Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

Gouverneurs en pareil cas demandoit que les Officiers de la ville, & de notre Ifle, l'accompagnaffent hors de Nagafaki. Deux Kuli eurent ordre. d'attendre fon arrivée pendant toute la nuit, près d'une riviere fur la route d'Ifafai: le froid étoit fi rigoureux, que l'un d'eux en mourut, & l'au tre fut dangereufement malade. Le 28 de Decembre vingt-huit criminels furent Execution executez pour avoir fraude la douane, treize fu- des fraurent attachez à la croix, les autres decapitez. Au nombre de ceux qui furent crucifiez étoient les corps morts de cinq, qui pour prevenir la honte d'un fupplice public s'étoient defaits eux-mêmes, en s'ouvrant le ventre. Il y en avoit beaucoup d'autres qui languiffoient en prifon, & qui devoient s'attendre à un pareil traitement..

Le 18 Janvier 1692, nous eumes avis d'Ofacca que des quatre fraudeurs de douane qui s'étoient evadez, il y en avoit trois de pris par les gens. que Tino Cami avoit envoyez à la decouverte: ils les trouverent buvant & fe rejouiffant enfemble. Il étoit à craindre qu'il n'y en eût beaucoup d'au tres de decouverts par la declaration de ces derniers.

Le 19 de Janvier dans la nuit, un forgeron qui venoit d'un Mariam ou maison de debauche, blefla trois perfonnés qu'il trouva dans la rue: heureufement les bleffures ne furent pas mortelles. On dit qu'il n'eft pas rare que les gens reçoivent de ces fortes d'eftafilades dans les rues de NagaTaki pendant la nuit..

Le 20 de Janvier nous apprimes que le Prince d'Imagada avoit été depouille par PEmpereur de cinq Mangokf de fon revenu. Quelques milliers de les fujets avoient été forcez de s'enfuir, ne pouvant fupporter la pefanteur des taxes & les rigoureufes exactions que fon Secretaire leur avoit impofées: celui-ci étoit un jeune homme qui avoit cet emploi depuis peu de temps; il lui fut ôté & donné à fon predeceffeur, en attendant que les cinq Mangokf fuffent affignez à quelque autre perfonne par l'Empereur.

G. 7

Le

deurs de

douane..

Le premier de Fevrier & les jours 'fuivans nous fumes occupez à faire les preparatifs necef faires pour un nouveau voyage à la Cour. On choifit les prefens pour l'Empereur: cela fut fait par les Gouverneurs de la ville: on chargea, & l'on envoya notre bateau à Simonofecki, nomma les Officiers deftinez pour aller avec nous à la Cour, & on leur donna les inftructions neceffaires.

on

Depart de Defima pour aller à Jedo.

No

CHAPITRE XIV.

Notre fecond Voyage à la Cour.

Ous partimes de Defima pour faire notre fecond voyage à la Cour, le 2 de Mars 1692 à huit heures du matin. Saffamorifanfao, qui étoit Joriki, fut avec nous en qualité de Commandant en chef, & le Dofen Simadaskeimon en qualité de fon Commis. Il étoient accompagnez par deux meffagers de la ville de Nagafaki. Sadaje étoit le premier Interprete, avec un Commis ou fous-Interprete. Nos Interpretes & nos amis de Nagasaki nous firent l'honneur de nous accompagner hors de la ville jufqu'au Temple nommé Tenfi, fitué au côté oriental de la ville de Sakarababa, & deffervi par des Jammabos. Ils nous y regalerent fort civilement. Il étoit déja dix heures du matin, lorfque nous quittames ce Temple pour continuer notre route. Nous fumes portez avec des Cangos jufqu'à Fooge fur le haut d'une montagne de ce nom, à caufe que les chemins étoient rudes & montagneux. De Fooge nous allames au village de Fimi près duquel eft Aba, grand village habité par des pêcheurs. Nous primes des chevaux à Fimi, & nous allames au village de Jagami où nous dinames. Nous fumes regalez de nouveau par quelques-uns de nos amis

qui voulurent nous faire compagnie jufqu'à cet endroit; ils nous donnerent du Soccana & du Sacki: après diner ils prirent congé de nous, fort furpris de: ce que contre notre coutume nous ne répondions pas à leurs civilitez; nous fimes peu de cas de leurs illades de travers, & nous continuames gayement notre voyage. Nous allames par le village de Koga à un autre nommé Ifafaja. Après avoir paffé fur trois ponts, affez près d'Ifafaja, nous regardames avec admiration le côté d'une montagne qui panche fi fort qu'on ne fauroit s'empêcher de craindre qu'il ne s'en detache à tout moment des roches fur les paffans. Nous arrivames à Ifafaja après fept heures du foir: nous nous Y arrêtames peu de temps, & après un leger fouper, fur les huit heures, nous. entrames dans deux barques qui appartenoient au Prince de Fifen: elles étoient là pour nous attendre, avec une autre pour tranfporter notre bagage, & un petit bateau pour aller d'une barque à une autre. Nous fimes la plus grande partie de notre traversée en ramant jufqu'à Takafakki où nous arrivames aPaffage de vant minuit, nous jettames l'ancre, & nous nous Simabara la baye de arrêtames pour voir fi le vent feroit favorable pour notre paffage, car s'il eût été contraire nous aurions été obligez d'y debarquer & de continuer notre voyage par terre. Cette baye eft appellée par les Hollandois Bogt van Arima, la même qui eft devenue fi fameufe dans l'Hiftoire du Japon par la revolte des Chretiens qui demeuroient en ces quartiers, & pour la guerre effroyable qu'on leur fit il y a près de cent ans. Elle a péu de profondeur près de Takasakki: Defcrig ainfi les navires & les bateaux qui y font à l'ancre tion de attendent la marée pour en fortir; c'eft ce que nous cette baye fimes, & nous mimes à la voile.

Le troifieme de Mars de bon matin nous arriva- Riviere de mes à l'embouchure de la riviere de Jangawa, elle Janagawa. fe decharge dans la baye d'Arima à trois quarts de lieue, en comptant fes tours & detours, du pont & de la porte du Château, dont la Tour fait un fort bel effet à un quart de lieue de diftance. Nous ne pumes venir à bout d'obliger les Meffieurs que l'on

avoit envoyez pour nous accompagner dans notre paffage de la baye, ni les bateliers non plus, de prendre quoi que ce foit de nous, par reconnoiffance pour la peine qu'ils s'étoient donnée, & pour leur honnêteté; quoi qu'outre cela ils nous euffent bien regalez le matin avec des mets à la maniere du pays, & du Sacki. Ils s'en excuferent fur. ce qu'ils avoient reçu des ordres exprès d'en user. ainfi, du Lieutenant du Prince de Filen qui pendant fon abfence a la conduite des affaires de cette Principauté; le Prince n'étant pas encore retourVille de né de Jedo. Nous trouvames à l'embouchure de Janagawa la riviere de Janagawa, un bateau de recreation tout prêt pour nous paffer à la ville du même nom: elle n'a rien de remarquable qu'un Château. & une Tour: la ville ne confifte qu'en quelquesrues irregulieres, habitées par des pêcheurs. Nous y dinames, & après diner nous fumes premierement à un petit village qui eft exactement fur les limites du territoire de Janagawa où il confine avec celui de Kuruma. De là nous paflames par divers petits hameaux difperfez çà & là, & nous entrames dans une plaine coupée par plufieurs canaux par où nous allames au village de Jokomifo; de là à celui de Tokoromatz que quelques-uns appellent Ofijmmatz, d'où nous fumes à Sijk-kambas: ce font deux villages affez confiderables. A Sijkkambas nous traverfames dans de petits bateaux une large riviere qui defcend du côté de Sanga. On pafla nos chevaux de même fans lesdecharger, ce qui nous mit en état de continuer notre chemin fans perdre de temps. Nous paffames dans differens villages qui font difperfez fur la route, & nous allames de cette maniere à Daifenfi grand bourg, d'où nous fumes au lieu de Kongo ou Kurmei Kongomatz, autre bourg con-fiderable: de là à la ville de Kurume, où nous arKurume. rivames à cinq heures du foir. Kurume a un fort beau Château avec des murs, des foffez, desportes magnifiques, & des ponts levis. Nous fumes accompagnez avec beaucoup d'honneur dans

notre

notre paffage par le territoire de Kurume, par fix deputez du Seigneur de cette petite Principauté, cinq defquels prirent congé de nous le lendemain matin, fe mettant à genoux d'une maniere fort foumife; mais le fixieme avoit ordre de demeurer, & de nous conduire tout à fait jufqu'aux confins des Etats du Prince. Dans la nuit la porte de la rue & celle de derriere de notre hôtellerie furent fermées & fortement verrouillées pour nous garantir, nous dit-on, des voleurs. Ce fut inutilement que je pris la liberté de reprefenter à nos conducteurs que c'étoit le plus grand af front que l'on pût nous faire, de nous garder & de nous veiller, en forte qu'ils feroient accroire au monde que nous étions des criminels, des Portugais, ou des Prêtes amenez prifonniers à la Cour, & non pas des perfonnes libres, amis de l'Empereur, qui allions de notre pure & franche volonté pour être admis à fa prefence. Nous ne pumes rien obtenir ni entreprendre qui fût contraire aux ordres rigoureux donnez par notre premier Interprete, qui dans toutes les occafions fo declaroit l'ennemi mortel de notre nation. Cette ville n'a qu'un petit nombre de rues, mais elles font longues & regulieres, coupées à angles droits. Le nombre des maifons peut aller à mille; plu fieurs font decouvertes & abandonnées, & reffemblent plutôt à des huttes qu'à des maisons. C'étoit une chofe digne de remarque, qu'en traver fant cette ville, nous ne trouvames perfonne dans la rue de notre paffage, tous les habitans étoient dans leurs maifons à genoux derriere des para vents, ou des jaloufies: mais les rues qui coupoient celle-ci étoient bordées d'une foule de fpectateurs à genoux des deux côtez, & gardant un profond filence. Dans toute notre route fur ce territoire tous ceux que nous rencontrions avoient ordre de nos conducteurs de fe tirer du chemin, de defcendre de leurs chevaux s'ils étoient à cheval, de fe mettre à genoux & tête nue, jufqu'à ce que tout notre train eût paffé..

Lo

« ZurückWeiter »