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sud (1). Auguste donna des soins attentifs a l'administration de l'île de Cypre; et le temple de Paphos ayant été détruit par un tremblement de terre, l'an 15 avant l'ere chrétienne, il pourvut aux frais de sa reconstruction.

INTRODUCTION DU CHRISTIANISME EN CYPRE. —— L'ile de Cypre fut une des premières contrées ouvertes à la prédication de l'Evangile. « Joseph, que les apôtres surnommerent Barnabé, c'est à dire enfant de consolation, qui était levite et originaire de l'ile de Cypre, vendit aussi un fonds de terre qu'il avait, et en apporta le prix, qu'il mit aux pieds des apotres (2) » Bientôt éclata la persécution où fut lapide saint Etienne; les fideles de la premiere Eglise se dispersèrent, et quel ques-uns d'entre eux allerent en Cypre. Après la fondation de l'Église d'Antioche, où les fidèles prirent pour la première fois le nom de chrétiens, saint Paul et saint Barnabé firent voile vers l'île de Cypre. « Quand ils furent arrivés à SaJamine, disent les Actes des Apôtres, ils prêchaient la parole de Dieu dans les synagogues des juifs, et ils avaient aussi Jean, qui les aidait. Après avoir parcouru toute l'île jusqu'à Paphos, ils trouvèrent un certain juif. magicien et faux prophète, nommé Bar Jésu, qui était avec le proconsul Sergius Paulus, homme sage et prudent. Ce proconsul désirant d'entendre la parole de Dieu fit venir Barnabé et Paul; mais Elymas, c'est-à-dire le magicien, car c'est ce que signifie ce nom d'Elymas, leur résistait, tâchant de detourner le proconsul d'embrasser la foi. Alors Paul étant rempli du Saint-Esprit, et regardant fixement Elymas, lui dit : « Homme plein de toutes sortes d'artifices et de fourberies, enfant du diable, ennemi de toute justice, ne cesseras-tu pas de pervertir les voies droites du Seigneur? Voilà dans ce moment la main de Dieu sur toi tu seras aveugle, et jusqu'à un certain temps tu ne verras point le soleil. A l'instant les ténèbres tomberent sur lui, ses yeux s'obscurcirent, et,

(1) Engel, Kypros, I, p. 458. On sait, par une inscription trouvée à Paphos et par une médaille, que P. Fabius Maximus et Aulus Plautius furent proconsuls en Cypre sous le principat d'Auguste.

(2) Act. des Apôtres, c. iv, 36.

tournant de côté et d'autre, il cherchait quelqu'un qui lui donnât la main. Le proconsul voyant le miracle embrassa la foi, et il admirait la doctrine du Seigneur (1), »

Telle fut la dernière conquête subie par l'ile de Cypre dans l'antiquité; et c'est aussi le dernier événement de son histoire ancienne. A partir du règne de Tibere, sous lequel Sergius Paulus embrassa le christianisme, jusqu'à la fin de la domination romaine, l'ile de Cypre n'eut plus qu'à jouir tranquillement des bienfaits de cette paix universelle donnée par les Romains aux peuples de l'Occident. Dès lors elle échappe aux regards de l'histoire, à laquelle elle n'offre aucun souvenir à recueillir, aucun événement à enregistrer; seulement des inscriptions, trouvées sous les décombres de ses antiquités, nous ont conservé les noms de quelques-uns des proconsuls à qui le sénat confia le gouvernement de cette île (2). Au quatrieme siècle l'administration de l'empire romain fut profondément modifiée par Constantin le Grand, surtout en ce qui concerne le gouvernement des provinces. Alors l'île de Cypre devint la quinzième province du diocèse d'Orient, avec la ville de Constantia, l'ancienne Salamine, pour capitale. Ce fut sans doute a cette époque qu'elle fut divisée en treize districts, selon Constantin Porphyrogénète, et quatorze selon Hiérocles, qui les énumère dans l'ordre suivant: Constantia, Tamassus, Citium, Amathonte, Curium, Paphos, Arsinoé, Soles, Lapithus, Cirbia, Cythri, Carpasion, Trimethonte et Leukosia.

(1) Act. Apost., XIII, 4. Le P. Lusignan énumère plus de quatre-vingts saints ou personnages célebres de l'Église de Chypre dans le chapitre qui a pour titre les illustres hommes chrétiens de l'isle de Chypre. Il y a tout un côté de l'histoire de l'ile de Chypre que je suis oblige de laisser dans l'ombre, car, pour emprunter le langage du vieux Lusignan, « si sont faites concernant les affaires de Cypre, je voulois raconter toutes les choses qui se cette chronique seroit encore augmentée de la moitié d'autant, »>

(2) Voir le recueil de Gruter et les inscriptions citées par Engel, Kypros, I, 460.

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CYPRE PENDANT LES TEMPS AN-
CIENS.

RELIGION DE L'Ile de CYPRE.
« Vénus, très belle fille, nasquit en
Aphrodisie, ville de Cypre, et pour sa
rare beauté fut amenée en Cythère, pour

être là nourrie entre les dieux et dées.

ses: laquelle estant grande, en âge convenable, fut mariée au roy Adonis, et couronnée royne de Cypre. Les poëtes et historiens racontent infinies choses de ceste femme, lesquelles il seroit trop difficile d'esplucher et raconter de mot a mot. Contentez-vous seulement d'entendre qu'on luy a donné le premier lieu entre les dieux et déesses, et qu'on l'a appelée de divers noms; qu'on lui a édifié plusieurs temples, non-seulement en Cypre, mais aussi en plusieurs autres provinces, voire par tout le monde (1). » Voilà comment le P. Lusignan se rendait compte de l'établissement du culte de Vénus dans l'île de Cypre. Il est douteux que cette explication si expéditive satisfasse tout le monde, et qu'on veuille s'en tenir à cette doctrine d'Évhémère qui faisait de tous les dieux et déesses du paganisme des rois et des reines élevés après leur mort aux honneurs divins. Autrefois elle était généralement bien accueillie des savants, et convenait également au scepticisme des uns et à la crédulité des autres. On l'enseignait alors dans toutes les mythologies élémentaires. Aujourd'hui l'étude de la mythologie tourne au symbolisme; et si ce système d'interprétation n'est pas exempt d'erreur, il présente des vues plus profondes et pénètre mieux dans la vérité.

Aphrodite est le vrai nom de la grande déesse des Cypriens; il appartient à la langue grecque; le mot de Vénus est latin. Mais Aphrodite ne fut pas la plus ancienne divinité de l'île de Cypre, où les Grecs n'avaient fait que succéder aux Phéniciens. Ceux-ci avaient introduit dans l'île leur religion nationale, et les temples de Paphos, d'Amathonte et de Citium avaient été d'abord consacrés au

(1) Le Père Lusignan, Description de toute l'isle de Cypre, p. 39.

culte de l'Astarté phénicienne, la même divinité qu'on adorait à Ascalon, à Byblos, à Tyr et sur toute la côte de Syrie. Quand les Grecs vinrent s'établir en Cypre, ils apportèrent avec eux le nombreux cortège des divinités qui composaient leur Olympe. Or, aucune n'avait autant d'analogie avec l'Astarté phénicienne que l'Aphrodite antique, divinité Ce puissant symbole signifiait à l'orides premiers âges connue des Pélages. gine la force créatrice et reproductrice, qui entretient tous les êtres de la créa tion. Son culte était l'adoration de la nature elle-même, dont les anciens ont divinisé la fécondité et la vie, dans l'impossibilité où ils étaient de remonter plus haut et de savoir où placer la source et l'origine de toute existence. Ce naturalisme pantheistique se retrouve partout, depuis l'Inde, où il existe encore, jusqu'aux confins de l'ancien monde, et il a produit partout et sous différentes formes des divinités analogues à l'Astarté des Phéniciens et à l'Aphrodite des Grecs, savoir: la déesse de Comana, l'Anaitis d'Arménie, de Pont, de Cappadoce, la Mylitta d'Assyrie, la Mitra de Perse, l'Alilat d'Arabie, l'Isis des Égyptiens, la Cybèle des Phrygiens et d'autres encore.

Personne ne peut dire comment s'opéra la fusion d'Astarté et d'Aphrodite : ce qui est certain, c'est que les deux peuples réunis dans l'île de Cypre parvinrent à se mettre d'accord sur un point où il est bien difficile aux homines de s'entendre. Leurs divinités contractèrent une union si étroite qu'on ne les distingua plus l'une de l'autre. Quelles furent les conditions de cette alliance, par quelles transactions, par quels sacrifices mutuels fut-elle cimentée, voilà encore ce qu'il est bien difficile à l'érudition d'établir. Toutefois, il me semble qu'on peut affirmer que l'élément phénicien preva· lut dans le fond, l'élément grec dans la forme. Les Grecs et, après eux, les Romains appelèrent la déesse de Cypre Aphrodite ou Vénus; mais le symbole ne changea pas : ce fut toujours la pierre conique de Paphos, qui représentait le Phallus et qui exprimait la force génératrice, ou la déesse barbue d'Amathonte, qui réunissait les deux sexes et qui se suffisait à elle seule dans l'acte de la re

production. Le sacerdoce resta entre les mains des Cinyrades, dont l'ancêtre Cinyras était Phénicien. Mais la mythologie grecque, ce grand instrument de la propagande des idées helléniques, qui altéra et absorba tant de religions étrangères par le charme et le prestige de l'ima gination, étouffa l'Astarté phénicienne sous un monceau de fables et de légendes inventées pour Aphrodite, dont le nom finit par prévaloir. Cinyras luimême devint, bon gré mal gre, un héros grec, tout en conservant son nom semitique.

Il en fut de même d'Adonis : « Le nom comme le culte d'Adonis est essentiellement phénicien ou syrien dans son principe; c'est un titre, une épithète d'honneur, donnée indifféremment aux diverses formes de Bel ou de Baal, le dieu multiple des Araméens et des Cananéens, aussi bien qu'à Jéhovah lui-même, le dieu simple et unique des Hebreux : Adoni, Adonai, mon Seigneur, notre Seigneur (1). Or, ce grand dieu, à qui l'on disait: Adonai, mon Seigneur, et que les Phéniciens avaient déja réduit à n'étre plus que le soleil, comme l'indique bien clairement la nature de la fête qu'on celebrait en son honneur au printemps, les Grecs lui conservèrent son noin, et lui appliquèrent l'un de ces mythes frivoles et gracieux par lesquels ils tournaient presque en plaisanterie les idées les plus graves et les plus sérieuses des religions de l'Asie. On transporta dans l'île de Cypre le mythe d'Atis et de Cybele. Adonis devint un bel adolescent, fils de Cinyras et de Myrrha, aimé de Vénus, qui abandonna le ciel pour s'atta cher à lui:

Abstinet e cœlo; cœlo præfertur Adonis. Ils passaient leur temps à la chasse; Mars, jaloux d'Adonis, le fit déchirer par un sanglier furieux. Adonis succomba; mais Vénus le disputa au trépas, et Adonis resta partagé entre la vie et la mort. Il passa la moitié de l'année, le prin. temps et l'été, auprès de Vénus, l'autre moitié, l'automne et l'hiver, dans les enfers, auprès de Proserpine. Aux Adonies, ou fêtes d'Adonis, on célébrait, par des cé

(1) Creuzer et Guigniant, Religions de l'Antiquité, t. II, 3 part., p. 919.

rémonies où se succedaient ja joie et la douleur, cet anéantissement et cette résurrection périodique du Dieu dans lequel le vulgaire ne voyait plus que l'amant d'Aphrodite, et qui dans l'origine avait été le soleil. Aphrodite perdit aussi son antique caractère on cessa de voir en elle la personn fication des forces reproductrices de la nature, elle devint la déesse des amours; et son culte consacra et divinisa la plus puissante et la plus funeste des passions humaines. L'Aphrodite Uranie, méconnue et délaissée, se retira au fond du sanctuaire, et l'Aphrodite Pandemos, l'amour déréglé et sensuel, attira à elle tous les hommages. De là les désordres des fêtes de Paphos, la prostitution des jeunes filles au rivage où la déesse sortit de la mer, et les debauches des hiérodules de Cypre, aussi célèbres que les prêtresses consacrées à Vénus dans le temple de Corinthe (1). On adorait aussi en Cypre Cérès, Bacchus, Jupiter et Junon, Minerve, Apollon et Diane, mais toutes ces divinités n'avaient qu'un culte local et particulier; seule Aphrodite était adorée dans l'île entière.

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ÉTAT POLITIQUE DE L'ÎLE De CyPRE (2); GOUVERNEMENT. L'ile de Cypre a toujours été gouvernée par des rois. Les cites grecques étaient encore sous le régime monarchique quand elles envoyèrent des colonies dans cette île. Aussi la royauté, qui y dominait déjà avec les Pheniciens, y fut continuée par les Grecs, et s'y perpétua jusqu'à la soumission de l'île aux Ptolemees. Jamais Cypre ne fut réunie sous la domination d'un seul prince; mais chaque cité faisait un petit royaume, qui avait pour chefs héréditaires les princes qui descen daient du héros fondateur de la colonie. Ainsi la famille régnante à Salamine prétendait descendre de Teucer fils de Telamon; et, plus heureuses que les dy

(1) Il faut s'en tenir à ces généralités : je ne puis esplucher ce que disent les poètes et les historiens à ce sujet. Je renvoie aux savants ouvrages qui en traitent spécialement, Movers, die Phoenizier, t. I, Engel, Kypros, t. II, et les Religions de l'Antiquité, de MM. Creuzer et Guigniaut, t, HI, ΤΟ part., ch. vi, p. 210, et les éclaircissements, (2) Engel, Kypros, 1, 467.

nasties héroïques de la Grèce proprement dite, celles de l'île de Cypre conservèrent jusqu'à la fin, grâce peut-être au voisi nage de l'Orient, le respect et l'obéissance des peuples. Au reste, on a vu dans les récits historiques qui précèdent à peu près tout ce que l'on peut savoir du gouvernement de ces princes : nous n'avons plus les ouvrages où les anciens décrivaient la constitution des villes cypriennes, tels que le grand ouvrage d'Aristote sur la politique, et le traité spécial de Theophraste qui avait pour titre Basiλɛla Tov Kurpiwv, la royauté des Cypriens.

Autour de ces rois se groupait une aristocratie composée des familles issues des premiers colons ou des fondateurs de la cité. C'était peut-être originairement la première bourgeoisie de chaque ville, qui peu à peu devint la noblesse de la cour, à mesure qu'elle se réduisait par l'effet destructeur du temps, qui, en décimant le corps, donnait ainsi aux familles qui survivaient un plus grand éclat. Au reste, les renseignements que l'on trouve dans Athénée sont loin de donner une idée avantageuse de la noblesse cyprienne, dont il représente les chefs comme jouant le honteux et double rôle de flatteurs des rois et d'espions de leurs concitoyens. Je transcrirai tout ce curieux passage (1), qui n'est luimême dans Athénée qu'une citation d'un ouvrage de Cléarque de Soli: « Tous les monarques de Cypre ont auprès d'eux des flatteurs d'une naissance distinguée, comme un accessoire fort important... Les flatteurs de Salamine sont partagés en deux familles, desquelles descendent ceux des autres parties de l'île de Cypre. On les appelle gerginiens et promalangues (yepуivot, лроμáλaɣyes). Les gerginiens se mêlent dans la ville parmi les autres citoyens, soit dans les lieux de travail, soit dans les places publiques, écoutant tout ce qu'on dit, et faisant l'espionnage. Tous les jours ils rendent compte aux anactes (princes) de ce qu'ils entendent dire. Quant aux promalangues, ils examinent si ce que les gerginiens ont rapporté mérite quelque information; ce sont comme les inspecteurs de ces espions. Ils abordent

(1) Athen., Deipnos., l. VI, p. 255, trad. de Lefebvre de Villebrune, t. II, p. 466.

tout le monde avec tant d'artifice, et d'un ton si persuasit, que je crois volontiers, comme ils le disent eux-mêmes, que tous les flatteurs les plus renommés sont sortis de leur pépinière. Les honneurs qu'ils reçoivent des rois les rendent extrêmement fiers de leur profession. » Ainsi cette noblesse dégradée sous l'absolutisme des rois cypriens formait le corps de la police, et n'en conservait pas moins son rang élevé dans l'État.

A Palæ-Paphos, qui était le sanctuaire principal du culte d'Aphrodite, le gouvernement était sacerdotal. Il appartenait à la famille ou tribu des Cinyrades, dont l'origine était sans contredit phénicienne, et qui devint grecque, comme la divinité qu'elle servait, après l'émigration des Hellènes. Les Cinyrades conservèrent la direction suprême des affaires politiques et religieuses. Le plus âgé de la famille en était le chef; les autres membres formaient son conseil. Comme chef religieux, il avait une juridiction sur l'île entière, où le culte d'Aphrodite était partout en grand honneur. A Amathonte une branche des Cinyrades avait la direction des choses religieuses; mais le pouvoir politique résidait entre les mains d'un roi. La grande prêtresse des temples de Déméter était placée sous l'autorité du college sacerdotal des Cinyrades. Cet état de choses dura jusqu'aux Ptolémées, qui renversèrent les dynasties locales, par lesquelles l'île était gouvernée depuis tant de siècles, et qui les remplacèrent par des fonctionnaires nommés et révocables à la volonté du prince. Depuis cette époque Cypre resta toujours dans la dépendance; les Ptolémées la transmirent aux Romains, ceux-ci aux Grecs de Byzance, et, après trois siècles de liberté et de gloire sous les Lusignans, elle retrouva la servitude, plus dure, des Turcs, qu'elle subit encore.

Lois. Nous n'avons que des renseignements bien incomplets sur la législation de l'île de Cypre. On doit à Dion Chrysostôme la connaissance des trois lois suivantes, observées dans ce pays (1):

(1) Dion. Chrys., Discours 64: 1° Tàv μοιχευθεῖσαν κειρομένην πορνεύεσθαι. 20 Τὸν αὑτὸν ἀποκτείναντα ἄταφον ρίπτεσθαι. 30 Μὴ ἀποκτεῖναι βοῦν ἀροτῆρα.

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1° « La femme adultère aura les cheveux coupés, et sera rangée parmi les courtisanes. Cette loi avait pour but d'assurer la sainteté du mariage; mais les femmes n'y étaient guère préparées par leur éducation. La chasteté ne devenait un devoir pour elles qu'après le mariage, et toute jeune fille devait consommer le sacrifice de sa virginité en l'honneur d'Aphrodite. 2° Celui qui s'est donné la mort sera privé de la sépulture. » Nulle part on ne trouve dans les législations grecques une condamnation aussi absolue du su cide. A Athenes on coupait la main de l'homme qui s'était donné la mort, et on l'enterrait au loin. Quant au corps, on l'ensevelissait le visage tourné vers l'occident. 3° « Il est défendu de tuer le bœuf qui sert au labourage. » L'infraction à cette dernière loi était punie de mort. Chez tous les peuples anciens la loi protégeait l'animal qui assiste l'homme dans ses travaux; mais on ne trouve que chez les Cypriens et les Phrygiens une pénalité aussi rigoureuse pour la transgression de cette loi (1). La tradition rapportée par Dion Chrysostôme attribue l'établissement de ces trois lois à une femme de Cypre appelée Démonassa, qui paraît un personnage légendaire plutôt qu'historique. Ces lois reçurent leur sanction de l'application rigoureuse qui en fut faite aux enfants de Démonassa. Sa fille ayant commis l'adultère, elle fut rasée et inscrite parmi les courtisanes.

De ses deux fils l'un tua un bœuf de labour, et fut mis à mort; l'autre s'étant tué de sa propre main, son corps demeura sans sépulture. Cette sinistre tradition maintenait en vigueur l'exécution de ces lois.

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chesses engendrèrent la corruption des mœurs, et celle-ci précipita les petits Etats de l'île de Cypre dans la décadence et la servitude. Or nous ne commençons à connaître l'état social de ce pays qu'après les temps primitifs, quand il est déjà engagé dans toutes les recherches et dans tous les excès de la civilisation la plus raffinée. La population de l'île de Cypre, enrichie par le commerce, l'industrie, l'agriculture, se livra sans retenue à toutes les jouissances dont elle pouvait si facilement s'entourer dans le délicieux pays qu'elle habitait. La mollesse et les plaisirs de la vie cyprienne étaient passés en proverbe chez les anciens. Le culte d'Aphrodite prit dans cette île, plus que partout ailleurs, le caractère d'un sensualisine effréné, et la jeunesse des deux sexes, élevée au milieu des fêtes licencieuses de cette religion dégradée, s'habituait de bonne heure, surtout dans les classes supérieures, à regarder le plaisir comme le souverain bien de la vie.

Athénée a emprunté aux ouvrages de Cléarque de Soli les plus curieux renseignements sur les mœurs efféminées des rois cypriens. Il y avait à la cour de ces princes des femmes appelées colacides, ou flatteuses; elles étaient au service des dames de la famille royale. Elles étaient fort recherchées à l'étranger; et Artabaze et Mentor en firent venir pour leur maison. Plus tard on changea leur nom en celui de climacides, et voici pourquoi: Voulant plaire à celles qui les prenaient à leur service, elles se courbaient en forme de marchepied ou de gradin, de manière que les dames montaient sur leur dos pour entrer dans leurs litières et en descendaient de même. Cléarque s'irrite contre cette invention abjecte et méprisable par laquelle ces viles complaisantes augmentaient encore la mollesse et la corruption des princesses qui les appelaient auprès d'elles. Mais, ajoute-t-il, ces climacides, après avoir vécu dans l'opulence par ce raffinement, n'eurent plus qu'une vie dure et pénible dans leur vieillesse; ainsi, celles qui leur succédè. rent n'ayant plus obtenu le même crédit passèrent en Macédoine. La décence ne me permet pas de raconter ici à quel degré de libertinage elles y porterent les princesses et les femmes du plus haut

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