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France, et les dispositions véritables de vos concitoyens. Vous trouverez dans ces exemples le terme de la guerre étrangère et de la discorde civile. Vous ne sauriez plus le chercher ailleurs.

» C'est dans cette espérance que l'Europe, en armes dans vos murs, s'adresse à vous. Hâtezvous de répondre à la confiance qu'elle met dans votre amour pour la patrie et dans votre sagesse. »

Cette proclamation avait été concertée avec M. de Talleyrand. Le modèle en avait été même envoyé au quartier-général et long-temps délibéré. Tous les partis y trouvaient des motifs d'espérance. On y parlait aux royalistes de l'exemple de Bordeaux; aux républicains, et même aux partisans de Napoléon, du désir des alliés de laisser la nation maîtresse de choisir la forme de son gouvernement. On flattait l'amour-propre national par cette phrase habile, que l'Europe en armes demandait la paix à la capitale de la France.

La vérité était que les puissances alliées, fatiguées de la guerre, avaient besoin de la paix. Leur position était d'ailleurs hasardée, s'ils n'avaient pas pour eux les habitans de Paris. Napoléon pouvait tomber sur leurs derrières,

et les attaquer dans plusieurs directions, soutenu par une population de 800 mille âmes. It fallait donc se hâter de disloquer le gouvernement impérial.

Les armées combinées traversèrent les boulevards, garnis d'un peuple curieux de voir cet assemblage de troupes de tant de nations et de peuples différens. A cette curiosité de contempler un spectacle si nouveau, se mêlait parmi le peuple un sentiment de tristesse.

Par un contraste frappant, des groupes de femmes agitant leurs mouchoirs, saluaient les alliés du titre de libérateurs. Les processions royalistes qui s'étaient promenées dans la matinée par la capitale, précédaient l'empereur Alexandre, et cherchaient par leurs démonstrations bruyantes à lui donner le change sur l'état de l'opinion. Cependant la proclamation du prince de Schwartzemberg avait rassuré les esprits; les boutiques, les marchés se r'ouvrirent. Les soldats, les officiers russes, prussiens, allemands se répandirent dans les rues de Paris. M. le préfet de police, baron Pasquier, maintint l'ordre public; il se mit en rapport direct avec les chefs des armées alliées et les ministres influens auprès des souverains.

Bientôt M. Pasquier conquit cette confiance qui arrive toute seule à la capacité. Il avait été jusqu'au dernier moment fidèle au gouvernement de Napoléon, et surtout aux devoirs de sa magistrature municipale. Il n'alla chez M. de Talleyrand que le 31 mars à quatre heures; c'est alors qu'il se mit à l'entière disposition du salon où allaient se discuter de si grands intérêts.

L'EMPEREUR ALEXANDRE

DANS LE SALON DE M. DE TALLEYRAND.

31 MARS 1814.

LE 31 mars, à six heures du soir, l'empereur de Russie prit possession des appartemens que M. de Talleyrand lui avait fait préparer. Après quelques instans de repos, l'objet de la conversation roula sur les moyens à prendre pour mettre un terme à la guerre.

Alexandre, d'un caractère généreux, quoique un peu dissimulé, avait alors une seule préoccupation, celle d'assurer la paix du monde. Son ambition était de faire un noble contraste avec Napoléon, grand surtout par la guerre. Quoique l'intime influence de Mme Crudner sur l'esprit d'Alexandre n'ait commencé qu'en 1815, le czar avait déjà recueilli certaines idées mystiques et de prédestination, qui lui

faisaient croire * que sa mission était ici-bas de remplir le rôle de pacificateur au moyen de ses immenses armées. C'était une de ces âmes usées par toutes les émotions, comme on en rencontre en Russie. On aurait dit que, préoccupé par le souvenir d'un cruel accident de sa vie qui lui pesait comme le remords, il se jetait avec passion dans le bien comme vers le repentir! Au reste le czar était un homme facile à manier pour M. de Talleyrand, dont l'expression, toujours noble, toujours heureuse, savait si bien parler à ses préjugés généreux. M. de Nesselrode, son chancelier, possédait sa plus haute confiance : diplomate instruit, à formes élégantes et polies, M. de Nesselrode partageait la pensée de l'empereur, son maître, sur la paix générale, se réservant tout entier pour la question du grand duché de Varsovie, au congrès, comme prix des efforts de la Russie dans la coalition. Le général-major Pozzo di Borgo exerçait également une haute influence sur l'esprit d'Alexandre. Né en Corse, et, dit-on, séparé de la famille de Bonaparte par une vendetta hérédi

* Mme Crudner avait persuadé à Alexandre que Napoléon était le diable noir ou le génie des batailles, et que lui était l'ange blanc ou le génie de la paix.

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