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utour de ce pouvoir une vivante et indestructible muraille. Effacez de l'histoire nos revers militaires, supposez Napoléon triomphant de la Russie, de l'Autriche, de l'Europe; et les révolutions qui ont renversé les royautés, dont la sienne a été suivie, l'auraient balayé tôt ou tard pour n'en laisser aucune

trace.

L'Acte additionnel aux Constitutions, si impatiemment attendu par la nation, et qui devait « protéger et défendre les interêts que la révolution avait fait naître », nous montre, mieux encore que tout ce qui précède, l'ignorance et aussi l'impuissance de tous les hommes de l'Empire à rien fonder de durable. Pour les be soins du moment, un pas a été fait vers les Principes, vers la Liberté; on se hâte d'en faire dix vers l'Autorite. Ce qu'il y a de curieux, c'est que les meilleures, les plus liberales intentions, la plus vive sollicitude pcar les drouds du peuple, acent présidé à la rédaction de cette charie tronquee, etriquee, incomplète. Écoutons le preambale de l'Acte additionnel.

Depuis que nous avons été appelé par le vœu de la France, « dit Napoléon empereur des Français par la grâce de Dieu, au « gouvernement de l'Etat, nous avons cherché à perfectionner « à diverses époques les formes constitutionnelles, suivant les « désirs et les besoins de la nation, et en profitant des leçons de l'expérience. Les Constitutions de l'Empire se sont ainsi « formées d'une série d'actes qui ont ete revêtus de l'accepta«<tion du peuple. Nous avions alors pou: but d'organiser un « grand système fédératif europeen, me nous avions adopte a comme conforme à l'esprit de steck e favorable scx progrès de la civilisation. Por navna te rompleter et a lu a donner toute l'étendue e: truk avati etat sus

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<< ment de la liberté publique. De là résulte la nécessité de << plusieurs modifications importantes dans les Constitutions, << sénatus-consultes et autres actes qui régissent cet Empire. A «< ces causes, voulant, d'un côté, conserver du passé ce qu'il "a de bon et de salutaire, et, de l'autre, rendre les Constitu«tions de notre Empire conformes en tout aux vœux et aux <«< besoins nationaux, ainsi qu'à l'état de paix que nous dési«rons maintenir en Europe, nous avons résolu de proposer « au peuple une suite de dispositions tendant à modifier et à perfectionner ses actes constitutionnels, à entourer les droits <«< du citoyen de toutes les garanties, à donner au système représentatif toute son extension, à investir les corps intermé« diaires de la considération et du pouvoir désirable; en un « mot, à combiner le plus haut point de liberté politique et de << sûreté individuelle, avec la force et la centralisation néces<< saires pour faire respecter par l'étranger l'indépendance du peuple français et la dignité de notre couronne.... »

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Nous accepterons la sincérité de ce préambule. Napoléon, de 1799 à 1814, cherchait à fonder une grande fédération européenne, conforme à l'esprit du siècle et favorable aux progrès de la civilisation; pour accomplir un semblable projet, il était nécessaire d'ajourner l'établissement de plusieurs institutions destinées à protéger la liberté des citoyens. Nous le voulons bien, quoique nous ne comprenions pas encore comment la liberté des Français, la jouissance de leurs droits politiques et sociaux, auraient pu nuire à l'établissement du vaste système fédératif, et, tout au contraire, ne l'auraient pas favorisé, en inspirant aux autres peuples du respect et de l'admiration pour nos propres institutions, qu'ils eussent ainsi enviées. Le but actuel du gouvernement impérial « est de donner au système << représentatif toute son extension, d'accroître la prospérité « de la France, par l'affermissement de la liberté. »

Étrange manière de procéder à cette œuvre, que de débuter

par une usurpation déguisée de pouvoirs. L'article 2, du titre Ier, dispositions générales de l'Acte additionnel, établit que le pouvoir législatif est exercé par l'empereur et par deux Chambres, dont l'une, chambre haute et aristocratique, non élective, héréditaire ou à vie, à la nomination de l'empereur, sera un boulet de plomb attaché aux pieds des législateurs nommés par le peuple. Et comment nommés? par ce système à soupape de sûreté qu'on appelle l'élection à deux degrés. Quant aux Droits de citoyens, nous ne voyons guère dans l'Acte additionnel que ceux dont la Charte de Louis XVIII a octroyé l'exercice, sous bénéfice de lois restrictives: la liberté individuelle, la liberté religieuse, l'inviolabilité des propriétés, la liberté de la presse.

Ainsi, l'équilibre des pouvoirs, c'est-à-dire l'antagonisme de l'Autorité et de la Liberté, est à peu près introduit dans la nouvelle Constitution; et l'expérience n'avait amené les idées napoléoniennes qu'à substituer à un mauvais gouvernement, le timide essai d'un gouvernement dangereux.

Il nous reste maintenant à jeter un coup d'œil sur ce que nous appellerons les aspirations napoléoniennes; sur les développements ultérieurs que Napoléon Bonaparte donna à sa pensée, lorsqu'une chute définitive lui eut montré les inconvénients et les vices de son règne. Lui-même nous a laissé tous les éléments de ce travail; et tandis que les Bourbons torturaient leur Charte aux Tuileries, pour en faire sortir l'arbitraire, il rédigeait la sienne à Longwood. On verra qu'elles avaient encore plus d'un point de contact, et que la France n'eût pas beaucoup gagné au change.

« Je crois qu'il y a moyen de gouverner par une Constitution: j'ai voulu pour la France le sceptre du monde, et pour le lui assurer il me fallait un pouvoir sans contradiction. Pour gouverner la France, réduite à ses limites actuelles ou même naturelles, il se peut qu'un régime constitutionnel vaille mieux......

TOME V.

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Des élections libres? des discussions publiques? des ministres responsables? la liberté? je veux tout cela; la liberté de la presse surtout.... j'ai écarté la liberté, lorsqu'elle gênait ma route; mais je la comprends, je l'ai aimée; elle a été le rêve de ma jeunesse..... La situation est neuve; je ne demande pas mieux que d'être éclairé. Je vieillis; l'on n'est plus à quarantecinq ans ce que l'on était à trente. Le repos d'un roi constitutionnel me convient. Il conviendra sûrement à mon fils. >>

C'est à Benjamin Constant que Napoléon adresse ces paroles, en 1815, pendant les Cent-Jours. Cinq ans plus tard, à Sainte-Hélène, il les confirme par ces réflexions léguées au fils de Marie-Louise, dont il espère le retour sur le trône impérial :

« Que résultera-t-il des œuvres de la Sainte-Alliance? L'Europe ne formera tôt ou tard que deux camps : les rois et leur cortége d'un côté, les peuples et leurs intérêts de l'autre. Elle ne se divisera plus par nationalité en royaumes, mais bien par couleur et par opinion. Qui oserait prédire les crises, les effets de tant d'orages accumulés à l'horizon européen? Quant à l'issue, elle est indubitable, car les lumières ne rétrogradent jamais que pour mieux avancer. Peuples et rois me regretteront, et si jamais mon fils est rendu aux Français, il pourra leur dire : Mon père pensait à vous sur son rocher, au milieu de l'Atlantique. Je soumets à votre sanction la Constitution qu'il m'a léguée avec ses conseils, pour la grandeur et pour la prospérité de notre belle patrie. »

Et le général Montholon nous apprend dans ses Mémoires que ce fut sous l'empire de ces impressions que l'empereur prépara la Constitution que ses espérances destinaient au règne de son fils.

Dans son admirable et lucide prescience, Napoléon a deviné et décrit les faits qui doivent se produire un jour en Europe, qui résulteront forcément de l'œuvre impie et absurde de la Sainte-Alliance. D'un côté tous les rois, de l'autre tous les

peuples, sans distinction de nationalité. Tous les Intérêts aristocratiques se grouperont ensemble, devenus, malgré les différences de lieux, de mœurs et de langage, solidaires entre eux; tous les Principes démocratiques, des bords de la Seine aux bords de la Vistule, se donneront la main. Une lutte de géant s'ensuivra, dont l'issue est indubitable, car les lumières ne rétrogradent jamais que pour mieux avancer. C'est l'empereur qui le dit. Or, quel rôle trouvera-t-il à son fils, à l'héritier de son sceptre et de ses idées, dans cet immense conflit des temps modernes? Ici, le prophète sublime, illuminé par un rayon d'en haut, disparait pour faire place à l'étroit politique, enfermé dans les liens inextricables de son système. Entre les rois et les peuples il ose poser une sorte de digue, dont le point d'appui sera la France et la Constitution qu'il lui lègue. Or, nous savons si les Constitutions ont jamais empêché le triomphe de mouvements profondément révolutionnaires, et si les compromis entre les deux antagonismes sociaux ont jamais abouti à une réconciliation impossible. La France, depuis cinquante années, en fait de douloureuses expériences.

I. La Charte napoléonienne de Sainte-Hélène constitue « une « monarchie démocrative, sous la dénomination d'Empire << Français. >>

II. La souveraineté, dit-elle, réside dans la nation; mais la nation confère au prince qu'elle élève au trône, sous le titre d'empereur, l'exercice de cette souveraineté dans les limites. déterminées par les divers titres de la Constitution.

III. L'empereur transmet à ses descendants en ligne directe, légitime, naturelle, de mâle en måle, par ordre de primogéniture, le mandat qu'il a reçu de la nation.

IV. En cas d'extinction de cette ligne, un congrès national élève au trône une nouvelle dynastie.

Qu'y a-t-il dans cette Monarchie démocrative qui ne ressemble, à s'y méprendre, à l'empire prétendu démocratique

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