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« Et la constitution de l'an trois ! s'écrie un

député, plus occupé de son ambition et de son «intérêt particulier, que de son amour pour les <«<lois. La constitution! reprit Bonaparte, vous << convient-il de l'invoquer ! qu'est-elle autre chose « à présent qu'une ruine? N'a-t-elle pas été succes<< sivement le jouet de tous les partis? Ne l'avez<< vous pas foulée aux pieds le 18 fructidor? au 22 << floréal ? au 28 prairial? La constitution! n'est-ce << pas en son nom qu'on a organisé toutes les ty<<< rannies depuis qu'elle existe? A qui désormais « peut-elle offrir une garantie réelle? Son insuffi«sance n'est-elle pas attestée par les nombreux << outrages que lui ont prodigués ceux-mêmes qui lui jurent en ce moment une fidélité dérisoire? << Tous les droits du peuple ont été indignement « violés; et c'est à les rétablir sur une base im<< mobile qu'il faut ensuite travailler pour conso« lider enfin dans la France la liberté et la ré<«< publique. Je vous déclare qu'aussitôt que les << dangers seront passés, j'abdiquerai le comman« dement qui m'est confié; je ne veux être, à l'égard de la magistrature nommée par vous, que << le bras qui la soutiendra. » Bonaparte fixant alors les yeux sur quelques militaires, plein de son amour ardent pour la patrie et pour la liberté, leur dit, dans cet enthousiasme qui attestait la

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pureté de son cœur, de tourner contre lui leurs baïonnettes, s'il abandonnait jamais la cause de la liberté.

Qu'importe à Bonaparte que la calomnie le compare à César et à Cromwel? Qu'y a-t-il de commun entre lui et l'oppresseur de Rome? Quelle ressemblance peut-il y avoir entre Bonaparte et le meurtrier de son roi, l'usurpateur du trône britannique? César détruisit la liberté publique, et donna des fers à sa patrie; il était l'esclave de la multitude, et le tyran du sénat ; il ; usurpa l'autorité suprême, et prépara ces guerres civiles qui firent verser des flots de sang; il s'empara du trésor public, et paya des deniers de l'état les destructeurs de la république. Cromwel ne médita que des crimes et des assassinats; il devint un usurpateur et un tyran, parce qu'il crut ou feignit de croire que le ciel le destinait à être le vengeur de la liberté, le fondateur d'un nouvel empire, le législateur d'un nouveau peuple, le prophète d'une nouvelle doctrine, et le pontife d'une nouvelle religion. Il ne pouvait remplir ces hautes destinées qu'en parcourant tous les degrés de l'hypocrisie la plus infâme, et du fanatisme le plus ardent. Cromwel usurpa un trône qu'il avait ensanglanté. Sa férocité, son despotisme, et le pouvoir militaire dont il était armé, répandirent l'effroi,

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et imprimèrent la terreur dans tous les esprits; il créa des tribunaux chargés de s'emparer des propriétés de la nation anglaise, écrasée sous le joug d'une tyrannie inconnue dans les contrées asiatiques. Il devint l'effroi de tous les hommes de bien, et des cris de malédiction s'élevaient de toutes les parties de l'empire pour dévouer son nom et son existence à l'opprobre et à l'infamie. Il mourut dans les tourmens et les remords.

Le peuple a revêtu Bonaparte de la suprême magistrature qui lui donne une grande autorité; il peut en étendre les droits : tout pouvoir donné par le peuple est sacré et légitime; tout doit plier devant la volonté nationale. Ah! si Bonaparte eût voulu usurper les droits de l'autorité suprême, il le pouvait lorsqu'il était à la tête d'une armée puissante et victorieuse, et dans un temps où les soldats, témoins de sa bravoure, célébraient ses triomphes, et juraient de combattre et de vaincre sous un chef aussi heureux qu'intrépide. Mais son ame grande et indépendante ne connaît point cette ambition qui conseille des crimes et des usurpations; il ne connaît la volonté nationale, et il sait que que peuple a le droit de transmettre ses droits de souveraineté, et de déléguer l'autorité suprême qu'il ne peut point exercer lui-même. Bonaparte terminera la révolution par ses travaux politiques : l'amour,

le

la reconnaissance et les bénédictions du peuple français; voilà sa récompense!

S'il était permis de chercher une analogie de caractère, de génie, et des talens, nous pourrions comparer Bonaparte à Gustave Wasa. Le héros suédois délivra la Suède du tyran furieux qui l'opprimait. Issu d'une famille noble, il s'appliqua dans sa jeunesse à l'étude des sciences, et se distingua par la pureté de ses mœurs. Témoin des malheurs de sa patrie, il s'arma pour punir le despote usurpateur qui l'asservissait. Après avoir erré quelque temps dans les déserts de la Dalécarlie; il se montre devant un peuple abattu, relève son courage, excite son énergie, forme deş guerriers et des soldats: sa vie ne fut plus qu'un enchaînement continuel de victoires et de triomphes. Le peuple suédois n'est plus gouverné par un tyran; il reprend ses droits et sa liberté: Gustave Wasa, monté sur le trône de Suède par l'amour et la reconnaissance de la nation, illustra son règne par sa justice, et honora l'humanité par

ses vertus.

On établit un gouvernement provisoire, et bientôt une nouvelle constitution, plus régulière, conforme aux véritables principes du contrat social, à l'étendue de la population de la France, au génie, aux mœurs de ses habitans, s'élève sur

les débris de l'ancienne. Bonaparte est nommé premier consul de la République. La nation, au milieu de mille cris d'alégresse et de bénédiction, sanctionne cet acte de la justice et de la reconnaissance, et le proclame le libérateur de la patrie. Qu'il nous soit permis ici d'examiner et de juger le nouveau pacte social qui nous régit. Nous voulons instruire les nations en leur exposant ces principes fondamentaux sur lesquels doivent reposer les constitutions des empires, et les gouvernemens des peuples.

Les nouveaux législateurs de la France n'ont point eu recours à une impuissante et vaine déclaration des droits de l'homme, à des dissertations métaphysiques, à de fragiles moralités, plus propres à exciter les insurrections populaires, qu'à éclairer les esprits, et à perfectionner la morale publique: on n'a pas parlé des droits de l'homme dont on a fait si souvent usage pour établir et propager ce systême nouveau de l'égalité, inventé jongleurs politiques, qui veulent aller à la célébrité par des folies ou par des crimes, et qui aiment à promener leurs regards sombres sur des ruines, sur des monumens épars et mutilés. Dès que, par la pensée, on place ce droit, dit un auteur esti

par ces

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