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On doit noter soigneusement que les rois de Perse, inaugurant la politique qui devait faire longtemps la fortune de la France, et qui après elle fut suivie par les cours du Nord, avaient toujours soutenu aux heures des guerres civiles de la Grèce, le parti le plus faible (1). Ils suivaient en cela les conseils donnés par Alcibiade à Tissapherne, et ces agissements protégèrent longtemps leur influence.

En Grèce, même, la doctrine se précise Thémistocle représente la ligue formée contre les Athéniens avant la guerre du Péloponèse comme une application de l'équilibre. Après la chute d'Athènes, et lorsque la suprématie de la Grèce fut devenue un objet de lutte entre les Lacédémoniens et les Thébains, nous voyons que les Athéniens essayèrent de maintenir l'équilibre en se rangeant du côté des plus faibles. Ils prirent le parti de Thèbes contre Sparte jusqu'à ce que Epaminondas eut été victorieux à Leuctres ils passèrent alors dans le camp des vaincus, par générosité, dirent-ils, mais en réalité par jalousie contre les vainqueurs (2).

Démosthène ligue toute la Grèce contre Alexandre. Mais les Romains et les Carthaginois, fort puissants alors et menacés aussi par le conquérant, ne songent pas à arrêter son activité dévorante. C'est, dit Justi, qu'en ce temps, il y avait comme deux mondes, et ils s'ignoraient l'un l'autre.

Depuis quelque temps déjà, les Romains, jaloux de la puissance de Carthage, lui faisaient la guerre. Les deux peuples ne luttaient point pour sauvegarder leur indépendance, mais pour conquérir le monde. Ils eurent tour à tour les mêmes alliés ; une politique de courte vue

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Discours VI,

(1) Hume, Discours politiques, Amsterdam, 1754. De la balance du pouvoir, cité par Stieglitz, Wheaton, Nys. (2) Hume, op. cit., citant Xenophon, Hist., 1. VI, VII.

guidait ces alliances, car on ne s'unissait au vainqueur que pour accabler le vaincu. C'est ainsi que Philippe de Macédoine offrit ses armées à Annibal, au moment même. où les victoires le plaçaient au dessus de Rome (1). L'an 552 de la fondation de cette ville, Carthage fut assujettie aux Romains; les nations virent alors le danger, elles écoutèrent les conseils d'Annibal, qui, dans sa retraite, semait la haine contre la puissance qui l'avait brisé. Ce fut en vain. Cette union contre une prépondérance envahissante fut tardive et inutile. Rome triompha du monde. Elle fut redoutée par toute la terre et ne voulut plus souffrir d'autre puissance que la sienne (2).

Hiéron de Syracuse avait été l'un des premiers à prendre partie pour Carthage et à la soutenir dans sa détresse :

« En ceci, écrivait Polybe, il agit avec sagesse et prudence, car, c'est une chose qui ne doit jamais être négligée, savoir que la puissance ne doit jamais être laissée entre les mains d'un seul État, de manière à ce que les États voisins soient mis dans l'impossibilité de défendre. leurs droits contre lui » (3). L'historien pose ici très nettement le principe d'intervention.

C'est peut-être la seule manifestation scientifique faite à ce sujet durant ces époques.

L'Équilibre n'est pas encore considéré comme une théorie générale. Si dans quelques tentatives on croit apercevoir quelques-uns de ces éléments, ce sont des

(1) Wheaton, Hist...., I, 45; citant Polybe, Hist., liv. XXIII, c. 33. (2) Bossuet, Hist. Univ. Ire partie, 9 époque. Réal de Curban, Science du gouvernement. VI, 445, tant que Rome et Carthage conservèrent leur puissance en'ière, la terre fut libre; aussitôt qu'on eût permis que Rome triomphât de Carthage, les républiques et les royaumes devinrent des provinces de l'Empire romain ».

(3) Op. cit. 1. I, C. 83 : V E. Nys. R. D. I., t. XXV, Bulmering, op. cit., p. 40.

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applications éparses du principe de conservation, qui, inné chez les États comme chez les individus, ne réclame ni beaucoup de raisonnement, ni beaucoup de sagesse.

Ce qu'il faut bien remarquer, et c'est la seule chose à retenir, c'est qu'aux temps antiques, on ne s'était pas figuré le maintien de l'Equilibre comme une nécessité politique et comme une loi qu'on dût appliquer toujours. Et cela parce qu'il n'existait point dans l'antiquité d'association morale des peuples fondée sur la reconnaissance de certains principes généraux, indépendants de traités publics. Les Grecs et les Romains considéraient les étrangers comme ennemis, et, si parfois des rapports juridiques se substituaient à cet état d'hostilité permanente, c'était en vertu de pactes spéciaux dictés par des intérêts de circonstance. Les Grecs appelaient dodo les étrangers avec lesquels des pactes avaient été conclus. Ces autres étaient qualifiés de modo ou proscrits » (1).

II

« Au temps de Clovis, les Francs n'étaient plus tout à fait, mais ils étaient encore des barbares. Etablis sur la frontière septentrionale, ils occupaient partie des terres. d'Empire, partie des pays germaniques. A cheval sur le Rhin, qui séparait le monde classique du monde barbare, ils devaient être les intermédiaires entre le passé qu'avaient rempli les Romains, et l'avenir qu'allaient occuper les nations germaniques..... Au lendemain du baptême de Clovis, les voix ecclésiastiques prêchent au nouveau David ses devoirs il ne s'agit de rien moins que de réunir sous une même loi et dans une mème foi les peuples de la

(1) Ed. Engelhard, Dr. d'Interv..., p. 5.

terre» (1). C'est ainsi que le christianisme inaugura une ère nouvelle dans les relations internationales (2). Sous l'influence de ses préceptes humanitaires, un rapprochement s'opéra entre les différentes sociétés du continent et l'on vit apparaître et se développer dans le milieu chrétien les premiers éléments du droit commun qui régit aujourd'hui le monde civilisé (3). Deux causes, les croisades, le développement des relations commerciales ont contribué à agrandir le cercle des règles à caractère international; et ce sont les conceptions théocratiques de la papauté qui ont été le point de départ de la notion d'une société d'Etats (4). L'identité de religion a établi, indépendamment de toute relation contractuelle, un rapport de communauté entre les groupes politiques qui partagent la foi catholique. Et quand, au xive siècle, Bartole proclamait dogmatiquement la souveraineté de l'empereur (5) jusqu'aux confins de la terre habitable, cette première manifestation bruyante de monarchie universelle, n'en était pas moins la preuve d'une union plus étroite des peuples dans les mêmes droits et les mêmes devoirs (6).

(1) Lavisse, Vue générale de l'histoire politique de l'Europe, p. 26, 27.

(2) Bry. Précis de dr. int. publ., 3e éd., p. 45. Engelhard, op. cit,, p. 5, 6.

(3) Le monde chrétien reste seule en société, même de nos jours. La Sainte-Alliance fut l'officielle consécration de ce groupe fermé. L'intervention si fréquente des puissances en Turquie vient de ce que la Porte n'est pas chrétienne. L'alliance de François Ier et de Soliman passionna vivement les esprits en son temps. V. J. Novicow, la Fédération de l'Europe, et Revue Bleue du 11 août 1900. (4) Leseur, Introd., p. 62, 72.

(5) De Carné, Rev. des Deux Mondes, 15 nov. 1840. Le Saint Empire romain, trad. par Em. Domergue.

J. Bryce,

(6) L'Empire romain fut une monarchie universelle; mais elle fut en quelque sorte inconsciente. Les peuples se sont peu ou mal défen

Mais les souverainetés morcelées à l'infini, les communications si peu actives de l'une à l'autre ne permirent pas à une idée générale de s'appliquer aux différents États. D'ailleurs, dit Ancillon, les gouvernements eussent-ils été en relations étroites, « leur impuissance réciproque était telle, qu'ils n'avaient pas lieu de se craindre (1). » Le pape et l'empereur, « ces deux moitiés de Dieu », se partageaient théoriquement l'univers; mais cette suprématie était trop idéale pour troubler outre mesure les peuples voisins. Pour les tirer de leur engourdissement médieval, il fallait la Renaissance et les projets de Charles-Quint.

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Du rôle de la Réforme, des ambassades et des armées permanentes. - Les républiques italiennes et la première application de l'ÉquiLes alliances contre le roi de France. Médicis et Ma

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chiavel.

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Alliance

Les traditions de la maison de Habsbourg. — Ses desseins. de la France et de la Turquie. Réflexions de la reine de Hongrie, et de Henri VIII d'Angleterre. La politique anglaise. Elle

dus; tandis qu'au Moyen Age les prétentions de l'empereur suscitent des résistances, qui cherchent dans un semblant d'équilibre les moyens d'être efficaces.

(1) Système politique de l'Europe, I. 32. - Discours préliminaire. Bry, op. cit., p. 103.

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