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Tout esprit raisonnable doit admettre l'évidence de ces allégations. Il serait impossible de ne pas convenir que, dès que Bonaparte se vit assuré du pouvoir, il déchira le traité d'Amiens (V. 25 mars 1802, 13 mai 1803), et peu satisfait des vastes, magnifiques et solides acquisitions échnes à la France, il persévéra dans un systême destructif de l'indépendance de toutes les nations. Il rallumait la guerre, non pour obtenir de la sécurité, mais pour agrandir ses conquêtes. Ses négociations de paix n'avaient d'autre objet que d'entretenir dans une fausse persuasion ces puissances dont il n'avait pas encore marqué l'heure fatale, pendant qu'il préparait, combinait et exécutait contre d'autres états ses projets de rapt et de spoliation. Ses traités n'étaient que des haltes militaires.

Mais, en reconnaissant que les quatre grandes puissances ont des motifs réels de défiance et de ressentiment contre Napoléon, il ne faut pas couvrir d'un voile officieux les motifs particuliers qui sont les plus puissants véhicules de leurs déterminations. —L'Angleterre sourit à la conjoncture actuelle, en sa qualité d'ennemie invétérée de la France; la Prusse, en raison de cet accroissement désordonné qui, la mettant en contact avec notre territoire, lui fait craindre l'établissement en France d'un systême militaire capable de comprimer son ambition. La Russie se réjouit de cette nouvelle occasion de s'immiscer dans les querelles de l'occident, dévorée qu'elle est du desir d'y trouver une augmentation de prépondérance plus elle en voit s'allumer, plus elle se montre empressée à les éteindre, car elle ne vient jamais qu'en dernière ligne, s'exposant à de moindres dangers, et recueillant les plus riches débris. Le conseil de Vienne dont aucun revers ne peut humilier le front, ni détourner la marche, voit, dans la renaissance des malheurs de la France, la facilité d'appesantir à jamais son joug tudesque sur l'Italie. Les plus belles contrées se fanent par le souffle de l'Autriche; les régions les plus favorisées de la nature languissent dans ses stériles et impuissantes mains: n'importe, elle est saisie de la frayeur que des principes réprésentatifs ne pénètrent dans ses anciens états, où domine une gothique oligarchie. L'Autriche, que gênent la Russie et la Prusse, espère que de nouvelles hostilités contre l'ennemi commun lui vaudront des agrandissements, susceptibles de la reporter à ce premier rang auquel elle ne se juge pas encore remontée. Ne vit-on pas, à chaque génération, cette puissance sacrifier des considérations d'antique orgueil, de justice, d'honneur, de convenance, et même ses archiduchesses, à une politique d'expectative? Que risquerait-elle d'ailleurs si Napoléon se relevait? n'aurait-elle pas l'intercession de

Marie-Louise? Quant aux vues des cabinets secondaires de l'Allemagne, satellites obligés des puissants monarques, dociles courtisans du plus fort, en participant à cette croisade, elles ne méritent pas une plus grande attention que la valeur spécifique de leurs états, que la qualité de leurs troupes, ou le mérite de leurs généraux ; mais ces potentats subalternes sont ravis de pouvoir se venger sans risques, sur la France, de ce qu'elle les a tirés du néant, et de prouver ainsi leur existence politique.

19. Une première colonne de troupes russes traverse Nuremberg, se dirigeant vers le Rhin.

20. Convention signée à Zurich, entre la diète suisse et les plénipotentiaires de l'Autriche, de la Grande-Bretagne, de la Prusse, de la Russie.

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La

La confédération suisse adhère à l'alliance contractée quatre grandes puissances contre la France (V. 25 mars ). confédération s'engage à tenir constamment en campagne un corps d'armée suffisant pour garantir sa frontière contre toute entreprise de l'ennemi commun. Dans le cas d'urgence, où l'intérêt commun exigerait un passage momentané de troupes alliées, à travers quelques parties de la Suisse, on recourra à l'autorisation de la diète.

Convention militaire de Casa-Lanzi près de Capoue, entre les généraux autrichiens et l'envoyé anglais d'une part; le général en chef de l'armée napolitaine du roi Joachim Murat, d'autre part.-Toutes les places, citadelles et forts, de même que les ports et arsenaux de tous genres, seront livrés aux armées des puissances alliées, pour être remis au roi Ferdinand. Cette campagne qui amène l'entière dépossession de Murat, a commencé le 28 mars.

26, 27. L'empereur de Russie, le roi de Prusse, l'empereur d'Autriche, partent de Vienne et se rendent près de leurs armées, qui sont en pleine marche sur la France. Ils n'ont voulu recevoir aucune proposition de la part de Napoléon (V. le 12).

31. Traité signé à Vienne, entre le roi des Pays-Bas, d'une part; l'Autriche, la Russie, l'Angleterre et la Prusse, d'autre part.

Ce traité remplit les dispositions de l'article 6 du traité de Paris, du 30 mai 1814, relativement à l'accroissement de territoire destiné à la Hollande, placée sous la souveraineté de la maison d'Orange. Le traité reconnaît l'érection du royaume des Pays-Bas ( V. 17 mars); il sanctionne l'acte constitutionnel des provinces-unies, rendu commun aux provinces belges, et détermine les limites du royaume : à l'est par l'Ems jusqu'à Nienschanz, et par les monarchies hanovrienne

et prussienne jusqu'à Luxembourg; au sud, par les frontières des départements français, de la Moselle, de la Meuse, des Ardennes et du Nord.

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Juin 1. Assemblée, dite du Champ-de-Mai.

Les électeurs de tous les départements devaient s'y rendre, afin de prendre les mesures convenables pour corriger et modifier les constitutions, selon l'intérêt et la volonté de la nation (V. 13 mars, article deux ); mais en publiant son acte additionnel ( V. 22 avril), Napoléon a jeté une nouvelle amorce à la crédulité des Français; il vient aujourd'hui flatter leur goût pour les spectacles frivoles, en réunissant au Champ-de-Mars, dans ce même lieu, témoin de la fédération du 14 juillet 1790, un grand nombre de députés des départements, des gardes nationales, de l'armée. Ainsi qu'en 1790, l'autel, sur lequel la religion doit consacrer le serment d'obéissance et d'union, s'élève au milieu de cette enceinte, la même foule s'y rassemble, le même enthousiasme y règne, les acteurs seuls sont changés. Au lieu de Louis XVI, le restaurateur de la liberté française, c'est Bonaparte, l'oppresseur du continent qui le menace une seconde fois de son joug; au lieu de l'évêque d'Autun, Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord, on voit l'archevêque de Tours, Barral, assisté du cardinal de Bayane qui, l'un et l'autre, avaient été nommés pairs par Louis XVIII. Là, sont aussi les maréchaux Soult, Ney, Jourdan, Oudinot. - Ce même Cambacérès, lugubre fantôme, visible à toutes ces grandes occasions qui doivent être funestes à la France (V. 19, 20 janvier 1793; 4, 18 mai 1804 ), ce conventionnel qui provoqua l'exécution immédiate du roi de France dans l'intérêt de la république française, ce consul, puis sénateur, qui s'inclina le premier, comme le plus auguste représentant de la grande nation, devant l'empereur des Français, se fait encore aujourd'hui l'organe de la France, il proclame que l'acte additionnel aux constitutions de l'empire est accepté de un million trois cent mille votants et rejeté par seulement quatre mille deux cent six; et Cambacérès prononce, le premier, le serment d'obéissance aux constitutions, et de fidélité au chef de la dynastie napoléonnienne; l'assemblée répète Nous le jurons: Napoléon jure aussi d'être fidèle à son ouvrage: on rend à Dieu de solennelles actions de graces, et ce serment ne tardera pas à se dissiper, comme tant d'autres serments; ce sera un parjure ajouté à tous les parjures. Mais celui qui affecte de reproduire ces assemblées du Champ-de-Mai si favorables à la dignité comme à la liberté de la nation, lorsqu'elles étaient tenues par le héros de la seconde dynastie,

voit s'accomplir ses desseins. La multitude séduite par le prestige de cette cérémonie, s'enflamme pour la cause de l'ambitieux travesti en libérateur, du tyran déguisé en citoyen. Des milliers de bras vont s'armer pour sa défense.

L'effectif de l'armée française qui, dans les six derniers mois de l'année précédente, a reçu d'importantes modifications, était, au 1er mars, de cent quarante mille hommes, dont vingt mille chevaux appartenant à la cavalerie ou à l'artillerie. — Au 1er juin, l'armée de ligne est, en hommes présents sous les armes et hors des dépôts, de deux cent mille, dont trente mille de cavalerie, et trente-six mille d'artillerie. L'armée extraordinaire employée à la garde des places fortes et des côtes, compose en gardes nationaux d'élite, en hommes de mer, canonniers de la marine, gardes - côtes, vétérans, militaires retirés et réformés, mis dans les places, une force de cent quatre-vingt mille hommes. Les dépôts renferment environ cent cinquante mille recrues.

2. Napoléon nomme cent dix-huit pairs. Ici reparaissent des hommes dont la conduite politique fut l'opprobre de la France, Carnot, Fouché dit de Nantes, Quinette, Roger-Ducos, Sieyes. Ici revient Roederer, ce procureur-syndic du département de Paris, qui livra Louis XVI comme un utile ôtage dans les mains des démagogues de 1792 (V. 10, 24 août 1792). Ici sont des courtisans auxquels l'air de toutes les cours est salutaire; quelques-uns de ces administrateurs disponibles pour tous les régimes; un assez grand nombre de militaires dont quelques uns possédés d'un fanatique enthousiasme pour la personne de leur général en chef, et tous les autres, animés d'un noble patriotisme, desirant avant tout préserver le territoire de l'invasion, et faisant de ce sentiment le premier mobile de leur détermination. C'est auprès de ceux-ci qu'il convient de placer Boissy-d'Anglas, à qui la France dut une fois son salut contre ses plus dangereux ennemis de l'intérieur. La victoire qu'il remporta le premier prairial (V. 20 mai 1795), reste un des plus beaux triomphes obtenus par le courage du citoyen. Le président de la convention défiant les poignards des plus vils jacobins, offrirait à la toile un sujet tout aussi digne d'un grand pinceau, que ce magistrat résistant au peuple ameuté par les frondeurs et dont le seul aspect calme la sédition.

7. Ouverture des chambres législatives, par Napoléon en personne. Il voudrait conserver la dictature, et remettre la convocation à l'époque de son retour de l'armée. Victorieux, il aurait dissous la

représentation, s'il n'avait pu la soumettre à ses volontés. Il cède néanmoins à l'empressement général, afin de ne pas augmenter les difficultés de sa position actuelle.

Les élections ont mis à découvert tous les partis. Les royalistes qui, toujours, firent bruit de leur dévouement à la cause de l'autel et du trône, n'y ont pas assisté. Se retirer au loin, voilà toute leur tactique dans les troubles civils et à l'heure du danger; et cela, depuis que les députés de la noblesse de Bretagne refusèrent de siéger aux états-généraux (V. 5 mai 1789), comme pour les rendre incomplets et les frapper de nullité. Une foule de citoyens timides, et tout disposés à se ranger du parti triomphant, s'absentent aussi des colléges électoraux. Quoique, par l'effet de ces défections si mal calculées, on ait procédé d'une manière irrégulière et incomplete dans plusieurs chefs-lieux; quoique vingt-neuf départements n'aient point fait de nominations, les choix ne laissent pas que de signaler l'opinion prédominante. Les électeurs présents, inquiets sur les promesses de Bonaparte, qui affecte de se proclamer le vengeur des droits et des intérêts de la révolution, vivement émus encore des tentatives faites sous le gouvernement royal, les électeurs ont principalement porté leurs votes sur ces hommes dont les idées populaires, ou plutôt décidément constitutionnelles, donnent les meilleures garanties contre l'invasion du despotisme : dans la banque et le commerce, messieurs Benjamin - Delessert, Hottinguer, Lafitte ; dans le barreau, messieurs Bérenger, Dupin, Roi; dans l'armée, les généraux Becker, Grenier, Sébastiani, Sorbier; dans les classes indéterminées, messieurs Bédoch, Dupont (de l'Eure), Flaugergues, Girod (de l'Ain), Lafayette, Lambrechts, Lanjuinais, Voyer-d'Argenson. Ces députés dont l'influence doit entraîner le sentiment de la grande majorité, se montrent prêts à rendre à la France tous les services qui, dans la ligne de la liberté, peuvent dépendre d'eux. Une section moins nombreuse de l'assemblée se compose de fonctionnaires de l'empire, de bonapartistes décidés, de fanatiques du systême napoléonien et de procureurs ou avocats-généraux, professant les doctrines du pouvoir absolu. L'assemblée présente des hommes très-instruits, de beaux talents; il n'est personne qui ne se prononce avec force pour l'indépendance nationale et la liberté du citoyen. Le président est Lanjuinais, célèbre, à toutes les époques, par sa résistance à l'injustice et son inébranlable adhésion aux principes d'une liberté positive. Il monte sur la brèche, au milieu de la confusion et des ténebres; il se dévoue, dans l'espoir d'être utile à la

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