Tremble zerre. dans notre Ifle eurent ordre de fe rendre incef famment dans leurs maifons. Un des Ottona fut privé de fon emploi, & mis en arrêt dans fa maifon, à caufe que celui qui s'étoit evadé étoit fous fa garde, & habitant de fa rue. Plus de cent hommes de chacune des rues d'où perfonne ne s'étoit abfenté, furent commandez pour aller dans les montagnes à la recherche des fugitifs.. Le feptieme d'Octobre deux ou trois habitans de Nagafaki furent encore decouverts par les prisonniers, & mis en prifon. Cette affaire fi embarrassante, où près de cent perfonnes de Nagafaki fe trouvoient envelopées, fans compter leurs parens & les étrangers, donna. tant d'occupation au Gouverneur, que notre Camban ou vente de nos marchandifes, qui auroit dû fe faire dix jours plûtôt, fut renvoyée à l'onzieme d'Octobre. On n'avoit pu parler au Gouver neur pendant les quinze jours precedens, & fes. domeftiques même n'ofoient lui adreffer la paro le que pour des caufes très preffantes. Le 14 d'Octobre qui étoit un Samedi, de bon: ment de matin, nous fentimes deux chocs violens d'un tremblement de terre, qui durerent une demi minute chacun. Le choc fut fi fenfible, même dans le port, que le pilote de l'un de nos navires, qui étoit alors à bord, fut jetté hors de fon lit. Les chiens & les corbeaux firent un grand bruit fur le rivage, étant éveillez par la violence de ce tremblemeut. Le 21 d'Octobre un Kuli ou portefaix fut pris à la porte comme il s'en alloit de notre Ile, & l'on trouva du Camphre fur lui. Sur quoi Mr. Reinfs, de qui le prifonnier avoua qu'il l'avoit acheté, fut d'abord conduit devant le Maire de la ville. Le Kuli même, le marchand qui avoit vendu le camphre, & fon hôte, furent arrêtés par leur Ottona felon les ordres du Gouverneur, mis dans le fers. & Le 22 d'Octobre & quelques jours après, tous nos navires furent vifitez l'un après l'autre en. pre prefence des deux Interpretes; on y cherchoit di verfes chofes, entre autres, le Sal volatile oleofum du Profeffeur Sylvius, qui avoit été demandé par l'Empereur dans notre derniere audience, comme une panacée excellente ou remede univerfel pour conferver la fanté & prolonger la vie. : Le 24 d'Octobre trois fraudeurs de douane furent amenez prifonniers de Fifen à Nagafaki, ils avoient été pris fur le fait comme ils achetoient des marchandifes des Chinois; deux d'entre eux trouverent le moyen de s'échaper, fur quoi notre Kuli ou porteur, & quelques autres de nos domestiques eurent ordre d'abord de quitter leur ou-vrage, & de courir après les fugitifs, le troisieme s'ouvrit le ventre.. Le même jour 24 d'O&obre, le Gouverneur envoya fon Secretaire & un Benjos pour inftruire: notre Refident de la fentence qu'il avoit prononcée dans l'affaire du Camphre, qui étoit que l'hom -me qui l'avoit acheté & le marchand pour qui: il avoit été acheté, auroient la tête tranchée. Le Secretaire & le Benjos avoient ordre encore de prier notre Refident d'arrêter Mr. Reinfs, qui avoit vendu le Camphre, & de le mettre à borda d'un de nos vaiffeaux pour l'envoyer à Batavia pour le mettre entre les mains de la juftice. On donnoit à entendre en même tems, que puifque plufieurs de leurs gens avoient perdu la vie pour ce crime, ils feroient obligez enfin de prendre de -nouvelles mesures. Et en cas que Mr. Reinfs, ou quelque autre coupable du même crime, ne fût: pas puni exemplairement par la fupreme Cour de judicature de Batavia, ils fe feroient justice à l'a-venir eux-mêmes. Il ne fe fit rien le premier de Novembre:: c'étoit le dernier jour d'une fête appellée Kunitz, qui eft celebrée dans tout le Japon & qui com-mence le 27 d'Octobre. Le cinquieme de Novembre il vint des Meffieurs à Delima; il étoient envoyez par le Gouver neur: les deux Directeurs de notre commerce, les Capitaines des navires, & en general tous les Hollandois depuis le plus grand jufqu'au plus petit qui étoient alors à Defima, furent affignez pour comparoitre devant eux. Ils reprefenterent aux Directeurs de notre Comptoir dans un long & grave difcours, que fachant combien leurs loix étoient rigoureufes contre la contrebande, & combien de fois elle avoit été funefte à leurs gens, on s'attendoit que nous y ferions plus de confideration à l'avenir que nous n'en avions fait par le paffé: alors les deux Japonnois, qui avoient fraudé "deux Catti de Camphre, furent amenez devant eux & condamnés à avoir la tête tranchée: fur quoi les deux Directeurs de notre commerce furent requis dans les plus forts termes d'ufer à l'avenir de toute leur autorité & de toute leur attention, pour prevenir de femblables accidens; leur fignifiant avec cela, que fi nos Directeurs n'accordoient pas une demande fi raisonnable, ils feroient obligez de faire fubir à nos gens le même châtiment que plufieurs des leurs avoient déja fubi. Le fixieme de Novembre le Jacht Bosvinck leva l'ancre, & à l'aide de la marée il alla jufqu'à Papenberg. Le feptieme de Novembre il fut fuivi par le Jacht Wyk op Zée. Et le 8 après midi par le Floot Wallenbourg, ayant à fon bord le precedent Directeur Mr. Butenheim qui s'en retournoit à Batavia. Le dixieme de Novembre au matin nous reçumes avis, à l'ordinaire, des fentinelles qui font au haut des montagnes, qu'ils avoient perdu de vue tous nos navires. Le même jour les Japonnois vinrent vifiter nos chambres; parce, difoient-ils, qu'ils prenoient plaifir à les voir. Le même jour entre reuf & dix heures du foir, un nouveau tremblement de terre fe fit fentir tout d'un coup d'une maniere violente: il ne dura pas tant que celui du 14 d'Octobre, mais le choc fut plus grand, & rompit quelques vitres dans ma chambre; il fut fuivi après minuit d'un autre choc moins vio lent lent, le temps étant toujours ferein & calme: ce fecond choc fut fuivi par trois autres, & ceux-ci par deux de plus qui furent fi peu confiderables qu'on eut peine à les appercevoir. Le 23 de Novembre Mr. Dieck mourut, & fut enterré honorablement le 24 au côté occidental d'Inaffa, ou Inassa no Jamma: nous accompagnames le corps avec trois grands, & deux petits Prows ou bateaux. Le 30 de Novembre je profitai de l'occafion d'écrire à mon bon ami le favant Docteur Cleyer par une Jonque Chinoise qui étoit prête à mettre à la voile pour Batavia. Le premier de Decembre nous envoyames diver fes fortes d'étoffes à la maifon du Gouverneur, afir qu'il choifit lui-même celles qu'il croyoit qui fe roient plus du gout de l'Empereur. Le fecond de Decembre nous fumes occupez à faire l'inventaire des marchandifes, & autres effets du defunt Mr. Dieck. Le 7 de Decembre Tfino Cami, nommé aupara Arrivée vant Genfaimon, Gouverneur de Nagafaki, arriva de de Tino Jedo. Plufieurs Benjos lui vinrent au devant à Naga- Cami. faki: ils avoient été envoyez par les Princes de Firando, d'Omura, d'Amakufa, de Simabara, de Karatz, & d'autres Daimio voifins, pour attendre fon arrivée, & par refpect pour l'Empereur, lui faire compliment fur fon heureux retour. S'il arrive par hazard qu'un de ces Princes faffe fon compliment lui-même, il donne la preffeance au Gouverneur pendant quelque temps, quor que d'un rang inferieur; & cela feulement par refpect pour l'Empereur, de la fanté duquel il s'informe. D'abord que les complimens reciproques font finis, le Prin ce reprend fon rang. Ces derniers jours paffez les vingt Jongues Chinoifes qui avoient refté dans le port, en fortirent pour faire chacune fon vóyage. Le 9 de Decembre qui étoit un dimanche, les trois Gouverneurs de Nagafaki vinrent nous faire une vifite à Defima, comme c'eft la coutume une fois. Pan Severité d'un des Gouver neurs de l'an: ils en font une autre aux Chinois. Le 10 de Decembre Tino Cami, notre grand adverfaire, nous donna après fon retour les premieres marques de fa haine, & de fa mauvaise volonté; car il envoya de bon matin nous avertir de nous tenir prêts pour voir l'execution de deux hommes condamnés à la mort, à caufe de nous; à caufe, comme j'ai dit ci-deffus, qu'ils avoient acheté en fecret du Camphre d'un Hollandois. (On a donné ci-deffus une relation de cette execution.) Il m'avoit été dit par Jofeiman & Senbe, deux de nos Interpretes, que Sedaje un autre de nós. Interpretes étoit la feule caufe de l'execution de ces deux pauvres malheureux; à caufe que la fomme n'excedant pas dix Thails, ils n'auroit pas dû porter la caufe devant le Gouverneur, d'autant mieux que les autres Interpretes n'en avoient aucune connoiffance. Nous fimes outre cela une autre demarche, pour leur fauver la vie; nous donnames, le jour qui preceda celui de l'execution, un écrit au Gouverneur, ou nous lui reprefentions que le Camphre n'avoit pas été acheté, mais derobé dans notre Ifle. Ce Juge impitoyable ne voulut point prêter l'oreille à nos remontrances. Les Juges dans ce pays-là, generalement parlant, font peu portez à la compaf fion. Les criminels font jugez fans retardement, & le fait étant prouvé, ce qui eft la feule chofe à quoi ils s'attachent, les criminels font punis felon la loi avec la derniere serverité. A peu près dans le même temps Siubofama, un des Gouverneurs de la ville, fit couper la tête à un de fes propres domestiques qui étoit Benjos, feuleNaga laki. ment parce qu'il étoit ivre, & querelleux. Un autre Benjos, qui voulut interceder pour lui, & prier le Gouverneur de ne pas le punir avec tant de leverité, fut mis aux fers pour recompenfe de fa peine: on dit que de pareilles executions font fort fre quentes dans leur domestique. Son depart Le vingtieme de Decembre à dix heures du ma pour Jedo. tin Siubofama partit pour aller à Jedo, quoiqu'il plût bien fort; cependant la civilité qu'on rend aux Gou |