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despotisme ou à l'anarchie. Au moyen d'unc modération que les circonstances auraient commandée, elle aurait pu avoir aussi l'inconvénient de changer la direction des affaires de l'Europe, et par conséquent de retarder, sinon de prévenir totalement la restauration.

Napoléon apprit en même temps la conjuration et le supplice de Mallet et de ses complices. Il paraît que ce fut à Smolensk, où il arriva le 13 novembre, qu'il en reçut la nonvelle; et l'on croit qu'elle fut au nombre des causes qui le firent presser son départ. Il jugea, dit-on, qu'il ne devait point perdre de temps pour se rendre dans sa capitale, et contenir les malveillants dont les revers de son armée allaient augmenter le nombre. Quoi qu'il en soit, parti de Smorghony, le 5 décembre il arriva le 10 à Varsovie (1), le 14 à Dresde,

(1) Napoléon, à son passage à Varsovie, eut avec son ambassadeur, M. de Pradt, et avec quelques polonais, un entretien où il a si bien développé son caractère et ses projets, tant pour le passé que pour l'avenir, que nous ne pouvons nous dispenser d'en citer quelques traits : « Il faut lever dix mille cosaques polo>> nais, dit-il; un cheval et une lance suffiront; on arrêtera les >> Russes avec cela. » Les Polonais qui étaient présents, ayant félicité Buonaparte d'être arrivé sain et sauf après avoir couru tant de dangers, il reprit : « Des dangers! pas le moindre. Je

vis dans l'agitation; plus je tracasse, mieux je vaux; il n'y a

et le 18 au soir à Paris, où l'impression facheuse produite par le 29° bulletin, qui était connu seulement depuis deux jours, ne pouvait

» que les rois fainéants qui engraissent dans les palais. Du » sublime au ridicule il n'y a qu'un pas. Je vous trouve bien » alarmés ici. L'armée est superbe (on ne pouvait mentir plus » impudemment). J'ai cent vingt mille hommes (il en avait » emmené quatre cent mille, et il n'en restait que trente mille). » J'ai toujours battu les Russes; ils n'osent pas tenir devant »> nous...... Je vais chercher trois cent mille hommes...... Le » succès rendra les Russes audacieux. Je leur livrerai deux ou » trois batailles sur l'Oder, et dans six mois je serai encore sur » le Niemen. Je pèse plus sur mon trône qu'à la tête de mon » armée. Sûrement je la quitte à regret; mais il faut surveiller » l'Autriche et la Prusse. Tout ce qui arrive n'est rien; c'est » un malheur; c'est l'effet du climat : l'ennemi n'y est pour » rien. Je l'ai battu partout. On voulait me couper à la Béré» zina. Je me moquai de cet imbécille d'amiral. J'avais de » bonnes troupes et du canon. La position était superbe; 1500 »toises de marais et une rivière........ Je ne puis empêcher » qu'il gêle. On vient me dire tous les matins que j'ai perdu » dix mille chevaux dans la nuit. Eh bien! bon voyage. Ncs » chevaux sont moins durs que ceux des Russes: ils ne résis» tent pas passé neuf degrés de glace. Il en est de même des >> hommes. Allez voir les Bavarois; il n'en reste pas un. (A-t-on» jamais poussé plus loin l'insensibilité?) Peut-être dira-t-on » que je suis resté trop long-temps à Moscou. Cela peut être; » mais il faisait si beau. La saison a devancé l'époque ordi»naire; j'y attendais la paix. Le 5 octobre j'ai envoyé Lau»ristop pour en parler. J'ai pensé aller à Pétersbourg; j'en

être encore affaiblie. Buonaparte n'en fut pas moins complimenté le surlendemain par le sénat, dont le comte de Lacépède fut de nouveau l'organe. « L'absence de votre Majesté, » Sire, dit l'orateur, est toujours une calamité » nationale; sa présence est un bienfait qui » remplit de joie et de confiance tout le peuple » Français. » La première partie de cette phrase était parfaitement conforme à la vérité,

» avais le temps; dans les provinces méridionales de la Russie; » à passer l'hiver à Sinolensk. On tiendra à Wilna. J'y ai laissé, >> le roi de Naples. Ah! ah! c'est une grande scène politique. » Qui ne hasarde rien n'a rien. Du sublime au ridicule, il n'y a » qu'un pas. Les Russes se sont montrés. L'empereur Alexan» dre est aimé. Ils ont des nuées de cosaques. C'est quelque » chose que cette nation. Les paysans de la couronne aiment » leur gouvernement. La noblesse est montée à cheval. On » m'a proposé d'affranchir les esclaves ; je ne l'ai pas voulu; ils >> auraient tout massacré: cela eût été horrible (Les esclaves, » ou pour mieux dire les serfs, n'étaient pas moins furicux » contre les Français que les autres habitants de la Russic; » et quelque peu éclairés qu'on veuille les supposer, la liberté » donnée par Buonaparte leur eût paru un contre-sens). Je >> faisais une guerre réglée à l'empereur Alexandre. Mais aussi » qui aurait cru qu'on frappât jamais un coup comme celui de » la brûlure de Moscou? Maintenant ils nous l'attribuent; mais » ce sont bien eux : cela eût fait honneur à Rome. » Il nous semble difficile de nier, après cet aveu, que l'incendie de Moscou ait sauvé la Russie.

si M. de Lacepède entendait parler du fléau de Ja guerre, dont les opérations étaient ordinairement sur le point de commencer, lorsque Napoléon quittait sa capitale; mais pour la joie dont sa présence aurait rempli le peuple Français, on peut assurer que c'était un jeu de l'imagination de l'orateur. Le passage suivant du même discours pourrait en fournir la preuve: « Dans les commencements de nos anciennes » dynasties, Sire (poursuivit M. de Lacepède), » on vit plus d'une fois le monarque ordonner » qu'un serment solennel liât d'avance les » Français de tous les rangs à l'héritier du » trône; et quelquefois, lorsque l'âge du jeune » prince le permit, une couronne fut placée » sur sa tête, comme le gage de son autorité » future et le symbole de la perpétuité du gou» vernement. » Si les Français, et surtout les habitants de Paris, avaient montré une froideur moins marquée au bruit de la mort de Buonaparte, on n'aurait certainement pas songé à une précaution qui n'a guère été prise que lorsque la succession au trône a paru menacée.

Napoléon dit, entre autres choses, au sénat, dans la réponse qu'il lui adressa : « Des soldats » timides et lâches perdent l'indépendance des » nations; mais des magistrats pusillanimes

» détruisent l'empire des lois, les droits du » trône et l'ordre social même.

» La plus belle mort serait celle d'un soldat » qui périt au champ d'honneur, si la mort » d'un magistrat qui périt en défendant le » souverain, le trône et les lois, n'était plus > glorieuse encore. . . . .

» Nos pères avaient pour cri de ralliement : » le Roi est mort, vive le Roi! Ce peu de mots » contient les principaux avantages de la mo»narchie. . . . . . . $

› C'était évidemment la conduite du préfet de la Seine, qui avait suggéré ces réflexions, dont la justesse ne peut être contestée. Napoléon, en les faisant, se proposait sans doute aussi d'attirer l'attention publique sur les conspirateurs et leurs adhérents, pour l'empêcher de se porter tout entière sur les désastres de sa retraite. Il fallut en parler cependant; mais la matière était si délicate, que, pour se tirer d'embarras, Buonaparte fut forcé de se mettre en contradiction avec lui-même, en déclarant que les pertes essuyées par son armée n'étaient dues qu'à la rigueur prématurée de la saison (1),

(1) Il aurait fallu n'avoir aucune connaissance du climat de la Russie, où il n'y a ordinairement ni printemps ni automne, pour croire que l'hiver y aurait été prématuré le 6 novembre,

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