Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

monarque chéri, et à leur suite, des Italiens, des Espagnols, des Portugais, des Hollandais, des Allemands conduits en esclaves, et qui pouvaient dire à celui qui les immolait à son orgueilleuse et peut-être nécessaire ambition comme ces gladiateurs du lac Fusin Adieu, César; coux qui vont mourir të saluent *!

La campagne de Russie avait dévoré près de six cent mille hommes, la retraite seule de Moskou plus de cent vingt mille; les débris épars d'une héroïque armée, errant au hasard, sans guide et sans espoir, sans armes, sans vêtemens, sans subsistance, se précipitaient vers les places fortes encore occupées au nom de la France. Murat ne sut ni les réunir ni les réorganiser; déjà secrètement rebelle à Napoléon, que cependant il venait de servir avec sa valeur accoutumée; ne sachant si l'empereur des Français avait échappé à l'ennémi et voulant sauver à la fois sa personne et son trône, il se hata de fuir vers Naples, laissant une besogne qu'il croyait peut-être impossible au vice-roi d'Italie, qui parvint à opérer avec ordre et succès sa retraite, grandement favorisée, il est vrai, par les pertes énormes qu'avait essuyées

[ocr errors]

Ave, Cæsar, morituri té salutant.

[ocr errors]

l'armée russe. En effet, le feld-maréchal Koutouzoff ne se présenta devant Varsovie qu'avec trente-cinq mille hommes, et il n'en conservait plus que dix-huit mille en arrivant à Kalich où sa campagne fut terminée. Enfin les deux corps de Tchitchegoff et de Wittgenstein ne montaient pas ensemble à plus de vingt-cinq mille hommes; les Russes en perdirent donc plus de deux cent mille dans cette campagne. Mais ces faibles armées du moins étaient réunies, attendaient de puissans forts, marchaient dans des pays amis ou prêts à le devenir, et se présentaient comme libératrices aux populations exaspérées contre la France; elles n'avançaient néanmoins qu'avec lenteur et timidité, avant et même après l'inévitable et nécessaire accession du roi de Prusse*.

* Quartiers généraux de l'empereur Alexandre depuis son départ de Wilna jusqu'à son arrivée à Dresde.—Orany, 27 décembre 1812 (8 janvier 1813); -Meretsch, 29 décembre (10 janvier); — Leiponni, 1er janvier 1813 (13 janvier; Polowtza, 2 (14); — Krasnopol, 3 ( 15 );—Souwalky, 4 (16); -Ratschky, 6 (18);—Lyki, 7 (19) ; — Johannisbourg, 11 (23); -Wissembourg, 15 (27);—Melova, 20 janvier (1 février); - Radziouz, 22 janvier (3 février); Poltyk, 24 janvier (5 février);-Laniaut, 2 février (14); - Kladowo, 3 (15); - Rouschtowa, 5 (17); -— Konin, 7 (19);—Stravischina, 10 (22); — Kalich, 12 (24); Nous ne les noterons point de Kalich à Dresde, où les

Cette timide lenteur contrastait avec la dévorante activité que Napoléon manifestait alors. Tout autre que lui eût été attéré des malheurs dont il venait d'être l'auteur et la victime. Le grand Frédéric fut le seul souverain qui, avant lui, se trouva dans une situation aussi cruelle; le génie et l'indomptable fermeté du héros du dixhuitième siècle avaient, dans un Etat faible, en partie envahi, assiégé par presque toutes les nations du continent, vaincu le pouvoir accablant d'une fortune adverse; mais l'empereur des Français, qui avait son territoire encore intact, des sujets nombreux, des ressources financières considérables, qui ne voyait encore devant lui d'hostile que la Russie, dont les armées souffraient presque autant que les siennes et dont les frontières demeuraient insultées par ses garnisons de Dantzick, Czenstochowa, Thorn, Modelin, Zamosk, montant à plus de cinquante mille hommes, ne désespérait point de réparer les avaries qu'un sanglant naufrage avait causées à son honneur et à sa puissance. Nous dirons donc ce que fit, avec autant de talent que de décision, le héros du dix-neuvième siècle, pour lutter contre une

deux monarques de Russie et de Prusse n'arrivèrent que le 12 (24 avril).

destinée longtemps prospère et qui commençait à devenir menaçante. Moyens formidables qui eussent opéré le salut d'un monarque réellement héréditaire, mais insuffisans pour celui d'un pouvoir né de la victoire et que la victoire seule pouvait prolonger. Avant d'entreprendre ce tableau empreint d'une haute instruction politique, portons nos regards sur les divers Etats européens, et premièrement sur la Prusse.

Nous avons vu précédemment le cabinet prussien se résigner à une alliance offensive avec la France, comme la seule ressource qui lui restât dans la situation périlleuse où les circonstances l'avaient placé. Mais cette alliance, quoique ostensiblement dirigée dans son action contre la Russie, pouvait néanmoins devenir utile à cet empire, indépendamment des vues secrètes du Tugendbund et de l'accord déjà conclu, dès le début de la campagne, entre le général Yorck et les agens autorisés de l'empereur Alexandre. Car, si Frédéric-Guillaume eût refusé de s'unir à Napoléon, la monarchie prussienne, promptement et facilement effacée de la liste des Etats européens, aurait fourni à l'empereur des Français des levées d'hommes, des remontes et réquisitions, un matériel de guerre et de plus l'incorporation de l'armée

prussienne tout entière, ainsi que des recrues déjà secrètement exercées; enfin des contributions qu'à titre de souverain, il éût alors imposées. Elle aurait fourni, disons-nous, des ressources infiniment plus considérables que celles stipulées dans le traité forcément accepté. Il y a plus; la dislocation du reste des provinces soumises au roi, leurre offert à la cupidité des alliés allemands de Napoléon, les aurait plus que jamais liés à sa fortune, et tandis qu'ils se seraient partagé en espérances les débris d'un trône brisé, la totalité des forteresses prussiennes, devenues françaises, eût, en cas d'échec, procuré au monarque repoussé une formidable base d'opérations militaires, barrière de fer opposée aux Russes, et sur laquelle il aurait pu s'appuyer pour rallier et réorganiser son armée, ce qui l'eût de nouveau rendu formidable à son ennemi. Certes, une impérieuse nécessité contraignit le roi à ratifier le traité du 24 février 1812, et son ministère dut se ployer à ses vues, les seules qui fussent alors conservatrices; mais ce ministère voyait clairement dans l'avenir ce qu'on pourrait, en raison des circonstances, tirer d'avantages pour la monarchie d'un acte qui froissait le cœur du monarque et

« ZurückWeiter »