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pu croire que l'amiral Boscawen n'eût agi que par les ordres de sa cour.

Le même motif avait d'abord suspendu le jugement du roi sur les pirateries que les vaisseaux de guerre anglais exercent depuis plusieurs mois contre la navigation et le commerce des sujets de sa majesté, au mépris du droit des gens, de la foi des traités, des usages établis parmi les nations policées, et des égards qu'elles se doivent réciproquement.

Le roi avait lieu d'attendre des sentimens de S. M. britannique, qu'à son retour à Londres, elle désavouerait la conduite de son amirauté et de ses officiers de mer, et qu'elle donnerait à S. M. une satisfaction proportionnée à l'injure et au dommage. Mais le roi voyant que le roi d'Angleterre, bien loin de punir les brigandages de la marine anglaise, les encourage au contraire en demandant à ses sujets de nouveaux secours contre la France, sa majesté manquerait à ce qu'elle doit à sa propre gloire, à la dignité de sa couronne, et à la défense de ses peuples, si elle différait plus long-temps d'exiger du roi de la Grande-Bretagne une réparation éclatante de l'outrage fait au pavillon français, et des dommages causés aux sujets du roi.

Sa majesté croit donc devoir s'adresser directement à sa majesté britannique, et lui demander la restitution prompte et entière de tous les vaisseaux français tant de guerre que marchands, qui, contre toutes les lois et contre toutes les bienséances, ont été pris par la marine anglaise, et de tous les officiers, soldats, matelots, artillerie, munitions, marchandises, et généralement de tout ce qui appartenait à ces vaisseaux.

Le roi aimera toujours mieux devoir à l'équité du roi d'Angleterre qu'à tout autre moyen la satisfaction que S. M. a droit de réclamer, et toutes les puissances verront sans doute, dans la démarche qu'elle s'est déterminée à faire, une nouvelle preuve bien sensible de cet amour constant pour la paix, qui dirige ses conseils et ses résolutions.

Si sa majesté britannique ordonne la restitution des vaisseaux dont il s'agit, le roi sera disposé à entrer en négociation sur les autres satisfactions qui lui sont légitimement dues, et continuera de se prêter, comme il a fait précédemment, à un accommodement équitable et solide sur les discussions qui concernent

l'Amérique. Mais si, contre toute espérance, le roi d'Angleterre se refuse à la réquisition que le roi lui fait, sa majesté regardera ce déni de justice, comme la déclaration de guerre la plus authentique, et comme un dessein formé par la cour de Londres de troubler le repos de l'Europe.

Versailles, le 21 décembre 1755.

III.

ROUILLÉ.

Mémoire du comte de Bernstorff, ministre des affaires étrangères de Danemark, adressé au baron de Sprengtporten, ambassadeur de Suède à la cour de Copenhague, pour l'instruire de l'obligation dans laquelle se trouvait le roi, de fournir des troupes auxiliaires à l'impératrice de Russie; du 19 août 1788.

S. M. l'impératrice de toutes les Russies, attaquée par mer et par terre, par les armées et par la flotte de S. M. suédoise, ayant réclamé les secours stipulés dans ses traités d'alliance défensive, conclus avec le Danemark dans les années 1765 et 1769, renouvelés et confirmés par le traité définitif de l'année 1773, et ayant exposé à S. M. danoise les faits et les argumens destinés à fonder cette réclamation, et à servir de preuve du cas d'aggression, S. M. les a pesés avec cette attention soigneuse qu'elle devait à S. M. suédoise, à son respect pour tous ses devoirs, à son amour pour la paix, enfin à tous les principes qu'elle a avoués depuis le commencement de son règne. Elle en a reconnu l'évidence, et n'ayant ainsi plus à consulter que la fidélité due à des engagemens anciens et inviolables, et la bonne foi, cette loi sacrée pour tous les souverains, elle déclare à S. M. le roi de Suède, que ce sont ses propres démarches qui la déterminent à présent; qu'elle les regrette d'autant plus, qu'elle n'a négligé aucun moyen qui fût en son pouvoir, pour les prévenir, et qu'elle a constamment ambitionné son amitié et une harmonie parfaite avec lui. S. M. déclare en même temps, qu'elle cède dès à présent, et en conformité de ses traités défensifs, et de la manière qui y est stipulée, une partie de ses vaisseaux de guerre et de ses troupes, qu'elle commencera d'armer, à la libre disposition de l'impératrice de Russie, son alliée. S. M. ajoute à cette déclaration l'assurance solennelle,

de n'avoir d'autre vue et d'autre souhait que le rétablissement d'une paix solide et assurée, et que cette démarche actuelle puisse servir elle-même à y contribuer. Le moment où elle verra ses souhaits remplis à cet égard, lui sera aussi cher que lui a paru amer et affligeant celui où la tranquillité a été interrompue.

S. M. a ordonné au soussigné de communiquer cette déclaration à S. Exc. le baron de Sprengtporten, ambassadeur de Suède, et de l'envoyer également à Stockholm à M. le comte de Reventlow, pour la remettre au ministre de S. M. suédoise. Du département des affaires étrangères à Copenhague, le 19 août 1788. BERNSTORFF,

IV.

Contre-mémoire du baron de Sprengtporten; du 11 septembre 1788.

Après les ouvertures que le roi a fait faire par son ambassadeur à Copenhague, et la confiance que le roi a témoignée au roi de Danemark, en lui remettant le soin de rétablir la paix entre le roi et l'impératrice de Russie, S. M. n'a pu recevoir qu'avec étonnement et déplaisir la déclaration que le roi son beau-frère lui a fait remettre, en date du 19 août dernier. S. M. voulant encore écarter tout ce qui peut exciter de l'aigreur et de l'éloignement entre lui et un prince qui lui est uni par des liens si sacrés, se réserve, si la nécessité des circonstances l'exige indispensablement, de rappeler à S. M. danoise combien il s'est donné de soins pour consolider la bonne harmonie qui depuis plus de soixante ans a subsisté entre la Suède et le Danemark, et pour la rendre stable et permanente. Le roi, ne voulant rien négliger encore pour conserver le maintien de la plus longue paix, que les annales des deux royaumes peuvent attester, et connaissant d'ailleurs les soins que d'autrės puissances vont se donner pour éteindre le nouvel incendie qui menace le Nord, se borne uniquement dans ce moment à demander une explication claire et précise des intentions de S. M. danoise, d'après laquelle le roi règlera ses démarches.

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S. M. danoise annonce qu'elle va céder, en conformité de ses

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traités défensifs, et de la manière qui y est stipulée, une partie
de ses vaisseaux de guerre et de ses troupes, à la libre dispo-
sition de l'impératrice de Russie. Le roi, qui jusqu'à ce moment
a ignoré le contenu et l'étendue des engagemens contractés entre
le Danemark et la Russie, demande au roi, son beau-frère, si
ce sont des troupes et des vaisseaux auxiliaires qu'il compte re-
mettre à la disposition de la Russie; en ce cas, et selon l'usage
de tout temps reçu, ses troupes et ses vaisseaux ne peuvent
agir contre la Suède que dans les mers et dans les provinces appar-
tenantes à la Russie, et être transportés dans les lieux où se
trouve actuellement établi le théâtre de la guerre et dans ce
cas, loin de regarder les démarches de S. M. danoise comme
hostiles, le roi se bornera aux regrets de voir le roi, son beau-
frère, soutenir par ses secours l'ennemi de la Suède. Mais si
ces troupes sortent des provinces soumises à la domination de
S. M. danoise et limitrophes à la Suède, pour entrer sur les
terres du roi ; s'ils y attaquent les sujets de S. M., ses places
fortes et ses troupes, le roi se verra forcé pour lors de regarder
la longue paix qui subsiste entre la Suède et le Danemark
comme rompue, et le roi de Danemark comme agresseur. Le
roi assure, de la manière la plus formelle et sur sa parole royale,
que les précautions qu'il va prendre sur la frontière de la Nor-
vège et en Scandinavie, ne sont que purement défensives, et
que ses vœux les plus sincères tendent au maintien d'une paix
également nécessaire aux deux peuples. Le roi attend une
réponse claire et précise qui décidera de ses démarches ulté-
rieures.
J. U. SPRENGTPORTEN,

Copenhague, le 11 septembre 1788.

V.

Mémoire du comte de Bernstorff, en réponse au contre-mémoire du baron de Sprengtporten; du 13 septembre 1788.

S. M. le roi de Danemark, loin de trahir la confiance de S. M. le roi de Suède, n'a eu d'autre regret que de n'avoir pas été mis de sa part dans le cas d'y répondre entièrement, ses premières ouvertures sur son retour à des intentions pacifiques ne lui étant parvenues que lorsque sa déclaration du 19 août était

déjà remise à M. l'ambassadeur, et partie pour la Suède. Elle en a cependant tiré tout le parti qui était encore en son pouvoir, pour avancer le rétablissement de la paix, et elle déclare être toujours également prête à concourir, avec toute la candeur et avec tout le zèle possibles, aux vues et aux démarches des puissances amies qui tendront au même but.

Il ne dépend pas de S. M. de donner à ses secours auxiliaires une autre direction que celle qui a été énoncée dans sa première déclaration, et qui est stipulée dans ses traités défensifs qui y sont cités. Ils sont déjà cédés à la libre disposition de la Russie, et comme le théâtre de la guerre n'est pas borné et ne saurait l'être à la seule Finlande, S. M. n'est pas autorisée à adopter une explication nouvelle entièrement opposée au sens et aux mots de ses engagemens avoués.

Tant que le Danemark n'a point un intérêt propre, et qu'il n'agit qu'en auxiliaire de son alliée, il ne peut avoir d'autre but que le rétablissement d'une paix prompte et solide, et dès que S. M. l'impératrice conviendra de ses conditions avec la Suède, la sienne est faite également. Il doit respecter toutes les démarches de la Russie qui terminent ou qui suspendent cette guerre où elle se trouve engagée. Aussi long-temps que les troupes et les vaisseaux auxiliaires qui agiront contre la Suède, n'excèderont pas le nombre stipulé, et que le reste des forces danoises ne commet aucun acte d'hostilité d'aucun genre, S. M. le roi de Suède n'est point fondé à se plaindre; ce sera elle-même qui changera la nature de la situation présente, si elle veut envisager et traiter en ennemis les forces qui n'agissent pas contre la Suède, et qui ne le feront que lorsqu'elle aura déclaré la guerre au Danemark. Ce sera elle-même qui aura donné alors une existence à des différends qui n'existaient pas, et qui n'existeront pas non plus, si les souhaits et les conseils du roi, et la considération du bonheur des sujets réciproques, peuvent avoir quelque influence sur S. M. suédoise.

Le roi n'a rien à objecter aux mesures qu'on opposera en Suède aux forces auxiliaires danoises: S. M. déclare plutôt, qu'elle ne donnera aucune étendue de plus à ses plans et à ses démarches, avant que d'apprendre que la résolution de S. M. suédoise, d'en donner aux siennes, soit irrévocable. Elle souhaite vivement que la réponse décisive qu'elle attend encore de

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