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du Concert Européen. <«< Avant qu'il ne fût question, sur la fin du dernier siècle, de prendre des arrangements au sujet de la succession de Charles II, les princes ne s'étaient point encore avisés de régler les intérêts de leurs voisins sans les appeler, sans les consulter, sans discuter leurs droits (1), ni de se porter pour juges, quand ils ne pouvaient être que de simples médiateurs. Je sais que cette politique est commode, qu'elle est utile dans de certaines circonstances, parce qu'elle tranche des difficultés qu'il serait trop long de débrouiller; mais elle sera toujours très pernicieuse. Elle affaiblit l'empire de la raison et de la bonne foi, qui n'est déjà que trop faible, elle donne tout à la force et à la convenance et rendant les droits équivoques et douteux, elle multiplie les prétentions et par conséquent les causes de brouillerie entre les puissances » (2). Cela laisse supposer que Mably n'aurait pas été partisan du véritable Concert Européen; les critiques. qu'il adresse sont toutefois prématurées : l'Europe n'était pas encore prète pour traiter avec ensemble et avec suite les affaires qui n'intéressaient qu'une des personnalités la composant; et voici la situation du continent au lendemain de 1714. L'Autriche était très favorisée et quand en 1718, elle joignit la Sicile à Naples, et que dictant aux Turcs la paix de Passarowitz, elle obtint Belgrade et la Serbie du Nord, elle fut à l'apogée de son extension territoriale. L'Instruction du comte du Luc, du 3 janvier 1715, fait remarquer que « l'Empereur regarde comme autant d'usurpations faites sur lui, les Etats dont il n'est pas le maître ». Mais en s'accroissant, l'Autriche se disperse « et présente à ses adversaires autant de points d'agression » (3). Et

(4) Cpr avec le Congrès d'Aix-la-Chapelle de 1818.

(2) Op. cit., II, p. 44.

(3) Réal de Curban, Science du Gouvernement, VI, 485.

d'ailleurs, presque tout en elle est un sujet de faiblesse. Elle n'a rien de ce qui fait la personnalité de ses voisines : Elle n'est ni une nation (1), ni un État. M. Sorel a très bien dit : « Il n'y a pas de nation autrichienne.., Ce n'est pas un État, à proprement parler, car il n'y a pas d'institutions, ce n'est pas même un gouvernement, c'est une diplomatie administrative.

«L'Autriche ne gouverne ses provinces qu'en vue de l'Europe, elle n'a qu'un moyen de les maintenir, c'est celui par lequel l'Europe se contient : la pondération des forces opposées. C'est à cet Empire qu'il faut appliquer la définition que Michelet donnait de l'Allemagne : une petite Europe dans la grande.

<« Il y a un Equilibre autrichien, comme il y a un Équilibre européen; mais comme il se trouve dans les États autrichiens un souverain unique disposant d'une force armée, l'Equilibre y devient une vérité et y tient lieu de constitution. Il y entraîne les mêmes conséquences que dans la « République européenne ». La monarchie autrichienne est réduite à s'appliquer à soi-même les règles de conduite que dans leur perpétuelle rivalité, les puissances de l'Europe suivent les unes à l'égard des autres » (2).

La France restait après Utrecht, puissante et forte; elle y avait même gagné en définitive de n'avoir plus de maison d'Autriche qu'en Allemagne, et le plus ardent foyer de la haine, le plus dangereux aussi, était en Espagne. De ce côté elle n'avait plus rien à craindre : les Espagnols, en quittant les Pays-Bas, cessaient d'avoir contre nous une cause permanente de guerre, et, après avoir été deux

(4) « L'Autriche n'est point une nation, disait le prince Gortchakoff ce n'est qu'un gouvernement. » (La monarchie Austro-Hongroise et l'Equilibre européen. Rev. des deux-Mondes, 15 oct. 1897).

(2) Les mœurs politiques et les traditions, p. 442. 443.

siècles nos ennemis, pouvaient devenir nos alliés. Libre sur sa frontière méridionale, la France pouvait porter ailleurs toutes ses forces.

Du reste, l'Angleterre, sa vieille ennemie se posait de plus en antagoniste de sa puissance. La Grande-Bretagne avait acquis à Utrecht de belles colonies, des points de contact avec l'Europe, et sur mer, une prépondérance qu'il sera difficile de détruire.

Comme la Hollande et comme la Suède, l'Espagne ne devait plus tenir l'un des premiers rôles sur la scène politique.

Par contre deux États nouveaux, la Prusse et la Russie, prennent place dans l'assemblée de l'Europe. Par un article séparé du traité d'Utrecht (1) la France reconnut l'électeur de Brandeboug, pour roi de Prusse. C'était alors sa seule ambition; bientôt il en eût d'autres. Les nouveaux venus vont nécessairement influer sur le système général de la politique, et leurs forces s'ajoutant aux anciennes vont déranger la balance. D'ailleurs « les Etats qui sont en voie de formation ont toujours dans leur allure, quelque chose de faible et d'inquiet» (2) et cela encore contribuera. à rendre l'Equilibre moins stable. Les jeunes nations, prussienne et russe, seront des facteurs, avec lesquels il faudra compter, et comme elles ont un ardent désir et une grande. joie de vivre, on peut se figurer qu'elles se hateront de prendre part à toutes les affaires de l'Europe; sorties désormais de leur isolement, on les verra mêlées à toutes les querelles, tâcher de se créer une existence plus sûre et plus facile en agrandissant leur territoire et en fortifiant sans cesse leur puissance (3). L'oeuvre des traités d'Utrecht

(4) L'art. I.

(2) Nettement, Hist. de la Restauration, I, 594.

(3) Sur la formation de la Prusse, V. Puget de la Serre, Tableau

fut salutaire: «Ils définirent, dit M. Giraud, et limitèrent le droit que peut donner l'intérêt de la sécurité générale des États, et concilièrent ainsi ce droit sacré avec le respect dû à l'indépendance des nations dans l'exercice intérieur de la souveraineté... Depuis, les éléments de l'Equilibre ont changé, mais les principes sont demeurés les mêmes » (1).

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Pologne. La Pragmatique Sanction. La Prusse s'empare de la Silésie. La France se joint à elle pour reprendre son ancienne politique et abaisser l'Autriche. Appréciation de l'alliance prussienne par Mably et Favier. Alliance de l'Autriche et de l'Angleterre. M. de Puysieux caractérise la politique anglaise.

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L'Europe en 1748. L'antagonisme de l'Angleterre et de la France. Celle-ci cherche des alliances. Le roi de Prusse l'abandonnant, elle est obligée de se rapprocher de l'Autriche. Les préventions des esprits. Ce que devait être l'alliance autrichienne. Mal comprise, elle a causé la ruine française.

l'histoire de la Louis XVIII di

de l'Europe, p. 336. E, Lavisse, Etudes sur Prusse. Les Princes colonisateurs de la Prusse. sait de cette puissance : « L'ambition est pour elle une nécessité. » (Instructions à Talleyrand).

(1) Op. cit., p. 1.

III. Les partages polonais.

-

La situation en 1763. Le droit public. L'agrandissement est l'objet de la politique. On empiète sur le voisin, et la balance étant détruite, d'autres Etats demandent des compensations. Les tiers faibles les fournissent. Les partages polonais. Pourquoi la Pologne a été partagée. L'anarchie de ce pays est un danger

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pour la Russie.
- Elle interviendra pour sa sécurité.
de la Pologne est une autre cause d'intervention.

L'attitude autrichienne.

- La faiblesse

L'action fran

L'entente des

çaise devant les agissements russes. Pourquoi la Turquie ne défend la Pologne. pas trois cours du Nord. Le premier partage. Le second partage en 1792 et les conquêtes de la France. L'insurrection polonaise de 1794. L'Equilibre est-il responsable de ces démembrements?

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I

Les alliances sont le principal moyen de maintenir l'Equilibre et d'atténuer dans une certaine mesure les changements considérables qui se produisent dans les forces des États. Ces changements sont inséparables de l'existence; parce que les nations sont obligées de progresser pour vivre, et que cette évolution n'est pas égale pour toutes. Pour parer à cette inégalité, des relations nouvelles se font et se défont tour à tour dans la société internationale, suivant que la balance semble pencher d'un côté ou d'un autre.

En 1714, l'Angleterre, l'Autriche, la France étaient sorties de litige avec des forces à peu près égales : aucune d'entre elles n'avait le pouvoir d'en imposer aux autres. Elles semblaient heureuses de leur sort et désirer la paix. On le vit bien quand l'Espagne, dans le renouveau de vigueur que lui donnait le génie d'Albéroni, rêva de

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