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oublié ; il parloit même de la manière de vivre qu'il adopteroit à son retour, lorsque Barras entra, l'air extraordinairement sombre; il prend très-peu de part à la conversation du salon, et passe après quelques instans de silence dans un cabinet voisin, avec Bonaparte. L'entretien dura un quart d'heure. Barras sortit, et quitta la société sans échanger à peine deux paroles avec madame Bonaparte. Bonaparte reparoît après lui, ne dit rien à personne, et se retire de nouveau dans son cabinet, dont il ferme brusquement la porte. Dans la nuit il partit pour Toulon.

Cette anecdote semble tout expliquer, et l'on ne voit plus alors dans l'expédition d'Egypte, si malheureuse par ses résultats, si funeste par le coup mortel qu'elle devoit porter à notre marine et à notre commerce, qu'une nouvelle preuve des maux incalculables qu'attirent sur les Empires, les haines et les préventions exagérées de ceux que hasard ou une fatale célébrité a placés à leur tête.

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Au surplus, Bonaparte auquel il ne restoit peut-être que l'alternative d'exécuter

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cette chevaleresque entreprise ou d'être perdu tout à fait, ne se dissimula pas le danger qu'il alloit courir; il se flattoit cependant que des démarches faites à Constantinople en écarteroient une partie, et que l'on parviendroit à faire consentir la Porte à cette invasion. C'étoit sans doute une grossière erreur, et l'on ne peut croire que M. de Taleyrand, qui rassuroit plus que personne Bonaparte sur ce point, la partageât sincèrement. Cependant, comme Bonaparte veut toujours que les hommes s'engagent personnellement, et comme il a toujours cherché dans les périls qu'il fit courir aux autres avec lui, une garantie contre l'abandon où la perfidie des conseils (1), il n'avoit pas oublié d'exiger que M. de Taleyrand se rendroit à Constantinople, et il partit convaincu que celui-ci y seroit avant que lui-même fût arrivé en Egypte; mais il avoit affaire à un homme trop habile; M. de Taleyrand le laissa partir, et prévoyant d'avance les suites de cette expédition, il resta

(1) Il emmena, avec lui, en Egypte, le jeune Merlin, fils du président du Directoire.

à Paris, et se joua ainsi de Bonaparte, en trompant d'un autre côté les espérances d'un des membres du Directoire qui, à sa sortie, croyoit avoir le ministère des relations extérieures.

POUR SERVIR

À L'HISTOIRE DES EXPÉDITIONS

EN ÉGYPTE ET EN SYRIE.

LIVRE PREMIER.

Traversée de l'armée, débarquement à Alexandrie et séjour en Egypte jusqu'à l'expédition en Syrie.

DES troupes désignées pour une expédition secrète, étoient rassemblées, depuis quelque temps en France, en Italie. On faisoit, dans le silence, des préparatifs considérables dans les ports de Toulon, de Gênes, de Civita-Vecchia, et même en Corse. Bonaparte, déjà fameux par sa campagne en Italie, Kleber, Desaix, célèbres par des combats, par des victoires, étoient à la tête de ces régimens dont les numéros glorieux rappeloient des succès éclatans. Bonaparte arriva a Toulon du 20 au 21 floréal an VI (du 9 au 10 mai 1798), et adressa aux soldats de

terre et de mer de l'armée de la Méditerranée la proclamation suivante:

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» Vous êtes une des ailes de l'armée d'Angleterre. -> Vous avez fait la guerre de montagnes,-de plaines, de siéges; il vous reste à faire la guerre

» maritime.

» Les légions romaines, que vous avez quelque>>> fois imitées, mais pas encore égalées, combat>> toient Carthage tour à tour sur cette même mer >> et aux plaines de Zama. La victoire ne les aban» donna jamais, parce que constamment elles furent » braves, patientes à supporter la fatigue, disci» plinées et unies entre elles.

Soldats, l'Europe a les yeux sur vous! Vous >> avez de grandes destinées à remplir, des batailles » à livrer, des dangers, des fatigues à vaincre ; vous >> ferez plus que vous n'avez fait pour la prospérité » de la patrie, le bouheur des hommes et votre » propre gloire.

» Soldats, matelots, fantassins, canonniers, cava»liers, soyez unis; souvenez-vous que, le jour » d'une bataille, vous avez besoin les uns des autres. Soldats, matelots, vous avez été jusqu'ici négligés; aujourd'hui la plus grande sollicitude de la republique est pour vous: vous serez dignes de l'ar»mée dont vous faites partie.

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