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d'un souverain détrôné. Redoutant bien plus de tomber aux mains du pouvoir royal, et n'ayant que le choix de ceux dont il se constituera le prisonnier, il se fait transporter à bord du Bellerophon, après avoir fait annoncer qu'il s'en remet entièrement a la généROSITÉ du prince régent d'Angleterre. — Chose inexplicable! Bonaparte ne redouta jamais les dangers de la guerre; et hors de la scène des combats, il craint tout danger. La soif du pouvoir, opérant sur ses facultés l'effet du somnambulisme, l'entraîne dans les hasards extrêmes; mais, s'il n'est plus sur le champ d'extermination, dans un cercle de baïonnettes sanglantes, s'il n'entend plus les détonations de cent bouches à feu, on le croirait éveillé, tant il devient timide, en pensant qu'il pourrait cesser de vivre. L'idée positive de la mort lui est insupportable; il faut qu'il voie la mort dans un nuage de gloire, à travers la fumée du canon.

Afin d'éviter les malentendus, l'Anglais Maitland, capitaine du Bellerophon a, la veille même, déclaré catégoriquement aux parlementaires de Bonaparte, qu'il est sans pouvoir pour stipuler des conditions quelconques; et que tout ce qu'il lui est permis de faire, se réduit à transporter en Angleterre Bonaparte et sa suite, pour y être reçu de la manière que le prince régent le jugera convenable. C'est donc en espérant la vie sauve, que Napoléon se décide à se rendre, bercè néanmoins de l'idée que sa renommée s'interposera efficacement pour le garantir des rigueurs de la captivité, et que sa présence en imposera dans un pays où les hommes aiment le merveilleux, se passionnent pour l'extraordinaire. Il réclamera le droit des gens, hors duquel le place irrécusablement la violation du traité du 11 avril 1814. Il aimera à se persuader qu'on ne donnera point d'effet aux assurances pourtant si positives de la délibération du 13 mars. Il invoquera la sainteté des asiles sur cette terre où sa détermination ne l'a pas conduit, alors que sa détermination pouvait sembler libre et volontaire. Ce destructeur de vingt républiques en Italie, en Allemagne, ce destructeur de toute liberté autour de lui, se met à côté d'un héroïque défenseur de la liberté des Grecs; il s'écrie avec emphase : « Je viens, comme Thémistocle, m'asseoir sur « les foyers de mes ennemis. » Quelle similitude peut donc s'établir entre le généreux Athénien qui repoussa les satrapes d'un despote d'Asie, et l'impitoyable oppresseur des paisibles citoyens de la Hollande (V. 2 août, deuxième article)?

16. Ordonnance du roi, relative à la formation d'une nouvelle armée. —La force militaire active consistera en quatre-vingt-six lé

gions d'infanterie, chaque légion de trois bataillons; huit régiments d'artillerie à pied; quatre régiments d'artillerie à cheval; quarantesept régiments de cavalerie, etc.

17. Proclamation du maréchal Davoust, commandant en chef les armées au-delà de la Loire (V. le 11). – C'est

« à vous, soldats, à compléter cette soumission par votre obéissance; « arborez la cocarde et le drapeau blancs. Je vous demande, je le sais, un grand sacrifice; l'intérêt de notre patrie le commande. Un « soldat sert toujours son pays, quel que soit le gouvernement qu'on «< ait. L'armée ne peut être délibérante... >>-L'ordre du chef s'exécutera sans troubles; l'armée se résignera toujours (V. 1er août). 20. Ordonnance du roi. Les bataillons des gardes nationales d'élite, levés depuis le 20 mars, seront licenciés sur-le-champ. Les conscrits de 1815, qui ont fait partie des bataillons d'élite, rentreront également dans leurs foyers.

Ordonnance du roi qui rétablit la liberté de la presse, les feuilles périodiques exceptées, et déroge aux articles 3, 4, 5 de la loi du 21 octobre 1814.

21. Cessation d'hostilités sur les côtes de France. — L'ordre en est donné par le gouvernement anglais, d'après, l'information que Napoléon Bonaparte s'est rendu à ses forces navales (V. le 15).

24. Ordonnance du roi. 1o Dix-neuf généraux ou officiers (désignés nominativement) qui ont abandonné le roi, avant le 23 mars, ou qui ont attaqué le gouvernement et la France, à main armée ; ou qui, par violence, se sont emparés du pouvoir, seront arrêtés et traduits devant des conseils de guerre. 2o Trente-huit personnes (désignées nominativement) seront éloignées de leurs domiciles, et mises en surveillance dans des résidences fixées par la police, en attendant que les chambres statuent sur celles qui devront sortir du royauine, on être livrées à la poursuite des tribunaux. Les individus qui seront condamnés à sortir du royaume auront la faculté de vendre leurs biens et d'en disposer. Toute autre liste est et demeure close, en conséquence des désignations ci-dessus (V. 12 janvier 1816).

Août 1er. Licenciement de l'ancienne armée. — Le maréchal Macdonald arrive à Bourges, pour assurer et compléter le licenciement des troupes stationnées au-delà de la Loire (V. 11, 17 juillet). Macdonald remplace le maréchal Davoust qui, depuis la convention du 3 juillet, maintient, dans une exacte discipline, cent mille soldats, nobles débris de tous les anciens corps. Quoique aigris par leurs

revers, irrités de se voir signalés comme de mauvais Français, ces vétérans de la gloire se soumettent avec calme. On jette sur eux d'odieux soupçons, on leur prête de criminels desseins, on insulte à leurs derniers actes de courage; mais ils ne cesseront pas d'obéir au sentiment qu'ils vouèrent à la patrie. En se séparant, ils s'embrassent comme des frères destinés à ne plus se rejoindre, et qui se garderont le plus tendre souvenir. La France saura, au mois de janvier suivant, et par les journaux, et comme s'il s'agissait du démembrement d'une armée russe ou autrichienne, que leur licenciement est terminé. La soudaine dispersion de ces nuées de braves qui couvraient l'Europe de leurs trophées, pénètre l'Europe d'un plus grand étonnement encore. Aussitôt ces guerriers si fougueux se destinent aux travaux de la paix. Ils exhaleront leurs regrets en silence, dans les foyers paternels; impassibles comme cette généreuse déesse autour de laquelle croassent les immondes habitants des marais.

Une armée de mercenaires ne serait pas, de terrible et conquérante, devenue tout-à-coup soumise et résignée. L'amour de la patrie a pu seul obtenir ce renoncement aux drapeaux, renoncement dont l'histoire n'offre pas d'exemple. Tous ces guerriers posent les armes dès qu'on leur dit que les puissances confédérées jugent que Louis XVIII est le seul prince qui puisse, comme chef du gouvernement français, leur présenter toute la garantie dont elle ont besoin pour assurer la tranquillité de l'Europe; et que, dans le cas où la France adopterait un autre souverain, cette garantie, nécessaire à la France ainsi qu'à l'Europe, ne pourrait consister que dans des cessions de territoire. Non, dans aucun pays, on ne vit de nombreuses, de vaillantes armées déposer les armes en se dévouant à la proscription; des généraux, les premiers des temps modernes, quitter leurs légions, se réfugier dans l'obscurité, préférant les misères de l'exil et l'échafaud même à la guerre civile. Turenne, Condé, agirentils de même ? Le connétable de Bourbon ne porta-t-il pas ses talents et son audace au service des ennemis de sa patrie, de l'adversaire de son roi? ne devint-il pas le stipendié d'une maison opposée à la sienne? Non, ils ne voulurent pas trahir leur pays, ces braves qui, s'avançant à la frontière, essayèrent de la défendre contre d'avides étrangers. Ils n'avaient ni conçu, ni préparé la dernière subversion dont ils furent les premières victimes. Cette catastrophe des cent jours provient, sur-tout (on ne saurait trop le dire), de cet esprit qu'avait transmis l'ancienne cour, qui a passé à Coblentz, à Londres, qui s'est relégué au faubourg Saint-Germain pendant le gou

vernement impérial, et qui a reparu aux Tuileries lorsque cette résidence a repris son titre féodal de château; esprit de cour essentiellement pernicieux; esprit malfaisant, favorisé et répandu par trois ministres inconsidérés (V. 20 mars, deuxième article).

Quatre mois s'écoulent à peine, et ces formidables légions se confondent dans la masse du peuple. Elles y font oublier leur existence, sans faire bruit de leur gloire. Soldats héroïques en face de l'ennemi, citoyens dévoués au sein de la France, qui vient se reposer sous les ailes de la paix.

L'héroïsme de cette abnégation n'est pas assez remarqué. Les époques où notre ancien gouvernement licenciait ses armées, à la fin de longues guerres civiles ou étrangères, furent toujours des crises dangereuses; et long-temps encore, la société en était désolée. Des bandes, la terreur des citoyens et du gouvernement même, dévastaient les campagnes, pillaient les villes.-Notre Charles V, si justement nommé le Sage, ne connut d'autre remède à ces maux, que de réunir ces bandes (1366) appelées les grandes compagnies, et d'en purger la France. Duguesclin les conduisit en Castille, où elles détrônèrent Pierre-le-Cruel, après avoir, sous Avignon, rançonné le nonce du pape qui se trouva payer les frais de la guerre faite au roi le plus dévoué au siége apostolique. - Henri IV rendait édit sur édit, et d'une rigueur extrême, sur les ports d'armes et les capitaineries. Néanmoins, son règne fut traversé par des révoltes multipliées, ainsi que par une infinité de duels collectifs qui firent périr, en seize ans, plus de quatre mille gentilshommes (Mémoires de Sully, liv. 25, an 1608). A peine le grand roi eut-il fermé les yeux, que les divisions éclatèrent de toutes parts.-Ces exemples ne disent-ils pas qu'un état sortant des agitations civiles, n'a rien à redouter d'une armée prise dans le corps de la nation; ne disent-ils pas explicitement que le système représentatif tempère heureusement la fougue militaire, tandis que les mesures du plus habile, comme celles du plus ingénieux et du meilleur des monarques absolus, peuvent rester sans efficacité, dans les conjonctures extrêmes qu'amènent les guerres civiles?

2. ASSASSINAT DU MARECHAL BRUNE, à Avignon.

Célèbre par plusieurs faits d'armes, Brune sut aussi se distinguer par des mœurs douces et un esprit conciliant, lorsque tout invitait à déployer des mœurs farouches, un esprit de rudesse. Il traversa ja révolution sans se souiller du moindre excès. Sa modération avait contribué à la pacification de la Vendée. Maître en Suisse, après l'a

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voir conquise (mars 1798); maître en Hollande, après avoir expulsé le duc d'Yorck (V. 18 octobre 1799), loin d'apesantir le pouvoir militaire sur les habitants, il tempéra les ordonnances du directoire, et fit preuve de désintéressement, à cette même époque où la plupart des généraux et des administrateurs exerçaient les plus odieuses rapines dans les pays envahis.

Ayant, au mois d'avril, accepté le gouvernement de la huitième division militaire (Marseille), il y maintint la tranquillité par des mesures indulgentes; et ce ne fut qu'après son départ, que des troubles éclatèrent (V. 25 juin) dans cette ville où la populace est toujours si près de la férocité. Instruit du retour du roi, le maréchal Brune accourt à Toulon, il y prévient l'opposition d'une troupe égarée et fait arborer le drapeau blanc. Déposant aussitôt le commandement, il se met en route pour Paris, où le rappelle le gouvernement qui n'entretient aucun soupçon sur la loyauté de son caractère. Le maréchal est arrêté, en passant à Avignon, par des hommes de la lie du peuple que les imprudents royalistes de ces contrées avaient armés; royalistes qui font consister leur fidélité au souverain légitime dans les persécutions illégales, dans les voies de fait contre quiconque s'indigne de leurs excès. Brune est signalé aux tueurs, comme un détestable jacobin. Ils l'égorgent d'une manière atroce. Son corps lacéré, traîné dans la boue, jeté dans le Rhône et repoussé sur la grève par le mouvement des eaux, reste deux jours privé de sépulture. Cet assassinat d'un maréchal de France a eu lieu en plein jour, devant trois mille citoyens, spectateurs immobiles des efforts que prolongent quatre heures entières le maire et le préfet réduits au seul secours de quelques gendarmes. La lâcheté de ceux des habitants présents qui n'encouragent pas les assassins, est un phénomène trop souvent reproduit en France. L'égoïsme habituel, l'ineffaçable pusillanimité des classes intermédiaires, que leurs habitudes d'ordre et leur éducation devraient animer à combattre les sauvages excès d'une populace égarée; cet égoïsme, cette pusillanimité, se remarquent à Avignon dans cette circonstance, comme au début de la révolution (V. 16 octobre 1791); comme à Paris, lors des massacres de septembre 1792, et dans plusieurs autres conjonctures de cette sanglante époque; comme ils se manifestèrent en divers lieux, par exemple, à Saint-Denis (V. 1er août 1789), à Montauban (V. 10 mai 1790), à Étampes (V. 3 mars 1792), à Versailles (V. 9 septembre 1792); et comme on les reverra plusieurs fois, cette année-ci (V. 25 juin, 17 août, 12 novembre).

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