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Depuis le retour de Napoléon, les feuilles publiques étaient remplies de recherches historiques sur les reines de France auxquelles on avait déféré la régence et sur les héritiers présomptifs du trône, que les monarques régnants avaient fait couronner de leur vivant. On ne réfléchit pas que ce dernier moyen n'avait été pris, le plus souvent, que lorsque l'ordre de succession à la couronne avait paru mal assuré, et qu'y avoir recours dans la conjoncture où l'on se trouvait alors, c'était annoncer que, comptant peu sur l'affection des Français envers son fils, Napoléon jugeait nécessaire de les. enchaîner par des serments. Quant à la régence qu'il se proposait de déférer à MarieLouise, on présume, avec beaucoup de vraisemblance, qu'il avait principalement en vue de flatter l'Autriche, dont il desirait la coopération. Mais une si vaine démonstration ne devait avoir que peu d'influence sur la conduite de la cour de Vienne, qui pouvait à peine y trouver l'assurance de n'être plus exposée à de nouvelles spoliations, tandis que l'état des affaires de l'Europe lui permettait d'espérer davantage. Quoi qu'il en soit, cet amas indigeste de lois, qu'on appelait les constitutions de l'empire, n'ayant déterminé que peu de points relativement

à la régence, un projet de sénatus - consulte fut présenté à ce sujet, le 2 février, au sénat, qui l'adopta trois jours après. Napoléon, se disposant à partir pour prendre le commandement de ses armées, déclara, par des lettrespatentes en date du 30 mars, qu'il conférait à Marie-Louise le droit d'assister aux conseils du cabinet, toutes les fois qu'il en serait convoqué durant son règne. Les mêmes lettres lui déférèrent la régence, en vertu desquelles elle pouvait présider le sénat, le conseil d'état, le conseil des ministres et le conseil privé, notamment pour l'examen des recours en grâce, sur lesquels elle était autorisée à prononcer, après avoir entendu les membres de ce dernier conseil. Toutefois elle ne pouvait autoriser, par sa signature, la présentation d'aucun sénatus consulte, ni proclamer aucune loi de l'état, ce qui réduisait presque à rien le pouvoir remis entre ses mains. On en jugera par le serment qu'elle prêta le même jour, 30 mars, dans un conseil du cabinet, composé des grands dignitaires et de tous les ministres. Il était conçu en ces termes : « Je jure fidélité à l'empereur. Je jure de me conformer aux actes des constitutions et d'observer les dispositions faites ou à faire par l'empereur mon époux, dans l'exercice de l'autorité qu'il lui plairait de

me confier pendant son absence. » Napoléon n'avait donc délégué réellement que le droit de faire grâce; et l'on conviendra, sans peine, qu'il n'y avait pas là de quoi séduire l'Autriche.

La défection du général d'York avait été considérée généralement comme un présage assuré de la conduite que tiendrait la Prusse dans la lutte qui allait s'ouvrir de nouveau. 11 était impossible, en effet, que cette puissance, dont les états avaient été réduits de moitié par le traité de Tilsitt, et qui avait vu accabler de contributions, de réquisitions et d'exactions de tout genre, les provinces qu'on lui avait laissées, ne saisit pas la première occasion qui pourrait s'offrir de soustraire aux maux qu'ils enduraient encore, ses peuples indignés. Il n'y avait que la terreur inspirée par le voir colossal de Napoléon qui eût pu porter Frédéric Guillaume à joindre ses armes à celles de son oppresseur, pour combattre un monarque auquel il était uni par les noeuds d'une amitié personnelle, et à qui même il devait la conservation de sa couronne. Dans cet état des choses, il ne fallait qu'un léger prétexte pour occasionner une rupture ; et il fut trouvé facilement dans les discussions qui existaient entre la France et la Prusse, au sujet des contributions de guerre et d'autres objets du même

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genre. Sa majesté Prussienne ayant d'abord mis sa personne à couvert, en se retirant en Silésie, province qui n'était point occupée par nos troupes, son ministre annonça, le 17 mars, à l'ambassadeur de France, que la Prusse faisait cause commune avec la Russie; et la même notification fut adressée au ministre des relations extérieures, le 27 du même mois. Quelques jours après, le sénat fut assemblé pour entendre la lecture d'un rapport où le duc de Bassano ne craignit pas de célébrer la générosité de son maître, qui n'avait pas dépouillé de tous ses états sa majesté Prussienne, dont, en conséquence, l'ingratitude était notoire. Cette communication avait pour objet une nouvelle levée d'hommes, qui ne fut que de cent quatre-vingt mille. C'était ne pas garder les règles de la proportion, puisqu'à la défection du contingent prussien, on avait demandé trois cent cinquante mille hommes. Peut-être Napoléon crut-il se dédommager, en proposant la lévée de dix mille hommes choisis dans les familles les plus illustres, ou les plus riches, et destinés à former quatre régiments de gardesd'honneur. On devait en faire un jour des compagnies de gardes-du corps, institution qui, selon l'observation judicieuse de l'orateur du conseil d'état, M. le comte Defermon, est né

cessaire au trône, mais dont, peu d'années auparavant, l'usurpateur avait inutilement tenté le rétablissement (1). L'intention principale de Napoléon était d'obtenir des otages (2) qui pussent lui garantir la fidélité de leurs parents, durant la crise dont il ne pouvait se dissimuler entièrement les approches. Cette mesure tyrannique, comprit une foule de jeunes gens qui s'étaient proposé de parcourir une tout autre carrière que celle des armes, et du plus grand nombre desquels les talents furent à jamais perdus pour la France.

Napoléon, après avoir déployé, durant près de quatre mois, cette funeste activité dont l'a pourvu la nature, quitta sa capitale, le 15 avril, pour aller prendre le commandement de ses troupes, et s'efforcer de rendre à son nom un éclat qu'il ne devait recouvrer que pour peu d'instants.

(1) Cette armée, qui composait la garde de Buonaparte, en avait témoigné son mécontentement, et en conséquence le projet fut ajourné.

(2) Le nombre considérable des gardes-d'honneur suffirait pour prouver cette assertion, s'il en était besoin.

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