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serait vrai, mais pour donner l'apparence du vrai à ses mensonges? Ces Mémoires dont vous avez la folle vanité de vous targuer comme d'un chef-d'œuvre d'éloquence, et qui n'exciteraient que la pitié de l'homme de lettres, s'ils n'excitaient l'indignation du moraliste, ces Mémoires, que sont-ils, si ce n'est la révélation d'actes intérieurs et de famille, dont vous n'avez eu connaisssance que par vos fonctions et dans vos fonctions? Celui qui, pendant vingt années, vous a employé dans sa maison, et vous a donné une partie de sa confiance; celui qui, lorsque vous l'avez quitté, vous a protégé dans votre nouvelle carrière de ses recommandations et de ses capitaux; celui qui, à l'instant de votre détresse, vous a ouvert sa caisse et a versé près de 600,000 fr. dans la vôtre; celui qui, pour se venger de vos offenses, a empêché qu'on ne vous mit en faillite, et a payé vos créanciers; celuí qui, même actuellement vous ménage encore, en n'exerçant contre vous qu'une action civile, quand l'action correctionnelle lui était donnée ; c'est celui-là que vous poursuivez de votre acharnement et de vos mensonges! Vous avez voulu soulever contre lui, et ses commis, qui ne vous ont répondu que par leur indignation, et les neveux de M. Pérégaux, qui ne lui ont jamais parlé que le langage de l'attachement, et les passions politiques qui vous ont délaissé, parce que l'ingratitude et la calomnie sont en haine à tous les partis. Qu'il est heureux cependant, M. Laffitte, de n'avoir rien eu à se reprocher dans le cours de sa longue et laborieuse carrière! S'il eût failli dans un seul cas, quel n'eût pas été votre triomphe! Voilà un homme dont vous avez fouillé la vie; et il sort de

l'épreuve avec un nouveau lustre : vous lui prépariez du scandale et de la honte; et en le forçant de parler de sa conduite privée, vous lui avez préparé des applaudissements et de la louange! Malheureux! que deviendrez-vous désormais? vous vous êtes perdu vousmême, et chaque mot que je dis vous perd davantage. J'en gémis, l'âme généreuse de celui que vous avez si indignement outragé en sera déchirée ; mais si j'omets de répondre sur un fait, vous triomphez: et si je réponds, la vérité est si évidente, qu'elle vous accable : encore si votre égarement n'eût été que de quelques jours; mais il a duré des mois: que dis-je ? il a duré presqu'une année. Tout nouvellement encore, depuis que la suppression de vos Mémoires vous a paru imminente, vous les avez fait afficher de toutes parts; vos placards et leurs épigraphes injurieuses ont couvert tous les coins de rue de la capitale. Eh bien donc! vous l'avez voulu que la honte coule à flots sur votre tête; qu'il soit rendu ce jugement qui doit imprimer sur votre front les noms trop mérités de colomniateur et d'ingrat!

Oui, Messieurs, c'est un de vos pairs qui vous demande justice. C'est votre cause à tous qui s'agite devant vous. Tous, n'avez-vous pas des employés ? n'avez-vous pas à craindre qu'après vingt années, ils ne viennent divulguer le secret de vos affaires? Sans doute, comme M. Laffitte, vous seriez promptement justifiés; mais ne faudrait-il pas vous défendre? et que feriez-vous, si le temps avait détruit quelque pièce importante? Sévissez donc, nous ne vous le demandons qu'avec peine, sévissez contre celui qui, le premier peut-être, donne un si funeste exemple. Nous

ne réclamons de votre justice que la suppression des Mémoires; mais la peine sera suffisante, puisque, si sa raison n'est pas égarée, le sieur Pincepré reste abandonné à sa conscience.

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Jugement du tribunal de commerce du 30 mai 1823, qui déboute le sieur Pincepré de sa demande, ordonne la suppression des Mémoires par lui publiés, etc., etc. Le sieur Pincepré ayant appelé de ce jugement:- arrêt de la Cour royale qui infirme et renvoie les parties devant le tribunal civil; jugement rendu le 4 janvier 1825, qui déboute derechef le sieur Pincepré, ordonne la suppression des Mémoires, etc., comme contenant des faits faux et calomnieux, et que le jugement sera imprimé et affiché à ses frais, etc., etc.

MÉMOIRE

De C.-J. OUVRARD

Sur les Marchés de Bayonne et le rapport de la commission d'enquête (1).

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Depuis plus de deux années, je suis l'objet d'inculpations graves. Attaqué de toutes parts, dans les pamphlets, dans les journaux, devant les Chambres; livré à l'opinion et aux tribunaux, je suis regardé comme le

(1) En 1823, la guerre d'Espagne ayant été résolue, le discours de la couronne annonça que 100,000 Français, sous les ordres du duc d'Angoulême, devaient franchir les Pyrénées. La loi du 10 mars ouvrit au Gouvernement un crédit éventuel et extraordinaire de 100,000,000 fr. pour subvenir aux frais de la campagne. Ce crédit fut si promptement épuisé, que durant la session de 1824, un nouveau crédit supplémentaire de 107,768,077 fr. fut demandé comme complément des dépenses extraordinaires et urgentes autorisées par des ordonnances royales. A cette demande, au sein des Chambres et au-dehors, on cria à la dilapidation; les marchés passés à M. Ouvrard par l'intendant en chef, la veille de l'entrée en campagne, furent l'objet des plus vives et des plus sérieuses attaques. Par une ordonnance du 30 juin 1824, il fut créé une commission chargée de recueillir tous les faits et documens propres à donner les moyens d'apprécier les causes et l'urgence du crédit supplémentaire accordé; d'où il résulta de son rapport « que « lors des traités passés à Bayonne, la subsistance de l'armée

seul auteur des dépenses extraordinaires de la guerre d'Espagne, quoique ce ne soit point moi qui les aie faites.

Au milieu de ce cri général, le public ne s'est pas même informé si j'avais été appelé à me défendre; il a pris l'accusation à la lettre, sans examen, sans critique, comme si toute accusation devait être fondée parce qu'elle vient du pouvoir. Quelques esprits plus réfléchis ont cependant remarqué que je n'avais pas été entendu, et ils se sont demandé pourquoi, du moins, je ne me faisais pas entendre. Ceux-là méritent que je leur donne satisfaction.

• n'était pas compromise, que rien ne forçait l'administration « de se jeter dans les bras d'un spéculateur..... que les mar«< chés faits avec le munitionnaire, au lieu de sauver l'arinée, ont compromis la fortune publique.... » Le 9 février, le ministre de la guerre fit un rapport au roi qui portait : « que « des faits graves, développés dans le travail de la commis«sion d'enquête, tombaient à la charge des premiers fonc<tionnaires de l'administration militaire, et semblaient au« toriser des soupçons de corruption de la part d'individus de a l'ordre civil..... » — Ces rapports furent transmis le jour même à M. le procureur-général....- Des poursuites furent commencées, mais attendu que des faits s'appliquaient à des pairs de France, la Cour royale se déclara incompétente.Par une ordonnance du roi du 25 décembre 1825, la Cour des pairs fut saisie de l'affaire; sur un nouveau rapport de M. Portalis, elle déclara qu'il n'y avait lieu à suivre contre les généraux Bordesoulle et Guilleminot, et se déclara incompétente à l'égard des autres inculpés. Au milieu de ce débat si vif et prolongé, M. Ouvrard avait gardé le silence. Il n'y était cependant pas étranger. C'est alors qu'il publia ce Mémoire rédigé par M. Mauguin d'après les documens officiels imprimés dans cette affaire célèbre.

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