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à son fils Philippe, l'Espagne, l'Italie, la Flandre, les Indes Occidentales et Orientales; à Ferdinand, son frère, la couronne germanique et les possessions autrichiennes en Allemagne. Ce fut Philippe qui hérita des projets ambitieux de son père. Le roi d'Espagne avait épousé Marie Tudor; cette reine morte, il demanda la main d'Elisabeth d'Angleterre « Il eut pu alors, dit Fénelon, faire la loi aux autres puissances de la chrétienté. Mais un droit particulier de succession ou de donation devait céder à la loi naturelle de la sûreté de tant de nations. Summum jus, summa injuria. L'Europe entière aurait eu raison de s'opposer à cet établissement » (1).

Elisabeth repoussa les avances de Philippe et l'Espagne s'engagea dans une série de guerres où elle allait perdre une puissance qu'elle ne devait plus retrouver.

La Réforme, en brisant l'unité catholique, fut un grand obstacle à la constitution de l'Empire universel. CharlesQuint l'avait compris et il essaya de réduire le protestantisme. Il n'y réussit pas. Son fils fit la même tentative et dans le Brabant tout fut dévasté; mais en Hollande la résistance fut plus énergique et les Provinces-Unies secouèrent le joug espagnol et proclamèrent leur indépendance (1579). Dès 1578, la France soutient ces provinces. Cette politique n'était pas complètement désintéressée. Acquérir la Belgique a été le grand but de la diplomatie française jusqu'en 1830. Pour l'intelligence du grand rôle qu'ont joué les Pays-Bas dans l'histoire de l'Équilibre européen, il nous paraît nécessaire de passer en rapide revue les différentes raisons du prix que les puissances d'Europe (la France, autant et plus que les autres) ont de tout temps attaché à connaître et à déterminer elles-mêmes entre quelles mains et dans quelles

(1) Fénelon, op. cit., p. 348.

conditions serait placée cette étendue de plaines et de côtes connue autrefois sous le nom commun de Pays-Bas et dont la Belgique d'aujourd'hui n'occupe qu'une partie.

A regarder la carte simplement, on ne voit pas sans surprise, resserrés dans cet espace les noms des batailles où le sort de l'Europe a été en jeu. « Il semble qu'on fasse une promenade militaire, qui, partant de Bouvines, passe par Courtray, Cassel, Rocroy, Lens, Senef, Fleurus, Malplaquet, Ramillies, Denain, Fontenoy, Raucoux, Lawfeld et Jemmapes pour aboutir à Ligny et à Waterloo (1). >>

C'est que trois grands États, France, Angleterre, Allemagne, ont eu toujours un intérêt égal, soit à y établir leur domination, soit à n'y pas souffrir de rival et cela par l'unique souci de leur défense et de leur sécurité personnelle. Une ligne indécise de territoires séparait la France de ces pays que rien ne distinguait extérieurement des siens. Il y allait de sa sûreté et même à certains jours de son existence à ne pas y laisser établir un voisinage inconnu ou suspect; et s'y étendre, se les approprier même « devait paraître à tout souverain français la seule manière un peu sûre de prendre et de garder les clefs de sa maison » (2).

Précisément parce que c'était la politique naturelle et toujours soupçonnée de tout gouvernement français, un sentiment de défiance analogue devait dicter des précautions contraires à des intérêts opposés. L'Allemagne ne pouvait sans prendre ombrage voir la France assise sur les deux rives de la Meuse, si près de franchir le Rhin.

(1) Duc de Broglie, Le dernier bienfait de la Monarchie, Revue des Deux Mondes, 1er décembre 1899, p. 484.

(2) Ibid. Crevecœur disait à Charles VIII: « La grandeur et le repos du royaume dépendent de la possession des Pays-Bas. » Guizot, Hist. de France, II, 475.

« Enfin l'Angleterre qui a longtemps eu peine à supporter patiemment les forces navales françaises en vue de ses côtes, même à Calais et à Dunkerque, pouvait encore moins se résigner à la retrouver à l'autre extrémité de l'étroit bras de mer qui la sépare du continent» (4). Depuis l'avènement de Charles-Quint, la lisière des PaysBas est devenue le point de contact des deux maisons souveraines qui se disputent la gloire et l'empire. C'est le grand enjeu de la lutte, et on va mieux saisir maintenant. l'importance des négociations faites à ce sujet et que nous retrouverons pendant la guerre de trente ans, le siècle de Louis XIV et le premier empire.

Dans la guerre d'indépendance, soutenue par les Provinces-Unies contre le roi d'Espagne, la reine d'Angleterre, Elisabeth, s'empressa de secourir les insurgés, associant ainsi de bonne heure la fortune de l'Angleterre à celle de la république naissante (2). Deux motifs guidaient sa politique. Elle comprit d'abord que l'oppression du parti protestant, en menaçant la liberté religieuse et politique des nations protestantes, devaient troubler l'Equilibre, surtout parce qu'elle préparait pour une époque peu éloignée l'unité redoutable de l'Empire germanique. Puis elle ne voulait pas laisser le roi de France protéger seul les Provinces. Elle craignait que Charles IX en les aidant à secouer le joug espagnol et en excitant leur reconnaissance, ne se préparât les moyens de les annexer à la France. Or, c'était là une éventualité à laquelle le

(1) « Au moyen âge, l'Angleterre vend la laine de ses moutons à la Flandre qui est son atelier. Aussi, est-elle en relations étroites avec ce pays qu'elle défend déjà contre les rois de France. » Lavisse, op. cit., p. 403.

(2) Frédéric II, de Prusse, disait : « La Hollande suit l'Angleterre comme une chaloupe suit l'impression du bâtiment de guerre auquel elle est attachée. » (Mémoires, duc de Broglie, op. et loc. cit.)

gouvernement anglais ne devait jamais consentir. La Saint Barthélemy, qui semblait faire à tout jamais ennemis catholiques et protestants, dut rendre cette réunion moins probable, car il était désormais difficile aux Hollandais de se jeter dans nos bras. Ils le firent pourtant et l'on vit en un siècle de foi profonde, l'alliance étrange du roi très chrétien et des hérétiques.

Dans le même temps, Charles IX négociait avec les princes protestants d'Allemagne, leur conseillant de ne plus prendre l'Empereur dans la maison d'Autriche. Ces négociations n'aboutirent pas et Henri III qui les reprit ne fut pas plus heureux.

A cette époque, Duplessis-Mornay adressa au roi un discours sur les moyens de diminuer l'Espagnol @... le salut de la France, disait-il, exige que la puissance espagnole soit abaissée. Il suffit que la France la France prenne l'initiative de la rupture pour que tous les États de la chrétienté qui ne s'entretiennent que par contre-poids et ont la grandeur d'Espagne pour suspecte se tournent contre l'ambition déréglée de la Maison d'Autriche » (4).

Mais, c'est à Henri IV qu'était dévolu « ce grand héritage de la polititique de la république chrétienne »> (2). C'est lui, qui écrivant à Elisabeth, se proposait « d'ètre le capitaine général contre l'ennemi commun ». A ce moment l'Espagne no pèse déjà plus beaucoup dans la balance; les Habsbourgs d'Autriche vont prendre sa place et c'est le commencement de la guerre de trente ans.

(1) Duplessis-Mornay, Lettres et Mémoires, II. p. 580, s. s. (publiés par Auguis, 1822-1825).

(2) Rommel, Correspondance de Henri IV, avec Maurice-le-Savant, landgrave de Hesse. Introd.. p. xxI., S.

§ 3. La première manifestation de l'Equilibre.

I. La doctrine au XVII° siècle.

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Rapprochements des divers Etats de l'Europe. Influence de la Réformation. L'Equilibre naît de la force des choses. Il préoccupe les hommes politiques. Les projets de paix perpétuelle. — Les Irénistes, Sully. Burlamaqui.

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Ouverture des conférences à Munster et à Osnabrüg. - Négociations relatives à l'Allemagne. Observations des princes de l'Empire à une circulaire des ambassadeurs de France. Lettre d'un senateur de la ville de Nuremberg en 1645. L'unité de l'empire d'Allemagne. Négociations relatives aux Pays-Bas. Discours sur les offres de paix de l'Espagne aux Provinces-Unies. Réflexions publiées sur cette même paix. Stipulations du traité d'Osnabrüg: La Suède, les sécularisations, le Brandebourg. Stipulations de Munster :

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Les traités de

Les diverses étapes de l'histoire de l'Équilibre.
Westphalie sont une combinaison d'Equilibre. Appréciation. -
Ils ont violé l'Équilibre en consacrant la grandeur française.

Nous n'avons pas l'intention de suivre les péripéties diverses de la guerre de trente ans, ni de passer en revue les divers actes, qui dévoilant les prétentions de l'empereur d'Allemagne à l'hégémonie de l'Europe, coalisaient contre lui dans un même sentiment de défense les peuples qu'il prétendait asservir. Nous noterons seulement que les nations eurent alors conscience qu'un danger commun

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