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213.

5o Signes ou indices de forgerie d'actes ou de falsifications inférés ex tenore.

Exemple: Mention de faits postérieurs ; Emploi de mots qui n'ont été usités que longtemps après la date de l'écrit ;

Assertion de faits faux, et connus pour tels par celui qui a fait l'acte;

Discordance du contrat avec des contrats antécédents;

Silence ou secret par rapport à l'écrit en question dans une conjoncture où l'on aurait dù en donner connaissance;

Diversité de caractères en ce qui concerne le savoir, l'intelligence ou la moralité; Opposition des affections, des goûts, des opinions;

Omission des faits que l'auteur de l'écrit aurait dû mentionner.

Viennent ensuite les indices matériels tirés du papier, de l'encre ou du sceau.

Du papier: par l'époque de l'établissement de la fabrique et par les marques plus ou moins récentes qu'elle imprime à ses feuilles; ou par leʼtimbre, comme si une espèce de papier timbré, qui n'a été en usage que depuis l'an 1800, a été employée pour un contrat portant la date de 1799.

:

De l'encre cet indice ne prend quelque force que dans les cas où la différence d'encre présente des taches, des mots çà et là diversement colorés, ou des traces d'une oblitération chimique.

A ces découpures analytiques, à ce latin technical qui se mêle souvent dans l'idiome judiciaire des Anglais, à ce néologisme, vous reconnaîtrez sans peine la manière de Jérémie Bentham; peut-être y trouverez-vous plus d'originalité que d'exactitude et de vérité.

S'il est vérifié que la pièce fut écrite ou signée par celui qui l'a déniée, il sera condamné à cent cinquante francs d'amende envers le fisc, outre les dépens, dommages et

intérêts de l'autre partie ; il pourra même être condamné par corps au payement du principal, c'est-à-dire de la somme qui faisait l'objet du procès. C'est la juste peine de la plus insigne mauvaise foi et du plus odieux mensonge.

L'héritier qui ne fait que méconnaître l'écriture de son auteur n'encourt point cette peine. On peut suspecter, mais non punir sa déclaration; il faudrait pour cela qu'il fût permis d'ouvrir les registres de sa conscience (a).

Un particulier fut assigné au tribunal de commerce de Foix pour le payement de quatre lettres de change, montant ensemble à 28,000 francs. Il dénia formellement les écritures et les signatures qui lui étaient attribuées. Le tribunal de commerce ordonna qu'il serait sursis au jugement de la demande principale, et renvoya la cause et les parties devant le tribunal civil, pour y être procédé conformément à la loi.

Au moment où la vérification allait être. ordonnée, le défendeur déclara, par acte extrajudiciaire, qu'il n'avait dénié que pour gagner du temps, et fit offrir en même temps à deniers découverts les 28,000 fr. avec les intérêts et les frais. Il n'en fut pas moins condamné à 150 francs d'amende.

Il y eut appel devant la cour royale de Toulouse, et le jugement fut réformé, «< attendu qu'il résultait des circonstances de la cause que, dans l'intention de l'appelant, la vérification ne devait point avoir lieu, et que la dénégation n'avait été qu'un moyen employé par lui pour retarder le payement de sommes qu'il n'avait pas au moment où elles lui avaient été demandées en justice.

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Le procureur général se pourvut en cassation dans l'intérêt de la loi, et l'arrêt fut cassé.

L'amende est encourue au moment même où se fait la dénégation; il suffit, pour qu'elle doive être prononcée, qu'il soit ultérieurement prouvé que la signature est l'œuvre de celui qui l'a déniée. Il importe peu que la preuve ait été faite par une vérification d'experts, par la déposition des témoins, ou par l'aveu de la partie.

(a) Ainsi jugé par la cour de Bruxelles, le 21 mars 1829. (Jurispr. de Brux.,1829-1-299. Jurispr. du XIXe siècle, 1829-5-103.)

Art. 213

427.

CHAPITRE XVI.

DU FAUX INCIDENT GIVIL.

Art.

Au chapitre précédent, c'était un plaideur 214. qui devait, suivant les règles du droit et de la justice, faire vérifier l'écriture, ou la signature privée sur laquelle il fondait ses préten tions, et que son adversaire ne reconnaissait pas.

Ici les rôles changent. L'adversaire ne s'enveloppe point dans les réserves d'une simple dénégation, ou dans les doutes d'une timide méconnaissance: il va porter à l'éditeur de la pièce le défi de la maintenir vraie, et s'engager lui-même à prouver qu'elle est fausse. Incumbat probatio fidei instrumenti ei primitus qui scripturam obtulerit, deindè ei qui strictá instantiâ falsum arguere paratus sit (1).

Toutefois, on le sait déjà, ce n'est pas toujours une pure faculté que ce parti que l'on prend de s'inscrire et de se mettre à la poursuite du faux. C'est une obligation spéciale ment imposée à qui veut entreprendre de détruire la foi attachée aux clauses et aux énonciations d'un acte authentique; les plus énergiques dénégations ne suffiraient pas pour l'ébranler (2).

Le faux est, en général, tout ce qui n'est pas vrai, a dit Farinaccio: Falsum largissimè sumptum est omne id quod non est verum (5). Dans le sens plus étroit du langage

(1) L. 14, Cod. Ad legem Corneliam de falsis.

(2) Voyez ci-dessus, p. 131 et suiv.

BONCENNE.-T. II.

214.

judiciaire, le faux est la suppression ou l'al- Art. tération de la vérité; il devient criminel, lorsqu'il est l'effet d'un dessein frauduleux et la cause d'un préjudice réel ou possible. C'est alors que s'applique la définition de Cujas : Falsum fraudulenta veritatis mutatio, vel suppressio, in detrimentum alterius facta.

La loi, moins rigide que la morale, ne donne point au simple mensonge et à la simulation le caractère du faux proprement dit. Par exemple dissimuler dans un acte de vente une portion du prix, c'est mentir, mais ce n'est pas commettre un faux; et les tiers qui auront à s'en plaindre pourront prouver la fraude par les voies ordinaires : Nec tenebuntur instrumentum etiam publicum arguere de falso, quia aliud merum falsum, aliud fraus, aliud simulatio (4). Si deux personnes s'arrangent de telle sorte que l'une paraisse céder son bien à l'autre, afin de le soustraire aux poursuites de ses créanciers et à la main de la justice, il y aura encore simulation et non pas merum falsum. Ce que ces personnes ont dit et signé de contraire à la vérité, elles étaient convenues de le dire et de le signer. C'était la vérité de leur mensonge: Falsi crimen, quantùm ad eos qui in hoc consenserunt, contractum non videtur, cùm inter præsentes et convenientes

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L. Cornelius Sylla, durant sa dictature, avait fait une loi sur les faux commis dans les testaments, et la fabrication de la fausse monnaie. Mais ses dispositions ayant été étendues, par des sénatus-consultes et des constitutions impériales, à d'autres cas de faussetés ou de quasi-faussetés, quasi falsa, à la calomnie, à la subornation, au stellionat, à la supposition de part, ad litteras, nomen, testimonia, obligationes, mensuras, pondera, etc., les interprètes s'accoutumèrent à citer comme autant de chefs de la loi Cornelia, tous les textes qui s'étaient groupés autour d'elle (3).

Ce fut de même en France. Les édits, les déclarations et les ordonnances se multiplièrent à mesure que l'art des faussaires prit des formes nouvelles, et s'exerça sur des objets nouveaux. Les premières lois furent portées contre les faux monnayeurs: il fallait, avant tout, pourvoir à la sûreté et à la conservation de la fortune publique. Nous avons des capitulaires de Childebert qui traitent de falsa moneta; nos coutumes rendent témoignage des peines que subissaient les coupables: il en est qui disent qu'on les faisait suffoquer et bouillir en eau et huile (4): In oleo et aquâ suffocari, seu bulliri debebant (5).

La fausse monnaie est une des espèces de faux qui se commettent par des faits, comme la fabrication des fausses clefs, des faux poids, des fausses mesures, des faux poinçons, des faux timbres, etc.

On commet le faux par des paroles, en

(3) L. 5, ff. De fide instrumentorum. (2) L. 25, ff. De lege Cornel.

(3) Voyez au Digeste le titre De lege Cornel., et au Code les titres Ad legem Cornel. Ad legem Vitelliam,-Si ex falsis instrumentis vel testimoniis judicatum sit,—De iis qui sibi adscri

214.

faisant des faux serments, des faux témoi- Art. gnages. J'ai parlé ailleurs du faux serment (6); je parlerai du faux témoignage au chapitre des enquêtes.

Contrefaire l'écriture ou la signature des personnes publiques ou privées; composer de faux contrats, de fausses promesses, de faux testaments; altérer des pièces véritables par ratures, additions ou surcharges; supposer dans un acte des consentements qui n'ont pas été donnés, des formalités qui n'ont pas été remplies, ou d'autres circonstances qui n'ont pas eu lieu; c'est commettre le faux en écriture, celui dont je dois uniquement m'occuper ici.

Tout ce qui se rapportait au faux en écriture était éparpillé, répété, modifié, recomposé et noyé dans une infinité de règlements divers; cette législation ressemblait au vaisseau d'Égée. C'était, entre autres, l'ordon. nance de 1551 et l'édit du mois de mars 1720 sur les faux dans les actes des notaires; l'ordonnance de 1735 sur le faux dans les testaments; l'édit du mois de mars 1680 sur le faux dans les actes de justice; l'édit de Henri II, ou l'édit des petites dates, sur le faux dans les titres ecclésiastiques; l'ordonnance de 1532 et la déclaration du mois de mai 1720 sur le faux dans les papiers royaux, les états, pièces et registres de l'administration des finances; l'ordonnance des fermes, du mois de juillet 1681, sur le faux dans la perception des aides ; l'ordonnance du mois d'octobre 1734 sur le faux dans le contrôle ou l'enregistrement des actes et contrats; la déclaration du mois de décembre 1680 sur le faux dans les lettres de chancellerie. La confiscation des biens des condamnés, pour ce dernier genre de faux, n'appartenait pas au roi, mais à M. le chancelier.

Voudrait-on bien croire que, dans tout cela, il n'y avait rien de spécifié, rien d'établi à l'égard des faux commis sur les registres de baptêmes, mariages et sépultures,

bunt in testamento,-De falsâ monetâ,-De
mutatione nominis,-De veteris numismatis
potestate, et la Novelle 77 de Léon.

(4) Imbert, en sa Practique, p. 706, aux notes.
(5) Mazuer, De pœnis, no 5.
(6) T. 1er, chap. 8, p. 334 et suiv.

Art. rien pour ce qui concernait les faux en écri214. ture privée ? Les juges y appliquaient des peines arbitrées par eux, selon l'exigence des cas, la qualité des personnes, et la gravité du préjudice.

Le Code de 1791 ne fit que tracer des lignes entre les principales espèces de faux en écriture, déterminer des peines, et les graduer. Ainsi vous y lisiez : « Si le crime de faux est commis en écritures privées, la peine sera de quatre années de fers; s'il est commis en lettres de change et autres effets de commerce ou de banque, la peine sera de six années de fers; s'il est commis en écritures authentiques et publiques, la peine sera de huit années de fers (1). » Mais vous n'y trou viez point les caractères auxquels auraient dù se reconnaître chacune de ces espèces; les questions de culpabilité restaient soumises aux caprices de l'ancienne jurisprudence, et il fallut faire d'autres lois, celle du 2 frimaire an II, par exemple, pour empêcher la confusion du faux avec l'escroquerie.

Le législateur de 1810 y a mis plus d'ordre et de précision; ses définitions sont déduites de certains faits et de certaines circonstances qu'il a eu soin de prévoir, de détailler et de classer (2).

Nous disons que le faux est matériel, lorsqu'il a été commis, soit par contrefaçon ou altération d'écritures ou de signatures, soit par effaçures, ratures, grattages, changements, suppressions, intercalations, additions de mots, de syllabes, de lettres ou de chiffres. On lui donne cette dénomination parce qu'il affecte matériellement la pièce arguée, parce qu'il peut être touché du doigt et de l'œil, démontré, reconnu, constaté physiquement par une opération, par un procédé quelconque Cùm inspectio ipsa falsum deprehendit. Le faux matériel prend, chez

(1) 1re part., tit. 2, sect. 2, art. 42, 43 et 44. (2) Code pénal, liv. 3, tit. 1, §5, 4 et 5. (3) Quest. de Droit de M. Merlin, vis Inscription de faux, § 1.

(4) Instit., lib. 4, til. 18, § 1.

Non omnia judicia in quibus crimen vertitur et publica sunt, sed ea tantùm quæ ex le

quelques auteurs, le nom de formel, dans Ar les cas où il s'agit non pas de la simple alté- 214 ration d'un acte véritable, mais de la fabrication entière d'un acte faux (5).

Le faux est intellectuel ou substantiel, quand il dénature la substance des actes, sans qu'il y ait la plus légère altération de l'écriture. Ainsi fait un fonctionnaire, un officier public qui, rédigeant un acte de son ministère, écrit des conventions autres que celles qui ont été tracées ou dictées par les parties, constate comme vrais des faits faux, ou comme avoués des faits qui ne le sont pas. C'est une falsification de la pensée, une supposition du consentement, un déplacement de la volonté, qui ne se découvre par aucune de ces marques physiques, palpables, matérielles, sur lesquelles l'art des experts se pourrait exercer.

Le faux était, à Rome, un crime de jugement public, crimen publici judicii, que chaque citoyen pouvait dénoncer et poursuvre: Publica autem dicta sunt, quód cuivis ex populo executio eorum plerumquè datur (4).

Mais il devint libre à la partie qui arguant de faux une pièce produite en justice, de rester dans les termes de l'action civile, ou d'affronter les périls de la voie criminelle : Damus licentiam litigantibus, si apud judicem proferatur scriptura de quâ oritur aliqua disputatio, profitendi utrùm de falso criminaliter statuat qui dubitet de fide instrumenti experiri, an civiliter (5).

Toutefois on pouvait revenir du civil au criminel: Non ambigitur falsi crimen de quo jam civiliter actum est, etiam criminaliter esse repetendum (6).

C'est là que nous avons pris nos distinctions du faux principal et du faux incident; car il n'est point de type qui ne se retrouve

gibus publicorum judiciorum veniunt. L. 1, ff. De publicis judiciis.

(5) L. 13, Cod. Ad legem Cornel.

(6) L. unic. Cod. Quando civilis actio criminali præjudicet, et an utraque ab eodem exerceri possit.

Art. dans ces gigantesques archives du droit ro214. main, où l'on fouille depuis tant de siècles, et où chaque jour on s'enrichit davantage.

239.

Le faux principal est l'accusation directement portée devant la justice criminelle, contre l'auteur ou les complices du faux.

Le faux incident est le moyen employé pour faire rejeter, comme fausse ou falsifiée, une pièce produite dans le cours d'une instance. C'est l'épisode d'une action qui n'avait point originairement une imputation de faux pour objet; c'est un procès fait à la pièce seulement, comme si elle s'était fabriquée ou falsifiée d'elle-même.

L'accusé n'arrêterait point la poursuite du faux principal, en déclarant qu'il ne veut pas faire usage de la pièce arguée.

Le faux incident tombe et s'éteint, si la pièce est retirée.

L'un ad vindicias pertinet, l'autre ad rei familiaris persecutionem (1).

La disposition des lois est donc telle, que vous avez le choix, ou de porter une plainte devant la justice criminelle, ou de ne point vous départir de la voie civile, pour impugner l'acte que l'on vous oppose et le maintenir faux.

Aisément on conçoit qu'il n'y a plus de choix à faire, et qu'il faut se tenir dans les termes d'une instance civile, quand le faussaire est inconnu, mort, ou couvert par la prescription (2); car la prescription du faux principal n'emporte pas la prescription dn faux incident.

Mais si d'une question de faux civilement 240. engagée, des indices accusateurs s'élèvent contre une personne que l'action publique peut atteindre, alors le faux principal vient dominer le faux incident, et l'on surseoit à prononcer sur le sort de la pièce, jusqu'à ce qu'il ait été prononcé sur la culpabilité de l'accusé, priùs de crimine agitur quàm de causâ civili. Cette maxime, que l'article 3 du Code d'instruction criminelle a traduite des lois romaines (3), reçoit exception lorsque

(1) L. 3, § 6, ff De tabulis exhibendis. (2) Voyez l'art. 637 du Code d'instr. criminelle. (5) L. ult. Cod. De ordine cognitionum; 35,

Art.

l'action civile est préjudicielle par sa nature, c'est-à-dire, lorsque l'ordre des choses et des 214. idées exige qu'on la juge avant l'action criminelle. Le Code civil en fournit un exemple : «L'action criminelle contre un délit de suppression d'état ne pourra commencer qu'après le jugement définitif sur la question d'état. » C'est qu'il faut bien que la réalité de l'état, de la filiation, des droits de famille, soit prouvée, pour qu'on puisse accuser quelqu'un de les avoir détruits: or, les réclamations d'état appartiennent exclusivement à la compétence des tribunaux civils (4).

En matière de faux, la justice civile n'est compétente que pour juger abstractivement la vérité ou la fausseté d'un écrit. La justice criminelle juge à la fois l'auteur du crime et la pièce qui l'a souffert. Toutefois l'acquittement de l'accusé ne donne pas toujours gain de cause à la pièce; c'est une proposition que je développerai plus loin.

Ces prémisses mènent à une conséquence que les auteurs ont négligée, et que la jurisprudence ne discerne pas toujours, parce qu'on se préoccupe trop étroitement de cette définition que les dictionnaires répètent à l'envi, et qui ne sépare point le faux de la fraude: Fraudulenta veritatis mutatio, vel suppressio.

L'imputation de fraude qui constitue le crime, et qui donne ouverture au faux principal, peut être effacée par des preuves de bonne foi.

Mais, si pure que vous imaginiez l'intention dans laquelle un acte a été falsifié, dénaturé, il n'en devra pas moins être rejeté du procès où il a été produit, car la justice ne peut jamais accepter comme vrai ce qui est matériellement ou substantiellement faux.

Il suit de là qu'il n'y a point de question intentionnelle à considérer pour le jugement du faux incident.

La cour de Lyon décida le contraire par arrêt du 12 décembre 1852. Il s'agissait des effets d'un commandement, dans lequel l'huis

Cod. Ad legem Juliam de adulteriis; 5, § 1, Ad legem Juliam de vi publicâ. (4) Code civil, art. 326 et 327.

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