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Bonaparte, dont la première campagne venoit d'être couronnée en Italie des plus brillans succès, croyoit ne les devoir qu'au nouveau système de guerre qu'il avoit adopté. Il étoit conforme au caractère. français. Dirigeant, en général habile, cette bouillante ardeur, fruit d'une longue inaction et du desir de secouer le joug dont les puissances de l'Europe nous menaçoit alors, il se portoit toujours en avant pour déjouer l'ennemi par la rapidité de ses mouvemens et pour assurer à son armée, aux dépens du pays conquis, les ressources dont elle étoit dépourvue. Ce n'étoit plus cette marche métho dique de nos anciens généraux, ces plans de campagne assujétis à l'établissement de lignes de magasins; ce n'étoit plus cette réservé dans les manoeuvres pour éviter les privations, conserver la santé et le sang précieux des soldats. Tout annonçoit dans les combinaisons de Bonaparte cette avidité de gloire, cette ambition qui ne calculent point ce qu'elles coûteront à satisfaire. Des triomphes éclatans lui avoient donné cette confiance qui rend tout facile; une seule campagne, étonnante par ses résultats, l'avoit placé en tête des premiers généraux de l'Europe; son extrême activité secondoit l'impétuosité française; la gloire prêtoit déjà à ses discours la force des oracles; il avoit une volonté ferme, une résolution prompte, et cette constance dans les projets qui peut seule les faire réussir; avec tous ces ressorts puissans, il commandoit aux premières troupes

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du monde; tout devoit lui paroître facile, comme il devoit se croire capable de tout. Habitué à renverser les obstacles sans s'arrêter, il devoit donc penser que Saint-Jean d'Acre ne tiendroit pas plus que Jaffa; mais le malheur ayant voulu qu'on s'adressât au point le plus fort de la place, il falloit avoir pour la prendre cette patience que nécessite un siége; Bonaparte ne l'eût point, et Kleber (1), dont les principes et le caractère étoient entièrement opposés à ceux du général en chef, prédit après le premier assaut manqué, que Saint-Jean d'Acre ne seroit point pris. Il témoignoit hautement son mécontentement sur le peu de soins apportés dans la construction de nos ouvrages, sur le peu d'ensemble du génie et de l'artillerie, qui ne s'accordaient point entre eux; sur cette impatience enfin qui multiplioit des attaques, en épuisant inutilement l'ardeur des troupes dans des tentatives trop répétées, sur un point où elles avoient déjà échoué. En effet, que le lecteurme permette de mettre sous ses yeux le résumé des principales opérations du siége, il verra que jamais les Français n'ont donné des preuves plus éclatantes d'un courage infructueux et d'une constance admirable.

(1) C'est lui qui, en parlant de Bonaparte, l'appeloit un général à dix mille hommes par semaine.

TABLEAU comparé de l'Attaque et de la Défense.

ATTAQUE DES ASSIÉGÉS.

6 germinal (26 mars ). Première sortie.

10 (30 mars). Deuxième sortie. Mort du colonel Detroye.

12 (1er avril) Troisième sortie.

18 (7 avril) Sortie générale sur trois colonnes, avec les troupes anglaises. Mort du capitaine anglais Thomas Aldfield.

L'ennemi établit des places d'armes pendant les jours suivans, lève des cavaliers et marche en contre-attaque sur nos ouvrages.

12 floréal (1o mai) Cinquième sortie. L'ennemi fusille la tour à revers.

ATTAQUE DES ASSIÉGEANS.

8 germinal ( 28 mars. Premier assaut à la tour. Mort de Mailly.

12 (1er avril). Second assaut à la tour.

5 floréal ( 24 avril ). Troisième assaut pour se loger dans la tour. Le général Veaux est blessé.

12 floréal ( 1a mai) Quatrième assaut pour se loger dans la tour.

15 floréal (4 mai ). Attaque des ouvrages extérieurs de l'ennemi. On ne peut les détruire entièrement.

Suite du Tableau.

ATTAQUE DES ASSIÉGÉS.

17 floréal (6 mai). Sixième sortie. L'ennemi évente là mine et comble le puits.

19 floréal (mat). Septième sortie de l'ennemi. Il prend la brèche à revers. A cette époque il étoit entièrement et formidablement établi dans ses lignes hors de la place.

27 floréal (16 mai). Huitième sortie dans la nuit du 26, et neuvième sortie à 7 heures du matin.

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* prairial (21 mai) Dixième sortie générale à ta pointe du jour. Onzième et dernière sortie à trois heures de l'après-midi.

ATTAQUE DES ASSIÉGEANS:

Nuit du 17 au 18 floréal ( du 6 au 7 mai). Attaque des places d'armes de l'ennemi ; on ne peut travailler au logement, ni le faire évacuer.

Nuit du 18 au 19. Cinquiè me assaut. On se loge dans la tour. Le colonel Boyer est tué. La perte est considérable de notre côté relativement à notre force.

19 floréal. Sixième assaut dans la courtine. Le général Rambeau est tué et le général Lannes blessé.

a1 floréal (10 mai). Septiè me et huitième assaut, le matin et le soir. Le général Bon est blessé mortellement. Les colonels Venoux et Fouler sont tués.

14*

L'armée vêtue d'une simple toile bleue, fort convenable au climat sec et brûlant de l'Egypte, souffrit étonnamment des pluies abondantes qui tombèrent dès ses premiers pas en Syrie. La fraîcheur de la terre et l'humidité des nuits rendoit le sommeil dangereux; les insectes même troubloient le peu de repos que goûtoient nos soldats, obligés de passer une partie de la nuit à se chauffer, pour sécher leurs vêtemens.

C'est dans cet état que l'armée arriva devant Jaffa.

Jaffa fut pris en quatre jours; il étoit difficile de mettre moins de temps à s'en emparer. La ville fut pillée et nos troupes victorieuses se couvrirent, ainsi qu'en Egypte, des dépouilles de leurs ennemis. Mais la peste régnoit déjà dans Jaffa, et la garnison nous laissa en héritage cette affreuse épidémie qui vint se mêler à nos trophées.

Maîtres de Jaffa, nous emportâmes, avec l'espoir de réduire rapidement Saint-Jean d'Acre, les principes du fléau qui germèrent pendant notre route, et se développèrent avec plus de force devant cette dernière place.

Si, dans le commencement du siége, le pain étoit bon, il n'y avoit point de viande, et le soldat ne mangeoit avec sa ration que le peu de figues sèches ou de fromage qu'il pouvoit acheter. L'eau que nous buvions dans le Kerdané n'étoit pas très-bonne,

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