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des troupes qu'aucun revers n'avoit abattues, qu'aucun danger n'avoit retenues, au milieu de tant de privations et de souffrances, et dont l'honneur et la gloire étoient intacts en pliant sous le joug impérieux des circonstances? Le général Belliard envoya un parlementaire au général Hutchinson ; la convention fut bientôt rédigée car les prétentions des deux chefs se réduisoient à ces deux seuls points: l'un l'évacuation de l'Egypte, l'autre son retour en France. Les conférences durèrent quelques jours et amenèrent une capitulation, témoignage honorable de la considération que s'étoit acquise l'armée française. Elle n'étoit que la répétition de la convention d'El-A'rich (1): falloit-il donc répandre tant de sang pour arriver à ce même résultat?

qui communiquoient entre eux au moyen d'un pont de bateau établi à Chobra.

(1) Les troupes françaises et alliées devoient évacuer non-seulement le Caire et ses dépendances, mais encore toutes les parties de l'Egypte qu'elles occupoient ; elles devoient se retirer à Rosette, avec armes, bagages, artillerie, munitions, etc., pour être transportées dans les ports français de la Méditerrannée, au compte des puissances belligérantes. Les mêmes conditions étoient applicables aux administrateurs, membres de l'Institut et à tous les habitans en Egypte, de quelque nation qu'ils fussent, qui voudroient suivre l'armée.

Les troupes du général Belliard, dans le terme fixé, évacuèrent le Caire pour se rendre à Rosette, avec une escorte turque et anglaise. Pas le moindre événement ne troubla la marche paisible de ces convois. Les soldats, tous joyeux pour des motifs différens, sembloient avoir fait un oubli entier des sentimens de haine qui les divisoient il y a peu de jours; et il convient de faire cette remarque, qu'à la fin d'une guerre, les soldats qui ne voyent jamais que leurs intérêts personnels, sont toujours portés à se rapprocher, à se bien traiter, quand ils croyent par leur conduite et leur valeur avoir une part égale à l'estime de leurs ennemis.

Les troupes du général Belliard, arrivées à Rosette, furent embarquées sur les bâtimens préparés à cet effet, et reconduites en France (1).

Il est temps actuellement de voir ce que devenoit pendant ces grands événemens l'expédition aux ordres du contre-amiral Gantheaume. Pour réparer le

(1) La première division de transports partit d'Aboukir, le 13 thermidor ( 1er août); la seconde, le 18 (6 août); la troisième et dernière, le 22 (10 août). La totalité des individus embarqués, y compris tout ce qui avoit été ramassé dans le Delta, du côté de Damiette, et les Chrétiens, Cophtes et Grecs, qui craignoient de rester en Egypte, se montoient de 12 à 13 mille.

temps perdu par le mouvement qu'il avoit fait sur Toulon, il paraît qu'il proposa de changer le point d'abord fixé pour le débarquement des troupes qu'il transportoit. Bonaparte, instruit d'un contre-temps qui l'indisposa, expédioit courrier sur courrier pour presser le départ de l'escadre, parce que, informé lui-même des desseins de l'Angleterre, il sentoit

que le moindre retard rendroit inutile l'arrivée du renfort qu'il envoyoit. Il croyoit avoir choisi l'instant unique pour l'accomplissement de ce nouveau projet, parce qu'il ne supposoit devant Alexandrie que la simple croisière anglaise destinée à observer et fermer la côte de l'Egypte. Il ne supposoit pas non plus des forces considérables devant Mahon (1) ni devant Malte, et dans son impatience extrême il prit le parti, indépendamment de ses ordres précis et répétés, d'envoyer M. Lacuée, son aide-decamp (2), auquel il avoit enjoint de ne point quitter Toulon que l'expédition n'en fût partie.

Mais un ordre, quelque impératif qu'il soit, ne

(1) D'après le rapport d'un parlementaire qui arriva à Toulon, le 22 ventose (13 mars), l'amiral Waren étoit arrivé à Mahon avec six vaisseaux et trois fré gates. Un de ses vaisseaux étoit tellement endommagé qu'il ne pouvoit plus tenir la mer.

(2) Il arriva le 16 ventose (7 mars 1801).

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fait pas mouvoir à volonté une escadre quand les vents sont contraires; et cet obstacle n'étoit point le seul qui s'opposât au départ des vaisseaux français. Des dissentions s'étoient élevées entre les chefs, et il ne régnoit point entre eux cet accord, cette union, cet ensemble, si nécessaires dans les opérations périlleuses et compliquées. Les esprits mal disposés se choquoient sur la moindre prétention, et le mystère qui avoit d'abord enveloppé la marche de cette expédition, se dévoiloit aux yeux de la France et de ses ennemis. C'est ainsi qu'on apprit à Toulon que le but de l'entreprise étoit un débarquement à Dernéh ou Bomba sur la côte d'Afrique. Ces points sont éloignés de plus de cent lieues à l'ouest d'Alexandrie, et ils avoient été désignés, dans la ferme croyance, qu'on seroit moins exposé à de fâcheuses rencontres pour y arriver. Si cet avantage étoit immense, il étoit suffisamment compensé par la route que les troupes devoient faire pour traverser le triste pays qui les séparoit de l'Egypte. Quand on a vu le désert et que l'on parle de cent lieues à faire dans des sables mouvans et sur une côte inhospitalière, on ne sait pas, si des soldats français lancés dans cette mer brûlante, il en fut arrivé un seul à Alexandrie, en admettant même que les naturels du pays n'eussent point mis obstacle au voyage. Quoi qu'il en soit, l'escadre de

Gantheaume appareilla de Toulon (1) et cingla vers les côtes de la Sardaigne, où l'escadre aux ordres de l'amiral anglais Waren l'aperçut sans pouvoir la joindre (2). Il paroît, s'il faut ajouter foi à la lettre du capitaine anglais Hallowell, qui commandoit le vaisseau le Swiftsure, et qui fut pris par l'escadre française à la hauteur du cap Dernéh (3),

(1) Le 29 ventose (20 mars) par conséquent la veille de la bataille d'Alexandrie.

(2) Waren appareilla de Mahon le 13 ventose (4 mars) avec 5 vaisseaux. Il se dirigea vers la Sicile, mais apprenant le traité conclu avec le roi de Naples, il revint sur Toulon. Il apprit, le 4 germinal (25 mars) an matin, dans sa route, que l'escadre française étoit sortie. Il ne put l'atteindre et se rendit devant Alexandrie, où il se trouvoit le 3 floréal (23 avril), après avoir été infiniment retardé dans sa marche.

(3) Le Swiftsure, séparé d'un convoi qu'il escortoit, suivoit sa route sur Malte, lorsque le 5 messidor (24 juin), à trois heures du matin, étant par 7 lieues S. O. du cap Dernéh, il découvrit cinq voiles. Comme il étoit instruit qu'une escadre ennemie avoit été aperçue sur les côtes de l'Albanie, il se douta que c'étoit la même escadre. Il voulut l'éviter, mais à 8 heures deux vaisseaux l'avoient considérablement gagné. Il se décida aussitôt à s'engager avec eux, espérant au moins en réduire un avant l'arrivée des autres. L'Indivisible

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