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sières pour se diriger vers l'Égypte; il faisait équiper des frégates dans les ports de l'Adriatique, dans ceux de la Méditerranée et de l'Océan: c'est ce qu'on voit par sa correspondance avec ses généraux, et par ses ordres secrets. Il rédigeait lui-même les instructions pour ces petites expéditions: il accorda une prime de quarante pour cent aux négocians et aux armateurs qui les premiers apporteraient des marchandises, des denrées et des munitions en Égypte; plusieurs bâtimens de guerre et de commerce, à des intervalles inégaux, entreprirent cette périlleuse navigation; presque tous furent enlevés aux attérages.

Enfin, la nouvelle du départ et de la destination de l'armée anglaise rassemblée aux îles Baléares, sous les ordres du général Abercrombie, décida le premier Consul à tenter un plus grand effort, et à faire parvenir à temps un renfort considérable à l'armée d'Orient trop affaiblie par les combats et les maladies, pour pouvoir résister au choc dont elle était menacée. Il avait fait équiper à Brest, une

escadre de sept vaisseaux de ligne, dont trois de quatre-vingt canons, et quatre de soixante et quatorze, deux frégates et un lougre; les apprêts se firent avec autant de secret que de célérité; rien ne transpira, même en France, sur la destination de cette escadre, dont le commandement fut confié à l'amiral Gantheaume, habile officier, plein de résolution, et dont le premier Consul disait, qu'il était aussi heureux qu'il était brave.

Cinq mille hommes de troupes commandés par le général Sahuguet, furent embarqués sur cette escadre, et l'on prit à bord autant de munitions de guerre et de bouche, que les bâtimens en purent contenir.

Ces dispositions étant terminées, le premier Consul donna l'ordre à l'escadre de sortir de Brest, et de faire voile pour Alexandrie: les bâtimens de guerre mouillés dans les divers ports de France, et sur les rades, reçurent en même temps celui de tenter de fausses sorties, afin de favoriser celle de l'escadre. Ces mouvemens multipliés obligèrent en effet les Anglais à étendre leur croisière,

à disperser leurs bâtimens et à se rapprocher des côtes. On ne peut qu'admirer leur constance à tenir la mer si dure dans cette saison, et l'on ne doit pas s'étonner qu'une marine ainsi exercée aux plus rudes travaux, dans des situations toujours nouvelles, souvent pé. rilleuses, n'acquière l'avantage d'une grande supériorité pour la précision, la prestesse des manoeuvres, et surtout pour l'adresse dans la réparation des avaries : c'est là qu'est leur bonne et forte école; on ne peut les égaler qu'en les imitant.

L'amiral Gantheaume appareilla le 7 janvier, du port de Brest, et alla mouiller à la rade extérieure de Bertheaume; il remit à la voile le lendemain, et tenta de dérober sa partance en passant par le Raz, canal fameux formé par les redoutables écueils connus sous le nom de Saints ; mais aperçu par les vaisseaux croiseurs, il fut contraint de regagner la côte et de mouiller à l'embouchure de la Vilaine. Il jugea fort bien qu'en profitant d'un moment favorable pour rentrer à Brest, il donnerait le change à

l'ennemi, qui penserait que cette fausse sortie n'avait, comme tant d'autres, que l'unique objet de l'inquiéter. Après avoir repris le mouillage dans la grande rade, il résolut d'attendre qu'un gros temps contraignît l'escadre anglaise à s'éloigner de la côte, et lui ouvrît un libre passage. En effet, le 23 janvier, une tourmente ayant forcé les croisières à gagner le large, l'amiral français profita de cette circonstance, et de l'obscurité de la nuit, pour faire sortir son escadre. Comme il était probable que les vaisseaux seraient bientôt dispersés, il indiqua pour premier point de ralliement, le cap de Gates, sur la côte d'Espagne, entre Gibraltar et Carthagène. Voici le nom des bâtimens dont l'escadre était composée :

L'Indivisible,

Le Formidable, de 80 canons.
L'Indomptable,

La Constitution,

Le Dix-Août,

Le Desaix,

Le Jean-Bart,

de 74 canons.

La Bravoure,

La Créole,

}

de 40 canons.

Le lougre le Vautour.

L'escadre sortit en bon ordre; mais bientôt la violence du vent sépara et dispersa les vaisseaux ; chacun d'eux fit route selon l'inégalité de marche, et le plus ou moins d'avaries que leur causa la tempête; aucun ne fut rencontré ni découvert par les croiseurs; la seule frégate la Bravoure donna dans une frégate anglaise, à la hauteur du cap Finistère, et après avoir échangé quelques volées, le capitaine Dordelin, qui montait la Bravoure, se disposa à tenter l'abordage; la frégate anglaise manoeuvra pour l'éviter, et s'éloignant à toutes voiles, laissa la Bravoure poursuivre sa

route.

La sortie de l'amiral Gantheaume, fut une résolution aussi audacieuse, que l'entreprise de la conduire à Alexandrie était téméraire. C'était hasarder de livrer aux Anglais la meilleure partie de ce qu'il restait de la marine française; mais ce secours pouvait sau

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