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à l'extrémité de la ligne. M. de Tchertnitcheff était destiné à rendre bientôt des services d'un genre plus noble à son souverain.

Peu de temps après cet événement, Napoléon quitta Paris (10 mai 1812). Voulant ne pas paraî tre l'agresseur, il fit annoncer simplement qu'il allait faire l'inspection de la grande-armée réunie sur la Vistule. Accompagné de Marie-Louise, il se rendit à Dresde, où l'empereur d'Autriche et le roi de Prusse vinrent le trouver. Ces deux princes, qui n'avaient à redouter que lui seul, s'étaient engagés, par un traité prétendu défensif, à lui fournir un certain nombre de troupes, en cas d'agression de la part de la Russie, dont ils ne devaient rien appréhender (1). Quelque

(1) Ce fut seulement le 3 juillet, époque où l'on pensait que les hostilités devaient être commencées, que l'archi-chancelier communiqua au sénat les traités conclus avec l'Autriche et avec la Prusse. On lut d'abord un rapport du duc de Bassano, contenant les griefs de son maître contre la Russie. « En 1809, » l'Autriche fit la guerre à la France, dit le ministre; la Rus>> sie, contre le texte précis du traité, ne fut d'aucun secours à » Votre Majesté; au lieu de cent cinquante mille hommes » qu'elle pouvait faire marcher, quinze mille seulement en

trèrent en campagne, et lorsqu'ils dépassèrent la frontière »russe, le sort, de la guerre était déjà décidé. » Singulier grief, qui consistait, non pas à avoir violé ses engagements, mais à n'avoir pas fait tout ce qu'on aurait pu faire! Et c'était avant de produire un traité d'alliance avec l'Autriche, qu'on reprochait à

satisfaction qu'il dût éprouver à se voir environné de souverains qu'il avait réduits à n'être plus que des auxiliaires soumis à ses volontés, Napoléon s'arracha promptement aux hommages et aux fêtes qui lui furent prodigués à Dresde (1). Les champs de bataille l'atten

la Russie de n'avoir pas concouru efficacement à écraser cette puissance.

« Depuis cette époque, Sire, poursuivait le duc de Bassano » Pukase du 19 décembre 1810, qui détruisit nos relations » commerciales avec la Russie, l'admission du commerce de » l'Angleterre dans ses ports, ses armements, qui menaçaient » d'envahir le duché de Varsovie, enfin sa protestation sur le » pays d'Oldenbourg anéantirent l'alliance. »

Le même ministre fit un autre rapport sur la Prusse. Il y disait que cette puissance avait appris avec beaucoup de regret les agressions de la cour de Saint-Pétersbourg, à qui elle avait fait vainement des représentations; que voyant cette fatalité, qui depuis dix ans avait entraîné l'Europe, peser aussi sur la Russie, elle avait demandé franchement, dès le mois de mai 1811, à s'unir à la France par un traité d'alliance.

Ainsi deux puissances, qui n'existaient encore que parce que la Russie leur avait prêté son appui, s'armèrent contre elle en faveur du conquérant farouche qui les avait dépo illées. Telle était cependant la position critique où elles se trouvaient, qu'on ne pouvait guère les accuser d'ingratitude. C'était du moins à leur propre conservation qu'elles sacrifiaient leur reconnaissance; mais ce ne devait pas être pour long-temps.

(1) M. de Pradt rapporte, dans son Ambassade à Varsovie, une conversation qu'il prétend avoir eue avec Napoléon,

daient, et lui promettaient de plus douces jouissances. Son instinct féroce l'emportait encore sur sa vanité, tout outrée qu'elle était.

et qui, dans le fait, offre tous les caractères de la vérité. Comme elle expose en partie le plan que le grand homme avait conçu pour son expédition de Russie, nous croyons ne pouvoir nous dispenser d'en citer quelques traits.

Après lui avoir annoncé qu'il se proposait de l'envoyer en ambassade en Pologne, Napoléon dit à M. l'archevêque, de Malines, dans ce style burlesque qu'il employait si souvent : « Allez, faites, je vous essaie; vous pensez bien que ce n'est » pas pour dire la messe (*) que je vous ai fait venir. Il faut » tenir un état immense..... Soignez les femmes; c'est essen. » tiel dans ce pays. Vous devez savoir la Pologue; vous avez lu » Rulhières. Dans quinze jours on a des cuisiniers. Pour » moi, je vais battre les Russes; la chandelle brûle; à la fin de >> septembre il faut avoir fini; peut-etre y a-t-il déjà du temps de » perdu. Je m'ennuie ici. Depuis huit jours je suis à faire le

....

galant, le petit Narbonne auprès de l'impératrice d'Autri» che..... Je vais à Moscou; une ou deux batailles en feront » la façon. L'empereur Alexandre se mettra à genoux (**). >> Je brûlerai Toula; voilà la Russie désarmée. On m'y attend. >> Moscou est le cœur de l'empire. D'ailleurs je ferai la guerre » avec du sang polonais. Je laisserai cinquante mille Français » en Pologne ; je ferai de Dantzick un Gibraltar. Je donnerai » 50,000,000 par an de subside aux Polonais; ils n'ont point

(*) Le jour de la Trinité, M. l'archevêque de Malines célébra la messe pontificalement à Dresde, dans la chapelle de la cour. Napoléon y assista.

(**) Il ne s'y est pas mis, et Napoléon est à Ste.-Hélène.

Napoléon, après avoir passé en revue les différentes divisions de son armée, porta son quartier-général à Wilkowisky, ville située à l'extrémité du duché de Varsovie, et peu éloignée du Niémen. Il y fit mettre à l'ordre du jour la proclamation suivante, qui lui servit de déclaration de guerre :

<< SOLDATS!

» La seconde guerre de Pologne est.com» mencée : la première s'est terminée à Fried» land et à Tilsitt. A Tilsitt, la Russie a juré » éternelle alliance à la France, et guerre à » l'Angleterre. Elle viole aujourd'hui ses ser»ments; elle ne veut donner aucune explica» tion de son étrange conduite, que les aigles » françaises n'aient repassé le Rhin, laissant, » par-là, nos alliés à sa discrétion (1).

» d'argent; je suis assez riche pour cela. Sans la Russie, le » système continental n'est qu'une bêtise. L'Espagne me coûte » bien cher; sans elle je serais le maître de l'Europe. Quand » cela sera fait, mon fils n'aura qu'à s'y tenir ; il ne faudra pas » être bien fin pour cela. »

(1) Le deuxième bulletin fut accompagné de plusieurs pièces officielles, dont la première était une lettre du ministre des relations extérieurés, duc de Bassano, au comte de Romanzoff, chancelier de Russie. C'est une récapitulation de tout ce qui s'était passé depuis le traité de Tilsitt; récapitulation faite de la

La Russie est entraînée par la fatalité ! »ses destins doivent s'accomplir ! Nous croi»rait-elle donc dégénérés? Ne serions-nous

manière la plus astucieuse et probablement dans le déssein de servir de manifeste. La seconde pièce est vraiment curieuse. C'est une lettre du même duc de Bassano au lord Castlereagh, secrétaire d'état pour les affaires étrangères de S. M. B. Napoléon y faisait proposer la paix à l'Angleterre. Voici quelles devaient en être les bases : « L'intégrité de l'Espagne serait garantie; la France renoncerait à toute extension du côté des Pyrénées; la dynastie actuelle serait déclarée indépendante, et l'Espagne régie par une constitution nationale des cortès; l'indépendance et l'intégrité du Portugal seraient également garanties, et la maison de Bragance régnerait; le royaume de Naples resterait au rói de Naples; le royaume de Sicile serait garanti à la maison actuelle de Sicile. Par suite de ces stipulations, l'Espagne, le Portugal et la Sicile seraient évacués par les troupes françaises et anglaises de terre et de mer. Quant aux autres objets de discussion, ils pouvaient être négociés sur cette base que chaque puissance garderait ce que l'autre ne pouvait lui ôter par la guerre. » Mylord Castlereagh répondit que le prince Régent desirait savoir préalablement ce qu'on entendait par ce passage: «La dynastie actuelle serait déclarée indépendante et l'Espagne régie par une constitution nationale des cortès. » Ce ministre poursuivait de la sorte: « Si, comme S. A. R. le » craint, le sens de cette proposition est que l'autorité royale

d'Espagne et son gouvernement, établi par les cortès, seront » reconnus comme résidant en la personne du frère du chef » du gouvernement français et les cortès formés sous son au» torité, et non dans le souverain légitime, Ferdinand VII et

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