Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

d'un peuple, et à détruire des vices qui tiennent plus à la forme du gouvernement qu'à son génie particulier. Malheur aux nations qui ont de mauvaises lois les erreurs en législation leur sont toujours funestes; les maux qu'elles produisent sont terribles. La perte d'une province, la famine, les malheurs de la guerre, ont un terme, et régénèrent quelquefois les mœurs publiques; un seul instant de prospérité, une victoire d'un jour, les avantages du commerce, réparent les pertes de plusieurs années; mais une mauvaise législation est la source inépuisable d'un siècle de maux, et son influence destructive s'étend sur les générations futures. Alors, les peuples, après avoir troublé l'état par leurs fureurs anarchiques, reçoivent le joug de l'esclavage.

Tout était désordre et scandale dans l'administration judiciaire: nos anciens législateurs, au milieu des passions qui les agitaient, et dans un temps où les liens politiques et sociaux étaient rompus, où l'on avait organisé l'insurrection populaire et détruit tous les principes de l'ordre public, avaient créé un code de législation qui renfermait un double principe d'anarchie et de corruption, produit monstrueux des passions des partis, du délire, et de la perversité; comment pouvaient-ils nous donner de bonnes lois? comment pouvaient-ils

méditer sur un objet aussi important, qui exigeait des talens et des vertus? comment pouvaient-ils recueillir en paix ces lumières et ces observations dont ils avaient besoin pour étendre et pour fortifier leurs propres idées, pour préparer un résultat heureux de leurs travaux, et pour donner cette maturité, cet ensemble, cette sagesse qu'exige le caractère auguste de la loi? Un terrain inculte et sauvage ne produit que des ronces et des poisons; c'est à l'intelligence du cultivateur que la terre lui doit cette fertilité qui procure d'abondantes moissons.

Les bonnes lois ne peuvent être que l'ouvrage de la méditation, des talens, de la raison, développées par l'expérience, et perfectionnées par les mœurs. Ce n'est point dans un temps d'anarchie, et dans des jours fertiles en crimes, qu'on peut créer une sage et heureuse législation; il faut que le règne de la justice et de la sagesse s'élève sur les débris des erreurs et des passions. Les régénérations des empires doivent s'opérer dans un temps de paix et de vertus; le génie aime à méditer ses projets au milieu du silence, et les belles conceptions de l'esprit humain se montrent et se développent lorsque la nature est calme, et qu'elle présente le spectacle paisible de ses grandeurs. Alors le législateur s'élève à une hauteur surnaturelle; ce

n'est pas seulement pour ses contemporains qu'il travaille, c'est pour les siècles: ce n'est pas une seule nation qu'il organise, c'est la terre entière; son influence s'étend sur la postérité; ses bienfaits appartiennent à l'univers, dont il prépare l'affran chissement et le bonheur; il donne aux lois ce caractère de grandeur et de puissance qui leur assure l'obéissance des peuples, les hommages des générations, et l'immortalité des siècles. C'est alors qu'il a véritablement dérobé, comme Prométhée, le feu sacré de la divinité, et qu'il va, comme elle, régénérer et embellir la nature.

Le premier consul s'est occupé de l'objet important de la législation civile et criminelle; une réforme dans les tribunaux de conciliation et des juges de paix a rendu cette belle institution plus salutaire et plus utile. En réduisant le nombre des juges de paix, en les débarrassant d'une partie de leurs attributions, en adoptant pour leur nomination des formes simples, en remplaçant les assesseurs par des suppléans, on est assuré que cette magistrature sera constamment exercée d'une manière paternelle par des citoyens éclairés et probes. On avait fait un grand pas vers la per

fection de la justice criminelle, en confiant en différentes mains l'accusation, le jugement, l'application de la peine; on a perfectionné cette œuvre en créant une magistrature uniquement chargée de la recherche et de la poursuite des crimes. Les fonctions des jurés, trop souvent dénaturées par des préjugés, ou par esprit de faction, ont repris leur indépendance, leur dignité, et leur force morale. Ces hommes, chargés de défendre les intérêts et les droits des citoyens, ont reçu un caractère légal, et exercent leur ministère, sous la surveillance des magistrats.

Bonaparte a nommé des jurisconsultes éclairés pour préparer un code civil, qui doit enfin rétablir l'ordre public, fixer les droits incertains des citoyens, affermir la jurisprudence sur des bases immortelles, et fermer ces sources fécondes de divisions et de chicanes qui suspendaient les jugemens des magistrats, propageaient la mauvaise foi des plaideurs, changeaient en brigandage l'art de vendre la justice, et consommaient la ruine de ceux qui venaient implorer l'appui et la protection des lois contre l'oppression, la violence et l'usurpation.

Le gouvernement, jaloux de s'entourer et de profiter des lumières de tous les citoyens, a envoyé le projet du code civil aux magistrats de différens tribunaux, pour l'examiner, le corriger et le perfectionner; c'est ainsi que les premiers législateurs déposaient leurs lois sur des tables, et les plaçaient ensuite sur un monument public, afin que ceux qui devaient être gouvernés et jugés par elles pussent les connaître. A Athènes, on ne pouvait proposer une loi nouvelle, si le sénat ne l'avait approuvée. Cette formalité remplie, la lecture en était faite à l'assemblée du peuple; on en plaçait une copie aux pieds de la statue de dix héros, afin qu'elle pût être de nouveau lue et examinée : chaque citoyen avait le droit d'exposer ses réflexions

au sénat.

Ce code civil, qui sera examiné et discuté par le conseil d'état et par le corps législatif, sera un bienfait précieux, et deviendra un monument qui attestera que le premier consul s'occupe du bonheur du peuple. Alors on verra un nouvel ordre de choses plus heureux et plus consolant; les droits des citoyens seront rétablis dans toute leur intégrité; la propriété sera respectée; l'ordre dans les successions sera fondé sur les principes naturels, et sur les maximes du contrat social; la

« ZurückWeiter »