fieurs appartemens on y met une fimple couche de vernis fort mince, en d'autres on le vernit, ou on le cizele: les bas-reliefs font des oifeaux, ou des branches, que l'on dore proprement. Le plancher eft couvert des plus belles nattes blanches, avec un bord, ou une frange d'or ce font là tous les ameublemens que l'on voit dans les Palais de l'Empereur, & des Princes de l'Empire. On me dit qu'il y avoit un appartement caché & fouterrain, qui au lieu de platfond a un grand refervoir d'eau; que c'est là que l'Empereur fe retire lorsqu'il tonne, parce qu'ils croyent que la force du tonnerre eft rompue par l'eau; mais je ne donne ceci que comme un ouï - dire. Il y a encore deux chambres fortes où l'on tient les threfors de l'Empereur: elles font affurées contre le feu & les voleurs avec de fortes portes de fer, & des toits de cuivre. C'eft dans ce Château que refidoient les fucceffeurs de l'Empereur ljejas, le premier de cette famille qui regna fur le Japon. Voici l'ordre de la Succeffion. Premierement Ijejas, qui après la mort fut appellé Gongin. 2. Teitokwin fon fils. 3, Daijojin fils de Teitokwin. 4. Genjojn fils de Daijojin; & en cinquieme lieu Tinajos l'Empereur d'aujourd'hui, fils du frere de Genjojn. C'est affez parlé du Château & de la refidence de l'Empereur feculier du Japon: je vais maintenant reprendre le fil de mon jour nal. Dès que nous fumes dans notre hôtellerie, nous Ce qui fe envoyames notre fecond Interprete, le premier é- paffa à notant indifpofé, pour faire favoir notre arrivée aux tre arrivée Commiffaires de l'Empereur nommez pour l'in- à Jedo, fpection & le reglement des affaires étrangeres; & à celui des Gouverneurs de Nagazaki qui étoit alors à Jedo. C'étoit Genfeimon, qui à caufe de fon attention à donner un bon ordre aux affaires du commerce étranger en l'année 1688, à l'avantage de fon pays, & à l'entiere fatisfaction de l'Empereur, en reçut le titre & le caractere honorable de Sino Cami. Il donna d'abord des ordres à notre Bugjo de nous tenir renfermez dans nos chambres, & de ne permettre à perfonne de nous approcher, excepté nos domeftiques. Ces ordres font toujours executez ponctuellement. Quoique d'ailleurs on eut dû croire nos appartemens affez éloignez de la rue, puifque c'étoit le plus haut étage du derriere de la maifon, où il n'y avoit d'entrée qu'un paffage étroit que l'on auroit pu fermer à clef fi on l'eût jugé neceffaire pour plus de fureté; il y avoit deux portes, l'une au bas & l'autre au haut de l'escalier, & les chambres étoient fermées de trois côtez; la mienne n'avoit qu'une feule fenêtre étroite, au travers de laquelle j'avois affez de peine à voir le foleil dans fon inidi. On nous dit, que quatre jours avant notre arrivée, quarante rues & plus de 4000. maifons avoient été entierement confumées par le feu: le foir même le feu éclata à deux lieues de notre hôtellerie au levant, mais il fut d'abord éteint & ne reduifit en cendres qu'un petit nombre de maisons Le 14 de Mars les Commiffaires Imperiaux, & Tfino Cami, nous envoyerent féliciter fur notre heureufe arrivée, & nous faire favoir en même temps qu'ils l'avoient notifiée aux Confeillers d'Etat.. Le même jour nous ouvrimes en prefence de notre Bugjo, & d'un autre Officier envoyé par le Sino Cami, les prefens que nous devions faire à l'Empe reur & aux autres Grands de la Cour, & nous commandames les boetes neceffaires pour y mettre le Calamback & le Gamphre de Borneo. Le 15 de Mars deux Tailleurs vinrent couper, pour l'Empereur, les étoffes d'Europe, comme c'eft la coutume. Le même jour nous arrêtames des bouteilles & d'autres vafes, pour les vins d'Efpagne blancs & couverts, & des tables de bois pour y étaler les prefens. Notre Bugjo fit une vifite au Sino Cami, qui lui défendit étroitement de per mettre à qui que ce fût de nous voir, jufqu'à ce que nous euffions été admis à l'audience de l'Empereur, à moins qu'il n'en eût des ordres exprès de lui Sino Cami. Ce foir même le feu éclata encore à deux lieues de notre hôtellerie; mais il cauLa peu de dommage.. Le Le 17 de Mars notre Bugjo nous donna des nou velles de Nagazaki: elles portoient, que quinze jours après notre depart vingt Jonques de la Chine é◄ toient arrivées heureufement au port. Il nous pria en même temps de ne point jetter de nos fenêtres dans la rue aucun papier fur lequel il y eûr des caracteres d'Europe. Le même matin nous apperçumes encore le feu à une petite distance de no tre demeure. Le 18 de Mars nous fumes occupez à tirer les vins d'Efpagne blancs & couverts, & à les mettre dans des bouteilles & des flacons; à mettre auffi le Calamback & le Camphre dans des boetes, enfin à mettre en ordre tous les prefens que nous devions porter à l'Empereur, à notre premiere audience. Le foir même un grand feu éclata à près d'une lieue & demi de notre hôtellerie du côté du cou- Incendie chant, il fouffloit alors un vent de nord qui étoit violent. affez fort: l'embrasement gagna avec tant de force, qu'il detruifit vingt-cinq rues, quoi qu'affez larges en cet endroit-là, & reduifit en cendres environ 600 maisons, en quatre heures de temps, avant qu'on pût l'éteindre: on dit que le feu y avoit é té mis par des incendiaires, & l'on en arrêta deux. Le 20 de Mars on nous apprit que Matzandairo Inaba Cami, qui devoit aller à Miaco en qualité de President du Tribunal de Juftice de cette ville, étoit parti de Jedo pour s'y rendre, accompagné par un autre Seigneur chargé de le prefenter au peuple, & en même temps de porter les prefens que l'Empereur envoyoit au Dairi. Sino Cami nous envoya le même jour un de fes Officiers, pour nous informer qu'il efperoit que nous aurions no tre audience de l'Empereur le 28 du mois couFant; i nous recommanda en même temps d'avoir foin de notre fanté, & de tenir tout prêt pour ce temps-là. Le 21 de Mars notre premier Interprete alla vifiter les Commiffaires de l'Empereur, pour les prier de de lui permettre de se faire porter à la Cour le jour de notre audience, dans un Cango, ce qui lui fut accordé, après qu'il eut premiérement certifié fous ferment figné de fon fang, qu'à caufe de fon indifpofition il n'étoit pas en état d'y aller d'une autre maniere. Goto Thiofimon, Echevin de Nagazaki, partit le même jour pour s'y rendre, après, avoir eu fon audience des Confeillers d'Etat le 15 du fecond mois des Japonnois, & fon audience de congé le 21 du même mois. Le 23 de Mars nous envoyames, par notre fecond Interprete Trojemon, un prefent d'une bou. teille d'eau de vie au jeune Seigneur de Firando, qui étoit alors à Jedo. C'étoit une legere marque de notre reconnoiffance, pour la protection pleine de bonté que fon pere nous avoit accordée, lorfque nous avions notre Comptoir dans l'lfle de Firando. Le même jour environ une heure après midi, le Tremble- tems étant calme, on fentit un tremblement de terment de re violent, qui fit trembler notre maison avec un grand bruit: il dura le temps que l'on mettroit à compter jufqu'à cinquante. Cet accident foudain me convainquit de la raifon & de la neceffité de la loi qui defend dans toute l'étendue de l'Empire de bâtir des maisons élévées; & qu'il n'eft pas moins neceffaire de les bâtir comme ils font dans tout le pays de materiaux legers & de bois, & de mettre une groffe poutre bien pefante fous le comble de la maison pour pefer fur les murs & les affurer en cas de fecouffe pareille. terre. Le 24 de Mars qui étoit un Samedi, le tems fut fort froid, il tomba de la neige mêlée de pluye, quoique la nuit précédente eût été extrèmement chaude. Le même jour Makino Bingo Confeiller d'Etat, & le premier favori de l'Empereur, envoya faire compliment à notre Directeur, & le pria de lui envoyer un peu de fromage, de Hollande: nous lui fimes prefent d'un fromage de saffran, que nous tirames de nos provifions. Le 25 de Mars fe paffa à mettre en ordre les prefens que nous devions faire à Sa Majesté Imperiale, la Cour de & à quelques Grands de la Cour, parce que nous ef perions d'être admis à l'audience le 28 du mois, qui étoit un jour de fête. Nous envoyames auffi prier le Tfino Cami, & les Commiffaires Imperiaux, de faire tout ce qui dépendroit d'eux pour en avancer le tems. Les Miniftres d'Etat, & autres Grands Princi de la Cour, auxquels nous devions rendre vifite, & paux Mifaire des prefens à quelques uns, étoient les cinq niftres de principaux Confeillers d'État de l'Empereur, appel- l'Empelez Goradzi, ou les cinq Vieillards, qui étoient 1. reur. Makino Bingono Cami. 2. Okubo Canga no Cami 3. Abi Bungono Cami. 4. Toda Jamajiro Cami. 5. Tfutfia Sagami Cami: quatre Confeillers d'Etat fubordonnez, ou fubdeleguez, appellez Waka Goridzi, qui étoient, 1. Akimotto Tadfijmo Kami. 2. Katta Saddono Cami. 3. Naito Tambano Cami, & 4. Inagi Sawa Dewano Cami. Les Dfisja, comme on les appelle, c'est à dire Seigneurs du temple, étoient au nombre de trois. 1. Toda no Tono Cami. 2. Fondakino Cami. 3. Ongafawara Saddono Cami. Matzaro Ikono Cami Seigneur de Firando, de la famille de Fifen. Les Commiffaires Imperiaux, comme nous les appellons ordinairement, qui font comme qui diroit les Procureurs generaux pour la ville de Jedo, Todo Ijono Cami, & Obutto Sabboro Saijemon Sama: les deux Gouverneurs de Jedo, Fodfo Awana Cami, & Nofij Ifmono Cami: le dernier de tous, celui des Gouverneurs de Nagazaki qui eft à Jedo; c'étoit alors Kawagatz Genfaiou conformément à fon nouveau titre, Kawagatz Tfino Cami: les deux autres, Jama Okkafiu bioje, & Mejaki Tono Mo, étoient au lieu de leur gouvernement. mon, Le 26 de Mars Tfino Cami nous envoya faire favoir que notre audience étoit differée d'un jour, & ainfi renvoyée au 29 de Mars, à caufe de la mort du frere de Makino Bingo, qui ne permettoit pas à ce favori de l'Empereur, & fon premier Confeiller d'Etat, de paroître en public avant ce jour-là. Le 27 de Mars après diner, Firanno Solats, un des Medecins de l'Empereur, vint me faire une vi |