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mable, avant les lois et avant l'origine des sociétés, on ne peut trouver de titre, qu'en dépouillant pour ainsi dire, les archives de la nature; l'univers les compose, l'univers est le majestueux dépôt des pensées du créateur: nous ne voyons nullement l'exemple ni le type de cette égalité que l'on veut appliquer au nom des droits de l'homme à l'organisation sociale.

Toutes les fois que l'on dira aux hommes assem. blés, vous êtes égaux, libres et souverains, il faut s'attendre à voir les liens de la subordination se dissoudre, et les droits de la société s'anéantir. Quand on n'aura, pour ramener la multitude à ses devoirs, que des mots vides de sens, et une métaphysique obscure, on excitera ses passions, et elle se livrera à tous les excès de la licence et à toutes les fureurs de l'anarchie. Parlons quelquefois au peuple de ses droits, rappelons-lui sa dignité, son indépendance; mais parlons-lui aussi de ses devoirs, et ne cessons de l'exhorter à travailler, à obéir aux lois, à respecter ses magistrats, ses législateurs, et à pratiquer les vertus publiques: alors il sera libre et heureux.

Nos anciens législateurs, dans l'organisation et le mode des élections, avaient consacré des principes subversifs de tout ordre social; ils avaient eu des notions fausses et dangereuses sur les droits et

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la souveraineté des nations; ils avaient ignoré ou méconnu cette grande maxime de sagesse et de raison, qu'il faut faire tout pour le peuple, et rien par le peuple. Sans doute, les assemblées primaires étaient nécessaires dans les premiers jours de la révolution; mais les passions et les faux principes avaient dénaturé et corrompu cette institution salutaire tout était devenu tumulte, désordre, injustice; l'ambitieux, l'intrigant obtenait le suffrage d'une multitude ignorante ou séduite; l'homme sage vivait dans l'oubli et dans la retraite; on ne parlait que des droits des citoyens, et jamais de leurs devoirs; le peuple abandonnait ses travaux, l'artisan ses ateliers, le cultivateur ses domaines, le père de famille ses affaires domestiques, pour se livrer à l'examen de questions inutiles à leur bonheur et à leur liberté. Sans doute, la souveraineté appartient au peuple; il est l'origine, le créateur de tout pouvoir; mais il ne peut exercer sa souveraineté par lui-même; il la délégué à un ou à plusieurs citoyens qui représentent légalement la nation; ils agissent, ils parlent en son nom; mais le peuple ne peut pas fixer leur puissance: ainsi, quoiqu'il soit vrai, au fond, que tout vient de la terre, il ne faut pas moins qu'on la soumette par le travail et la culture, comme on soumet le peuple par l'autorité et par les lois. La souveraineté est, dans le peuple,

comme un fruit est dans nos champs, d'une manière abstraite; il faut que le fruit passe par l'arbre qui le produit, et que l'autorité publique passe par les mains qui l'exercent.

Il était temps de revenir à ces vrais principes qui doivent régir les sociétés politiques. Il ne faut point que, dans un vaste état, le peuple soit assemblé pour nommer ses législateurs. Qu'il désigne ceux qu'il croit propres à exercer ce grand ministère; mais c'est aux premières autorités à choisir les citoyens qui doivent coopérer au bonheur et à la prospérité de l'état. La présentation des candidats prouve la liberté du peuple; et le choix des élus dirige cette liberté vers le bonheur général.

Le mode de l'éligibilité prescrit par la constitution, et fixé par les lois qui ont été rendues, a évité sagement de réunir les citoyens en assemblées; il réserve au peuple l'action immédiate de la candidature; les citoyens élus dans chaque département ne sont que présentés aux fonctions publiques : ce sont des autorités communes à tous les départemens qui doivent les investir. Les listes graduelles ne sont que des listes de candidats; ce sont les autorités nationales qui doivent transformer la candidature en élections. Ces listes pré

sentent aux fonctions publiques des citoyens qui en sont dignes; le choix, la vérification des titres, la communication de la confiance publique aux élus, l'impression du sceau auquel la nation les reconnaîtra, sont des fonctions départies à des mandataires du peuple liés à l'intérêt de la constitution par les intérêts politiques les plus puissans, et par l'intérêt de tous les citoyens ; à ces avantages politiques, l'éligibilité promet d'ajouter des avantages moraux. En plaçant entre toutes les ambitions d'une part, et les emplois publics de l'autre, des barrières que les talens des affaires et l'expérience unis à la probité pourront seuls franchir, elle doit donner au talent de l'émulation pour le travail, de l'ardeur pour l'étude, de l'application pour les affaires, un profond respect pour les mœurs; tandis que, d'un autre côté, elle doit préserver la multitude ignorante de ces prétentions. désordonnées qui lui font abandonner les arts qu'elle peut honorer, pour briguer et disputer au mérite des fonctions qu'elle est incapable de remplir; elle doit la garantir de cette inquiétude envieuse et jalouse, qui est un sujet de trouble continuel pour les fonctionnaires qu'elle menace, et un véritable supplice pour les ambitieux même qu'elle agite.

Ce mode d'élection concilie à la fois la plénitude,

des droits et la liberté des suffrages. Quel plus noble usage peut faire de sa liberté un peuple couvert de gloire, que de distribuer, en quelque sorte, sa confiance et son estime, et de signaler aux dépositaires de son bonheur et de sa puissance des hommes qui, fiers de ces premiers choix, porteront avec orgueil, dans toutes les places qu'ils obtiendront un jour, le prix d'une responsabilité partant d'une source aussi pure! Le but de l'élection est de former une bonne représentation, dit un écrivain politique; la représentation s'établit sur la connaissance qu'a le représentant, non pas de la volonté, mais de l'intérêt des représentés ; car il est impossible d'accorder des millions de volontés dont la majeure partie n'est pas dirigée par des lumières; mais il est toujours possible d'accorder les intérêts des individus qui forment une association quelque nombreuse qu'elle soit.

L'élection immédiate a bien l'avantage, continue le même auteur, de donner à l'élu une connaissance plus exacte de la volonté de ses électeurs; mais, dans une nation très-nombreuse, cet avantage est peu de chose auprès de celui de connaître leurs intérêts; et, comme ces intérêts sont nécessaires aux intérêts généraux, l'objet de la représentation, dans une grande nation, ne peut être bien rempli, qu'autant qu'on peut assez perfec

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