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à statuer sur la filiation des enfants naturels, ils omettaient rarement d'ordonner à la personne qui demeurait chargée de cette éducation de faire élever l'enfant dans la religion catholique. D'après Loysel, quelques coutumes disaient qu'un bâtard, après qu'il est né, est hors de pain, ce qui signifiait émancipé. Par suite, il pouvait consentir à l'aliénation de ses biens, dès l'âge de discrétion, ou 15 ans, tandis que les enfants légitimes n'avaient cette faculté qu'à 21 ans pour les mâles et à 18 pour les filles (1). On reconnaissait d'ailleurs que l'enfant naturel n'était pas soumis à la puissance paternelle et pouvait se marier sans le consentement de son père ou de sa mère.

§ II. Légitimation des bâtards

Les bâtards pouvaient être légitimés de deux manières: par mariage subséquent, ou par lettres de légitimation.

1° Mariage subséquent. - Ce mode de légitimation était le plus parfait. Il effaçait complétement la tache de bâtardise et assimilait l'enfant naturel à l'enfant légitime, sauf dans le cas où il était adultérin ou incestueux.

L'enfant ne cessait pas d'être incestueux, lorsque le père et la mère avaient obtenu avant sa naissance, mais postérieurement à sa conception, des dispenses qui leur permettaient de contracter mariage malgré leur alliance ou lien de parenté; il ne cessait pas d'être adultérin, quoique les liens qui retenaient dans le mariage son père ou sa mère eussent été rompus après sa conception, mais avant sa naissance. La tache restait imprimée sur l'enfant d'une manière indélébile, parce que la faute commise ne pouvait être effacée par un événement postérieur (2). Cette opinion n'était point partagée par les canonistes, mais elle

(1) Cout. du Hainaut, ch. 85, art. 1, et de Mons, ch. 6, 7,8. (2) Coquille, question 28; Bacquet, ch. xi, no 3; Furgole, ch. 6, sect. 2, n° 181.

avait pour elle l'unanimité des jurisconsultes civils et a été consacrée par notre code.

Il était donc nécessaire, pour la légitimation d'un bâtard par mariage subséquent, que ses parents fussent libres lorsqu'il avait été conçu. Il fallait en outre que le mariage n'eût pas été contracté in extremis, d'après la déclaration de 1639, art. 6 et l'art. 8 de l'édit de mars 1697.

Pour légitimer l'enfant né avant le mariage, on le pla-çait avec ses père et mère sous le poële que l'on tenait étendu sur la tête de ceux-ci. Cet usage fort ancien parait s'être introduit en France avec la légitimation elle-même, sous la 3e race. Jusque là, on appliquait le code Théodosien, dans lequel ne se trouvent pas les constitutions par lesquelles Zénon et Constantin permirent de légitimer les enfants per subsequens matrimonium L'observation de cette pratique, décrite par Beaumanoir, ne fut jamais d'ailleurs strictement imposée et, sauf en quelques localités, elle était tombée en désuétude au dernier siècle.

La légitimation par mariage subséquent était considérée avec tant de faveur qu'elle révoquait la donation comme la survenance d'enfants, quoique le légitimé fût né avant la libéralité (1).

2° Lettres de légitimation. Les effets de la légitimation par lettres du prince étaient beaucoup moins étendus. Elle effaçait la tache imprimée à la naissance du bâtard; elle lui rendait les honneurs, selon le mot de Laurière, c'est-à-dire la place qui lui appartenait dans la famille des ascendants; elle le mettait à même de remplir des offices, de recevoir des bénéfices ou des dignités publiques; elle lui permettait de recueillir les donations et les legs universels qui lui étaient faits par ses père et mère, mais elle ne l'autorisa pas toujours à recueillir leur succession ab intestat ou celle des autres membres de la

(1) Brodeau sur Louet, lett. D; ord. de 1731.

famille. Sur ce point il y eut beaucoup de variations dans la jurisprudence. Tout d'abord, la légitimation par lettres du prince avait rendu le bâtard habile à succéder ab intestat à ses père et mère, comme l'enfant légitimé par mariage subséquent (1). Puis, il fut admis qu'il ne pouvait être habilité à succéder que lorsque les lettres de légitimation contenaient une clause expresse à cet effet, et lorsque son père ou sa mère avait consenti à la légitimation. Ce consentement suffisait pour le rendre capable de succéder à tous ses parents, bien que ceux-ci n'eussent point donné leur assentiment formel aux lettres, et n'eussent pas été appelés à leur entérinement. Enfin, dans le dernier état de la jurisprudence, le légitimé pouvait recueillir la succession paternelle ou maternelle lorsque les lettres avaient été enregistrées, même sans clause expresse, mais il n'était admis à celle des autres parents que lorsque ceux-ci avaient formellement consenti à l'enregistrement. En un mot, d'après cette jurisprudence, il fallait que tous les intéressés, quels qu'ils fussent, eussent adhéré à la légitimation. Par suite, le bâtard d'un homme franc et d'une mainmortable, légitimé par lettres du prince, restait mainmortable comme sa mère, si le seigneur de la mainmorte n'avait consenti à sa légitimation et assisté à l'entériment des lettres qui la prononçaient (2). De même, ces lettres n'auraient pas suffi à autoriser un bâtard mainmortable, commun en biens avec le défunt, à se dire son successible, si le seigneur n'avait consenti à l'enregistrement (3). Le seigneur de la mainmorte avait en effet grand intérêt à einpêcher la légitimation du bâtard, puisqu'elle tendait à l'exclure de la succession de son mainmortable, dont il était l'héritier naturel et qui ne pouvait disposer

(1) V. Ferrière, sur la cout. de Paris, art. 318.

(2) V. Bouhier, t. II, p. 785. - Contrà, arrêt du parlement de Dôle, de 1620.

(3) V. Bouhier, t. II, p. 865.

de ses biens par testament. Par application de cette règle, lorsque le père avait des enfants légitimes, le consentement de ces enfants était même requis, d'après Coquille, mais contrairement à l'opinion de Bacquet, pour rendre le légitimé capable de recueillir la succession paternelle. En un mot la plupart des auteurs s'accordaient à reconnaitre que la volonté des proches parents du bâtard légitimé était une condition indispensable à la vocation de celui-ci (1). Quelques-uns cependant estimaient encore au xviie siècle qu'il était nécessaire de joindre à l'expression de cette volonté une autorisation formelle du prince; d'autres enfin, plus radicaux, prétendaient que les lettres de légitimation ne pouvaient en aucun cas rendre le légitimé successible de ses parents, et qu'elles lui donnaient seulement capacité de recueillir les libéralités de ses père et mère (2). Au surplus, il importait peu que le consentement des parents intervint au moment de l'enregistrement des lettres ou postérieurement à cet enregistrement. Le légitimé devenait habile à succéder, dès que les parents intéressés donnaient leur assentiment.

Il était bien entendu que les parents des légitimés par lettres étaient admis à la succession de ceux-ci, alors même qu'ils n'avaient pas consenti à leur légitimation. C'était là une exception à la règle de la réciprocité du droit de succéder. On avait exprimé l'avis que les parents qui avaient donné leur consentement à la légitimation devaient être préférés, dans la succession du légitimé, à ceux qui l'avaient refusé. Mais cette exclusion qui ne reposait sur aucun fondement, puisque la législation avait eu

(1) Davot, Tr. de dr. franc., t 1, p. 71; Taisand, sur la coutume de Bourgogne, p. 535; Brodeau sur Louet, lett. 1, ch. 7; d'Argentré, sur l'art. 356 de la coutume de Bretagne; Lemaistre sur l'art. 318 de la coutume de Paris ; Lebrun, des successions, liv. 1, ch. 2, sect. 1, dist. 2.

(2) V. Legrand sur Troyes, art. 117, gl. 1, no 16; Boucheul sur Poitou, art. 97, no 5.

pour objet de conférer au bâtard la qualité de membre de la famille et le titre d'agnat sans distinction, ne fut jamais accueillie par la jurisprudence.

Ce que nous venons de dire sur le droit de successibilité des parents à l'égard des légitimés ne s'appliquait qu'aux bâtards simples, nés ex soluto et soluta. Quant aux bâtards adultérins et incestueux, aux avoultres, comme les appelaient Beaumanoir et Jehan de Mehun, ou à ceux qui devaient leur naissance à un prêtre, le fisc recueillait leur succession, alors même qu'ils avaient reçu des lettres de légitimation. Mais ils pouvaient se succéder les uns aux autres, parce que l'acquittement des droits de finance perçus pour les lettres les substituait aux droits du roi.

Les lettres de légitimation étaient expédiées au grand sceau, parfois enregistrées au Parlement, mais toujours, d'après un règlement du Conseil d'Etat du 6 avril 1604, vérifiées à la chambre des comptes.

CHAPITRE IV

SERFS ET MAINMORTABLES

Nous arrivons au servage, c'est-à-dire à la condition de la majeure partie de la population rurale de la France. pendant la féodalité, population dont il est impossible d'évaluer exactement le nombre, mais qui ne fut peut-être, avant les luttes désastreuses que souleva l'invasion anglaise au XIV siècle, guère inférieure à celle de nos jours (1).

(1) Je parle ici, bien entendu, seulement de la population rurale. Elle est d'ordinaire fixée bien au-dessous de son chiffre actuel. Mais lorsqu'on parcourt les rôles des paroisses, les relevés de perception des taxes, les dénombrements domaniaux, on est frappé du grand nombre de feux ou de ménages qui existent dans la

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