la violence. Il cesserait alors de se trouver dans cette fausse position qu'il ne perdit jamais; il se dégagerait de ce qu'elle offre de plus fâcheux; il ôterait à la malveillance de ses ennemis leurs prétextes les plus spécieux et les jetterait dans de grandes difficultés, en restant ferme pour la première fois. Mais on vient alarmer sa vertueuse sensibilité; on lui fait redouter les premiers effets d'une résolution si contraire au vœu général. Il faut que la destinée s'accomplisse; le plus infortuné des rois se jette avec résignation dans l'obscur avenir.

Cependant l'acceptation de la constitution cause d'universels transports d'allégresse. Trop pen clairvoyants, trop confiants, et séduits par leur impatience, les Français supposent que cette circonstance termine la révolution, assure la liberté, unit par des liens indisso

lubles le souverain et le peuple, et commence une ère de bonheur impérissable.

Septembre 28. Départ de Brest du capitaine d'Entrecasteau.r, commandant les corvettes la Recherche et l'Espérance, envoyées sur les traces du navigateur Lapeyrouse (V. 15 mars 1788 et 19 février 1794 ).

29. Décret sur l'organisation de la garde nationale. Ses dispositions ne reconnaissant plus de commandant général, la Fayette cessera d'être à la tête de la garde de Paris, qui reste de 60 bataillons formant 6 divisions appelées légions. Pour être admis dans la garde nationale, il faut être citoyen actif, ou fils de citoyen actif.

29. Décret qui défend à toute société non instituée politiquement de faire corporation, de paraître légalement sous un nom collectif, et de prendre des décisions sur les affaires politiques. Cette mesure contre les clubs qui, disséminés sur toute la France, rejettent l'autorité du roi, outragent sa personne, excitent les dissensions, organisent le pillage, l'incendie, l'assassinat, n'est qu'un vain hommage aux principes constitutionnels, hommage que les dominateurs actuels de l'assemblée nationale n'osent pas refuser au moment même de sa séparation. Bientôt on verra reparaître ces mêmes législateurs pour achever la destruction, et de cette constitution qu'ils jurèrent tant de fois de conserver, et de toutes les formes existantes de l'organisation politique. C'est ainsi que Péthion, Vadier, Garat, Barrère, Robespierre, obscurs satellites à l'assemblée constituante, obtiendront enfin une affreuse célébrité pendant le règne de la convention. 30. Dernière séance de l'assemblée constituante.

Louis XVI y paraît, et promet de nouveau ( V. 14 septembre) d'employer tout ce que la constitution lui donne de force et de moyens pour assurer aux lois le respect et l'obéissance qui leur

sont dus.

Cette assemblée se trouve divisée depuis assez long-temps, 1o en partisans de l'ancien régime pur et absolu, appelés aristocrates, et constamment menacés par le peuple : ils sont en très-faible nombre; 2o en zélateurs d'une monarchie tempérée, qu'on désigne assez communément sous le nom de monarchistes ou monarchiens, hommes réservés, mais sans popularité et peu nombreux aussi; 3° en patriotes, d'abord imprudents par exaltation ou par systême, qui ont reconnu leurs erreurs, mais qui trop avancés pour s'arrêter, ou trop vains pour revenir sur leur pas, ont continué sans direction fixe en se persuadant que leur masse les fera triompher; 4° et en hommes dépravés

et furieux, tendant à renverser entièrement l'ordre nouveau: ce sont les jacobins, dont l'influence augmentera chaque jour.

L'histoire de cette assemblée apprend à voir l'abyme de la liberté, de l'ordre public et de l'État dans les exagérations de l'enthousiasme, et dans les méprises de l'inexpérience. Une assemblée législative doit être jugée sur ses actes et non sur les discours de ses orateurs. Peuton admettre qu'elle ait fondé la liberté politique d'une nation civilisée sur un gouvernement représentatif, lorsque le peuple, toujours en ébranlement, reçoit une puissance active supérieure à celle de ses représentants; lorsque ceux-ci partagent avec le peuple le pouvoir d'exécuter les lois et de rendre la justice, en laissant subsister un fantôme de puissance exécutive, étrangère à la législation, dépouillée de tous ses attributs et hors d'état de faire respecter ses ordres par la moindre municipalité? Peut-on croire qu'une constitution libre consiste dans l'autorité illimitée et non contenue d'un corps de représentants populaires, d'un roi nul, et d'un peuple maître absolu de l'administration, de la force publique et du choix de tous les officiers civils et religieux? N'agit-on pas, enfin, en sens inverse de la raison et de l'expérience, lorsqu'on divise et subdivise l'action du pouvoir, et que l'on concentre la législation dans une seule chambre ?

La faction dominante n'a cessé de favoriser les violences, d'excuser les attentats, de, laisser impunis les perturbateurs de l'ordre public. On donne à la nation un gouvernement tout nouveau, et on le rend odieux en retirant la protection des lois à ceux qui en souffrent ou qui le désapprouvent. Égarés par une perfide tolérance, le peuple et les soldats s'habituent à la licence, qui devient bientôt un besoin impérieux, au mépris des autorités qu'on voit conniver lâchement aux désordres, et qu'on cesse de craindre en cessant de les estimer. En vain les déclamateurs s'épuisent à rappeler le respect à la loi, comme si ce respect n'était pas l'ouvrage de l'habitude, de l'autorité morale et domestique. Ils exigent pour des lois toutes récentes, une obéissance dont ils ont anéanti le principe, en renversant impétueusement toutes les lois anciennes. Législateurs à la journée, ces avocats ou lettres subalternes, poussés par l'envie, la basse vengeance, ont aliéné, effrayé les classes des mécontents, en les excluant de tous les emplois nouveaux, pour ne les remplir que des créatures du club des jacobins. L'intolérance, l'irrascibilité, la vanité despotique de tous ceux qui dirigent les opinions de la multitude, forment un spectacle inouï dans les révolutions.

Le caractère sanguinaire, gratuitement imprimé à la révolution dès son début, se retrouve après deux ans. Après deux ans de session, la France encombrée de lois, de magistrats, de gardes citoyennes liées par des serments solennels à la défense de l'ordre et de la sûreté, la France reste une arène où des bêtes féroces dévorent des hommés désarmés. Et ( chose incroyable) on ne rencontre aucune résistance combinée, aucune opposition un peù ferme. Depuis le trône jusqu'à l'humble presbytère, l'ouragan a tout renversé. Les mécontents, livrés à la fureur inquiète des clubs, des délateurs et souvent même des administrateurs, ne se défendent nulle part. Au lieu de se dévouer pour le salut du monarque, pour l'ordre public, pour la conservation des propriétés, les nobles fuient au loin. Un château est-il brûlé; à l'instant vingt possesseurs de châteaux abandonnent leurs pénates. Un assassinat est commis; on sait bien qu'il ne sera fait aucune poursuite judiciaire, et c'en est assez pour que l'effroi s'empare de tous les habitants aisés d'une ville et pour que la foule d'hommes menacés se soumette éternellement à l'état de víctimes.

Cette assemblée, si étrangement surnommée constituante, a donc désorganisé la monarchie avec une inconcevable célérité. Elle a lancé la France dans l'abyme, elle fuit; et la constitution qu'elle a si péniblement mise au jour aura le sort des testaments des rois absolus. A peine Louis XIII, Louis XIV, eurent-ils fermé les yeux, qu'on annulla leurs dispositions.

En se séparant, ces présomptueux constituants offrent à la nation le tableau le plus favorable des finances. A les en croire, 100 millions restent au trésor public; et, sur 1200 millions d'assignats décrétés (V. 19 décembre 1789 et 29 septembre 1790), 253 seulement ont éte employés. A ces ressources se joint l'hypothèque des biens nationaux qui paraissent chaque jour plus considérables. Mais, en admettant la fidélité de leurs comptes, ne peut-on pas leur représenter que le droit de propriété a été violé, que la mauvaise foi a pris son essor, que le crédit a disparu, et que mille portes s'ouvrent au désordre? En soumettant tous les détails à l'assemblée nationale, on a introduit un très-grave inconvénient; car, plus le corps qui s'occupe des comptes de finances est nombreux, moins il a de moyens éprouvés pour en connaître. Une nation riche ne doit pas dédaigner la voix publique, qui trompe rarement en fait de probité; et quand elle accorde sa confiance à des administrateurs, ne pas trop la limiter.

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